LA NOUVELLE ECONOMIE MARKETING INTERNATIONAL M. DUCROCQ Mathias ABEL Hélène CHENET Candice DEBOUT Frédéric FAILLE Caroline OLIVIER 1 SOMMAIRE : I. DEFINITIONS et THEORIES ECONOMIQUES _______________________________ 4 I- 1- Définitions ________________________________________________________________ 4 I-2- Théories ___________________________________________________________________ 6 II. HISTORIQUE :__________________________________________________________ 9 III. LA NOUVELLE ECONOMIE ET LES DIFFERENTS MARCHES CONCERNES _ 11 III- 1- La nouvelle économie aujourd’hui __________________________________________ 11 III- 2- Les différents marchés : __________________________________________________ 11 III- 3- La nouvelle économie et les politiques économiques. ___________________________ 12 IV. LA NOUVELLE ECONOMIE FACE A L'ANCIENNE _______________________ 115 IV- 1- La fin des intermédiaires est-elle en vue ? ___________________________________ 115 IV- 2- La diffusion de produits gratuits sur le web _________________________________ 118 V. LES GRANDS SUCCES ET LES GRANDS FLOPS ___________________________ 20 V- 1- Les différentes orientations, secteur par secteur _______________________________ 211 V- 2- Quelques exemples ________________________________________________________ 23 a) des succès incontestables b) de grands flops 23 24 VI- TRAVAILLER DANS LA NOUVELLE ECONOMIE _________________________ 27 VI- 1- Un nouveau management par une nouvelle économie __________________________ 27 VI- 2- Le profil des acteurs français de la nouvelle économie __________________________ 29 a)Des décideurs jeunes b)Vers une parité Hommes-Femmes c)Une nouvelle élite d)Paris, centre de la nouvelle économie 29 30 31 32 2 Introduction Il avait fallu une quarantaine d’années pour que la radio fasse parti du quotidien, une quinzaine d’années seulement pour que le micro-ordinateur s’intègre au paysage familier de chacun ; il aura suffi de quatre ans pour que les internautes, en nombre croissant, aient véritablement assimilé la Toile. La nouvelle économie constitue une révolution technologique, industrielle, culturelle profonde qui, à la différence des précédentes innovations de nature comparable (l’électricité, l’automobile, le chemin de fer), se sera diffusée en un temps record à l’ensemble de la planète. Cette nouvelle économie est largement une « knowledge economy », une économie de la connaissance, socle de la croissance actuelle. Le choc de l’arrivée de l’ordinateur et des nouvelles technologies de l’information et de la connaissance met à la disposition du plus grand nombre un outil puissant de traitement et de transmissions de l’informations. La place du savoir se renforce partout or c’est une richesse qui ne s’use pas avec son utilisation et qui peut être cédé sans que celui qui l’a transmis n’en soit dépossédé. Corollaire de cet état de fait, les équipements et les compétences sont vite déclassés, les nouveaux produits ont une durée de vie courte, les organisations sont déstabilisées. Tel se présente le moteur de la nouvelle économie que nous nous proposons d’aborder sous différents aspects. Tout d’abord, il nous a semblé intéressant de définir certains termes ainsi que les différentes théories propres à ce sujet et de faire un bilan des marchés directement concernés par la nouvelle économie. Puis nous verrons les conséquences de la nouvelle donne sur l’ancienne économie. Au travers de différents exemples, nous aborderons les orientations que prendront tant les start-up que les entreprises traditionnelles. Enfin, nous passerons en revue les différents acteurs de la nouvelle économie. 3 I. DEFINITIONS et THEORIES ECONOMIQUES I- 1- Définitions Définition de la nouvelle économie : Avant d’y faire allusion de façon plus historique il faut savoir que le terme français « économie » en recouvrant les deux termes anglais « economy » et « economics » désigne deux choses : - l’organisation d’un système économique concret situé dans la géographie et l’histoire (comme par exemple ‘’lorsque l’on parle de ‘’l’économie française dans les années 50’’) et: - la science sociale (qui doit rendre compte du fonctionnement des systèmes économiques). A travers la nouvelle économie on constate que les secteurs des technologies et de la communication ont pris par leur développement une place importante dans l’activité économique. Le champ de cette nouvelle économie comprend l’Informatique (matériel et logiciels) et l’ensemble des moyens de communication de l’Information (téléphonie, Internet, télévision...) ainsi que des services et activités qui utilisent les nouvelles technologies. Pour participer, il suffit d’avoir recours au ‘’Réseau’’. Définition d’Internet : L’ISOC (Internet Society) propose trois définitions d’Internet : -Définition générale : un méta-réseau d’information (un réseau de réseaux) global et ouvert; -Définition étroite : un groupe ‘Inter-réseaux (d’interconnexion de réseaux) capables d’acheminer entre eux des paquets suivant ‘’l’Internet Protocol’’. -Définition large : L’interconnexion des réseaux au protocole IP, plus tous les réseaux connectés capables d’acheminer du trafic (ce qui inclut les réseaux utilisant le protocole IP, ceux utilisant un autre protocole qu’IP et les systèmes de niveau applicatif). L’équilibre d’Internet dépend de : son réseau, de l’accès au réseau, les services, rémunération du réseau. Cet équilibre économie issue du réseau est nécessaire pour qu’Internet perdure. L’économie d’un réseau Internet obéit à une logique économique implacable à laquelle Internet ne saurait de déroger et qui relie toutes choses égales : demande à prix ; prix à coût, coût à dimensionnement, dimensionnement à demande. Le dimensionnement des liaisons et des équipements est déterminé à partir d’informations relatives au trafic que devra supporter le réseau (ce qui permet de dénombrer les unités d’œuvre. Les coûts unitaires sont ensuite introduits. Des résultats quantitatifs sont ensuite obtenus. Parmi les variables du modèle, les principales sont le nombre d’utilisateurs de l’Internet et le volume de trafic total. Définition du Nasdaq : Le Nasdaq (National Association of Securities Dealers Automated Quotation) est un marché d’actions entièrement automatisé et sans réelle localisation géographique. Le Nasdaq, 4 devenu le symbole de la nouvelle économie, a joué un rôle-clé dans le financement de l ‘économie américaine par le vigoureux climat de concurrence qu’il a instauré avec les autres marchés d’actions. Crée en 1971, ce marché se voulait un recours pour le financement des petites entreprises à forte croissance qui ne répondaient pas aux critères de cotation des autres marchés. Il a largement débordé son champ initial, devenant une source de capitaux de plus en plus importante pour toutes les catégories d’entreprises américaines. Le terme nouvelle économie peut par extension être définie historiquement. Le terme est alors utilisé pour décrire tous les changements structurels entraînés par les diffusions des évolutions techniques qui seraient à l’origine de ces évolutions économiques. Les introductions en Bourse des entreprises Internet françaises en 1999 et 2000 Le tableau ci-dessous détaille les principales de ces opérations et indiquent la valorisation actuelle des entreprises cotées. (NB : les cours sont en euros, les levées et les capitalisations en francs. Société Secteur Prix Cotation Introducteurs Code Date de d'intro. Nombre de % Kal Levée de Marché J+1 Teneurs de Sicovam l'IPO en titres total placé fonds en euros marché euros LibertySurf Fournisseur d'accès à Internet Premier marché (RM) 7508 Wanadoo Fournisseur d'accès/Portail France Télécom Premier marché (RM) 12415 3 Deutsche 17,25% milliards Bank, BNP de francs Paribas BNP, Crédit Agricole Indosuez, 19 1,9 Mds 19/07/00 1.102.000.000 21 euros 9,2% Lazard, euros F Morgan Stanley Dean Witter 16/03/00 41 12.637.271 53,29 Capitalisation (en francs) au 18/12/00 3,6 milliards 7 milliards Nouveau marché Artprice Base de données Site éditorial pour les femmes Courtier en Bourse Direct ligne Business Prestataire Interactif Aufeminin Nouveau Marché 7478 21/01/00 19,06 6.250.000 Nouveau Marché 7678 19/07/00 7,6 euros 7.905.579 7425 10/11/99 13,5** 400.000 7605 28/06/00 9 euros 9.338.212 - 19,5 euros Nouveau Marché Nouveau Marché 55 Europe 20,13% 144 MF finance & industrie 8,7 euros 33% 150 MF CCF Charterhouse Natexis Pinatton ABN-Amro 9 euros 31,97% 176 MF Rotschild 26,7 25% 90 MF Consors Courtier en ligne Nouveau Marché 7247 05/04/00 (Transfert Marché Libre) Cryo Networks Jeux en ligne Nouveau Marché 7758 25/09/00 Nouveau Marché 7659 28/06/00 9 euros 24.767.350 Nouveau Marché 7629 20/07/00 6,2 euros 7.628.044 6,35 euros 13,4% 41,3 M F ING Barings Ferri Marché Libre 7885 15/12/00 11,9 euros 2.745.185 11,9 euros 7,7% KBC Securities 7505 22/03/00 15,6 56.616.000 17,3 23% 6588 07/10/98 16,77* 12.181.475 16,617 7960 09/06/00 23.994.925 8,25 euros Bornes d'accès à internet Conseils et Cybersearch recrutement en ligne Web agency Ebizcuss.com spécialisée Mobile Courtier en Fimatex ligne Cyberdeck Fi System Prestataire Gameloft Jeux en ligne Nouveau Marché Nouveau Marché Nouveau Marché 7,8 euros - 7 906 750 - - - BNP Paribas 200 MF ,Cazenove & Coe 295,2 Société 7 euros 20,2% MF Générale 19,9 euros 20% 15 MF 400 millions 250 millions 260 millions 260 millions 820 millions 550 millions 340 millions 300 millions 214 millions de francs 1,2 Mds SG Securities 2,5 milliards 27,96 48,3 MF Oddo % ING Barings 12% 135 MF Ferri CCF Charterhouse 1,2 milliards 900 millions 5 Himalaya Prestataire Nouveau Marché 7529 28/03/00 28 euros 5.330.000 31 euros Hi-Media Régie publicitaire Nouveau Marché 7598 07/06/00 11 euros 12.375.000 10,2 euros 16,6% 151 MF Integra Prestataire Nouveau Marché 7293 02/06/99 20 6.191.236 26,5 32,8 % 210 MF Kazibao Site éditorial pour les 4-16 ans Nouveau Marché 7649 29/06/00 6,1 euros 8 395 204 Medcost Prestataire Nouveau secteur médical Marché 7615 13/06/00 7,9 euros 3.998.371 7,84 euros Micropole Web agency spécialisée Mobile Nouveau Marché 7757 21/09/00 9,1 euros 6.550.000 13,06 euros 28,9% 101 MF Multimania Site de communautés Nouveau Marché 7515 09/03/00 36 7.705.344 103 20,25% 350 MF NetValue Mesure d'audience sur internet Nouveau Marché 7485 26/01/00 22 8.578.150 75 Selftrade Courtier en ligne Nouveau Marché 7505 17/03/00 11,75 50.000.000 14,6 SQLI Prestataire Nouveau Marché 7547 21/07/00 Courtier en ligne Courtier en Etna Finance ligne Marché libre Marché Libre 7706 25/07/00 7,25 euros 26/11/99 4,4 Kahiloa Web agency Marché Libre 7846 15/12/00 14,89 euros Newsinvest Plateforme Informations financières Marché libre 7656 27/06/00 3,16 euros 6.750.154 Perenoel.fr Cybermarché 7525 06/04/00 17,80 2.355.598 6,75 euros 32% 6,3 euros 27,4% 20% 28% 300 MF 92 MF 42 MF 346 MF 22,3% 820 MF 13.000.000 7,5 euros 15% 80 MF Robertson & Stephens International - Crédit agricole Indosuez JP Morgan Securities Ltd et Crédit Agricole Indosuez Lazard BA Robertson & Stephens Oddo CCF Charterhouse et Bryan garnier Crédit du Nord Gilbert Dupont Oddo Pinatton Corporate Merryl Lynch, BNP Paribas BNP - ABN Amro Rothschild Crédit Suisse First Boston ABN Amro Rothschild Crédit Agricole Indosuez et Crédit Lyonnais 530 millions 260 millions 2,2 milliards 66 millions 140 millions 340 millions 460 millions 260 millions 700 millions 400 millions Marché libre 3Atrade.com Marché libre 3.300.000 11 euros 9,09% - Meeschaert Rousselle 180 millions - Europe Finance et Industrie (EFI) 96 millions de francs - - 45 millions - Gilbert Dupont SNC 55 millions 11,40% 983.000 14,87 euros 5% 3,2 euros 7,1% - 4% * La valeur nominale de l'action Fisystem a été divisée par 5 depuis l'introduction ** La valeur nominale de l'action Bourse Direct a été divisée par 2 depuis l'introduction I-2- Théories Une évolution des théories économiques Pourquoi parler de nouvelle économie ? En quoi l’économie est - elle nouvelle ? 