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avant d’inhiber les inhibiteurs du système immunitaire. En 2011, les chercheurs ont compris que bloquer
l’inhibition était beaucoup plus important que de renforcer l’activation. Cibler les anomalies moléculaires
du système tumoral permet d’endiguer la croissance des tumeurs. Et cette réduction de masse tumorale
doit être accompagnée d’une réactivation du système immunitaire, qui passe d’abord par le blocage du
système inhibiteur », explique-t-elle.
Dans les années 70, les scientifiques ont décrypté les cellules et les récepteurs importants de
l’immunosurveillance naturelle contre le cancer. « On rappellera l’importance du BCG instillé dans les
cancers de la vessie in situ. Ce sont des composés bactériens qui vont activer le système immunitaire
inné. Puis il y aura transfert adoptif de lymphocytes T activés et les cytokines recombinantes dans le
cancer du rein. En parallèle de ces premières avancées, on assiste à la découverte des cellules
dendritiques, des récepteurs T à l’antigène qui vont permettre le passage à l’immuno-oncologie
moléculaire », poursuit le Pr Zitvogel.
« En 2011, on assiste à une forte avancée clinique car on fait la preuve de concept clinique que le
premier récepteur inhibiteur des lymphocytes CTLA4 doit être inhibé pour redynamiser le système de
surveillance anti-tumoral », s’enthousiasme la directrice de recherches. Et c’est à partir de 2014 et 2015
« que la révolution commence véritablement » avec l’aide de l’industrie pharmaceutique qui met sur le
marché d’un certain nombre d’anticorps monoclonaux inhibiteurs du système immunitaire. ET le Pr
Zitvogel de citer : « Novartis a mis en place des récepteurs chimériques de lymphocytes T qui ont la
capacité de présenter des anticorps reconnaissant le CD19 présenté par l’ensemble des cellules
tumorales B des lymphomes B des leucémies B chroniques ou aiguës ».
Sur un plan pratique, à l’heure actuelle, trois molécules ont obtenu l’autorisation de mise sur le marché
(AMM) : l’anti-CTLA4 (pour le mélanome métastatique), l’anti-PD1 (mélanomes et cancers avancés du
poumon). L’anti-PDL1 est en attente d’une AMM.
« L’anti-CTLA4 aurait comme vertu essentielle d’autoriser les premiers lymphocytes à être initialisés
contre les antigènes les plus dominants du cancer. » La molécule CTLA4 est fortement exprimée par les
premiers lymphocytes activés par les cellules dendritiques et localisés dans les ganglions drainant le
premier site antigénique. « Pour PD1, la situation semble être complètement différente, dans le sens où
PD1 est surtout exprimé par les lymphocytes activés par l’antigène au moment de la reconnaissance au
site effecteur », précise la chercheuse. Bloquer PD1 ou PDL-1 exprimé sur les lymphocytes d’une part et
les cellules tumorales d’autre part, permettrait la réactivation de ces lymphocytes qui seraient alors
capables de tuer, de secréter des cytokines comme l’interferon gamma et de proliférer.
Le répertoire de l’ensemble des pathologies néoblastiques qui sont les cibles de ces traitements est de
plus en plus large. « Il faut dire que ce qui va caractériser une oncologie et qui est appelé révolution
thérapeutique, tient du fait que ces médicaments ont un large spectre (spectre d’activité totalement
transversal) donc concernent seulement les cancers hormono-dépendants. Du mélanome en passant
par le cancer du rein, le cancer du poumon quel que soit son statut histologique, et tous les cancers tels
que celui de la vessie, de l’estomac, oesophagien, colorectal. » Et les avantages de ces traitements sont
multiples : durabilité, curabilité et absence de toxicité. « C’est ceci qui suscite dans notre communauté
une excitation importante et une interrogation. Des réponses objectives surprenantes sont observées
dans des cancers très avancés, touchant un large spectre de néoplasies. Ces réponses ont une longue
durée, telle que l’indique la courbe de décroissance tumorale. Des métastases hépatiques très
complexes sont capables de régresser voire de disparaître », révèle la directrice de recherche.
Un mode d’action doit être mis en avant. « Il n’est pas finalisé mais on peut déjà décrire l’infiltrat
progressif par des lymphocytes CD8 cytotoxiques de ces lésions. Après trois ou quatre injections, on
constate même un infiltrat massif », souligne le Pr Zitvogel. Pour les patients qui ne peuvent pas en
bénéficier d’emblée, du fait d’un phénomène de résistance primaire, il est possible d’envisager des
combinatoires thérapeutiques. Soit mettre en jeu les thérapies classiques telles que l’oncologie
classique par chimiothérapie ou radiothérapie, ou d’autres systèmes inhibiteurs comme l’indolamine-2,3
déoxygénase qui est un système métabolique extrêmement suppresseur. « L’anti-PD1 va synergiser
avec des chimiothérapies à base de platine dans le cancer du poumon, ainsi qu’avec l’indolamine-2,3
déoxygénase aussi dans le cancer du poumon, laissant la voie très ouverte pour des combinatoires
intéressantes, pas forcément très toxiques. Dans le mélanome, la première combinatoire qui nous a
semblée évidente était celle combinant l’anti-CTLA4 avec l’anti-PD1. Les auteurs ont démontré qu’on
pouvait espérer jusqu’à 80 % de réponses objectives à court terme et 40 % de réponses à long terme.
Mais la toxicité n’est pas négligeable et invite soit à réduire les doses, soit à envisager cette thérapie en