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LES GRANDES PÉRIODES HISTORIQUES
La préhistoire
L’Histoire naît avec l’écriture. Avant l’écriture, est donc avant l’Histoire, il y a la préhistoire. Que nous
ne ferons remonter que jusqu’à environ deux millions d’années, date des premières traces
d’hominidés sur le territoire français.
La protohistoire
Pour que les peuples entrent dans l’Histoire, il faut donc qu’ils laissent des traces écrites derrière eux.
C’est le cas des Sumériens, dès 4000 av. JC ; puis des Grecs et de Romains. Ces derniers nous
intéressent plus particulièrement car ils nous ont légué plusieurs textes concernant les habitants du
territoire qui nous intéresse, les Gaulois, qui eux ne connaissaient pas l’écriture.
Pour ces peuples à propos desquels nous avons des traces écrites, mais indirectes, on ne peut pas
parler véritablement d’Histoire et les historiens du début du XXe siècle ont forgé le terme de
protohistoire.
L’Antiquité (l’Époque antique)
De l’apparition de l’écriture (4000 av. JC) à la chute de l’empire romain d’Occident (476). Pour ce qui
nous concerne, il s’agit surtout de protohistoire avec l’arrivée des Celtes en Europe occidentale (800
av. JC) même si l’on pourrait parler d’Histoire pour la période gallo-romaine qui suit la conquête des
Gaules par César (Alésia, 52 av. JC).
Le Moyen Âge (l’Époque médiévale)
De la chute de l’empire romain d’Occident (476) à la prise de Grenade (1492). Cette expression date
du XIXe siècle et réduit cette période à une transition plus ou moins obscure entre un supposé Âge
d’or de l’Antiquité et la Renaissance. L’historiographie a depuis, et fort heureusement, fait quelques
progrès et « médiéval » n’est plus tout à fait synonyme de « moyenâgeux ».
Les Temps modernes (l’Époque moderne)
De la prise de Grenade (1492) à la Révolution française (1789). La première date est plus connue
pour la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb mais il faudra quelques années avant de
comprendre la portée de cet événement. D’autres dates auraient pu être prises en compte : autour de
l’an Mil, s’accompagnant d’un remarquable essor démographique, trois États importants d’Europe
occidentale connaissent un tournant majeur dans leur histoire politique (la renaissance ottonienne en
962, la montée sur le trône d’Hugues Capet en 987, la « conquête » de l’Angleterre par Guillaume en
1066) ; 1453, avec la chute de l’Empire romain d’Orient, même si ces conséquences ne seront
qu’indirectes sur le destin de l’Europe occidentale ; 1456, avec la première impression de la Bible…
L’Époque contemporaine
De la Révolution française à nos jours. Le début de cette période est spécifique à la France. Les
États-Unis retiennent plus volontiers la date de leur propre révolution (1776) tandis qu’en Allemagne et
dans les pays anglo-saxons, l’ « histoire » contemporaine ne concerne que notre époque et c’est
l’époque moderne qu’ils subdivisent en trois périodes (fin XVe-1792, 1792-1920, 1920-maintenant).
LA PRÉHISTOIRE
Paléolithique (au plus 10 000 « hommes » sur le territoire français) :

- 1 800 000 : l’homme de Roquebrune (homo habilis)
 Juste des traces de son passage dans une grotte, dans le sud de la France,
entre Monaco et Menton. À rapprocher d’un autre homme des bords du
Tanganyika. 1m30, 40 kg, cerveau 700 cm3. Il sait tailler les pierres, découper
la viande.

- 400 000 : l’homme de Tautavel (homo erectus)
Squelette dans une grotte vers Perpignan. Cerveau 1 100 cm3. A servi de repas à ses congénères.

- 135 000 : l’homme de Neandertal (homo sapiens)
Vallée de Neandertal, près de Düsseldorf. 1m65 (1m78). Plusieurs outils rudimentaires. Enterre
ses morts. Disparaît sans que l’on sache pourquoi. A cohabité avec Cro-Magnon.

- 35 000 : l’homme de Cro-Magnon (homo sapiens sapiens)
Cro-Magnon est le nom d’un site de la Dordogne (Cros : creux, grotte en occitan). Il fait encore très
froid. La calotte glaciaire va jusqu’aux rives nord de la France.
Site de Lascaux, en Dordogne (- 15 000) découvert en 1940 par des enfants et leur chien.

