Hitchcock se constitue son propre genre. Il s’est approprié le suspense par exemple. On peut
aujourd’hui parler de film hitchcockien. Il est né par dérivation à partir d’autres genres comme
le Whodunnit (= « qui a fait ça) ou le Mc Guffin (ce qui motive l’action des personnages mais qui
finalement pour le spectateur ne l’est pas du tout).
Le film hitchcockien dérive aussi de la comédie amoureuse puisqu’il y a toujours une intrigue
amoureuse qui vient seconder l’intrigue principale.
On peut parler d’horizon d’attente concernant Hitchcock. Il a réussit à briser l’horizon d’attente
en se détachant des conventions du milieu hollywoodien et en se détachant de sa propre
réputation.
Psychose lui a permis de devenir le père d’une nouvelle forme du cinéma d’horreur. On considère
qu’il y a eu une rupture au cinéma dans les 1960’s avec Psychose. Aujourd’hui le film ne fait plus
peur car la nouveauté s’est considérablement atténuée. Nous somme habitués à ce type de
figure. Pour comprendre l’effet de ce film il faut se replacer dans le contexte des années 1960.
Une des nouveautés principales est la manière dont le film a été vendu : Hitchcock a fait une
campagne de marketing radicalement nouvelle, venant d’une contrainte toute simple (le fait
qu’il n’a pas d’argent pour ça). Il a choisi de ne pas montrer le film au critiques ou aux
journalistes, ce qui a été considéré comme un affront. Il a créé un slogan qui a fait mouche :
« Personne ne sera admis dans la salle après le début de Psychose ». C’est ce qui a participé au
succès du film.
L’autre est l’autorisation d’une photographie de plateau. La scène des deux acteurs à moitié nus
était révolutionnaire par exemple. Hitchcock est le 1er à utiliser la provocation sexuelle pour
vendre un film.
De plus, la bande-annonce, absolument inhabituelle est devenue légendaire : au lieu de montrer
des images du film, Hitchcock nous raconte ce qui s’est passé sur les lieux du plateau.
Le film en lui même est une nouveauté radicale à la fois dans sa carrière, et dans les horizons
d’attente qu’il avait créé dans ses précédents films (glamour, acteurs prestigieux, costumes hors
de prix, etc.). Il crée donc une rupture avec sa propre réputation. De plus Hitchcock n’avait
jamais fait de film d’horreur avant.
C’est le premier film du genre, à l’époque personne n’avait jamais vu ça avant.
La rupture a lieu avec la mort violente de Marion (Janet Leigh) à la moitié du film, de manière
totalement inattendue. Le but d’Hitchcock était de déstabiliser son public. Ici il viole l’une des
règles principales de la narration traditionnelle, fondée sur l’identification et la sympathie du
public avec le héros. Hitchcock construit les attentes du public dans le but de les détruire (c’est
pour cela que l’attention est fixée sur les 40 000$ et Marion) Mc Guffin.
Il y a d’autres ruptures car Hitchcock tente ce qui n’a jamais été fait auparavant : le traitement de
la scène de meurtre. Il ose faire une scène de meurtre qui s’étire dans le temps : on assiste à la
réaction de Norman et tout son processus de nettoyage de la scène de crime. Cette scène rend le
meurtre concret car elle prend le temps de le montrer au lieu de n’en donner qu’une
représentation abstraite (figure, image ou métaphore).
La situation ne se résout pas à la fin de Psychose, contrairement à ce qu’on a l’habitude de voir.
Même si la situation semble avoir changé, tout est assez superficiel, on sait que la folie de
Norman Bates ne cessera jamais. On termine le film sur un gros plan sur le visage du personnage
(non pas sur l’avenir positif d’un personnage) participe à cette non-résolution du film. Cela
empêche le sentiment d’happy-end.
Eric Dufour dit : « Que le film d’horreur n’est pas de fin, voilà une loi essentielle qui apparaît
dans Psycho ».
La fin relativement ouverte du film a permis des suites (on peut le comparer à Halloween)
Une des grandes nouveautés de Psycho est d’avoir mis en scène un des plus grands serial-killer
de l’histoire du cinéma (après M le Maudit, film tout à fait précurseur en la matière). Le fait est
qu’il y a très peu de personnages positifs pour contrebalancer la monstruosité du héros. Ce
serial-killer a la spécificité d’avoir la capacité d’insérer l’horreur au sein du quotidien.
Hitchcock fait de son monstre le personnage principal. On le suit tout le temps. Le spectateur se
voit sympathiser avec quelqu’un d’absolument atroce.
Les spectateurs de l’époque ne s’attendaient pas à voit tout ça, aussi parce qu’Hitchcock ne
s’était jamais attaqué au cinéma d’horreur.