6 La nouvelle économie telle que nous la désignions n’a finalement rien de nouveau en ce qui concerne sa théorie qui a été élaboré essentiellement au cours des années 30 par Alfred Marschall (Principes of economics). En revanche ce que l’on peut designer de nouveau c’est une forme de généralisation dans les économies concrètes des phénomènes économiques qui avaient été décrits. Ainsi la nouvelle économie serait tout simplement la généralisation de ces phénomènes qui étaient considérés comme des exceptions, des anomalies ou des inventions de théoriciens sûrement trop avant gardistes pour leur époque. Repenser les théories économiques ? La nouvelle économie a fait naître un phénomène nouveau : la coexistence entre un faible taux de chômage et un taux d’inflation très bas lui aussi. Jusqu’il y a encore deux ou trois ans, l’ensemble du monde académique estimait qu’un taux de chômage inférieur à 5,5%-6% entraînerait mécaniquement un regain de l’inflation. Les travaux de Philips et ceux de Friedman montrent qu’il existe un lien fixe entre taux de chômage et taux d’inflation. Pour chaque société donnée, il existe un taux de chômage naturel qui a été fixé entre 5,5 et 6%. Hors, aujourd’hui aux Etats-Unis, on se rend compte que le taux de chômage réel est de 4,2%, il est en dessous du taux de chômage naturel et pourtant le taux d’inflation n’a pas augmenté. Faut-il alors invoquer une série de facteurs exogènes comme la baisse du prix du pétrole, la hausse persistante du dollar et la peur toujours rémanente des salariés américains de perdre leur emploi, pour expliquer l’inflation très faible ? Les tenants de la nouvelle économie préfèrent recourir à un second argument, celui des technologies de l’information. La généralisation de l’informatique et Internet auraient selon eux, commencé de faire basculer le vieux monde de la production industrielle dans un espace nouveau. Le travail intellectuel a pris le pas sur le travail manuel, où l’innovation serait plus importante que la production de masse, et où les nouveaux concepts donneraient à ceux qui les élaborent un avantage compétitif décisif sur ceux qui manquent d’imagination. Vers un nouveau cycle économique grâce à Internet ? John Chambers, le PDG de Cisco, l’une des entreprises vedettes de la nouvelle économie qui a fabriqué une grande partie des équipements du réseau Internet, estime qu’Internet permet d’augmenter la productivité de 6,7% voire 8% par an, et l’économie peut donc progresser à de tels rythmes, sans risques inflationnistes. A quoi est du ce miracle d’Internet ? Pour les partisans, le réseau mondial permet de mettre en relation de manière instantanée et quasi gratuite l’ensemble des acteurs économiques de la planète. Conséquence, les entreprises peuvent s’adresser aux fournisseurs du monde entier pour réduire leurs coûts d’approvisionnement et trouver des clients sur l’ensemble du globe. Ce nouvel environnement a de multiples conséquences. En premier lieu, il permet de réduire considérablement les coûts. Internet a permis de supprimer des milliers d’emplois improductifs en favorisant les relations avec les fournisseurs et les clients. Selon M. Chambers, dans 10 ans, toute entreprise qui n’aura pas basculé complètement dans le réseau sera morte. Les entreprises traditionnelles survivront elles aussi, à la condition qu’elles se réinventent complètement dans leur manière de s’organiser et de fabriquer. Cette nouvelle manière de fonctionner procure des opportunités énormes pour les start-up. Ces nouvelles entreprises peuvent se lancer, dès leur création à l’assaut du marché mondial. La 7 librairie en ligne Amazon et le portail Yahoo ! ont ainsi réussi à se faire connaître en quelques années sur l’ensemble de la planète, là où il a fallu des décennies pour des marques comme Coca-Cola ou Bic. Pour répondre à la demande des millions d’Internautes dont les rangs s’élargissent chaque jour, des milliers d’entreprises ont été crées pour développer des sites et concevoir de nouveaux services. De manière peut-être encore plus fondamentale, la révolution Internet affecte profondément les relations entre les hommes. Le courrier électronique, les forums d’échange ont permis la création de communautés virtuelles qui redessinent le monde de demain et contribuent à la mise au point de technologies révolutionnaires. 8 II. HISTORIQUE La révolution technologique des années 70 A la fin des années 70 les entreprises entrent dans une phase de révolution du travail, d’accentuation de la concurrence, de l’élargissement de l’économie et des marchés à l’ensemble du monde : informatisation, compétition, globalisation. (Organes politiques: GATT...) Les techniques se transforment et la détente de la nouvelle économie est amorcée par la crise qui marqua la fin de l’étape de la consommation en 1973. Lorsque les fournisseurs des pays consommateurs voyant ces derniers peu soucieux de faire des économies d’énergie se mirent à faire payer une taxe sur le pétrole. Ce qui provoque un bouleversement complet du système, provoqua la redistribution des moyens financiers et contraignit les pays riches à mettre plus de rigueur dans leur économie pour tenter d’échapper à l’inflation. La production de masse fit alors place à la production diversifiée, de qualité. La généralisation de l’usage de l’informatique va aussi permettre l’éclosion de la nouvelle économie. Dès les années 70 les entreprises s’équipent d’ordinateurs pour renforcer la centralisation. Puis le ‘’micro’’ permit de diffuser l’information vers les travailleurs qui sont alors plus aptes à prendre des décisions relatives à leur activité. Les progrès des télécommunications et des transports et la chute de leurs prix favorisent la mondialisation des mouvements financiers, facilitent la multiplication des centres de production, contribuent au développement de nouveaux marchés. La nouvelle économie a aussi des conséquences sur l’emploi. La délocalisation consiste à déplacer vers des pays à faibles salaires des productions où le coût de main d’œuvre a une part importante. Cette délocalisation permet d’un côté la survie des firmes mais d’un autre côté les capitaux cherchant des investissements prometteurs s’orientent vers les économies émergentes et s’intéressent aux économies établies. La nouvelle économie comme à chaque grand tournant de l’évolution technique pose des problèmes au niveau de l’emploi. Il ne faut pas considérer les technologies de l’information et de la communication (TIC) comme une simple évolution technique, mais plutôt comme une révolution technologique. Les changements causés par la Nouvelle économie Toute révolution technologique comporte des changements structurels importants et les technologies de l’information ont de ce fait bouleverser les conditions de la concurrence. Elles permettent en effet aux acheteurs de comparer et de changer de réseau de distribution ; elles permettent aussi une meilleure adéquation entre l’offre et la demande (possibilité d’enchères permanentes...) et tendent à accroître la concurrence; elles facilitent également l’internationalisation des échanges. La nouvelle économie, en fait, c’est plus de tout : plus de finance et de Bourse, de concurrence, d’équipes de croissance, de service, et moins de temps et de distance. Les entreprises de la nouvelle économie connaissent en effet des croissances de 200%, 300% voire 600% par an. Dès qu’un produit apparaît, les concurrents arrivent au bout de 2 ou 3 mois. Plus de finance et de Bourse : les entreprises peuvent lever de capitaux en Bourse, et utiliser ces fonds pour faire des acquisitions. 9 C’est aussi un accélérateur de croissance : on peut multiplier plus rapidement son chiffre d’affaires et sa présence sur les marchés. Plus de service : si on vend des abonnements, on doit satisfaire les abonnés et le modèle économique peut donc être remis en cause chaque mois. Plus d’équipe : les salariés représentent un vrai « team ». Ils sont associés à la richesse de l’entreprise avec les stock-options. C’est cette équipe qui développe l’entreprise, et plus seulement les dirigeants. Internet est un booster, un accélérateur. La nouvelle économie existait avant son arrivée, mais Internet permet désormais à des jeunes start-up d’être performantes très rapidement, à l’échelle mondiale. 10 III. LA NOUVELLE ECONOMIE ET LES DIFFERENTS MARCHES CONCERNES III- 1- La nouvelle économie aujourd’hui Depuis le second semestre 1999 l’économie mondiale a connu de belles évolutions : comme les rebonds asiatiques ; la reprise en Amérique Latine; la croissance européenne rigoureuse et la vigueur de l’économie américaine. L’année 2000 est symbole d’une exceptionnelle croissance mondiale. Le monde industriel connaît une croissance incroyable avec la poursuite de l’expansion américaine et le nouveau souffle européen qui pourrait amener le taux moyen des pays de l’Union à moins de 8% en cette fin d’année 2001. Les perspectives de croissances dépendent essentiellement de l’évolution de l’économie américaine. L’accélération du progrès technique aurait augmenté le taux de croissance supérieur sans risque inflationniste. Cette diffusion du progrès technique à travers le monde pourrait faire entrer l’économie mondiale dans ‘’une ère nouvelle’’. A ce titre on peut aussi citer l’implication des économies émergentes qui développent les technologies de l’information. Une mutation profonde qui fait craindre à certains que la « fracture numérique » ne vienne s’ajouter aux disparités sociales relevées au Nord comme au Sud, compte tenu des inégalités évidentes qui demeurent entre 158 millions d’Américains et de Canadiens qui ont accès au Web et les quelque 3 millions seulement d’Africains branchés sur le réseau, entre les foyers urbains à revenu élevé et à diplôme universitaire et les ménages à revenu modeste, souvent handicapés par un moindre bagage éducatif et par un parcours professionnel moins réussi. III- 2- Les différents marchés : Les Etats-Unis : Ce sont les Etats-Unis qui sont chef de file de la nouvelle économie. Ils bénéficient d’une demande intérieure privée importante (taux de croissance de +4% entre mi-1999 et mi-2000). Une demande qui est stimulée par les effets de richesse et les créations d’emploi. Les effets de richesse dont dus à l’envolée dans le secteur des nouvelles technologies des cours de la bourse, quant à la création d’emploi elle permet au chômage US d’être au plus bas depuis 30 ans (à environs 4%). l’Union Européenne après avoir subit la crise financière de 1993, a profité de l’environnement mondial favorable et d’un taux de change compétitif pour accélérer régulièrement sa croissance. L’Europe : L’Europe aussi bénéficie de l’environnement mondial cependant elle reste toujours en retard face aux USA. Retard qu’elle tente de rattraper. En effet la diffusion et l’exploitation des progrès techniques réalisés dans les secteurs de la nouvelle économie génèrent des gains de productivité, donc de croissance et d’emploi dans les économies industrialisées. Si 11 l’Europe veut combler son écart avec les Etats-Unis il lui faudra prendre les précautions nécessaires: Les Européens sont conscients de la nécessité de créer un environnement favorable à la nouvelle économie. A cet effet le Sommet européen à Lisbonne le 24 Mars 2000 au cours duquel les chefs d’Etats européens déclarent faire de l’Europe ‘’l’économie la plus compétitive du monde dans les dix prochaines années’’. Pour atteindre cet objectif il faudrait que le taux de