- 4 000 : les menhirs
Le plus gros faisait 350 tonnes, soit 100 de plus que l’obélisque de la Concorde. Vers - 2 700, il y a
environ 1 millions d’hommes sur le territoire français et un commerce actif dans toute l’Europe.
Il reste aussi de la préhistoire des expressions comme « homme de Cro-Magnon », « on est
revenus à l’âge de pierre » mais aussi Lascaux ou Carnac, sites mondialement célèbres et encore
très visités.
LES GAULOIS

- 800 : invasion des Celtes
Chassés par le mauvais temps, plusieurs tribus ayant un commun une langue indo-européenne. Ils
apportent de nouvelles traditions, une nouvelle religion, une nouvelle langue et surtout le fer. Ils
viennent, à cheval, par le nord des steppes d’Asie centrale après un long arrêt en Autriche. Société
dominée par des chefs guerriers mais qui n’ignore pas le commerce. Ils s’installent d’abord dans l’est
de la France (mine de fer de Lorraine). Ils pratiquaient l’inhumation et l’incinération. Ils vont dominer
toute l’Europe, d’est en ouest.
Deux tribus donnèrent leur nom à deux villes françaises : les Senones (Sens, Yonne) et les Parisii
(Paris, « peuple des carrières », ils exploitaient le gypse qui le sera jusqu’au début du XIX e siècle). Le
mot « Celte » se rencontre chez Hérodote (étymologie : « colon » ou « rapide »). Mais les Grecs les
appellent plus souvent « Galates » (« envahisseurs »). Galates, donnera Galli chez les Romains et
l’on désignera ainsi les Celtes qui se sont installés sur le territoire français (Gaulois).
En -450, une nouvelle vague arrive de l’est. Ceux-là ont de meilleures épées et des casques pointus
parfois ornés de corne de taureau ou d’aile d’oiseau. Ils combattent torses nus, parfois entièrement
nus en poussant des cris épouvantables. Aucune tactique, mais pas plus de peur : ils ont la réputation
de ne jamais reculer. De toute façon, seul leur corps meurt, leur âme atteint le paradis des héros. Ils
repartent du combat avec les têtes de leurs ennemis et au rythme lent et lugubre d’un hymne guerrier.
Certaines têtes illustres auront le droit à un embaumement (plutôt bocal à formol) et on sacrifiera
quelques prisonniers aux dieux.
Les banquets d’Astérix sont un des rares points historiquement justes.
Organisation sociale : druides et nobles se réunissent pour élire un chef qui peut être contredit par ses
pairs. Les druides enseignent l’immortalité de l’âme (emportée par un cygne) et détiennent des
connaissances avancées sur les plantes médicinales et la chirurgie (fractures…) Stage de formation
continue tous les ans dans la forêt des Carnutes (Chartres). Ils se méfient de l’écrit et l’interdisent : il
conduit à la paresse intellectuelle. Ils apprennent tout par cœur.
Quelques mots gaulois : alouette, cheval, chèvre, mouton, ruche, ambassade, bagnole, braguette,
brasserie, caillou, chemin, drap, galette, graine, savon, tonneau, valet ainsi que la plupart de noms de
fleuves et de montagnes.
Bons cultivateurs (engrais, moissonneuses…)
Artisans et artistes :
- bijoux, tatouages, body-painting
- différents types de chars à 2 ou 4 roues
- tonneaux
- étoffes de couleurs vives (bandes ou damiers), chemises, manteaux, tuniques, braies
- savon, cheveux décolorés, longues moustaches
- jambons, pain blanc, fromage, foie gras, viandes grillées ou bouillies aux herbes, cervoise,
hydromel, vin (plus rare)
- 400 : environ 10 millions de Gaulois.
- 390 : Brennus (ça veut dire « chef »), chef des Senones, franchit les Alpes et assiège Rome. Les
« oies du Capitole » sauvent les assiégés d’une attaque surprise. Brennus repart contre 350 kg d’or.
Les Gaulois faussent les poids, les Romains protestent, Brennus lance son épée sur la balance en
criant « Vae victis », « Malheur aux vaincus ». Les Romains restent traumatisés pour longtemps.
- 278 : un autre « Brennus » part à la tête de 150 000 hommes, pille Delphes (« Il faut que les dieux
trop riches soient généreux avec les hommes… ») et s’installe en Asie Mineure où il fonde l’empire
des Galates (cf. : épître de Paul)
LES GALLO-ROMAINS
- 192 : les romains massacrent les Gaulois de Gaule cisalpine (descendants de Brennus).
- 125 : ils répondent à la demande d’aide des habitants de Marseille et massacre les Salyens.
- 121 : première colonie en Gaule transalpine : la Narbonnaise (Narbo Martius, dieu de la guerre).
- 80 : Celtill, père de Vercingétorix est brûlé par les siens. Il voulait être roi.
- 58 : massacre de Bibracte (les Helvètes d’Orgérorix en route vers la Saintonge (Niort)).

