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Document 2 : Proclamation du Djihad à Constantinople le 14 (23) novembre 1914
[...] Ô Musulmans fidèles serviteurs de Dieu !
Ceux qui prendront part au Djihad pour le bonheur et le salut des Croyants et en reviendront vivants,
jouiront du bonheur ; quant à ceux qui y trouveront la mort, ils auront droit au titre de martyrs.
Conformément à la promesse divine, ceux qui se sacrifient pour la cause du droit auront la gloire et le
bonheur ici‐bas, le paradis là‐haut.
O Musulmans, épris de gloire et de félicité, prêts à sacrifier votre vie et vos biens et à braver tous les
périls et toutes les luxes pour la défense du droit, groupez-vous, solidaires et unis autour du Trône
impérial, conformément à l'ordre du Très‐Haut qui nous a promis le bonheur dans ce monde et dans
l'autre, pressez d'une étreinte commune le socle du califat et sachez qu'en ce jour où notre Etat se
trouve en guerre avec la Russie, la France, l'Angleterre et leurs alliés, ennemis mortels de l'islam, le
Commandeur des Croyants, calife des Musulmans, vous appelle au Djihad.
Combattants musulmans ! Avec l'aide de Dieu et l'assistance spirituelle du Prophète, vous vaincrez et
écraserez les ennemis de la religion et vous remplirez d'une joie éternelle les cœurs musulmans suivant
la promesse divine.
Signé : Ürgüplü Mustafa Hayri Efendi, Cheikh al-Islam
Document 3 : ‘Ali ‘Abd al-Râziq, L’islam et les fondements du pouvoir, Paris/ Le Caire, La
Découverte, 1994, 1ère édition au Caire en 1925 (alors non traduit).
Le doute ne doit pas s’insinuer dans nos esprits de ce que nous trouvons chez le Prophète des actions
relevant apparemment du gouvernement, des manifestations d’un pouvoir étatique et royal. A les
examiner de près, on comprend qu’elles ne sont rien de tel, ou plutôt qu’elles ne constituent que des
moyens parmi d’autres utilisés par le Prophète pour raffermir sa prédication et soutenir la nouvelle
religion. Il n’est pas étonnant que la guerre sainte (djihad) soit l’un de ces moyens. Elle constitue sans
doute un moyen violent et impitoyable, mais qu’en savons-nous ? Le mal, n’est-il pas, dans certains
cas, indispensable au bien ? La destruction n’est-elle pas souvent le préalable à toute œuvre
constructive ? [...]
L’autorité que le Prophète avait sur les croyants était le prolongement de sa mission prophétique et ne
comportait aucune des caractéristiques d’un pouvoir temporel. En toute certitude, il n’y avait ni
gouvernement, ni Etat, ni tendances politiques, ni visées de rois et de princes !
Nous espérons avoir ainsi guidé vers la réponse à cette interrogation que nous avons rencontrée
précédemment, à savoir l’absence, dans la première communauté islamique, de toute manifestation
d’un pouvoir civil et de préoccupations étatiques. Nous espérons avoir montré [...] qu’enfin la
perplexité et la confusion qui nous avaient saisis ont cédé la place à la lumière et à la paix de l’esprit.
Document 4 : La profession de foi des Frères musulmans (début des années 1930).
5. Je crois que le musulman a le devoir de faire revivre l’Islam par la renaissance de ses divers
peuples, par le retour de sa législation propre, et que la bannière de l’Islam doit couvrir le genre
humain et que chaque musulman a pour mission d’éduquer le monde selon les principes de l’Islam. ET
je promets de combattre pour accomplir cette mission tant que je vivrai et de sacrifier pour cela tout ce
que je possède.
Document 5 : Edouard Herriot, Orient, Hachette, Paris, 1934, p. 102.
Ce que les réformes du Ghazi ont fait disparaître de la vieille Turquie, c’est surtout son aspect
Mamamouchi. Plus de fez ; les femmes ne portent plus le voile de mousseline, le yachmak. Plus de
monastères musulmans, de tekkés ; on a relégué au musée d’Ankara les instruments dont se torturaient
les derviches : fanatisme et comédie. On les a relégués à côté de cette tiare persane qui ressemble
étrangement à tiare papale.
Il est facile, du reste, de définir les différentes réformes qui ont transformé le vieil Empire ottoman en
une jeune et active République. D’abord suppression de toute religion officielle, des écoles coraniques
attachées aux mosquées (médressés), du Chéri et de l’Evkaf1. La République turque sera laïque. Plus
de tribunaux religieux fondant leurs décisions sur la loi islamique et, par leurs procédures