croissance moyen soit de 3%, que le chômage diminue, un développement de la société de l’information et la modernisation du modèle social européen. L’avantage dont les Européens bénéficient est de l’expérience américaine, ce qui peut leur permettre d’analyser le nouvel environnement qui s’est créé dont on peut retenir 3 éléments principaux : -le financement des nouvelles technologies -le développement de la recherche - la flexibilité des marchés des biens et du travail. - La libéralisation des marchés de capitaux et l’existence du capital risque ont permis un accès aisé au financement, ce qui est considéré comme un facteur déterminant du développement de la nouvelle économie. Cette libéralisation semble encore trop timide en Europe bien que l’arrivée de l’euro est un grand pas vers un marché européen des capitaux intégrés et flexibles. - L’innovation et la recherche jouent un rôle déterminant. A ce niveau les Européens sont aussi performants que les Etats-Unis. Cependant on peut noter 3 différences: - Les Etats-Unis dominent dans le haut de la distribution des qualifications. - La recherche publique se traduit en Europe par moins d’application privée. - La science européenne n’est pas unifiée (mobilité et coopération réduites). Des mesures sont cependant prises afin de remédier à ces problèmes, ainsi l’OCDE insiste sur le besoin de développer une coopération européenne pour ce qui concerne la recherche (brevet unique) et la diffusion de la recherche. Les économies émergentes : Même les économies émergentes des pays en développement profitent de l’environnement mondial favorable. Ainsi après avoir vécu la crise dévastatrice de 1997-1998, l’Asie Orientale a été la région enregistrant les taux de croissances les plus élevés (6%). D’autres pays également touchés par la crise ont eu le même développement, tels que la Corée du Sud (croissance de 10%), l’Indonésie malgré ses déboires politiques la Chine s’est stabilisée après avoir connu un ralentissement régulier depuis le début des années 90’; l’Amérique latine où la dépréciation du réal n’a eu que des effets transitoires sur les marchés financiers d’Amérique latine, d’ailleurs le Brésil a connu une reprise de son activité; la Russie malgré ses problèmes structurels a augmenté son PIB de plus de 3% en 1999; les pays d ‘Europe centrales et orientales ont connu des évolutions contrastées. Ces pays restent cependant vulnérables vu leurs besoins en financement externe et face aux fluctuations des marchés financiers mondiaux et face à l’évolution des taux d’intérêts américain. La politique monétaire devenant plus restrictive les marchés financiers mondiaux deviennent plus volatils. III- 3- La nouvelle économie et les politiques économiques. 12 La Nouvelle économie a une influence non seulement sur les marchés financiers mais également sur la politique économique des différents secteurs industriels. L’émergence des nouveaux secteurs technologiques a provoqué un afflux important de capitaux dans les valeurs de la nouvelle économie. L’émergence de ces nouveaux secteurs d’activité a entraîné la restructuration des entreprises, donnant suite à des fusions-acquisitions. Ce qui a participé à l’envolée des marchés d’actions sur toutes les places financières internationales. On peut noter que les différents types d’actions ont été touché différemment par les envolées boursières. En effet se sont surtout les cours des valeurs technologiques (correspondant à la nouvelle économie) qui ont augmenté au détriment des valeurs de ‘’l’ancienne économie’’(correspondant aux secteurs industriels traditionnels). Depuis le début 2000, les indices boursiers ont connu un arrêt de leur progression et une hausse de leur volatilité. Ce regain de volatilité étant du aux incertitudes entourant les décisions des autorités monétaires américaines et européennes. Ce sont les valeurs technologiques qui ont enregistré les évolutions les plus marquées, surtout depuis le mois d’avril 2000 (l’indice américain NASDAQ perdant plus du tiers de sa valeur en une semaine.). Cependant au deuxième trimestre 2000 on a constaté un ralentissement de la croissance, une hausse de l’inflation et un arrêt de l’exubérance des marchés financiers. La nouvelle économie suit des rythmes très irréguliers. En 1999, la « bulle technologique » qui s’était formée sur l’ensemble des places financières et notamment au Nasdaq était au plus fort, les actions des entreprises technologiques valaient jusqu’à 5000 fois les bénéfices estimés pour l’année suivante. En 2000, suite à deux « technochocs » qui ont fortement secoué l’arbre boursier du high-tech, le Nasdaq avait perdu en quelques mois la moitié de sa valeur (soit 3000 milliards de dollars) par rapport à ses plus hauts niveaux de l’année, et l’on ne comptait plus le nombre de jeunes pousses qui, dans le même temps ont fait faillite. Ce nettoyage n’a pas épargné les « nouveaux marchés » européens des valeurs Internet, pas plus que leurs homologues asiatiques. Sur le terrain, et surtout sur le sol américain, nombre de dot.com dégraissent à tour de bras. A propos de l’économie américaine : Si on a constaté une croissance ininterrompue pendant 10 ans : on parle d’âge d’or, de croissance sans fin soutenue par le développement des nouvelles technologies. Depuis fin 2000 on note un ralentissement de la consommation des ménages et de la bourse. Les politiques budgétaires et monétaires sont activées par le bais de baisse des taux d’intérêts et l’ allègement des impôts afin de garantir la pérennité du modèle américain. Un accident conjoncturel est-il en vu ? Allan Greenspan Président de la Réserve fédérale se veut optimiste mais face mais le cycle de croissance est long et atypique semble toucher à sa fin et la récession engagée. Les théories divergent quant à l’avenir: Gail Foster (économiste en Chef du conférence Board) reste optimiste. Il confirme que la croissance sera maintenue à 4% en 2001. Il interprète la baisse de 2000 comme étant l’épiphénomène d’une croissance qui vieillit. Selon lui l’Euro est un excellent indicateur de la bonne santé de l’économie US. Compte tenu de ses prévisions de rebonds, l’entreprise devrait rénover avec un cours affaiblis au fur à mesure de la restauration de la confiance acteurs économiques. Récession courte en 2001. 13 Greenspan (déclaration au 25/ 01/2001) prévoit un taux de croissance proche de l’offre. Ces propositions n’ont alarmé personne car il donne l’assurance pour les marchés financiers que les ‘’pressions inflationnistes sont très biens maîtrisées’’. Malgré la baisse des salaires des taux directs, le Nasdaq affiche hausse de 16% depuis début de l’année et Dow Jones en hausse. Greenspan donne son accord à Bush pour baisser des impôts. Même si il doute de la validité des allègements fiscaux comme moyens d’enrayer une récession naissante. Bush peut se présenter au congrès son programme de réduction des impôts d’un montant total de 1,6 billion de dollars sur 10 ans. De même le Président de la Fed refuse à parler de ‘’récession’’ dont la définition correspond selon lui à un PIB négatif des 2 trimestres d’affilés. Cette éventualité est pour lui de ‘’faible probabilité’’ surtout que le tissu de la confiance des consommateurs n’a pas été entamé. On constate des signes d’améliorations selon certains experts ( chiffres de l’emploi stables 4% chômage). La bourse se porte mieux. Les fondamentaux de l’économie US restent sains. Greenspan reste cependant prudent car les initiatives fiscales sont difficiles à mettre en œuvre dans les délais dans lesquels les récessions avaient commencé et s’étaient achevées. 14 IV. LA NOUVELLE ECONOMIE FACE A L’ANCIENNE L’ arrivée d’Internet a provoqué une nouvelle révolution industrielle et, comme lors des précédentes, des entreprises et même des métiers sont menacés par l’adaptation nécessaire au marché et aux nouvelles donnes économiques. L’enthousiasme et la confiance inspirés par les réussites de la nouvelle économie masquent trop souvent le côté plus sombre des adaptations demandées aux hommes et aux entreprises. IV-1 La fin des intermédiaires est-elle en vue ? Le cabinet Forrester prévoit que les achats par internet des consommateurs ne représenteront que 7% du commerce de détail en Europe en 2005. Donc le commerce électronique ne chassera pas le commerce tout court. Mais le e-commerce viendra éroder sensiblement les marges des vendeurs traditionnels dans plusieurs secteurs d’activité. Il peut signifier la fin de certains revendeurs ou d’intermédiaires qui seront court-circuités par le web. Pour Renaud de Barbuat, vice-président du cabinet de conseil AT Kearney, « plus le produit est immatériel, plus la révolution Internet est forte ». A titre d’exemple, Cisco réalise 90% de ses ventes sur le net. Dell suit le même chemin avec 45% et Oracle prévoit de faire passer 80% de ses ventes en direct cette année. Les vendeurs et revendeurs informatiques ne peuvent que le déplorer : beaucoup devront évoluer pour occuper des jobs d’assistance (information, dépannage, conseil). Pourquoi les réseaux d’intermédiaires sont-ils appelés à s’effondrer ou au moins à souffrir? Phil Evans, consultant américain du BCG explique ceci : « Le web, comme les précédentes révolutions techniques, désintègre la chaîne de valeur des métiers. Prenez l’exemple d’un concessionnaire auto. Quelle est sa valeur ajoutée ? Il stocke, informe, revend, finance, assure et il permet au client d’essayer des voitures. » A part la dernière, chacune de ses fonctions peut être effectuée plus efficacement et à moindre coût sur le web sans intermédiaire physique. Dans d’autres secteurs, les entreprises qui réussissent sont celles qui éliminent les intermédiaires inutiles et donc réduisent le prix de vente final du produit. « Le vainqueur, prévoit Eric Archambeau, general partner de Benchmark Capital , sera celui qui réalisera des économies drastiques dans la chaîne d’approvisionnement. » Ainsi, les métiers de revendeurs ou de grossistes se retrouvent concurrencés par leurs propre fournisseurs. Avec le web, la distribution ne sera plus jamais ce qu’elle fut. Les règles du jeu changent très vite. Nous allons voir quelques exemples de secteurs d’activités. L’automobile Comme on l’a vu, le concessionnaire automobile n’apporte relativement que peu de valeur ajoutée par rapport à ce que l’on peut trouver sur le web. Mais les consommateurs feront encore longtemps le tour des concessions pour choisir et ne seront pas tous prêts à acheter leur voiture en ligne. En revanche, ils se serviront du réseau pour consulter les offres et négocier les prix afin d’échapper à la pression des vendeurs, à leurs arguments de vente. Tout cela se fera au détriment de leur valeur ajouté commerciale. Autre point noir pour l ‘avenir des concessionnaires , la libéralisation du marché de la vente de véhicules neufs exigée par l’Union Européenne en 2002. Des start-up vendront directement 15 aux clients, de même que des entreprises étrangères à l’automobile qui ont créé des sites à côté du réseau traditionnel. Aux Etats-Unis, le cabinet JD Power & associates a établi, début 2000, que le recours au web fait économiser en moyenne 490 dollars sur le prix d’un véhicule. Parallèlement, une centaine de concessionnaires (sur 22400) disparaissent chaque année, victimes des concentrations et des réductions des coûts de la part des constructeurs. La grande distribution Tous les secteurs de la distribution ne sont pas concernés au même titre par la révolution Internet. « Ceux qui vendent de l’électroménager, des chaussures ou des articles de bricolage, pour lesquels le client a besoin d’être rassuré et de voir le produit, sont moins menacés par l’e-commerce. », commente Cédric