La question des normes chez Hume

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La question des normes chez Hume
Résumé :
Il s’agira de montrer dans le cadre de cette intervention comment Hume inscrit les normes,
qu’elles soient juridiques ou morales, dans une histoire naturelle. Loin d’être des règles a
priori, elles se mettent en place de manière graduelle : ainsi le livre III du Traité de la nature
humaine peut-il apparaître comme la description du processus de normalisation de la société
civile où la sympathie, principe remarquable de la nature humaine, configure et reconfigure le
système qu’elle ordonne. En effet, les règles de justice qui sont dans le même temps pour
Hume des règles morales, procèdent de la partialité première des hommes (ou sympathie
restreinte), qui se réfléchit et se corrige en sympathie élargie pour surmonter ses
contradictions.
Pour raconter cette histoire naturelle des normes, il conviendra de situer la pensée de Hume
dans le champ de la philosophie morale anglo-saxonne du XVIIIème siècle. Son originalité est
de substituer à la Providence un concept non théologique, la sympathie, qui assure la
connexion entre la moralité et la justice d’une part, et la prospérité humaine d’autre part, tout
en se gardant bien d’adopter l’hypothèse égoïste. Hume n’est ni Hutcheson, ni Hobbes. Il sera
alors possible de déployer les péripéties de cette narration humienne au fil de la sympathie,
depuis les rudiments de justice dans la famille jusqu’aux bonnes manières dans les cercles
mondains, en passant par les règles de propriété et l’approbation morale qui les accompagne.
Mais une redoutable difficulté se présente ici : le point de vue empiriste de Hume sur la
genèse des règles depuis le fait, au sein d’un processus de normalisation, ne le conduit-il pas à
légitimer tout ce qui est ? Nous nous efforcerons de montrer en quel sens le naturalisme de
Hume peut être compris comme un naturalisme critique.
Biographie :
Actuellement boursière de la Fondation Thiers (Institut de France), Céline Bonicco est
doctorante en philosophie à l'Université Paris I-Panthéon-Sorbonne (NoSoPhi) sous la
direction du professeur Laurent Jaffro. Ancienne élève de l'Ecole Normale Supérieure (Ulm),
agrégée de philosophie, Céline Bonicco a exercé durant trois ans des fonctions de monitrice à
l'Université Paris I . Ses recherches se situent au croisement de la philosophie morale et de
l'épistémologie des sciences sociales. Elle travaille plus particulièrement sur le rôle de la
philosophie de David Hume dans la constitution des sciences humaines, et sur la sociologie
interactionniste américaine. Parmi ses publications: "La philosophie contre l'amour", Parages
n°6, printemps 2002 ; "Goffman et l'ordre de l'interaction. Un exemple de sociologie
compréhensive", Philonsorbonne, revue de l'Ecole Doctorale de Philosophie de l'Université
Paris I, n°1, décembre 2006 ; "Rigidité et souplesse de l'ordre de l'interaction chez Erving
Goffman, Klésis, revue en ligne de philosophie, à paraître en février 2008; "Une critique
d'explication par les causes finales: l'anticontractualisme de Hume", Dialogue (Canada), à
paraître dans le volume 46-4 (février 2008).
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