LE
MESSAGER ÉVANGÉLIQUE
Feuille d’édification chrétienne
Que le Seigneur incline vos cœurs à
l’amour de Dieu et à la patience du
Christ !
2 Thessaloniciens 2, 5.
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CENT-DIXIÈME ANNÉE
1969
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LA VRAIE GRÂCE DE DIEU
auvés par la grâce, par la foi, nous sommes exhortés à «espérer parfaitement dans la grâce qui nous
sera apportée à la révélation de Jésus Christ» (Éphésiens 2, 8 ; 1 Pierre 1, 13) : c'est par grâce que
nous avons été engagés dans le chemin que nous avons à suivre ici-bas, et c'est par grâce que, arrivés à
sont terme, nous serons ravis dans les demeures célestes nous serons à jamais des « monuments »
de la grâce de Dieu. Mais encore, tout le long de ce chemin nous éprouvons les soins variés de la grâce
divine qui seule nous permet de poursuivre la course et nous donne l'assurance d'arriver au but. Nous
comprenons donc que, tout à la fin du saint Livre, le saint Esprit exprime ce souhait: «Que la grâce du
seigneur Jésus Christ soit avec tous les saints ! » (Apocalypse 22, 21.) Cette grâce nous est nécessaire
pour réaliser ce qui est placé devant nous dans la Parole inspirée, pour jouir des privilèges que Dieu
nous confère tout autant que pour faire face aux responsabilités qui nous incombent. Nous comprenons
aussi que dans la plupart des épîtres cette faveur soit invoquée sur les saints tout au début, tandis qu'à
la fin le désir est formulé que la grâce accompagne celui ou ceux auxquels l'épître est adressée.. Il n'y a
d'exceptions que dans l'épître aux Hébreux, l'épître de Jacques, les trois épîtres de Jean et l'épître de
Jude, encore est-il fait mention de la grâce à la fin des Hébreux et au début de la deuxième épître de
Jean.
Les deux épîtres de Pierre méritent à cet égard de retenir spécialement notre attention car, plus
qu'aucune autre, elles mettent l'accent sur la grâce. Au début de la première: «Que la grâce et la paix
vous soient multipliées ! » ; de la seconde : « Que la grâce et la paix vous soient multipliées dans la
connaissance de Dieu et de notre Seigneur ! »
L'apôtre désire pour les croyants auxquels il s'adresse, et pour nous aussi, non seulement une abon-
dance mais une surabondance de grâce, et lie cette faveur à «la connaissance de Dieu et de Jésus notre
Seigneur. » Soulignons tout de suite tout ce point important que nous retrouverons dans de nombreux
passage de l'Écriture, la grâce est liée à une Personne. Nous reviendrons un peu plus loin sur le fait que
l'apôtre Pierre insiste particulièrement sur la grâce, sur la valeur des secours qu'elle apporte au fidèle,
secours qui lui sont indispensables pour vivre une vie à la gloire de Dieu.
Que la grâce soit liée à une Personne divine nous permet de comprendre ceci: seul l'ennemi peut
nous amener à croire que nous pouvons agir suivant ce qui nous semble bon, en comptant sur la grâce
de Dieu pour effacer nos fautes et conséquences; une telle pensée ne peut venir de Celui auquel la
grâce est liée. Écouter cette suggestion de l'adversaire serait imiter l'exemple des impies qui «changent
la grâce de notre Dieu en dissolution » (Jude 4), une telle conduite ne tient aucun compte des ensei-
gnements de la grâce et des obligations morales qu'elle impose, enseignements et obligations auxquels
le croyant doit se conformer s'il veut plaire à Dieu. Le danger est très réel, nous le savons bien, de faire
notre volonté propre et de considérer avec une certaine légèreté les conséquences qui pourront en ré-
sulter, en disant: Confions-nous dans la grâce de notre Dieu ! Il est vrai que cette grâce demeure
quelles que soient nos infidélités, mais nous aurons sans doute à subir les conséquences de nos fautes
sous le gouvernement de Dieu. Qu'il y ait de la grâce même dans son gouvernement ne saurait atténuer
la douleur et l'humiliation de celui qui a failli à sa responsabilité et qui, ayant « semé pour sa propre
chair, moissonnera de la chair la corruption» (Galates 6, 8.) Et s'il est vrai que la grâce a surabondé là
où abondait le péché, oserions-nous dire pourtant: Péchons afin que la grâce abonde ?