Ducrocq, directeur du cabinet de conseil DiaMart. Le challenge pour les plus exposés consiste à faire coexister un réseau de distribution classique avec un site marchand, sans que l’un ne cannibalise l’autre. De nombreuses sociétés vivent actuellement ce dilemme, particulièrement épineux pour les groupements d’indépendants ou de franchisés qui voient dans Internet un réseau concurrent. L’existence du site doit se justifier par l’apport d’un service aux consommateurs, mais aussi aux magasins. Go Sport a ainsi choisi de ne mettre en ligne que 350 articles sélectionnés selon leur « valeur d’encombrement » autrement dit difficiles à emporter, comme les appareils de musculation. Face à l’offensive des Start-ups du web, les entreprises « bricks & mortars » opposaient les services et les conseils disponibles dans les magasins traditionnels. Mais Internet provoque un autre choc dans les magasins : la remise en question du rôle et de l’utilité du vendeur. Fiche explicative sur la consommation d’électricité d’un lave-linge, leçons pour bien tailler son rosier, conseils d’utilisation d’un téléphone-répondeur, calculette pour compter les pots de peintures nécessaires pour repeindre la salle de bains : les rubriques de conseil et d’information se multiplient. Qu’est-ce qui empêche maintenant d’acheter un PC directement chez Packard Bell plutôt que d’aller chez un revendeur ? D’autant que beaucoup de clients sont séduits par la perspective d’échapper à la pression du vendeur. Dans le domaine alimentaire, les études les plus optimistes ne voient pas le commerce électronique dépasser les 15% de parts de marché dans les trois ans à venir. Et les consommateurs ont surtout envie d’acheter en ligne les produits lourds ou volumineux ( packs de bouteilles, couches, etc…) sur lesquels, justement, les coûts logistiques sont importants et les marges faibles. Il est difficile pour les distributeurs en ligne de proposer les mêmes prix bas que les hypermarchés et amortir les coûts de la livraison à domicile qui se montent à 70 francs par livraison au moins. En France, les entreprises qui se sont lancées dans l’aventure éprouvent les plus grandes difficultés et doivent s’allier aux géants de la distribution. Ainsi Télémarket s’est rapproché de Casino et de Monoprix-Prisunic. Carrefour, numéro un français, déploie ooshop.fr qui est limité à Paris, aux Yvelines et aux Hauts-de-Seine avec une livraison facturée 79 francs. Pour l’instant, seul houra.fr, filiale de Cora, livre sur l’ensemble du territoire moyennant un taux de cannibalisation de ses magasins de seulement 5%. 16 Le tourisme Les agences de voyage ont en France une longue expérience de la vente par minitel depuis le milieu des années 80. Une centaines de sites web français propose aujourd’hui la réservation en ligne sous des formes diverses. Mais la plupart n’ont qu’une audience confidentielle. Aux Etats-Unis, l’institut bancaire Bear Stearns prévoit que 800 sites de voyages en ligne sur les 1000 qui existent actuellement, auront disparu d’ici 5 ans. Les producteurs de voyage espèrent trouver avec Internet un nouveau canal de distribution moins coûteux que les agences qui touchent de 7% à 12% de commission sur les vols secs et plus de 15% pour un forfait touristique. Le problème consiste évidemment à ne pas froisser leurs partenaires qui génèrent encore la quasi-totalité de leurs ventes. Dés lors, des opérateurs comme Fram et Jet Tours se contentent de sites plaquettes. Autre problème pour un tourisme développé sur Internet, l’offre des producteurs se limite à leurs propres catalogues. Pour proposer un éventail complet, certains envisagent la création de portails touristiques regroupant la production de plusieurs concurrents. Air France, par exemple, a annoncé le lancement d’un site commun à 10 transporteurs européens, avec la ferme intention de contourner les distributeurs. L’avenir s’assombrit pour les petites agences de voyage. En 2009, on estime que 50% des billets d’avion des compagnies régulières et 90% de ceux des charters s’écouleront sur Internet. Cela représentera une perte de 2 milliards de francs de commissions en France. L’assurance Comme les agences de voyage, les courtiers en assurance seront court-circuités par l’ecommerce. Quand l’Internet deviendra un canal de distribution primordial pour les assureurs, les courtiers traditionnels risquent d’être les grands perdants. En effet, la valeur ajoutée de ces professionnels, commerçants indépendants, repose sur leur capacité à comparer les prestations des compagnies. Or, sur le web, le client est à même de décrire sa situation et de mettre les compagnies en concurrence sans rémunérer d’intermédiaire. Mais les start-up qui se sont lancées dans l’assurance par le web, comme assurdiscount.com, souffrent de la défiance des internautes qui préfèrent la sécurité des marques connues, notamment pour le paiement. Les « brick & mortars » ont donc encore de beaux jours devant elles. Mais elles devront aussi proposer leurs services en ligne. L’immobilier Le mot immobilier est déjà une des principales requêtes des internautes sur les moteurs de recherche. Le gain de temps offert parle web est ce qui motive les internautes. Auparavant, il fallait en moyenne 2 mois et demi pour trouver la maison ou l’appartement souhaité. Sur la Toile, ce délai peut être ramené à moins d’un mois grâce notamment aux visites virtuelles. En attendant la vidéo, encore inadaptée à la lenteur du réseau, la vision dite immersive est en passe de devenir un standard. Elle permet à l’internaute d’observer chaque pièce d’un appartement ou d’une maison comme s’il se trouvait en son centre et de faire pivoter son regard (cf immostreet.com). De plus, certains sites offriront un large éventail de services tels que déménagement, crédits immobiliers…(cf ezClose.com) ; ce que ne proposent pas les agences traditionnelles. 17 Dés lors, les petites agences de quartier continueront de vivoter grâce à leurs faibles coûts de fonctionnement. En revanche les autres, qui représentent les deux tiers du marché, peuvent commencer à s’inquiéter et à se préparer à faire des concessions sur les commissions. Internet impose aux acteurs de la distribution des adaptations radicales quand il ne s’agit pas tout simplement de les faire disparaître. De ce point de vue, les corps de métiers qui se contentent d’une simple activité de redistribution sont, on peut le craindre, condamnés dans le meilleur des cas à survivre. La parade à cette évolution qui semble inéluctable, pourrait résider dans la recherche de nouveaux services inadaptés aux webs ou alors à la conjugaison de services online et offline. De plus, la disparition de certains métiers laisse la place à de nouveaux métiers. C’est le propre de chaque révolution industrielle. IV-2 La diffusion de produits gratuits sur le web A ses débuts, le web était considéré comme un vecteur associatif où la gratuité était de mise. Ce temps du web associatif est aujourd’hui largement révolu mais certains services persistent à n’être acceptés par les internautes que dans la gratuité. Le réseau favorise également le court-circuitage des éditeurs de produits intellectuels et de produits culturels. Le principal problème vient de ce fait de la question de la rémunération des auteurs. La musique face aux MP3. Le MP3 est une technologie allemande, un format utilisé pour télécharger de la musique depuis Internet. D’innombrables sites permettent le téléchargement gratuit de chansons ou de musiques. De ce fait, ni les artistes, ni les maisons de disques, ne touchent de royalties sur ces diffusions. Le phénomène a pris une telle ampleur que les majors (Universal, Sony, Warner-EMI et BMG) ont intenté un procès au plus emblématique de ces sites : Napster.com. Napster propose l’échange gratuit de fichiers musicaux. Son succès a été fulgurant. Tous les observateurs disent qu’il y a un avant et un après Napster. L’industrie de la musique doit renouveler complètement sa façon de gagner de l’argent. Elle ne pourra plus se rémunérer exclusivement sur la vente de disques. Elle devra se payer sur d’autres services (billets de spectacles, produits dérivés…). Les sites comme Napster mais aussi mp3.com ou francemp3.com remettent en question la rémunération des auteurs et à ce titre peuvent même menacer la création artistique comme le clame haut et fort l’industrie de la musique. Cependant, des artistes font le pari du MP3 ou cherchent à s’en accommoder. Le groupe Louise Attaque proposait, en accord avec sa maison de disques, le téléchargement gratuit de trois de ses chansons sur le site louiseattaque.com. Beck et les Beastie Boys ont adopté la même stratégie, leurs ventes d’albums n’en souffrent pas. L’édition Outre le développement extrêmement rapide de la vente de livres sur le web par des sites comme amazon.com, chapitre.com ou fnac.com, le danger pour le commerce traditionnel de livres vient du téléchargement possible d’œuvres entières par Internet. 18 Précurseur, Stephen King a publié en exclusivité le 15 mars 2000 sa dernière nouvelle d’horreur, « Riding the bullet ». Pour 2,50 dollars, l’internaute pouvait télécharger le récit et le lire sur son ordinateur, de son Palm Pilot ou de son livre électronique. 500000 cybermanuscrits ont été écoulés en 48 heures dans le monde entier. L’intérêt financier est évident pour l’auteur et son éditeur : ils n’ont pas eu besoin de partager avec les imprimeurs, les grossistes et les libraires. Les livres virtuels coûtent de 20 à 60% moins cher que les livres réels. Encore une fois, ce sont les intermédiaires qui pâtissent de l’émergence du web commercial. La presse « S’ils ne s’adaptent pas, tous les quotidiens auront disparu d’ici à 2003 ». Andrew Grove, ex patron d’Intel, avril 1999. Les quotidiens sont doublement menacés par le web. D’abord, les petites annonces, qui constituent en moyenne 15% de leurs recettes (et jusqu’à 40% pour certains), ont fui, pour moitié déjà, vers des sites spécialisés gratuits. Ensuite, Internet fournit de l’information en temps réel et en continu, tandis que le quotidien s’arrête quand l’impression démarre. La concurrence prend maintenant la forme de journaux étrangers directement consultables en ligne, ainsi que les diffuseurs d’information gratuite tels que Yahoo! ou Net2One. Ces derniers sont capables notamment grâce à la technique du push de créer des journaux personnalisés pour chaque internaute. Le net possède aussi ses quotidiens à thèmes, comme le Journal du Net ou encore CNet. Internet a aussi la particularité de bouleverser la notion de périodicité : rien n’empêche de consulter des articles anciens. Le danger n’est pas certain pour les éditions papier. Il n’y a aucun cas prouvé de cannibalisme entre le web et le papier. On observe cependant que les magazines sont moins touchés que les quotidiens par la concurrence des éditions électroniques, puisqu’ils ont vocation non pas d’informer en continu, mais d’aider à faire le tri dans la masse d’information et à en comprendre le plus important. Les journaux qui n’apporteront pas une véritable plus-value en termes d’approfondissement ou de plaisir risquent de voir leur diffusion s’éroder. A titre d’exemple, une centaine d’internautes préfèrent payer 5 francs pour recevoir Le Monde en version PDF que gratuitement en texte brut. Comme on le voit, le web bouleverse la distribution de produits culturels ou intellectuels. Il offre la possibilité d’une diffusion illimitée et sans contrôle d’œuvres immatérielles sans garantir une rémunération adéquate des auteurs. L’apparition des graveurs menace la vente de disques audios et de logiciels informatiques. Les différentes industries concernées devront trouver de nouvelles façons de se rémunérer. 