Un Centre Referent Maladies Rares à Expressions Psychiatriques

Article « La Lettre de la Psychiatrie Française », 2008.
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Un Centre Référent Maladies Rares à Expressions Psychiatriques
pour quoi faire ?
Dr Olivier Bonnot, Raffaella Lucanto & Pr David Cohen
Centre Référent Maladie Rare à Expression Psychiatrique
Service de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent Groupe Hospitalier Pitié Salpetrière /
APHP
47 boulevard de l’hôpital, 75013 Paris
Représentant prêt de 2% de la population dans leur ensemble (source www.orphanet.org),
chacune des maladies orphelines, ou rares, ne touche pourtant qu’un petit nombre de patient
(moins de 1 personne sur 2000 par définition mais souvent quelques centaines voire quelques
dizaines de sujets en France). Ces maladies laissent les patients, et les professionnels de santé
souvent démunis. Les patients, d'abord, sont confrontés à une nécessaire errance médicale
allant du généticien, au pédiatre, en passant par les médecins rééducateurs et les psychiatres.
En effet, l’aspect polysymptomatique étant la règle, ces troubles nécessitent l’intervention de
plusieurs spécialistes. Ensuite, si chaque professionnel est compétents par nature dans son
domaine, il est le plus souvent peu informé et mal préparé a prendre en charge les autres
registres de la symptomatologie. Pour répondre a ces difficultés, le Ministère de la Santé à
mis en place en 2004 un Plan National Maladie Rare qui avait pour objectif de créer par
labellisation des Centres Référent. La compétence de ces centres est large puisqu’ils doivent
permettre de proposer aux patients et à leur famille des prises en charge et des évaluations
pluridisciplinaires qui prennent en compte les différents aspects de la maladie mais il doivent
aussi être des pôles de formations et d’information, de veille épidémiologie, et de recherche
dans leur domaine.
Un nombre important de ces maladies, souvent d’origine génétique, est associé directement,
ou indirectement, à une symptomatologie psychiatrique. Nous n’évoquerons pas ici la
question de la réaction psychologique à la maladie qui touche le patient et sa famille mais
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uniquement la dimension de symptomatologie psychiatrique associée, ou directement induite
par la maladie rare.
Il existe plusieurs cas de figure qui sont intéressant pour les psychiatres à des niveaux
différents.
1- Une association avec un trouble psychiatrique.
Il s’agit de l’existence d’un trouble psychiatrique lié à une pathologie organique rare pour
lequel la nature du lien n’est pas nécessairement directe. On retrouve dans ce cas les
pathologies schizophréniques associées à un syndrome polymalformatif. Le meilleur exemple
est celui de la microdélétion 22q11 ou la prévalence des schizophrénies selon les critères du
DSM IV est de 20 à 35 % (1)et ou cette anomalie génétique est retrouvée chez 2 à 5% des
patients schizophrènes (2). C’est aussi le cas des catatonies de l’enfant et de l’adolescent pour
lesquels les causes organiques peuvent représenter de 15 à 20% des cas colligés (3). On peut
citer aussi la Myotonie de Steinert, l’anomalie du bras long du chromosome 15, les maladies
métaboliques à expression tardive, Neurofibromatoses, Scléroses Tubéreuses ou le syndrome
de Prader Willi… L'autisme présente également un nombre important d'association avec des
pathologies organiques mais rentre dans le cadre des centres diagnostique autisme.
La forme clinique de la symptomatologie psychiatrique liée à une pathologie organique peut
être différente, atypique (par exemple des hallucinations visuelles ou une fluctuation des
troubles), mais il existe souvent des signes d’appels somatique. Par exemple l'existence d'une
diarrhée chronique, d'une réaction inhabituelle aux antipsychotiques (inefficacité, importance
des effets indésirables), d'ictère, d'angiomes ou de xanthokératomes peut orienter vers
l’association troubles psychiatriques maladies neurométaboliques (4). L’enjeu est de taille,
en effet il s’agit de connaître les signes d’appels afin de pouvoir proposer des explorations
complémentaires. Bien que l’ensemble de ces associations reste rare et qu’il ne soit pas
question de faire un bilan extensif à tous nos patients, dans un certains nombre de cas, un
traitement curatif peut être possible (4, 5).
2- La question d'un vrai diagnostic fonctionnel
L’histoire de la pédopsychiatrie est fortement marquée par la question du retard mental. Le
travail éducatif avec les patients débiles ou idiots d’un Itard ou d’un Bourneville a amené à
distinguer chez ses patients des troubles psychiatriques et à développer une nosographie
complète des troubles du développement. Trop souvent aujourd’hui les patients présentant des
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maladies rares qui sont associée à une déficience intellectuelle ne bénéficient, au mieux que
d’une évaluation du QI. Il nous apparaît essentiel de pouvoir, le diagnostic étiologique étant
déjà fait, proposer les moyens d’un diagnostic fonctionnel qui est souvent l'un des enjeux
majeurs du pronostic sur le plan de la vie quotidienne et de l'insertion sociale du sujet. Il
s’agit aussi de distinguer, autant que faire ce peut, ce qui relève de l’anomalie génétique elle-
même, de ce qui relève des conséquences psychopathologiques pour un sujet d’être atteint
d’une maladie chronique, le phénotype psychiatrique étant souvent de spécificité partielle. Ce
diagnostic fonctionnel peut comprendre : une évaluation psychomotrice, orthophonique,
cognitive (processus attentionnels et mnésiques, fonctions exécutives et efficience
intellectuelle), une évaluation scolaire et du fonctionnement social. Un de nos objectifs est de
pouvoir proposer des référentiels présentant un bilan minimum par pathologie pouvant
diffuser sur le territoire de façon simple et pratique. Ces bilans sont d'une grande utilité pour
élaborer avec les enseignants et les éducateurs un projet d'enseignement adapté pour les
patients. Nous avons aussi, dans le même ordre d'idée, un projet avec l’Education Nationale
visant à la transformation du groupe scolaire rattaché au service en une unité de pédagogie
expérimentale qui devrait permettre de mieux répondre aux problèmes d’apprentissages
académiques de ces patients.