La grâce « dans laquelle nous sommes » n'est donc pas une sorte de blanc-seing nous permettant
d'agir à notre guise, les conséquences de nos manquements se trouvant ensuite effacées; c'est «la vraie
grâce de Dieu» (1 Pierre 5, 12), une grâce « qui nous a été donnée dans le christ Jésus avant les temps
des siècles » (elle est bien liée à une Personne, inséparable d'elle dès avant les temps des siècles) et
«qui a été manifestée maintenant par l'apparition de notre Sauveur Jésus Christ, qui a annulé la mort et
a fait luire la vie et l'incorruptibilité par l'évangile» (2 Timothée 1, 9-10.) Cette grâce, «vraie grâce de
Dieu», est donc venue ici-bas et Celui en qui elle a été manifestée, «qui n'a pas connu le péché» (2 Co-
rinthiens 5, 21), a accompli l'œuvre en vertu de laquelle le péché a é «aboli», selon l'expression
d'Hébreux 9, 26: Il a «annulé la mort » qui en est le salaire. La « vraie grâce de Dieu » ne supporte pas
le péché, ne tolère pas le mal; elle agit tout au contraire pour qu'il soit ôté.
«Apparue à tous les hommes» et leur «apportant le salut» c'est-à-dire le pardon des péchés et la déli-
vrance du péché, elle «enseigne ceux qui, par la foi, ont accepté ce salut. Tite 2, 11 à 14 nous dit quel
est cet enseignement de la grâce de Dieu; il présente un double aspect, négatif et positif.
Négatif, c'est le rejet de tout ce qui marque un homme avant sa conversion, «l'impiété et les convoi-
tises mondaines», c'est-à-dire une vie sans Dieu, le cœur occupé de l'objet de ses convoitises, savoir
«le monde» et «les choses qui sont dans le monde» (1 Jean 2, 15 à 17.)
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Positif: vivre «sobrement, et justement, et pieusement. » L'enseignement de la grâce nous conduit
donc à vivre une vie qui est tout l'opposé de celle qui consiste à faire sa volonté propre, une vie de
sainteté pratique dans la recherche du bien et de la séparation du mal. Le fait que nous ne sommes plus
sous la loi ne saurait en aucune manière nous autoriser à obéir à nos convoitises charnelles: «Car le
péché ne dominera pas sur vous, parce que vous n'êtes sous la loi, mais sous la grâce » (Romains 6,
12-14.)
La grâce de Dieu est liée à une Personne divine, c'est pourquoi elle est inséparable de la sainteté ;
« Sion, montagne tout à la fois de la grâce et de sainteté, en est une illustration, comme aussi la vérité:
«La grâce et la vérité vinrent par Jésus Christ» (Jean 1, 17.) En Christ ont été manifestées grâce et vé-
rité inséparablement unies. La «vraie grâce de Dieu», c'est la grâce inséparable de Celui en qui elle a
été pleinement révélée, inséparable de la sainteté et de la vérité.