19 V. LES GRANDS SUCCES ET LES GRANDS FLOPS Il est certain que le décollage plus que tonitruant d’Internet partout dans le monde au milieu des années 90 a tout d’abord entraîné une euphorie due aux succès et aux perspectives offertes par ce nouveau moyen de communication. Puis, il y a eu un premier krach de la nouvelle économie ainsi que des faillites très médiatisées, ce qui a influencé beaucoup d’investisseurs à réviser leur jugement et à être maintenant beaucoup plus prudents. Il est vrai que le krach est aujourd’hui passé mais on peut se demander quelles entreprises de l’Internet laisseront de réelles traces dans l’histoire et l’économie, et si un premier bilan ne laisse pas apparaître autant de leçons de réussite que d’échecs retentissants. C’est pourquoi nous allons étudier au travers de différents secteurs ainsi que d’exemples précis ce qui explique ces différentes évolutions. V.1. Différentes orientations, secteur par secteur Portails Si Yahoo! est vainqueur toute catégorie, il doit aujourd’hui faire face à la concurrence des sites de grands médias traditionnels (type e-TF1) et c’est là qu’une nouvelle difficulté apparaît avec le fait qu’il ne possède pas de contenu et pourrait donc être amené à se marier avec un grand de la communication (Disney pourrait être ce dernier). Moins bien lotis que les grands portails horizontaux type Yahoo!, les portails verticaux (spécialisés dans un seul domaine) jouissent toujours d’une audience plus faible que la partie du portail horizontal spécialisée sur le même centre d’intérêt. Fournisseurs d’accès Internet (FAI) Ceux qui font la course en tête (Tiscali, Wanadoo..) font le plein d’abonnés et de millions de pages vues en rachetant aux autres des abonnés et des pages vues. Mais cette course à l’audience qu ne rapporte rien se termine. Les fournisseurs d’accès gratuit – un modèle européen qui était censé compenser le fait que les communications téléphoniques sont payantes – auront disparu très rapidement selon les estimations. Pour les autres, l’enjeu est de devenir autre chose que des guichets d’entrée sur le Net. L’arrivée de l’Internet rapide va pouvoir les y aider car il sera plus facile de proposer des services intéressants et payants. Pour l’instant, le seul qui ait réussi à fidéliser l’internaute en lui offrant du contenu intéressant, c’est AOL. Deuxième problème : à près de 400 francs par mois la liaison haut débit (Noos), combien d’internautes accepteront encore de payer ? Commerce électronique Les échecs sont ici très fréquents. Souvent, on considère finalement que l’on n’a pas besoin de l’Internet pour vendre des produits du quotidien tels que vin ou viande car cela marche déjà très bien dans le monde réel. Par ailleurs, le « last mile » (le dernier kilomètre à parcourir jusqu’à l’acheteur) coûte cher sauf pour les produits immatériels, type logiciel. De plus, il n’y a pas de place sur le web pour une marque qui démarre de rien, surtout si elle veut vendre un produit que les consommateurs aiment toucher pour se rassurer. Ceux qui ont 20 une chance de gagner la bataille de l’e-commerce sont les marques mondiales multi-produits, comme Amazon, et les sites mono-produits qui s’appuient sur un réseau de boutiques et une expérience de la VPC classique, comme le fleuriste Aquarelle. Sites d’achat groupé C’est le plus célèbre cimetière de l’e-business, en France (Koobuy.com, Clust.com...) comme aux Etats-Unis. Le modèle paraissait adapté à l’Internet : on rassemble des internautes sur un site et on obtient, de ce fait, auprès des fournisseurs, des réductions pour l’achat de produits, mais il ne fonctionne pas. La grande distribution propose, en réalité, le même service, facilement accessible, et il n’y a pas encore assez d’internautes pour créer des groupes de taille suffisante. Ventes aux enchères Le « vide-greniers en ligne » est un marché de « winner takes it all », où le plus puissant ne laisse pas les autres survivre, car son avantage (être le plus riche en annonces) se renforce inexorablement. Dans ce secteur, les gagnants sont déjà désignés et ils s’appellent ebay.com ou en France ibazar.fr. L’américain qui continue de croître à grande vitesse (il a annoncé à ses actionnaires une croissance annuelle du chiffre d’affaires de 50% par an) cherche à prendre le contrôle de la start-up française. Mais saura-t-il, pour maintenir sa croissance, réussir au-delà de son activité d’origine, l’échange de babioles. Alors eBay a commencé à vendre des voitures d’occasion... Services financiers en ligne La finance fait partie de ces secteurs où les marges des intermédiaires (banquiers, courtiers, assureurs...) sont élevées, sans que la valeur ajoutée le justifie toujours. L’Internet a donc suscité de nombreuses vocations mais des quatre catégories de services qui existent en ligne (le courtage, la banque classique, les prêts et l’assurance), seule la première compte quelques grands succès de nouveaux venus (Self Trade, ConSors, Fimatex...) et est largement utilisée par les internautes : 25% contre moins de 1% pour les trois autres selon les spécialistes. Il s’agit ici d’un problème de confiance qui mettra des années à disparaître. Dans ce secteur, comme dans le tourisme, les opérateurs 100% virtuels sont condamnés à ouvrir des points de vente pour rassurer le grand public, qui hésite à confier son argent à un PC. En revanche, les banques traditionnelles, qui ont du mal à démarrer à démarrer sur le Net (un réseau concurrent de leurs agences) possèdent l’atout confiance et pourraient rattraper leur retard. Places de marché Elles devaient offrir aux entreprises un lieu, sur le web, où elles pourraient, plus efficacement qu’avec les moyens traditionnels, sélectionner des fournisseurs, effectuer des appels d’offre, etc. Aux Etats-Unis, les sites de première génération (verticalNet.com, ventro.com) se sont effondrés. En France, aucune start-up n’a réussi à atteindre la masse critique : à savoir rassembler un nombre de fournisseurs important pour que les clients affluent. L’avenir est aux sites gérés par les majors de leur secteur, les start-up se contentant des niches. Ainsi, Danone a créé pour ses achats de plastique une place de marché avec son concurrent Nestlé, mais achète pour 10 millions de francs par an de « gommes et de crayons » à une marketplace indépendante. Autre modèle d’avenir : les places de marché transformées en « échangeurs 21 d’actifs » ( elles créent les réseaux et les outils permettant aux fournisseurs d’échanger des commandes) ou en « prestataire de solutions » (elles proposent, outre les produits, des informations et des services. Supermarchés on-line S’il y avait bien un domaine où l’Internet allait pouvoir apporter de la valeur ajoutée, c’était bien celui du supermarché en ligne. Mais finalement, aucune start-up n’a tenu le choc. Le grand modèle américain, webvan.com, qui voulait à partir d’un seul entrepôt livrer l’Amérique, est en péril et l’action ne vaut plus un dollar... En France, ceux qui sortent du lot sont des filiales des grands distributeurs traditionnels, notamment Ooshop (Carrefour) et Telemarket (Galeries Lafayette). Le problème est qu’ils restent limités au seul marché lucratif : l’Ile-de-France. Ceux qui en sont sortis n’ont pas pu rentabiliser leurs investissements. Tourisme et voyages en ligne C’est un des secteurs qui drainent le plus d’internautes, même s’il n’est pas encore rentable. Les pures players (Travelprice, Lastminute...) et les acteurs traditionnels (Nouvelles Frontières...) y cohabitent encore. Mais la convergence virtuel/réel a commencé : les sites ouvrent des boutiques pour inspirer confiance à leurs clients, et les agences ouvrent des sites pour leur faciliter la vie. L’avenir semble appartenir aux agences capables d’utiliser la puissance de l’Internet pour permettre au client de faire son voyage sur mesure (comme skihorizon.com), et ceux qui sauront faire rêver grâce à la vidéo ou à une visite guidée. Sites d’information et d’actualité Fournir de l’information, qui draine de l’audience qui, elle-même, génèrent des recettes publicitaires et des achats de produits, ce n’est pas encore l’une des réussites du Net. Seuls les quotidiens traditionnels (le Wall Street Journal aux USA ou Les Echos en France) disposent des moyens de couvrir l’actualité et de proposer des sites riches. L’échec de thestreet.com, un site financier qui avait essayé de faire payer son (excellent) contenu via des abonnements, a marqué les esprits. Aux Etats-Unis, deux sites sont rentables : cnet.com, le rendez-vous des fanas de la high-tech et Consumers Reports, un magazine édité par une puissante association de consommateurs. La clé du succès dans le domaine est de pouvoir établir, comme zdnet.com, un lien fort entre le contenu et les offres commerciales (le lecteur d’un article sur les Palm se voit proposer des adresses de vendeurs de Palm), le tout sans assujettir le contenu au commerce. Sites d’emploi Près de 500 sites (Emailjob, Monster...) essaient de prendre une part du gâteau occupé jusqu’alors par la presse (qui met ses annonces en ligne avec cadresonline.com et cadremploi.fr). Les barrières à l’entrée (technique, commerciale) étant faibles, la palme ira à celui qui saura imposer sa marque, autrement dit, celui que les investisseurs soutiendront le plus longtemps. 22 Sites de communautés Les grandes entreprises qui ont voulu fédérer des centaines de petites communautés et vendre ces audiences qualifiées aux annonceurs et aux e-commerçants sont les grands perdants. Par exemple, Multimania, qui a été racheté par un grand portail (Lycos), comme l’ont été précédemment tous ses semblables (chez.com par Liberty Surf et Geocities par Yahoo!). Mais les sites communautaires ont un avenir et aux Etats-Unis, gay.com et blackplanet.com n’ont pas des audiences gigantesques, mais ces sites ont un atout qui compte dans l’Internet de demain : le « stickiness », les internautes y restent « collés » (« sticked ») nettement plus longtemps que sur des sites généralistes. Mais il reste le problème de convertir en argent la « stickiness » des aficionados de la pêche en rivière ou du tarot... V.2. Quelques exemples a) Des succès incontestables... Yahoo! Il s’agit aujourd’hui du plus grand média du Net et l’annuaire portail a prouvé que l’on pouvait gagner de l’argent en faisant du web gratuit. En cinq ans, il est présent dans dix-neuf pays et reste le site le plus utilisé au monde par le public non professionnel. En novembre 2000, 51% des internautes connectés depuis leur domicile étaient allés au moins une fois consulter l’un des sites de Yahoo!. Fait très rare, le site est rentable car bénéficiaire depuis 1996, soit un an avant les prévisions des analystes, l’entreprise a dégagé 411 millions de dollars de profits opérationnels en 2000 pour un chiffre d’affaires de 1.1 milliards avec 37% de marge d’exploitation, alors que même LVMH n’en fait que 20%. La clé du succès est la capacité à attirer une audience massive, ce qui permet d’engranger des revenus publicitaires (90% de son chiffre d’affaires), c’est à dire 1.3 milliards de dollars entre janvier 1997 et juin 2000. Elle est aussi un levier pour enrichir le contenu du site au moindre coût : Yahoo! obtient gratuitement 85% des informations (hors guide de recherche) qui apparaissent sur ses pages. Pour chaque rubrique (météo, finance, actualités économiques, etc.), des partenaires acceptent de donner gratuitement du contenu en échange de la visibilité qu ‘ils obtiennent sur le site. Pour attirer les internautes en masse, la marque Yahoo! a d’abord été valorisée à 6.3 milliards de dollars par le cabinet Interbrand, ce qui en fait la marque Internet la plus chère du monde (40% de