3- Les schizophrénies à début précoce
Le troisième axe de travail important pour notre centre concerne essentiellement les patients
présentant des Schizophrénies à Début Précoce, forme rare de schizophrénie qui se manifeste
durant l'enfance ou l'adolescence et dont prévalence est estimée à 0.03%, soit 5% des
schizophrénies. D’un point de vue clinique on peut identifier deux principaux tableaux de
schizophrénie infantile : 1) le premier se caractérise par une symptomatologie similaire aux
schizophrénies de l’adulte. Il apparaît souvent brutalement durant la pré-adolescence ou en
début d’adolescence, sans antécédents prémorbides particuliers durant le développement ; 2)
le deuxième tableau, beaucoup plus grave et précoce, débute insidieusement vers 6-8 ans et
s’accompagne d’anomalies du développement sur différents plans : psychomoteur (retards
d’acquisition des compétences motrices, de coordination, de langage), cognitif (QI faible,
déficits attentionnels, troubles des apprentissages) et relationnel (retrait, isolement, méfiance,
voire des symptômes du spectre de l’autisme comme les stéréotypies ou les troubles de la
communication). Ce tableau est souvent stable et présente une évolution déficitaire. De
manière plus générale, la symptomatologie clinique de la schizophrénie infantile est
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étroitement liée à la précocité d’apparition des troubles. Notre centre s’intéresse
particulièrement à ce deuxième tableau qui, de plus présente une fréquence des pathologies
organiques associées chez le sujet jeune (maladies métaboliques, 22q11, Lupus, Epilépsies,
Huntington…). Nous travaillons à la mise en place d’un réseau national autour de deux
priorités (i) le dépistage précoce et l’épidémiologie et (ii) l’évaluation des traitements
médicamenteux ainsi que leurs effets indésirables. Le dépistage précoce implique la mise en
place et l’évaluation d’un bilan de vulnérabilité qui doit répondre à deux critères principaux,
simplicité et sensibilité. L’évaluation des traitements est une priorité car les psychotropes ne
font l’objet que d’une littérature scientifique réduite à cet âge de la vie.
Notre centre, labellisée en 2007, se situe dans le service de Psychiatrie de l’Enfant et de
l’Adolescent du Groupe Hospitalier Pit-Salpêtrière. Seul centre centré sur les manifestations
psychiatriques (sur plus de 200 centres labellisés en France !), il dispose de peu de moyen et
doit donc se concentrer sur l’information et la sensibilisation de nos collègues ainsi que
promouvoir des recherches dans ce domaine. Nous proposons aussi une consultation
spécialisée d’une part pour les patients présentant des maladies rares associées à des
manifestations psychiatriques (y compris des troubles des apprentissages) et d’autre part pour
les patients présentant des schizophrénies à début précoce.
Information : http://crepsymar.aphp.fr
Annonce de la journée Maladie Rare sous l’égide de la SFPEADA du 9 décembre à la
Salpetrière (pdf sur le site Internet)
Références
1. Gothelf D, Feinstein C, Thompson T, Gu E, Penniman L, Van Stone E, et al. Risk
factors for the emergence of psychotic disorders in adolescents with 22q11.2 deletion
syndrome. Am J Psychiatry 2007;164(4):663-9.
2. Sporn A, Addington A, Reiss AL, Dean M, Gogtay N, Potocnik U, et al. 22q11
deletion syndrome in childhood onset schizophrenia: an update. Mol Psychiatry
2004;9(3):225-6.
3. Lahutte B, Cornic F, Bonnot O, Consoli A, An-Gourfinkel I, Amoura Z, et al.
Multidisciplinary approach of organic catatonia in children and adolescents may improve
treatment decision making. Prog Neuropsychopharmacol Biol Psychiatry 2008;32(6):1393-8.
4. Sedel F, Baumann N, Turpin JC, Lyon-Caen O, Saudubray JM, Cohen D. Psychiatric
manifestations revealing inborn errors of metabolism in adolescents and adults. J Inherit
Metab Dis 2007;30(5):631-41.
Article « La Lettre de la Psychiatrie Française », 2008.
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5. Marra D, Amoura Z, Soussan N, Haroche J, Consoli A, Ghillami-Dalbin P, et al.
Plasma exchange in patients with stuporous catatonia and systemic lupus erythematosus.
Psychother Psychosom 2008;77(3):195-6.
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