Le Traité de Versailles, 1783

publicité
Le Traité de Versailles, 1783
(parfois nommé _ abusivement _ « traité de Paris », ce qui entraîne une confusion avec le véritable traité de Paris,
signé 20 ans plus tôt, et qui clôt la guerre de Sept Ans)
Le Traité de Versailles, signé le 3 septembre 1783 met fin à la guerre dite d’Amérique, qui avait opposé la
Grande-Bretagne à une coalition composée des Treize Colonies d’Amérique (entrées en guerre en 1775), de la France
(entrée en guerre en 1778), de l’Espagne (entrée en guerre en 1779) et des Pays-Bas (entrés en guerre en 1780).
A bien des égards, cette guerre d’Amérique fut dans la réalité une guerre mondiale puisqu’on combattit en
Europe, en Amérique, dans les Antilles, en Afrique et aux Indes.
Le Traité de Versailles n’est-il que le règlement d’un conflit périphérique ?
Le Traité de Versailles, fondateur d’une nouvelle nation sur la scène internationale
La clause la plus importante du Traité de Versailles était la reconnaissance officielle de l’indépendance des
colonies d’Amérique. De plus, en concédant aux Etats-Unis tous les territoires compris entre le Mississipi et les
Appalaches, le Traité ouvrait la voie à la « conquête de l’Ouest », qui serait l’évènement historique du XIXe siècle. En
réalité, dès le 30 novembre 1782, l’Angleterre avait engagé des négociations secrètes avec les Etats-Unis et reconnu
leur indépendance. Cette capitulation diplomatique de la métropole face à sa colonie rebelle était la suite logique de sa
défaite militaire : en 1777 l’armée américaine avait obtenu sa première victoire contre les Anglais à Saratoga ; en 1778,
la France, en signant les accords de Paris avec les Treize Colonies (accord commercial et militaire), avait apporté son
soutien aux Insurgents ; en 1781, par l’intermédiaire de leur flotte et de leur Corps expéditionnaire, les Français avait
contribué à la victoire de Yorktown, où la dernière armée anglaise présente en Amérique avait dû capituler. Dès le 20
janvier 1783, les hostilités avaient été interrompues par des préliminaires de paix. En acceptant de traiter avec les
Insurgents au même titre qu’avec les autres nations belligérantes, l’Angleterre cessait de les considérer comme de
simples séditieux.
Les relations anglo-américaines ne se normalisèrent toutefois pas immédiatement. Si le commerce entre les
deux pays retrouva dès 1783 son niveau d’avant-guerre et si le traité de Jay (1794) régla un certain nombre de
différends territoriaux (à propos de la frontière canadienne), l’Angleterre entendait continuer à exercer son influence
sur l’Amérique. En 1812, son impérialisme commercial provoqua une guerre de deux ans contre les Etats-Unis, que
ceux-ci remportèrent car l’Angleterre était trop occupée en Europe par la guerre contre Napoléon. C’est finalement
après une longue période de neutralité de la part des Américains et de rapports uniquement commerciaux que
l’Angleterre put enfin envisager de traiter d’égal à égal avec les Etats-Unis.
Le Traité de Versailles aurait dû avoir comme conséquence logique de jeter les bases d’une alliance atlantique
entre les Treize Colonies et les pays européens qui avaient soutenu leur indépendance. Mais les dirigeants d’alors ne
saisirent pas les enjeux de l’Indépendance américaine. Le commerce avec la France, inexistant avant la guerre, bondit
en 1778, puis se mit à stagner dès 1780. Entre 1798 et 1801, suite à l’agressivité des corsaires français, la France et les
Etats-Unis se livrèrent une guerre navale dans l’Atlantique et la mer des Caraïbes (sans déclaration de guerre officielle
cependant).L’Espagne, qui récupéra la Floride (perdue en 1763) par le traité de Versailles, devint ainsi voisine des
Etats-Unis ; en 1818, les Etats-Unis envahirent la Floride et forcèrent l’Espagne à leur céder la péninsule.
Ainsi, le Traité de Versailles ne contribua pas à intégrer les Etats-Unis au concert des grandes Puissances de
l’époque. Au contraire, il accentua la défiance des Américains à l’égard de l’Europe.
Toutefois, pour les Européens, l’aspect le plus marquant du traité de Versailles n’était pas la naissance des
Etats-Unis mais l’affaiblissement de la puissance britannique.
Le Traité de Versailles modifie le rapport de force entre les grandes puissances européennes
Pour la France et l’Espagne, le Traité de Versailles de 1783 était la revanche du Traité de Paris de 1763, où
leurs empires coloniaux respectifs avaient été partiellement démantelés au profit de la Grande-Bretagne (l’Espagne
avait perdu la Floride, la France le Canada et de nombreux comptoirs aux Indes). Non seulement la Grande-Bretagne
perdait sa plus grande colonie, mais elle devait aussi rendre la Floride et Minorque à l’Espagne, était bloquée dans son
mouvement d’expansion en Indes, perdait quelques îles aux Antilles et devait renoncer à ses conquêtes africaines
(comptoirs français et hollandais). Pour la première fois, la France avait réussi à lui tenir tête sur les mers et à ébranler
son Empire partout dans le monde tout en défendant le sien et celui de ses alliés. Le rapport de force entre les
puissances européennes en était sensiblement modifié : pas plus que la France de Louis XIV, la Grande-Bretagne de
George III ne pouvait prétendre à l’hégémonie.
Ainsi, la traité de Versailles ne fut pas seulement, comme on serait tenté de la croire, le règlement d’un conflit
colonial périphérique. Il entérina un nouvel équilibre des puissances européennes, qui demeura inchangé jusqu’aux
guerres de l’ère révolutionnaire ; il influença également durablement la politique des jeunes Etats-Unis. On ne saurait
donc le réduire au simple acte de clôture de la révolution américaine.
Téléchargement