plus qu’AOL ou Amazon) puis, passée maître dans l’art d’utiliser les médias, Yahoo! a fait de son nom une vraie légende. Par ailleurs, la communication s’est voulue décalée, privilégiant l’événementiel (pas cher) à la publicité (ex : taxis américains Yahoo! avec accès au web, logo affiché sur des yo-yo, des skate-boards, des pastilles pour rafraîchir l’haleine...). Enfin, Yahoo! refuse complètement le cobranding et chez Yahoo!, tout s’appelle Yahoo! : Enchères Yahoo!, Jeux Yahoo!, Yahoo! Musique... Le portail ne doit pas uniquement son audience massive à sa marque car il a prouvé aussi sa capacité à fidéliser les internautes en veillant à leur apporter une réelle valeur ajoutée. Ainsi, lorsqu’en 1998, son guide de recherche a été concurrencé par des moteurs ultraperformants comme Google, Yahoo! s’est 23 transformé en une plate-forme de services : carnet d’adresses, agenda connectable à un Palm, messagerie rapide, l(entreprise a lancé plus de 10 prestations nouvelles par an. Leur point commun est la simplicité et surtout la fluidité : l’internaute navigue d’un service à l’autre avec un seul mot de passe et la même logique. Pourtant, l’avenir annonce que la hausse des investissements publicitaires sur l’Internet va ralentir, passant d’un taux de croissance annuel de 93 a 29%. Même si l’inquiétude n’est pas encore de mise, le portail a annoncé qu’il voulait réduire sa dépendance envers la publicité : en 2001, 15 à 20% de son chiffre d’affaires devrait provenir de la facturation de services aux entreprises mais aussi de la facturation aux internautes eux-mêmes, ce qui pourrait complètement faire changer les habitudes de ces derniers... Amazon Ce site a construit en cinq ans la 48ème marque mondiale en valeur, devant Adidas et Chanel, et conquis 25 millions de clients. Mais ceci lui aura coûté 1 milliard de dollars en frais de marketing et les critiques ne sont pas toutes enthousiastes. En effet, car s’il s’agit du plus grand e-magasin du monde, la société devient aussi un distributeur comme les autres en proposant désormais un catalogue comme les autres. De plus, l’analyse de ses coûts révèle aussi l’explosion du poste « logistique » qui passe de 20 à 41% des dépenses entre 1997 et 2000 et la baisse de la flambée marketing (de 47 à 20% sur la même période). En conclusion, en Bourse, Amazon, qui vaut encore deux fois son chiffre d’affaires, serait deux fois trop cher par rapport à un distributeur traditionnel comme Wal-Mart, valorisé une fois ses ventes. C’est son mode de développement inédit, reposant sur le slogan « Get big fast » (devenir grand rapidement), qui caractérise Amazon. Il a été choisi de devenir gigantesque avant de se savoir capable de gagner de l’argent... Mais se soucier plus de croissance que de rentabilité est une stratégie qu’il faut aujourd’hui abandonner. Amazon a récemment revu à la baisse ses prévisions de ventes pour 2001 (entre 3.3 et 3.6 milliards de dollars contre 4) et elle a aussi annoncé le licenciement de 1 300 employés le 31 janvier 2001, ainsi que la fermeture d’un grand centre de distribution. La réduction des coûts et la rentabilité sont désormais à l’ordre du jour. Au-delà des débats sur le compte d’exploitation, personne ne conteste les atouts et la suprématie de l’ex-start-up de Seattle sur un autre aspect : la qualité de son site, 100% orienté clients. Il suffit d’en faire l’expérience pour en être convaincu. Vous aimez Brassens ? D’autres amateurs de Brassens ont acheté du Léo Ferré ? On vous proposera donc du Léo Ferré. Ce système de marketing très fin, dont Amazon est propriétaire, a fait ses preuves : le site est premier toutes catégories confondues par son taux de conversion des visiteurs en acheteurs, et l’on voit se réconcilier deux concepts pourtant opposés, mégadistribution et conseil personnalisé. La troisième force d’Amazon est la logistique. Contrairement à un distributeur traditionnel, la start-up a construit son activité autour de gigantesques entrepôts (445 000 mètres carrés, soit 60 terrains de football) et elle peut donc stocker une grande gamme de produits en peu de quantité, et les faire tourner deux ou trois fois plus vite qu’un hypermarché normal. Du coup, elle pourra vendre davantage de produits à marge plus élevée (hi-fi, high-tech, etc.). Ainsi, même s’il est vrai qu’Amazon ressemble de plus en plus à une entreprise de vente par correspondance banale, la concurrence a toujours de quoi s’inquiéter. 24 b). ... et de grands flops Boo.com Le principal syndrome qui a terrassé l’une des légendes du Net est la mauvaise gestion, tout simplement. Ainsi, de nombreux projets onéreux ont été mis en chantier pour n’être finalement jamais lancé (ex : le magazine en ligne du site). Le site de vente en ligne de vêtements sportswear de luxe lancé le 3 novembre 1999 par deux Suédois s’annonçait pourtant prometteur, à la pointe de la mode et de la technique. Entourés de parrains prestigieux qui injectent des millions dans l’aventure sans trop se soucier des comptes, il s’impose rapidement comme l’un des grands mythes du Net-eldorado. Mais quelques mois plus tard, Boo.com dépose le bilan le 18 mai 2000. L’histoire de Boo.com est celle d’une entreprise qui a péché par excès de gourmandise. En effet, les effectifs atteignent 400 salariés avant l’ouverture du site. Locaux somptueux, soirées fastueuses, campagnes publicitaires ruineuses, Boo a créé à coup de millions et en quelques mois une marque mondiale et branchée, mais se sont vite confondus vitesse et précipitation, investissement et gaspillage. Mais l’échec de Boo.com ne tient pas qu’au management fantaisiste et dispendieux car leur modèle ne tenait pas compte des fondamentaux de la VPC. Le volume de vente, sur un créneau aussi étroit et élitiste, était insuffisant pour rentabiliser les investissements engloutis dans la création ex nihilo d’une marque, d’une technologie de vente et d’un back office. Ce dernier soulèvera lui aussi des problèmes puisque certains clients ne recevront jamais leurs commandes. Pour finir, la plate-forme technique, complexe, avec ses cabines d’essayage virtuelles et ses animations 3D, mettait un temps fou à se télécharger. Se lancer dans la vente de textile sur le Net sans aucune expérience du textile ni de la VPC était donc une erreur car pour beaucoup de professionnels, le modèle était viable. Boo n’a pas vraiment disparu, il se revend morceau par morceau, et le nom de domaine, la marque et les droits du contenu rédactionnel ont été rachetés en juin 2000 par le site américain Fashion Mall, spécialisé dans les sites de prêt-à-porter. Clust En mars 2000, deux mois après son lancement, Clust recevait le grand prix du jury aux Clics d’or, une sorte de mini-festival de cannes du Net. Le site d’achat groupé devait « révolutionner le commerce électronique » car grâce à son principe, des consommateurs allaient se grouper pour acheter moins cher les articles dont ils avaient envie. Le site, lui, prenait une commission de 10% sur les transactions et se rémunérait aussi par de la publicité. Contrairement à Boo, ce n’est pas la qualité de gestion des dirigeants qui est en cause, mais l’activité. Tous les autres sites d’achat groupé (Letsbuyit, Koobuy, LeSpot, mais aussi Mercata, un modèle américain) se sont plantés. Le principal problème est que les internautes qui se rassemblent sur le site n’auront jamais, vis-à-vis du fabricant, un pouvoir de négociation aussi forts que les grands de la distribution, Auchan, Carrefour ou Leclerc. Un consommateur qui va seul chez Auchan paiera moins cher que cinquante qui font corps sur un site d’achat groupé. En plus, il pourra emporter la marchandise tout de suite, alors que sur le site d’achat groupé, il faudra attendre que plusieurs autres acheteurs ait un besoin similaire au sien. Pourtant, l’achat groupé n’est pas une aberration du e-commerce car comme contre-exemple, nous avons iBazar qui se contente d’un 25 catalogue réduit de produits plébiscités, tout en bénéficiant de ses 700 000 membres. L’erreur de Clust aura été de vouloir construire une marque indépendante au lieu de se contenter de bâtir une activité et de la vendre ensuite, en sous-traitance, à des sites à fortes audiences par exemple. Par ailleurs, des produits se prêtent fort bien à l’achat groupé (Console de jeux, grands jeux vidéo, ordinateur, Palm Pilot) mais d’autres beaucoup moins, notamment les voitures, motos, etc., il vaut donc mieux sectoriser. 26 VI- TRAVAILLLER DANS LA NOUVELLE ECONOMIE Le Nouvelle Economie a transformé les manières de travailler. Un management plus souple est apparu : le salarié est devenu la force première de l’entreprise. De même, les Nouvelles Technologies ont attiré des entrepreneurs jeunes, dynamiques et novateurs. Leur profil est différent de celle de l’ancienne économie. VI-1 Un nouveau Management pour une nouvelle économie L'un des éléments les plus différenciant de la nouvelle économie par rapport à l'ancienne est sans aucun doute les nouvelles méthodes de management utilisées. Venues directement des pays scandinaves et des Etats-Unis, celles-ci placent largement le salarié au coeur de l'entreprise et fond de lui un élément déterminant. Ces nouvelles pratiquent enterrent pour de bon la PME des années 70 où le patron se sentait, quelque part, "propriétaire" de ses salariés. Maintenant, ce sont les salariés qui se croient propriétaires de l'entreprise. Le phénomène des stocks-options a bien évidemment développé cette notion d'appartenance du salarié pour son entreprise : la qualité de son travail pourra engendrer des variations de résultats, ce qui aura pour effet de faire changer le cours de l'action de son entreprise. Il faut néanmoins relativiser ce propos. En effet, tous les salariés ne bénéficient pas de stock-options. De plus, le phénomène d'intéressement aux résultats de l'entreprise n'est pas nouveau non plus. Seulement, les start-up, pour attirer leurs nouveaux collaborateurs, ont mis en avant ce nouveau mode de rétribution qui peut permettre au salarié de s'enrichir très rapidement. L'effet inverse est également possible : les gains boursiers ne sont que fictifs tant qu'ils ne sont pas réellement touchés. Aussi, depuis l'e-krach d'Avril 2000, la plupart des valeurs boursières du Nasdaq ou du Nouveau Marché ont connu des chutes vertigineuses. Les actions offertes par l'employeur au salarié lors de la signature de son contrat de travail ne valent plus grand chose. Aussi, le système de stock-options est devenu beaucoup moins attractif pour recruter de nouveaux collaborateurs. Ce nouveau Management se met également en place dans de petites structures : les start-up commencent avec quelques personnes pour grossir souvent rapidement. Le fait de travailler en petit nombre permet de rapprocher les salariés entre eux et de créer un véritable esprit d'équipe. D'autant plus que les espaces de travail sont de moins en moins cloisonnés. Le temps où les cadres possédaient leur propres bureaux avec leur secrétaires est dépassé pour être remplacé par celui des "open-space". Cependant, la complicité du début entre quelques salariés risque de disparaître avec la croissance de l'entreprise et l'embauche massive de nouveaux collaborateurs. Les nouvelles méthodes, plus souples, sont dues également au fait que la grande majorité des salariés soient des jeunes (voir tableau sur la répartition par âge dans la nouvelle économie). Le tutoiement est de rigueur, les costumes-cravates sont rangées dans les penderies pour laisser la place au vêtements "casual" : le Friday Wear est aujourd'hui instiguée également dans les bricks-and-mortar. Le salarié souhaite plus de liberté dans son travail : il gère luimême son temps du moment que les objectifs sont atteints au final. 