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Chapitre 2. Fondements de la rigidité des prix
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Pourquoi obtient-on à LT une corrélation entre la monnaie et les prix proche de 1, et non à
CT ? => pourquoi la politique monétaire peut avoir des effets réels à CT ?
Si on était dans un monde économique parfait, on pourrait penser que si les prix et
salaires étaient parfaitement flexible, ils s’adapteraient immédiatement. Or ça ne se
passe pas comme cela dans la réalité.
En réalité:
Δ+ M => Δ+ P < Δ+ M => Δ+ (M/P) => Δ+Y
=> en réalité, les prix augmentent moins vite que l’offre de monnaie
La question est donc de savoir pourquoi les prix ne s’ajustent pas directement et
systématiquement. Et, pour comprendre cela, il faut passer au niveau
microéconomique. En fait, les choses sont un peu paradoxales. Lucas dirait de cela
qu’on « laisse des billets de 100 sur le trottoir ». En effet, ceux qui ne monteraient
pas leurs prix aussi vite que les autres y perdraient => en ne montant pas leurs prix
aussi vite que les autres, ils auraient un comportement non rationnel. Il y a 2 types
d’analyse microéconomiques que nous allons maintenant étudier.
Les 2 types d’analyses micro:
1) Imperfection de l’information
2) Prix et salaires visqueux (en anglais: ‘Sticky’)
Ce sont donc 2 théories concurrentes. Lucas, qui fut pourtant un des fondateurs de
la théorie de l’imperfection de l’information, dira lors de sa conférence Nobel sur la
neutralité de la monnaie (càd lors de la conférence qui suit la remise d’un prix Nobel)
qu’il faut en réalité tenir compte de ces 2 théories pour bien tout comprendre. Voyons
donc maintenant ces analyses en détail.
1) Imperfection de l’information (par Robert Lucas)
La question est ici de savoir pourquoi des firmes pourtant parfaitement rationnelles au
niveau microéconomique (càd qui maximise leur profit) vont générer cette rigidité des
prix au niveau macroéconomique, et par là-même une certaine ‘inefficacité’.
Pour répondre à cette question, on va considérer des firmes parfaitement rationnelles
(qui optimisent leur profit) mais qui n’ont pas nécessairement une information parfaite
et complète: il y a un problème d’accès à l’information et elles ne vont donc pas
directement ajuster leur offre: il y a un délai.
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Document établi à partir de notes d'étudiants.
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Dans le modèle de Lucas, càd dans la théorie de l’imperfection de l’information, il y a
deux papiers qui sont souvent cités:
- ’72: un papier relatif au modèle théorique.
- ’73: un papier relatif à son application empirique.
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Lucas, pour illustrer son modèle va employer une parabole: la ‘parabole des îles’. Tout
se passe comme si chaque firme produisait sur une île. Il y a des problèmes
d’information: il va falloir tenter de savoir ce qui se passe sur les autres îles. Et il va
donc falloir du temps pour acquérir cette information. Une fois ceci fait, la firme doit
encore l’intégrer.
Cette hypothèse de Lucas selon laquelle du temps est nécessaire n’est pas aberrante.
En effet, un exemple de ce genre de délai est que les salles de marchés régionales
n’ont pas tout à fait le même accès à l’information que les salles de marchés nationales
et accusent donc un léger retard.
La firme va donc produire de sorte que: Coût marginal = P
Ce coût marginal dépend du prix des inputs => c’est ça qui permet à la firme de faire
le lien avec les autres firmes => l’information circule via les inputs (ex: une firme qui
utilise du pétrole comme intrant devra prendre en considération le prix de ce pétrole).
ETAPE 1: nous allons dériver la fonction d’offre à la Lucas:
La firme a, à la base, un certain niveau de production qu’elle considère
comme normal et puis, par rapport à ce niveau, elle peut se laisser ‘influencer’
par ce qui se passe sur le marché:
yi = yi* + h . ( Πi - Π )
où: yi* = niveau moyen de production (ou niveau normal)
Πi = inflation connue par la firme sur son marché
Π = inflation générale (càd dans l’économie globale)
h = un paramètre
Si on suppose que l’info est parfaite et qu’on se trouve dans le cas Πi >
Π, alors la firme pourrait être incitée, par un coefficient h à produire plus ; en
effet, elle peut penser qu’il y a un supplément de demande qui ne s’adresse rien
qu’à elle (càd qui n’est pas généralisé) => ↑ offre => ↑ production.
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Lucas R., 1972, "Expectations and the neutrality of money", Journal of Economic Theory, vol.4, 103-124
LUCAS R., 1973, "Some international evidence on output-inflation trade-offs", American Economic Review,
vol.63, n°3, 326-334
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Graphiquement:
Πi - Π
( Πi = Π) 0
yi* yi
N.B.: Ce résultat est proche du mécanisme présent dans le modèle
keynésien élémentaire. En effet, si D↑, O↑, ce qui sous-entend que les
firmes ont une capacité de production potentielle qu’elles peuvent
utiliser en fonction de l’écart entre Πi et Π.