Serions-nous parvenus à une époque il serait impossible de connaître une telle grâce et d'en
jouir ? La deuxième épître à Timothée, pleine d'enseignements pour les «temps fâcheux» des «derniers
jours», nous présente les ressources qui demeurent à notre disposition pour réaliser une marche indivi-
duelle et collective dans la vérité et la sainteté ; ces ressources se résument en une Personne: notre
Seigneur Jésus Christ, placé devant nous si souvent tout au long de l'épître, Celui par qui «vinrent la
grâce et la vérité. » Pareillement, cette épître, en plusieurs endroits, nous occupe de la grâce et égale-
ment de la vérité. Il en est, nous dit-elle, «qui se sont écartés de la vérité», d'autres qui «résistent à la
vérité» ou encore, «détournent leurs oreilles de la vérité et se tournent vers les fables», il en est aussi
«qui apprennent toujours, et qui ne peuvent jamais parvenir à la connaissance de la vérité. » Au sein
d'un tel état de choses, la responsabilité du serviteur c'est de présenter la Parole, qui est la vérité, d'ex-
poser « justement la parole de la vérité » (2 Timothée 2, 18 ; 3, 8 ; 4, 4 ; 3, 7 ; 2, 15.) Pour faire face à
cette responsabilité, le fidèle qui connaît la grâce par laquelle Dieu «nous a sauvés» et «nous a appelés
d'un saint appel», qui a reçu un «don de grâce», libéralité qu'il pourrait négliger et qu'il est exhorté,
comme l'était alors Timothée, à «ranimer», est invité à se fortifier. Mais comment ? « Dans la grâce
qui est dans le christ Jésus » (2 Timothée 1, 9-10, 6 ; 2, 1.) Également un passage de l'Écriture qui
nous présente la grâce liée à Christ, la grâce «dans le christ Jésus. » Tel est le secret de la force pour
traverser des jours de ruiner cette «force», c'est quelque chose de la puissance divine qui est commu-
niquée au fidèle. Il est utile de rappeler à cet égard que précisément dans cette épître l'apôtre met en re-
lief, dès le début, la puissance de Dieu, la puissance de Christ et la puissance du saint Esprit (1, 8, 12,
7.)
Quel encouragement pour nous à nous «fortifier dans la grâce qui est dans le christ Jésus ! »
À l'apôtre Paul, qui le suppliait par trois fois pour que l'écharde se retirât de lui, le Seigneur -
pond: «Ma grâce te suffit, car ma puissance s'accomplit dans l'infirmité» (2 Corinthiens 12, 9.) Cette
grâce lui avait «suffi» tout au long de son ministère et, dans son infirmité, il y avait eu effectivement le
déploiement de la puissance de Dieu. Nous comprenons donc pourquoi il exhorte son enfant Timothée
à se «fortifier dans la grâce qui est dans le christ sus», pourquoi il termine cette seconde épître, la
dernière qu'il ait écrit, par cette parole, la dernière qui nous ait été conservée de lui : « Que la grâce
soit avec vous ! » Pas seulement «avec toi» Timothée, parole qui suit d'ailleurs celle-ci: « Le seigneur
Jésus Christ soit avec ton esprit ! » Combien nous avons besoin et du Seigneur et de sa grâce !
Rappelons aussi la scène qui nous est rapportée en Actes 20. Paul fait ses adieux aux anciens
d'Éphèse: il les recommande à Dieu et à la parole de sa grâce, qui a la puissance d'édifier et de nous
donner un héritage avec tous les sanctifiés» (v. 32.) Là encore, nous avons la grâce liée à une Personne
divine et la suprême ressource pour une assemblée aussi bien que pour le croyant individuellement :
Dieu et la parole de sa grâce.
Tout comme l'apôtre Paul, l'apôtre Pierre, ainsi que nous l'avons déjà remarqué, réalise combien les
saints ont besoin de la grâce de Dieu, en abondance et en surabondance. N'est-ce pas parce que dans
toutes les circonstances au travers desquelles il est passé, il l'a connue et appréciée ? Cette grâce l'a en-
seigné après l'avoir sauvé, elle l'a secouru et fortifié tout le long du chemin, pleinement restauré après
sa chute si douloureuse et humiliante. Qui pourrait en parler comme lui ? Lisons dans les évangiles les
récits qui retracent son histoire, nous serons frappés de voir ensuite, en étudiant les deux épîtres écrites
par lui sous l'inspiration divine, combien les expériences faites par le disciple ont été utiles à l'apôtre
dans le ministère qui lui a été confié. Et vérité, il lui a été donné de «fortifier ses frères» comme le
Seigneur l'y avait exhorté. Que serait-il advenu de lui s'il n'y avait eu la grâce de Dieu ? Et qu'en serait-
il de nous si nous ne pouvions compter sur la même grâce ? Oui, qu'elle nous soit «multipliée dans la
connaissance de Dieu et de Jésus notre Seigneur ! » Cette connaissance seule nous permettra de jouir
de « la vraie grâce de Dieu dans laquelle nous sommes», comme aussi la jouissance de la grâce nous
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fera croître dans la connaissance.