27 Pourtant, ces méthodes entraînent une dépendance plus grande du salarié à l'égard de l'entreprise : s'il gagne en liberté physique, il perd en liberté d'esprit. Sa dépendance vis-à-vis de l'entreprise est de plus en plus importante : vie active et vie privée ont tendance à se rapprocher de plus en plus. La notion de stress est également très présente du fait de la plus grande indépendance et de l'obligation de résultat. Le sociologue Richard Sennett dans Le Monde des Débats d'Avril 2000 expliquait : " dans les entreprises de technologie, le centre fixe des objectifs, mais il ne les négocie pas ; il donne les ordres. Aux salariés de trouver les règles et les moyens de les atteindre". Autant dire que Nouvelle Economie et les 35 heures ne font pas bon ménage. Pour tenter de mieux saisir les concepts de nouveau management, le mensuel Newbiz (n°3 Octobre 2000) a dressé un glossaire contenant les 10 notions clés. Nous en reprenons ici l'intégralité : - Casual : S'habiller décontracté est accepté et pas seulement le vendredi. Recommandés : les tee-shirts et pantalons larges. Mais les patrons de start-up ressortent aujourd'hui les cravates face aux banquiers. - Collégial : L'esprit start-up, c'est l'esprit d'équipe. Pas de chasses gardées, on est tous solidaires, on se serre les coudes, etc. Pour certains, c'est "limite secte". - Entrepreneurial : Les jeunes sont décomplexés face à la réussite et à l'argent. L'ambition sans le strass des années 80... mais avec le stress. Réalité ou vieille rengaine ? - Familial : Plus que conviviale, une atmosphère affective s'instaure. Soirées, sorties...tissent des liens intimistes. Vos histoires de famille ne vous suffisaient pas ? - Global : Les équipes de travail sont vraiment multiculturelles. L'anglais envahit l'espace quotidien. Le "think global, act local" triomphe. Avec le spectre du modèle anglo-saxon réducteur. - Horizontal : La pyramide hiérarchique est aplatie et chacun considéré sous l'angle de sa fonction, non du pouvoir qu'elle lui confère. Mais que se passera-t-il lorsqu'il faudra tailler dans le vif ? - Libéral : Le maître mot, c'est la délégation. L'individu est responsabilisé. Autonome, il gère son travail selon des objectifs qui lui sont imposés, mais sans contrainte horaire. Sans limite de stress non plus. - Spatial : L'open-space et le décloisonnement physique génèrent la fluidité et la réactivité. Ils modifient aussi les rapports entre les gens. L'autoflicage en prime ? - Transversal : Les cloisons explosent littéralement : le décloisonnement physique implique un décloisonnement mental. Dans les réunions, tout le monde parle de tout (ou presque). Le résultat est riche. A condition que l'enthousiasme demeure. - Viral : Le net est souvent une affaire de ...réseaux. On embauche les copains des copains. On débauche le salarié de la boîte où travaille le copain qui m'a dit que...etc. Le risque ? La consanguinité 28 VI-2 – Le profil des acteurs français de la Nouvelle Economie Les Nouvelles Technologies, secteur économique dynamique par excellence, se sont développées grâce au talent, au travail et à l’imagination d’entrepreneurs souvent visionnaires. Nombreux sont les chefs d’entreprise a avoir été bercés dans leur enfance par les balbutiements de l’informatique. Aussi, ces chefs d’entreprise ont été tout de suite réceptifs aux potentialités des TMT (Technologies, Médias, Télécoms). Il n’est donc pas étonnant de retrouver parmi les grands patrons de la nouvelle économie de jeunes n’ayant pas encore atteint la trentaine (Jerry Yang pour Yahoo ou Sergeï Brin pour Google). En France, on retrouve un phénomène quasiment identique : la nouvelle économie a permis à de jeunes entrepreneurs de parvenir à la tête d’entreprise novatrices. Le Journal du Net a réalisé un questionnaire auprès de 551 décideurs de la nouvelle économie : les résultats permettent de dresser des profils des patrons de la nouvelle économie française. a) …Des décideurs jeunes… Certains exemples de la nouvelle économie laissent penser que la nouvelle économie est réservée aux jeunes : Fabrice Grinda (Aucland, 26 ans), Oriane Garcia (Caramail, 28 ans) ou Michel Meyer (Multimania, 29 ans). Pourtant le manager type de l'Internet a 36 ans. Plus jeune sans doute que les managers des secteurs traditionnels -près des trois-quarts d'entre eux ont moins de 40 ans-, mais rien à voir avec le cliché des étudiants-entrepreneurs. Et le phénomène n'est pas près de s'inverser puisque les investisseurs prônent de plus en plus l'arrivée de "seniors" (des personnes ayant déjà de l’expérience dans l'ancienne économie) aux postes-clés des start-up. Symbolique : le remplacement musclé de Fabrice Grinda par Paul Zilk, 43 ans, à la tête de Aucland. La répartition par tranches d'âges Age - de 25 ans De 25 à 29 ans De 30 à 34 ans De 35 à 39 ans De 40 à 44 ans De 45 à 49 ans 50 ans et plus Proportion 3,3% 15,5% 27,4% 26,2% 14,9% 5,6% 7,1% 29 La génération la plus représentée est constituée des -vrais- enfants de 68. Ils sont en effet 45, soit près de 10% des e-managers, à être nés cette année-là. Certes, les exemples de très jeunes dirigeants existent bel et bien. Jérémi Berrebi, fondateur de Net2one, âgé de 21 ans et souvent mis en avant par les médias pour illustrer le phénomène de la jeune génération d'entrepreneurs Internet. A ses yeux, son âge a d'abord été un atout. "On n'aurait jamais autant parlé de Net2One dans les médias si je n'avais pas été si jeune, reconnaît-il. Des émissions comme "Envoyé Spécial" ou "Capital" n'auraient rien fait sur nous, même si, par ailleurs, notre concept était génial". Mais Jérémi Berrebi ajoute aussitôt : "Nous ne sommes pas si jeunes qu'on veut bien le croire. Je me suis entouré de gens expérimentés. Chez mes actionnaires, avec des gens comme Thierry Dassault, ou en recrutant de collaborateurs plus âgés que moi. Je pense en revanche que mon âge a été un inconvénient vis-à-vis de certains journaux qui ont dénigré Net2one en considérant que je n'étais qu'un jeune fou qui ne faisait pas le poids. Pensez donc : je n'avais pas d'avocat !" Alexandre Dreyfus, fondateur de Webcity, aujourd'hui âgé de 22 ans, qui a quitté le lycée avant de passer son Bac pour créer une première société de conception de sites, n'est pas du même avis. "Pour moi, mon jeune âge n'a sûrement pas été un avantage, en particulier pour la première société que j'avais créée avec un ami. C'est d'ailleurs lui qui a négocié la vente de l'agence à Publicis : il avait 26 ans et sortait d'une école de commerce, ce qui correspondait mieux au profil du jeune entrepreneur." Aujourd'hui à la tête de sa deuxième société, Alexandre Dreyfus considère que le seul avantage lié à son âge, ce sont les encouragements mi-admiratifs, mi-perplexes que des gens qui lui prodiguent "Vous avez déjà créé votre société à votre âge, mais c'est très bien ça !". Il ne se fait pourtant pas fait d'illusion : "Cela ne met pas en valeur l'entreprise..." Mais les choses évoluent vite et les financiers de la nouvelle économie, surtout les capitauxrisqueurs, sont les premier à demander aux "jeunes pousses" de se structurer en confiant le management à des gens d'expérience. Xavier Schallebaum, lui-même âgé de 27 ans, mais surtout associé et directeur du fond de capital- risque Apollo Invest, l'annonce clairement. "Aujourd'hui, on ne va plus à la découverte. Il ne faut certes pas décourager les entrepreneurs mais nous sommes là pour participer à la création de véritables entreprises". Interrogé sur son profil atypique de très jeune parmi les investisseurs, Xavier Schallebaum explique : "Mon âge n'a vraiment pas été un handicap. Je suis aujourd'hui reconnu pour ma connaisance du réseau mais je montre également que je suis capable d'apprécier les qualités de management de mes interlocuteurs. J'ai le sentiment que pour la première fois avec Internet, les seniors nous ont laissé défricher le terrain. Nous étions en quelque sorte les éclaireurs." Mais le jeune financier reconnaît néanmoins : "Au début, pour mes deux ou trois premiers rendez-vous, je me suis senti gêné d'avoir à me prononcer sur la viabilité ou l'intérêt de projets qui m'étaient présentés par des gens de 40 ou 50 ans..." D'ailleurs "s'interroger sur l'âge de ces entrepreneurs a-t-il encore un sens?" s'interroge François Benveniste, PDG fondateur du site AbCool, un "senior" de 54 ans, pionnier de l'Internet français. Ce dernier explique :"Il ne faut pas confondre le jeune entrepreneur et l'entrepreneur jeune! Pour ma part j'ai créé ma première entreprise Calvacom il y a sept ans. Je pense donc être encore un jeune entrepreneur." b) Vers une parité Homme-Femmes ? 30 On aurait pu croire que le secteur naissant de la nouvelle économie favoriserait un rééquilibrage des postes à responsabilités entre hommes et femmes. Pour l'instant, ce n’est pas le cas. Sur Internet aussi, les femmes restent très largement sous-représentées au sein des décideurs. On ne recense que 41 femmes dans les résultats des questionnaires, soit moins de 8% de l'effectif total. Plus inquiétant encore, moins d'une vingtaine seulement occupent des fonctions de direction générale (PDG ou DG) au sein de leur société. Parmi elles, on retrouve des femmes d'expérience comme Anne Sinclair, à la tête des activités Internet de TF1, ou Elisabeth Chamontin, en charge des éditions électroniques du groupe Investir. Pour elles, Internet constitue une étape dans une carrière. Mais elles cotoient de jeunes "entrepreneuses", pour lesquelles il s'agit là d'une véritable première expérience de management. Répartition hommes-femmes . Proportion Hommes Femmes 92,8% 7,2% Parmi ces dernières, Catherine Koste, directrice générale de Tradweb, un site BtoB spécialisé dans les activités de traduction professionnelle, qui estime que "la création d'une entreprise est en général difficile pour une femme, qui doit entre une vie professionnelle dévorante et une vie familiale. Dans le secteur des start-up de la nouvelle économie, poursuit-elle, le problème est encore accru, car la naissance même de ces sociétés dépend souvent des financeurs, business angels et capitaux-risqueurs. Or, il s'agit de milieux extrêmement machos." Les femmes sont effectivement très peu nombreuses au sein des structures de capital-risque, comme le reconnaît l'une d'entre elles, Florence Ribes, associée chez Leonardo Finance, "d'abord parce qu'il s'agit de postes extrêmement prenants". Mais, estime-t-elle, "les choses évoluent et je ne suis plus une exception. Je ne crois pas que le secteur soit aussi peu ouvert aux femmes qu'on le dit." On laissera la conclusion à Elisabeth Chamontin, directrice des médias électronique au sein du groupe Investir. "Cette sous-représentation des femmes dans les postes à forte responsabilité n'est pas surprenante. Il n'y a rien de nouveau sous le soleil, une femme doit toujours en faire davantage qu'un homme pour parvenir au même niveau de responsabilités. Internet n'a rien changé à cela!" C'est parce qu'elle est convaincue qu'il faut constituer un réseau d'entraide entre les femmes, très minoritaires dans ce milieu, qu' Elisabeth Chamontin a créé avec quelques amis une association baptisée Internénettes. Elle n'est pas la seule aujourd'hui à chercher à mettre en place ce type de réseaux informels : Cyber-elles, le "Business Club des professionnelles de l’Internet", est en cours de création et organisera à la fin du mois sa première conférence-débat autour du thème : « La femme, avenir du Web ? » c) …Une nouvelle élite ? La révolution de la nouvelle économie a-t-elle remis en cause l'élitisme à la française ? Internet a-t-il vraiment permis à de géniaux autodidactes de se lancer dans l'aventure pour lancer