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Ces révolutions sociales n’ont pas été accueillies à bras ouverts par la profession
médicale. Bien qu’elles aient contribué énormément à la qualité des soins et au confort du
patient, les médecins se trouvaient encore une fois obligés de sortir de leur zone de
confort pour fonctionner d’une manière différente. L’adoption totale de ces différentes
méthodes de soins des patients ont nécessité l’intervention du gouvernement et les efforts
d’intervenants, à l’intérieur et à l’extérieur des professions de la santé. Encore
aujourd’hui, les visions originales n’ont pas été pleinement réalisées.
Le processus de l’éducation médicale
Vers le milieu du 19e siècle, l’éducation médicale en Amérique du Nord dépendait
fortement des facultés de médecine indépendantes, qui existaient dans le but de réaliser
des profits et qui souvent n’avaient aucun lien officiel avec un hôpital pour l’éducation à
l’aide de patients. La fondation de la John Hopkins Medical School a brisé cette
tradition en offrant le premier programme d’études qui serait reconnu dans le monde de
l’éducation médicale moderne. Sous la direction du doyen William Walsh, l’on a réuni un
groupe exceptionnel de professeurs cliniques, dont les Drs William Osler (Directeur de
médecine), William Halsted (Directeur de chirurgie), et Howard Kelly (Directeur de
gynécologie). Les principes directeurs de cette nouvelle faculté de médecine et de son
hôpital d’enseignement construit précisément à cette fin (inauguré en 1893) prévoyaient
une grande priorité pour la recherche, des normes d’admission élevées, une année
universitaire de neuf mois (tandis que les facultés de médecine indépendantes
n’enseignaient que sur cinq mois), un programme d’études de quatre ans mettant l’accent
sur l’enseignement de base et clinique, et des normes d’évaluation rigoureuses. En fait,
Osler n’a écrit son célèbre manuel de médecine (Textbook of Medicine) qu’après avoir
été embauché à la Hopkins, alors qu’il attendait l’ouverture de l’hôpital d’enseignement
et l’inscription de sa première classe d’étudiants en médecine. D’autres universités ont
rapidement compris la valeur de cette méthode pédagogique et ont engagé des diplômés
de Hopkins comme professeurs. En dix ans, plusieurs facultés de médecine privées de
renom (p. ex. Harvard) avaient reformulé leur propre programme d’études afin de suivre
le modèle de Hopkins (6).
Cependant, la majorité des plus de 450 facultés de médecine en Amérique du Nord n’ont
pas été affectées par les événements à Hopkins. La American Medical Association,
préoccupée par la qualité et les normes de l’éducation médicale aux États-Unis, a
contacté la Carnegie Foundation pour obtenir des fonds afin de mener une enquête auprès
de toutes les facultés de médecine nord-américaines. Abraham Flexner, un professeur qui
avait déjà mené une enquête sur l’enseignement dans les universités américaines, a été
choisi par la Fondation pour rédiger un rapport sur l’éducation médicale en Amérique du
Nord. Le célèbre Rapport Flexner a été publié en 1910. L’impact de ce rapport n’a pas
tardé. En dix ans, les écoles indépendantes avaient pratiquement disparues, laissant
environ 150 facultés universitaires de médecine, publiques et privées. De plus,
l’insistance de Flexner pour que l’éducation médicale ait de fortes racines scientifiques a
facilité la concentration de la plupart des sciences biomédicales dans les facultés de
médecine, créant ainsi de solides liens avec les industries qui dépendaient de ces
connaissances de base pour la création de nouveaux produits. Le transfert de