L’apôtre Pierre termine sa deuxième épître, aussi, nous avons les dernières paroles qui nous ont
été conservées de lui, par cette exhortation, dans laquelle nous trouvons une fois encore intimement
liées la grâce et la Personne du Seigneur Jésus: «Croissez dans la grâce et dans la connaissance de
notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ. » Que tout au long de l'année qui vient de commencer, il nous
soit donné de désirer et de réaliser vraiment une telle croissance, pour notre plus grand bien spirituel,
pour la prospérité des assemblées et pour qu'« à lui soit la gloire, et maintenant et jusqu'au jour d'éter-
nité! Amen» (2 Pierre 3, 18.) P.F.
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«VOICI L'HOMME »
Nous commençons aujourd'hui la publication, adaptée de l'original, d'une étude biblique parue en al-
lemand, il y a une quarantaine d'années, dans' le périodique «Die Tenne», puis sous forme d'une bro-
chure intitulée «Der erfüllte Ausgang» par F.K.
De Béthanie à Gethsémané
Parmi les scènes décrites dans la Parole de Dieu, il n'en est point de plus touchantes que celles qui
nous occupent des souffrances et de la mort du Seigneur sus. Mais c'est une terre sainte que nous
devons aborder les pieds déchaussés. D'autre part, il est peu de sujets dans lesquels les croyants entrent
aussi peu. Il n'est donc pas surprenant qu'il en fût de même pour les disciples. Lorsque le Seigneur leur
annonça que toutes les choses écrites par les prophètes touchant le fils de l'homme allaient s'accomplir,
«ils ne comprirent rien de ces choses; et cette parole leur était cachée, et ils ne comprirent pas les
choses qui étaient dites» (Luc 18, 31, 34 ; Marc 9, 32.) Pourtant, avec quelle exactitude ne les leur
avait-il pas communiquées! « Le fils de l'homme sera livré aux principaux sacrificateurs et aux
scribes; et ils le condamneront à mort... et le fouetteront, et cracheront contre lui, et le feront mourir »
(Marc 10, 33, 34.) Que cette description est saisissante en sa précision ! À trois reprises, il avait ainsi
annoncé aux douze « sa mort qu'il allait accomplir à Jérusalem » (Luc 9, 31.)
Les chapitres 25 de Matthieu, 19 de Marc et 21 de Luc, marquent la fin du ministère public du Sei-
gneur et, dès les chapitres suivants, le saint Esprit relate les souffrances qu'il endura durant la dernière
période de sa vie terrestre. ¹ À l'heure où les principaux sacrificateurs et les anciens décident en grand
secret de « se saisir de Jésus par ruse et de le faire mourir », le Seigneur, ayant « achevé tous ces dis-
cours », annonce une dernière fois aux disciples ce qui allait. arriver: «Vous savez que la Pâque est
dans deux jours, et le fils de l'homme est livpour être crucifié » (Matthieu 26, 1 à 5, 14, 16 ; Marc
14, 1, 2, 10, 11 ; Luc 22, 1 à 6 ; Jean 11, 45 à 57.)
Comprirent-ils alors ces paroles ? Saisirent-ils clairement ce que leur Maître bien-aimé allait subir ?
Leur comportement nous oblige à répondre négativement à ces questions. C'est une femme qui eut le
privilège d'exprimer, à l'égard du Seigneur, les sentiments qui convenaient en de telles circonstances.