leur propre start-up ? Sur plus de 500 acteurs interrogés pour la constitution du carnet du JDNet, ils ne sont que quatre à se définir comme autodidactes véritables, comme Jean- 31 Pierre Eskenazi de Netbooster ou Alexandre Dreyfus, le créateur de Web City. A l'inverse, on trouve chez les décideurs de l'Internet français 63 dipômés d'HEC, soit 11,1% de l'effectif global, 40 polytechniciens et 48 diplômés d'IEP, soit autant que les titulaires de DESS (toutes universités confondues) auxquels s'ajoutent 38 titulaires de DEA. Formation Diplôme école de commerce (principalement HEC, ESC, ESCP, ESSEC, INSEAD) Diplôme d'ingénieur (principalement X, ENSI, Centrale, ENST, Ponts, CNAM) Maîtrise MBA DESS IEP DEA Mastère Autres Nombre Proportion* 171 30% 160 69 59 48 48 38 30 16 28,1% 12,1% 10,4% 8,4% 8,4% 6,7% 5,3% 2,8% *Cumul possible Les formations des écoles de commerce et d'ingénieur tiennent le haut de pavé avec plus des 60% des décideurs de la nouvelle économie. Jean-Pierre Eskenazi a abandonné le lycée quelque jours avant de passer son Bac. Spécialiste reconnu dans le secteur du référencement, il a inventé avec sa société Netbooster une nouvelle spécialité. "Dans ce métier, j'ai appris tout seul en passant des heures et des heures en tête-àtête avec mon PC à décortiquer le fonctionnement des moteurs de recherche." Pourtant, cet entrepreneur ne sous-estime pas l'importance des formations de haut niveau. "Je suis allé chercher un associé brillant, à la formation très solide, Michel Fantin, qui joue un grand rôle pour m'aider à développer l'entreprise." D'ailleurs, en bon autodidacte, Jean-Pierre Eskenazi est conscient d'être un cas assez exceptionnel. "Pour lever des capitaux, je pense que les diplômes et la formation rassurent les investisseurs. Lorsque j'ai créé Netbooster dans mon coin, j'avais peu de moyens et c'est peu à peu que j'ai pu faire reconnaître mes compétences." Henri et François de Maublanc sont deux frères à la tête de plusieurs sociétés, parmi lesquelles une des marques phare du e-commerce français : Aquarelle. Henri est ingénieur X 72 et il n'est pas le seul à avoir succombé aux sirènes du Web. Aujourd'hui, pas moins de quarante polytechniciens dirigent des sociétés Internet. "Ce que j'ai appris de plus important à Polytechnique, c'est une importante faculté de remise en question. Je pense d'ailleurs que, globalement, on n'apprend pas grand chose dans les écoles, explique Henri de Maublanc. On apprend à apprendre et c'est le plus important. Car tout est nouveau avec Internet. Sauf deux choses : l'origine de l'entreprise, c'est-à-dire la production, et la finalité, le client." Henri de Maublanc reste malgré tout une exception : il est l'un des rares représentants de l'ENA a être tombé dans la nouvelle économie. "Peut-être que le principal intérêt de l'ENA pour moi a été de me faciliter la vie, du moins au début. J'avais moins besoin de justifier ce que je disais parce que j'étais issu de l'école. C'est là un vrai défaut français que d'accorder une importance excessive et à priori à ces formations comme l'X, HEC ou Centrale." D'ailleurs, la rareté de ce type de diplômés dans les entreprise Internet ne surprend pas Henri de Maublanc. "En général, les petites entreprises ne les intéressent pas beaucoup car pour cela, il faut avoir un intérêt poussé pour les gens, les problèmes quotidiens. Les anciens étudiants de l'ENA sont d'abord intéressés pas les idées, à part peut-être les membres du corps préfectoral qui sont plus 32 proches des gens et des problèmes concrets. En outre, mes camarades de l'ENA ont souvent du mal à assumer l'échec. Et c'est pourtant un risque inhérent à la création d'entreprise." d)…Paris, centre de la nouvelle économie Internet est en général perçu comme un fantastique moyen de communication permettant de s'affranchir des distances, tête de pont des fameuses "autoroutes de l'information." Pourtant, les chiffres tendent à montrer que la nouvelle économie n’a pas vraiment changé la donne. Les chiffres sont éloquents : sur près de 560 décideurs présentés, 90,3% soit 494 d'entre eux travaillent en région parisienne dont une grande majorité dans Paris intra-muros (347 personnes, 62%). Les autres régions arrivent très loin derrière, avec dans l'ordre Rhône-Alpes, les Bouches-du-Rhône et la région Nord-Pas-de-Calais. Département 75. Paris 92. Hauts de Seine 69. Rhône 93. Seine-Saint-Denis 59. Nord Pas de Calais 94. Val de Marne 13. Bouche du Rhône Autres Nombre Proportion 347 116 14 12 8 7 6 39 63,2% 21,1% 2,6% 1,5% 1,3% 1,1% 0,9% 7,8% Paris et le désert français, même à l'heure de l'Internet, le constat du géographe Jean-François Gravier en 1947 n'est par remis en cause par l'avènement de la nouvelle économie. Parmi les rares entreprenautes à ne pas avoir succombé à cet irrésistible appel de la capitale, Marc Perrin, CEO de Wine and Co, explique pourquoi il a décidé d'implanter sa société à Aixen-Provence : "Je ne vois presque que des avantages au choix d'Aix. La qualité de vie y est incomparable et dans un contexte de tension sur certains segments du marché du travail, c'est un véritable plus offert aux futurs salariés." Originaire de la région d'Aix, Marc Perrin avait pourtant créé sa première société, Vinternet, à Paris. Le déménagement a eu lieu à l'occasion de la transformation de la société en Wine and Co: "La conséquence la plus sensible pour nous a d'abord été la baisse de moitié des loyers de nos bureaux pour un doublement de la surface disponible! Aujourd'hui sur un effectif de 50 personnes, la moitié sont originaire de Paris et sont venus nous rejoindre. Nos investisseurs Europ@web et GIP n'ont pas vu d'inconvénients à cette localisation et nos prestataires parisiens comme Broadvision nous ont souvent avoué qu'ils étaient plutôt heureux de venir travailler pour nous, particulièrement en fin de semaine (rires)." Tout n'est pourtant pas si facile lorsqu'on choisit de faire naître sa start-up en région. Ivan Lome, PDG fondateur d'Ismap est plus nuancé sur le sujet: "Les inconvénients ne doivent pas être négligés. Les investisseurs d'abord sont des gens très sollicités et ils considèrent le déplacement à Marseille comme une perte de temps. A la fin de l'année dernière par exemple, une levée de fonds que nous avons effectué auprès d'Axa a été retardée de plus d'un mois et demi à la suite d'une grève d'Air France qui m'a fait manquer un rendez-vous. Lorsqu'il s'agit 33 d'investisseurs étrangers, le problème est encore plus sérieux car ils viennent quelquefois à Paris, mais jamais en province. De même les clients sont plutôt inquiets de se savoir éloignés de nous et je pense que nous aurions davantage de partenaires si nous étions à Paris". C'est pourquoi Ismap a récemment ouvert un bureau parisien . Mais ces inconvénients ne doivent pas être exagérés, les avantages sont indéniables précise aussitôt Ivan Lorme: "Les surface de bureau ne sont pas chères, Marseille a été très touchée par le chômage. Les compétences sont nombreuses et moins coûteuses qu'ailleurs et nous n'avons pas à gérer tous les jours le problème délicat du turn-over." 34 Conclusion La nouvelle économie a changé la donne du monde économique. Les valeurs TMT ont dynamisé l’ensemble de l’économie mondiale. La croissance actuelle des pays occidentaux est fortement due à la valeur ajoutée que produit la nouvelle économie. Néanmoins, l’e-krach d’avril 2000 a fragilisé les acteurs de la nouvelle économie. La plupart des entreprises ont vu le cours de leurs actions dramatiquement baissé. Les stocks-options ne font plus recettes. De nombreuses start-up ont du fermer boutique du fait de leur manque de chiffre d’affaire. La période d’euphorie de l’an dernier a fait place à une période plus obscur où le doute est de mise. Les capitaux-risqueurs sélectionnent davantage les dossiers des nouveaux entrepreneurs. De plus, l’ancienne économie rattrape son retard sur la nouvelle. La distinction entre les deux devient bien difficile. Les bricks-and-mortar se confondent avec les pure players. D’ailleurs, on note un fort mouvement de concentration dans la nouvelle économie. Les plus petits acteurs se vont racheter par les plus gros. Ce phénomène est identique à celui qui a lieu dans l’ancienne économique. Nous présentons ci-dessous les fusions et acquisitions depuis janvier 2001. Start-ups Internet : les fusions & acquisitions en 2001 Ce tableau tient à jour les principales acquisitions en France d'entreprises internet pour l'année 2001. Les modalités de ces opérations étant rarement rendues public "à chaud", nous donnons pour certaines une estimation JDNet qui n'engage pas les sociétés impliquées. (Mise à jour: 1er janvier 2001, tous les chiffres en millions d'euros) Les acquisitions ----------------Société cible (Nationalité) Secteur (Nationalité) Acheteur Date % du Montant capital Modalités détaillées Régie publicitaire online Hi-Media (Fr) 4/01/01 100% 13 La transaction sur les 100% du capital d'Advenda se fera essentiellement par un apport d'actions. Le paiement en numéraire est limité à 2,3 millions d'euros. Hi-Media procèdera pour la première prise de participation à hauteur de 51% à une augmentation de capital de 1 283 827 actions (soumises à un lock-up) et à un paiement de 1 472 625 euros. Fournisseur d'accès Tiscali (It) 8/01/01 100% 645,5 Offre mixte cash + actions. Une action Liberty Surf contre 0,365 actions Tiscali et 2,23 euros. Telecharger.com (Fr) Téléchargement de logiciels 01Net.com 8/01/01 100% 4* Purplepot (UK) Régie publicitaire en ligne Hi-Media (Fr) 9/01/01 70,6% 0,53 Europe Explorer (Fr) Fournisseur d'accès 9 Telecom (It) 9/01/01 100% 15 Advenda (All) LibertySurf (Fr) Aucune fournie. Telecharger revendiquait 23,5 millions de pages vues par mois au moment du rachat. Hi-Media souscrit à une augmentation de capital de 2,5MF, obtenant 50,6% de la société. D'autre part, Hi-Media rachète 20% du capital à un investisseur financier pour 1MF. Jet Multimédia cède sa filiale internet grand public (Europe Explorer) à sa maison- mère 9 Télécom (groupe Télécom Italia ) en échange de cash. 35 Koobuycity(Fr) Commerce électronique Impact Net (Mkt Direct) 10/01/01 100% 0,1 La société de marketing direct reprend les actifs de Koobuycity, par ailleurs en dépôt de bilan, et récupére ainsi un fichier de 20.000 clients. Vircom (Ca) Outils pour internet Cryonetworks 15/01/01 100% - Fondée en 1994 Vircom (Montréal) a réalisé en 1999 un chiffre d'affaires de 12,5 MF avec un résultat net positif. Le prix de l'acquisition est de deux fois le C.A 2001. Fournisseur de contenus ISyndicate (Bertelsmann) 25/01/01 80% 150 MF* Fondée en 1999, Nfactory achète et revend des flux d'informations pour les portails et les intranet. La société prévoyait un chiffre d'affaires de 100 MF en 2001.. 100% Ebay a émis 2,5 millions nouvelles actions pour payer l'acquisition et s'est engagé à ce que le 720 MF prix total ne tombe pas en dessous de 450 milions de francs. Le jour de l'acquisitionle titre Ebay cotait à 45,5 euros. Nfactory (Fr) Ibazar (FR) Site d'enchères Ebay (USA) 22/02/01 *Source: JDNet Malgré ce phénomène de concentration, la nouvelle économie aura apporté un nouveau souffle à l’économie mondiale. Elle a également permis d’adapter de nouvelles méthodes de management plus humaines. 36 BIBLIOGRAPHIE : - MINC Alain : Capitalisme.fr, Paris, 2000. - VOLLE, Michel : e-conomie. Economica, Paris, 2000. - CPEII L’économie mondiale 2001. La découverte. Repères. Paris; 2001. - TOUCHARD Patrice : La nouvelle économie mondiale en chiffres, PUF - Dossiers et Documents du Monde, février 2001 - Newbiz, tous les numéros de 1 à 8. - Le Nouvel Hebdo, numéro 1 WEBOGRAPHIE - www.journaldunet.fr www.01net.fr www.strategiesonline.com 37