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Riegel M., Pellat J.-Ch., Rioul R. Grammaire méthodique du
français (Paris, PUF, 1994) : Les classes syntaxiques
2.3. Les classes syntaxiques
2.3.1. Problèmes de définition
La tradition grammaticale répartit les constituants ultimes de
l’ACI (les mots) en neuf parties du discours : le nom, l’article,
l’adjectif, le pronom, le verbe, l’adverbe, la préposition, la
conjonction et l’interjection. Selon qu’on l’envisage en extension ou
en compréhension, une partie du discours est une classe de mots ou un
type de mots vérifiant une ou plusieurs propriétés communes.
► Les grammaires traditionnelles ont généralement recours à des
critères notionnels, comme la Grammaire de l’Académie française
[1932] le fait, en partie du moins, pour le nom, l’adjectif qualificatif, le
verbe et l’adverbe :
« Le nom [...] désigne les êtres vivants, les choses, les qualités [...] » (p. 17).
« Les adjectifs qualificatifs [...] expriment la manière d’être d’une personne
ou d’une chose, l’aspect particulier sous lequel on les envisage » (p. 67).
« [le verbe] exprime une action faite ou supportée par le sujet » (p. 95) ;
« l’adverbe est un complément circonstanciel de forme invariable qui sert à
exprimer la manière, le temps, le lieu, la quantité, etc. » (p. 188).
Ce type de classification est, en fait, dépourvu de tout pouvoir
discriminant, puisque le nom, par exemple peut désigner, outre « les
êtres vivants, les choses, les qualités », des procès (course,
destruction), des états et des manières d’être (tristesse, obséquiosité),
des portions d’espace (panorama) et de temps (semaine, siècle) ainsi
que des quantités (litre, multitude), toutes notions qui sont également
utilisées pour caractériser respectivement le verbe, l’adverbe et
l’adjectif. On pourrait multiplier les exemples de tels recouvrements
sémantiques : la notion de quantité, par exemple, peut indifféremment
être exprimée par la catégorie des déterminants, des pronoms
(plusieurs), des adjectifs qualificatifs (nombreux), des noms (dizaine),
des verbes (foisonner) et des adverbes (abondamment).
Deux conclusions s’imposent. D’une part, les propriétés
sémantiques telles qu’on les conçoit ordinairement ne permettent pas
de distinguer de façon univoque les différentes parties du discours. Si
ces catégories recouvrent néanmoins une bonne partie de la réalité