Pour nous le révéler, le saint Esprit nous à ramène à une scène survenue lors du souper offert au Sei-
gneur Jésus à Béthanie (Jean 12, 1-8.) Nous y voyons, pour la troisième fois, Marie aux pieds de Jé-
sus ; comme chaque fois que nous la trouvons en sa présence (Luc 10, 39 ; Jean 11, 32 ; 12, 3), expres-
sion des saintes affections qui remplissaient son cœur pour lui. Elle oint le Seigneur d'un « parfum de
nard pur de grand prix » et lui essuie les pieds avec ses cheveux, la gloire de la femme. « Et la maison
fut remplie de l'odeur du parfum. » Par cet acte unique, Marie exprimait à Jésus la profonde sympathie
et la compréhension d'un cœur aimant. Quant aux disciples, ils le considéraient comme une «perte»
(Matthieu 26, 8.)
Marie avait, un jour, « choisi la bonne part » et écouté la parole du Seigneur. Elle était ainsi capable,
plus que les disciples, de percevoir d'avance ce qui allait être la part de Celui qu'elle aimait ardem-
ment. Elle discernait, plus clairement que tous les autres, les sombres nuages de haine qui s'amonce-
laient, toujours plus menaçants, sur Sa tête. C'est pourquoi elle éprouvait le désir de lui témoigner sa
sympathie et son affection.
Mais que peut faire cette femme faible et, sans doute, pauvre ? Elle prend ce qu'elle a de plus pré-
cieux, brise le vase d'albâtre et en répand le parfum sur la tête et les pieds de Jésus, comme le récit
nous en est donné en Matthieu 26, 6-13 et Marc 14, 3-9. Elle lui rend ainsi l'hommage qui lui était
comme roi d'Israël, serviteur de Dieu et Fils unique du Père, au moment où, par l'Esprit éternel, il allait
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s'offrir «lui-même à Dieu sans tache» ² (Hébreux 9, 14.) «Cette femme, en répandant ce parfum sur
mon corps, l'a fait pour ma sépulture» ³ (Matthieu 26, 12.)
¹ L'évangile de Jean contient une période intermédiaire: la résurrection de Lazare et les circonstances qui s'y rattachent.
Dans cet évangile, le ministère public du Seigneur prend fin au chapitre 10.
² En Matthieu et Marc qui nous présentent Christ comme le Messie et le Prophète, respectivement, le parfum est répandu
sur sa tête, tandis qu'en Jean, où Christ est révélé comme le Fils de Dieu, Marie oint ses pieds. Il est compréhensible que Luc
ne contienne pas ce récit, car dans cet évangile, le Seigneur Jésus est présenté comme le fils de l'homme, homme abaissé et
humilié.
³ En Marc, il est dit: « Elle a anticipé le moment d'oindre mon corps pour ma sépulture (14, 8.) On sait que les autres
femmes qui se rendaient au sépulcre du Seigneur dans cette intention, sont arrivées trop tard (Luc 24, 1-3.)
Telle est la signification que le Seigneur donne lui-même à son acte, lorsqu'il s'interpose entre elle et
les disciples qui la blâment. Il proclame solennellement que cet acte ne tomberait jamais dans l'oubli ;
cela montre tout le prix qu'il y attachait. De même que Jonathan, poursuivant l'ennemi, avait goûté un
peu de miel au bout de son bâton « et ses yeux furent éclaircis» (1 Samuel 14, 27), de même et com-
bien davantage notre bien-aimé Sauveur goûta en cette circonstance, un rafraîchissement qu'aucun
homme, à l'exception cependant du brigand sur la croix, ne lui accorda plus durant les heures doulou-
reuses qu'il allait traverser.
