Emmanuel Kant – La Religion dans les limites de la Raison (1794) 4
AVANT-PROPOS
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On sait l'influence considérable qu'a eue sur la philosophie du dix-neuvième siècle la
Critique de la Raison pure. Mais on doit aussi reconnaître que, bien souvent, ce livre a été,
peut-on dire, le seul qu'on acceptât de Kant, et même encore de façon fragmentaire. Tel
s'arrêtait à la Dialectique et croyait y voir que l'auteur s'était donné uniquement pour but de
démolir toute métaphysique : tel autre s'installait, au contraire, dans l'Esthétique, où il croyait
trouver un système métaphysique, un idéalisme transcendantal ; tel autre enfin, s'en tenant à
l'Analytique, voyait seulement dans ce livre une théorie de l'expérience. Et tous ceux-là, qui
laissaient de côté la partie la plus importante de cette œuvre considérable, ne s'apercevaient
pas que cette Critique, pour Kant lui-même, est un «exercice préliminaire
», une « propé-
deutique
» au système de la Raison pure et qu'il s'y propose tout simplement de « déblayer
et d'affermir le sol, afin d'y élever le majestueux édifice de la morale
». Aussi étaient-ils
incapables de saisir une liaison entre la Critique de la Raison pure et la Critique de la Raison
pratique. Ils voyaient entre elles, au contraire, une opposition radicale, une manifeste
contradiction et condamnaient l'illogisme du philosophe qui, après avoir démoli, par la raison
spéculative, l'entier édifice du dogmatisme, prétendait maintenant le reconstruire, avec plus
de solidité, grâce à une raison pratique. Comme si pour Kant la Raison était ainsi décomposa-
ble, et comme si la. diversité même des deux usages qu'elle admet, suivant les objets qui
l'occupent, n'impliquait pas l'unité absolue de la Raison, de la Pensée ! Cette première
Critique de la Raison pure, trad. Pacaud-Tremesaygues, p. 653.
Id., p. 36, p. 56, p. 653.
Id., p. 307.