Mais, il n’est pas du tout certain que les firmes peuvent avoir cette
information parfaite. A défaut d’information parfaite, la firme va devoir
anticiper (estimer) cette inflation. Sur son marché, il n’y aura pas trop de
problème: elle voit que les clients acceptent de payer plus cher chez les
concurrents et ajuste donc ses prix. Par contre, pour le marché global, les
choses se compliquent: il faut avoir recours aux statistiques nationales (qui
ne sont communiquées / connues qu’avec du retard).
La firme va donc devoir se forger ses propres anticipations:
yi = yi* + h . ( Πi - Πe )
où: yi* = niveau moyen de production (ou niveau normal)
Πi = inflation connue par la firme sur son marché
Πe = inflation expected = inflation anticipée par les firmes.
Après, tout dépend de l’hypothèse faite sur la dispersion du marché: si les
îles sont proches les unes des autres, l’information circulera plus vite,
mieux et avec un plus grand contenu informatif que si les îles sont plus
éloignées (auquel cas l’information serait bien entendu plus difficile à
obtenir).
Deux cas différents sont maintenant à considérer:
Cas où les prix relatifs sont constants:
La firme pense que ce qui se passe sur son marché est bien représentatif
du reste de l’économie => elle pense que l’information qu’elle a est
bonne.
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Dans ce cas, la firme ne fera pas varier son niveau de production: il ne
s’écartera pas du niveau de production qu’elle considère comme normal
(càd son niveau de production de référence, càd yi*). On a donc:
yi = yi*
Ceci est proche de l’idée du monde d’inflation pure: c’est un monde
dans lequel si on dit que les prix vont monter de 5 % dans 1 minutes,
tous les prix montent effectivement de 5 % 1 minutes plus tard. Comme
tous les prix montent simultanément, la structure des prix de change pas
=> les prix relatifs restent inchangés => ça ne change rien à la demande
=> d’où, en moyenne, la production = la production de référence.
Cas où les prix relatifs sont variables:
La firme ne peut plus penser que ce qui se passe dans son marché est
représentatif du reste de l’économie => dès lors, la firme doit anticiper
(estimer) ce qui se passe dans le reste de l’économie.
Le processus d’anticipation de la hausse du niveau général des prix est
en fait la projection que les entreprises font, le tout majoré d’un certain
coefficient (b) multiplié par l’écart entre son marché et cette projection.
Comme une équation vaut souvent mieux qu’un long discours, on a
donc:
_
où: Π = la projection des entreprises (elle est donnée par les
statistiques ou par un bon économiste qui aurait été
engagé par le firme)
où: 0 < b < 1
On peut voir ce b comme une sorte de paramètre de
confiance dans l’information que révèle le marché. Ce b
peut être issu d’un processus de tâtonnement et d’erreur
commises par la firme dans ses anticipations passés: la
firme a ajusté ce b au gré des erreurs qu’elle avait faite.
Les deux cas extrêmes sont donc:
- Si b = 0: ça signifie que l’entreprise n’a aucune
confiance dans l’information que révèle son marché.
- Si b = 1: ça signifie que la firme se base uniquement sur
son marché pour élaborer son anticipation.
__ __
Πe = Π + b . ( Πi - Π )
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Il s’agit donc d’un processus d’anticipation qui est un peu « au doigt
mouillé… » sauf qu’il tient quand même compte de ce qui se passe sur
le marché.
Si la firme avait anticipé 10 et que sur son marché il y avait 15, elle
pense qu’il faut continuer à produire mais elle n’a pas suffisamment
confiance que pour répercuter entièrement cette hausse des prix sur la
production.
On va maintenant réinjecter ce processus d’anticipation dans la fonction
de production:
Donc:
Pour passer au niveau macroéconomique, on va donc procéder à
l’agrégation de l’ensemble des firmes:
où: y* = niveau de production normal de l’entreprise
n
y* = ∑ yi*
i = 0
n
y = ∑ yi
i = 0
__ n __
où: ( Π Π) = 1 . ∑ ( Πi Π)
n i = 0
__
On utilise ( Π Π) car on a n taux d’inflation
puisque nous avons n marchés.
Nous avons donc ainsi obtenu la courbe d’offre à la Lucas. C’est une
fonction d’offre qui montre qu’on peut s’écarter du taux de production
naturel (càd normal ou encore moyen => càd y*) en fonction des
anticipations.
Notons que plutôt que de regarder le processus de la production, on
pourrait regarder le processus de l’inflation:
__ __
yi = yi* + h . ( Πi Π b . i Π ))
__
yi = yi* + h . (1b) . ( Πi Π)
__
y = y* + n . h . (1b) . ( Π Π)
__
Π = Π + C . ( y – y*)
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