Le jour de la fête, « le premier jour des pains sans levain », arrive. Le soir étant venu, Jésus se met à
table avec les douze pour célébrer la Pâque (Matthieu 26, 17-20 ; Marc 14, 12-18 ; Luc 22, 7-18.) Il
leur dit: «J'ai fort désiré de manger cette pâque avec vous, avant que je souffre. » Avant que le fils de
l'homme, l'héritier de toutes choses, soit rejeté définitivement, avant que les vagues de la haine de
l'homme s'abattent sur la tête du saint et du juste, avant que le vrai Agneau pascal donne sa vie et que
son sang soit versé, le désir de son cœur est d'être réuni une fois encore avec le faible résidu de son
peuple sur le terrain de l'ordonnance parfaite instituée par Dieu (Matthieu 26, 21-25, 31-35 ; Marc 14,
18-21, 27-31; Luc 22, 21-38 ; Jean 13,18-30, 36-38.) Toutefois cette scène d'adieu si solennelle est as-
sombrie par bien des sujets de tristesse. Ce n'est pas seulement Judas, le traître soudoyé par les princi-
paux sacrificateurs, et qui, possédé tout entier par son sinistre dessein, s'enfonce dans la nuit pour l'ac-
complir. Ce sont aussi les disciples qui contestent entre eux «pour savoir lequel serait estimé le plus
grand. » C'est, enfin, Simon Pierre affirmant avec jactance qu'il est prêt à aller en prison et à la mort
avec son Maître, alors qu'il devait le renier trois fois cette même nuit.
Bien qu'il ressentît tout cela infiniment plus que nous, le Seigneur ne recula pas. «Ayant aimé les
siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu'à la fin» (Jean 13, 1-17.) Durant le souper, il leur
montre, par le symbole du lavage des pieds, qu'il serait toujours prêt à secourir les siens par la puis-
sance purificatrice de sa Parole. Après le repas, il leur confie un legs particulièrement précieux (Mat-
thieu 26, 26-30 ; Marc 14, 22-26 ; Luc 22, 19, 20.)
Il savait combien nos cœurs sont oublieux et combien cette scène si émouvante de ses souffrances et
de sa mort, ne laisse, trop souvent hélas! Que des impressions fugitives dans notre esprit ! C'est pour-
quoi il institua, à notre intention, son repas, la cène du Seigneur: le pain et le vin, son corps et son sang
séparés; son corps donné pour nous, son sang versé pour nous, symboles d'un Christ mort pour nous,
d'un Christ qui a parfaitement glorifié le Père et satisfait à jamais le Dieu saint. « Faites ceci en mé-
moire de moi» (Luc 22, 19.) Ce vœu du Seigneur, qu'il confirma plus tard du haut des cieux (1 Corin-
thiens 11, 24-25), ne devrait-il pas trouver en nos cœurs à tous, un écho plus chaleureux ?
Le chant d'une hymne s'élève, puis ils sortent dans la nuit (Matthieu 26, 30.) «Il s'en alla, selon sa
coutume, à la montagne des Oliviers» (Luc 22, 39.) Mais les paroles qu'il adresse cette fois aux dis-
ciples sont des paroles d'adieu. «Que votre cœur ne soit pas troublé, ni craintif ! » (Jean 14, 1 et 27.)
Quelle sollicitude! Il aurait eu bien des raisons de n'être préoccupé que de lui-même, et le voilà qui
console, encourage et enseigne les onze. Il leur parle des «plusieurs demeures dans la maison de son
Père» et du chemin qui y conduit (Jean 14.) Ensuite il les entretient de la relation si tendre et si intime
qui les unit eux, les sarments, à lui, le vrai cep (Jean 15.) Mais ils poursuivent leur chemin dans la nuit,
laissant loin derrière eux la sainte ville. Alors il leur annonce que les ombres de l'ancienne alliance
vont disparaître pour eux et que va venir bientôt un autre Consolateur, l'Esprit saint, qui les conduira
«dans toute la vérité» et les introduira dans une relation toute nouvelle avec le Père (Jean 16.) Puis, le-
vant les yeux au ciel, il prononce la prière qui nous est rapportée en Jean 17. Il tend, en quelque sorte,
au Père ceux qu'il lui avait donnés du monde, afin que le Père les garde jusqu'à la fin, au milieu du
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