Les relations interactives entre le système nerveux, le système immunitaire et le système endocrinien (hormonal) Par le Dr. Vander Putten A mesure que progresse la connaissance des relations corps-esprit et milieu environnant, c'est une nouvelle image de l'humain qui se dessine. Il apparaît désormais comme une entité globale, intégrée. Il existe en effet des communications (des interactions grâce à des neurotransmetteurs) entre le cerveau, le système hormonal et le système immunitaire. Le langage cellulaire est fait de "mots chimiques", c'est-à-dire de substances qui sont produites par des cellules précises, larguées dans le milieu extracellulaire et qui voyagent dans les tissus jusqu'à la cellule-cible. Des fibres nerveuses pénètrent dans le tissu lymphatique et le modulent. Pour tenter de les démêler et de faciliter la compréhension par le lecteur, nous pensons qu'un petit rappel de physiologie serait bienvenu : Evoquons d'abord le système nerveux végétatif (S.N.) dont on distingue deux facettes: le système orthosympathique et le système para-sympathique . a) b) le système orthosympathique est constitué de centres hiérarchisés de l'écorce cérébrale (= cortex) à la moelle. Ses médiateurs chimiques, bien connus, sont la famille de l'adrénaline. La stimulation de ce système provoque une accélération cardiaque, de l'hypertension, une dilatation des bronches, la hausse du taux de sucre dans le sang et la dérivation du sang vers les muscles en cas d'effort. Il permet la lutte contre le froid, la douleur, les hémorragies également grâce à la constriction des vaisseaux, etc. C'est lui qui sonne le branle-bas de combat dans tous les stimuli alarmants, les "emergency conditions" (H. Cannon). Il est bien conçu pour faire face aux dangers, p.ex. la fuite devant un agresseur. Heureusement, il existe un frein qui compense les effets excessifs de l'orthosympathique. Il s'agit du système parasympathique qui émerge de l'encéphale et de la moelle sacrée. Son médiateur est l'acétylcholine. Grosso-modo, ses actions sont opposées à celles de l'orthosympathique. Ces deux systèmes peuvent être assimilés à deux forces antagonistes assurant l'harmonie de l'ensemble. (effet balancier) Une description sommaire du système immunitaire (S.I.) peut apporter quelques informations utiles (1) Le système immunitaire est capable de réagir à un stimulus généré par une substance étrangère, de déclencher contre elle une réponse spécifique et de conserver l'incident en mémoire. (1) Voir "La sève", bulletin trimestriel n° 2, juin 2001 "notre corps se défend" ,p.35 et ss. Et "La Sève" n°3 année 2000 "propos sur l'immunité" p. 19 et ss. 1 La réponse à une substance étrangère, un antigène, est assurée par les cellules du système immunitaire, les lymphocytes. On distingue : les lymphocytes T, indispensables à l'immunité cellulaire (défense contre les virus, greffes, cellules tumorales, …) les lymphocytes B secrétant les anticorps. les cellules mémoires avec une durée de vie particulièrement longue, qui peuvent provenir de chacun des types de cellules immunitaires déjà nommées. les cellules tueuses naturelles : "Natural killers" (N.K.) Comment ces groupes cellulaires communiquent-ils entre eux ? Grâce à des médiateurs spécifiques appelés interleukines, signaux protéiques comparables à des hormones, Ces interleukines stimulent la réaction inflammatoire mais pénètrent aussi dans le système nerveux et on les retrouve au niveau du tronc cérébral, l'hippocampe et l'hypothalamus, expliquant la fièvre, l'anorexie, l'état dépressif observés lors d'infection d'une certaine importance. Particulièrement, la fièvre est une alarme importante, mais grande consommatrice d'énergie. Reste le troisième volet de notre approche globale : celui des glandes endocrines (S.E.) reliées au système nerveux végétatif grâce à un intégrateur appelé l'hypothalamus. Celui-ci, situé à la base du cerveau et relié au cortex, déclenche à la fois des réactions de type parasympathique ou orthosympathique, mais secrète aussi des médiateurs qui vont activer l'hypophyse, assurant ainsi la fonction de véritable chef d'orchestre commandant la glande thyroïde, les glandes génitales et le cortex surrénal (sécrétion de cortisol, par exemple). La réponse du cortex surrénal est toujours assortie d'une réaction diffuse du système nerveux orthosympathique avec participation médullosurrénale et forte sécrétion d'adrénaline. L'ensemble de ces réponses est souvent évoqué par le terme anglosaxon de "stress" (H. Selye) Espérant que ces informations relativement simplifiées et peut-être indigestes auront intéressé le lecteur, nous lui communiquons quelques exemples glanés au cours de nos lectures et illustrant les riches relations interactives des trois systèmes qui font l'objet de notre article : S.N. = système nerveux ; S.E. = système endocrinien S.I. = système immunitaire - l'immunité est modulée par des liaisons hypothalamiques (S.I. S.N.) des modifications bio-électriques ont été enregistrées lors de la synthèse d'anticorps par les lymphocytes (S.N. S.I.) une injection d'adrénaline augmente le taux de cellules tueuses naturelles (N.K.) (S.N. S.I.) 2 - - - - - l'anxiété et la dépression affaiblissent les défenses immunitaires suite à la diminution des cellules T, alors que le soutien psycho-comportemental les stimule (S.N. S.I.) les substances pyrogènes endogènes (interleukines) induisent l'état fébrile en stimulant l'hypothalamus et ainsi, favorisent le fonctionnement des cellules actives de la réponse immunitaire (S.I. S.N.) le stress émotionnel et certaines interleukines stimulent l'axe hypothalamo-hypophyso-cortico surrénalien. Il s'en suit une sécrétion non-appropriée de cortisol conduisant à un état dépressif chez certains sujets (S.E S.N.) la réduction de stress par un soutien psychologique améliore bel et bien la réponse immunitaire des malades atteints du cancer du sein (S.N. S.I.) . En conclusion : L'image dualiste de l'homme décrite par Descartes et consistant en deux entités distinctes : le corps-machine d'une part et l'esprit libre d'autre part s'efface au profit de structures parfaitement intégrées et complémentaires pour former un ensemble interactif. Cette image, d'une grande complexité, est d'autant plus fascinante. Rappels : 1) Le système endocrinien (hormonal) est constitué d'un ensemble original, issu de l'hypothalamus, transitant par l'hypophyse et aboutissant à la glande cortico-surrénale. Lorsque celle-ci est activée, elle sécrète un grand nombre d'hormones, entre autres le cortisol qui, à des concentrations élevées, supraphysiologiques, supprime toutes les phases (exsudation, prolifération, cicatrisation) de la réaction inflammatoire (S.I. S.E.) 2) Le cerveau envoie des impulsions au niveau des organes lymphoïdes qui synthétisent des cellules immunitaires. (S.N S.I.) 3) La réponse immunitaire : les virus, les bactéries, les champignons et les parasites ayant pénétré dans l'organisme des vertébrés peuvent être reconnus et détruits par le système immunitaire. Celui-ci est surtout assuré par les lymphocytes (sous-groupe des globules blancs) euxmêmes, activés par des cytokines, appelés aussi interleukines. Certains lymphocytes sont spécialisés dans la production d'anticorps. Une activation chronique du système producteur d'interleukines dans le cadre des maladies auto-immunes (p.ex. sclérose en plaques, arthrite rhumatoïde) est corrélée avec une plus grande propension à développer un état dépressif (S.I. S.N.) 3 4