- 52 : les Romains vainqueurs des Gaulois à Alésia
Vercingétorix mène une politique de terre brûlée mais lance des attaques imprudentes. Après la
victoire de Gergovie (Clermont-Ferrand), il se retrouve assiégé par les troupes romaines à Alésia
(Côte d'Or ?). Il décide alors de faire sortir les femmes, les enfants et les vieillards, afin qu'ils aient la
vie sauve. Mais les Romains ne les laissent pas passer et ils se font massacrer sous les remparts de
la ville. Des renforts arrivent mais ils tombent dans les fosses hérissées de pointes dont les légions
romaines se sont elles-mêmes entourées. C'est un désastre si grand que l'on en a oublié le lieu exact
de cette défaite. Quelques villages ont revendiqué ce lourd héritage, l'un d'eux a été plus ou moins
officialisé mais rien n'est certain.
Vercingétorix ("Le roi suprême de ceux qui marchent à l'ennemi") a été un chef militaire dans l'armée
romaine. Il va se rendre à César qui l'envoie en prison et le fera défilé lors de son triomphe 6 ans plus
tard puis le fera étrangler.
Dans ses Commentaires sur la guerre des Gaules, César met en avant la valeur des guerriers gaulois
(en particulier des Belges) afin de magnifier sa conquête. Il insiste aussi, comme d'autres
commentateurs romains, sur leur "barbarie" afin de justifier cette conquête. Ce mépris pour la
civilisation gauloise va demeurer jusqu'au XIXe siècle et dans les mentalités, "gaulois" est toujours
plutôt synonyme de "bon vivant", au mieux, "brute", au pire.
S'en suivent presque 3 siècles de co-existence pacifique et bénéfique à tous (commerce, voirie…) Les
Gaulois ont 130 jours fériés. La Gaule est divisée en 4 régions dont les adjectifs sont parfois
devenues des noms propres (narbonnaise et aquitaine, lyonnaise, belgique).
En 177, Lyon est le théâtre du premier massacre de chrétiens (qui sont soupçonnés de sacrifices
d'enfants, de cannibalisme, leur prophète aurait une tête d'âne...) Blandine devient la première
martyre française : les fauves s'en sont détournée mais un taureau l'embroche et un rétiaire l'achève.
Entre 200 et 400, les barbares infiltrent peu à peu l'espace romain et intègrent officiellement la société
(et l'armée) dès 330. Les jeunes Romains, par provocation, adoptent leur mode (braies, cheveux
longs, bottes).
Saint Martin
Vers 336, Martin, un Pannonien
(Hongrie), est soldat en Gaule.
Il partage son manteau avec un
pauvre qui était le Christ. Quelques
miracles plus tard, il meurt et on
l'enterre, vénéré comme un saint,
avec la moitié de sa cape (cappa)
dans un lieu que l'on appellera
capella (=> chapelle).
LES INVASIONS BARBARES
406 : les invasions barbares
Profitant du gel du Rhin, les Vandales (=> vandaliser) arrivent en Gaule par milliers, fuyant les Huns,
et saccageant tout sur leur passage jusqu'en Espagne (=> l'Andalousie); où ils arrivent en 409.
Ils sont suivis des Suèves, des Alains… et des Burgondes qui s'établiront en Bourgogne.
407 : Les Wisigoths, chassés aussi par les Huns, passent les Alpes et atteignent Rome, qu'ils pillent,
en 410. Puis, ils traversent encore les Alpes et conquièrent tout le sud-ouest, de Narbonne à
Bordeaux. Ils signent un accord avec Rome mais, ariens, les problèmes commencent avec les
Gaulois chrétiens (Christ est-il d'essence divine ?).
Dès 260, des Francs, installés entre la mer du Nord et Mayence, tentent des incursions en Gaule.
En 357, ils s’allient aux Goths, Vandales, Burgondes et autres Alamans. Les Francs saliens
s’installent autour de Liège.
406 : Ils sont chassés par les Huns.
430 : On les retrouve autour de Cambrai d’où on ne les laisse pas (encore) s’étendre.
Ve-VIe siècles : chassés par les Angles et les Saxons de Bretagne, des Celtes arrivent en Armorique,
qu’ils appelleront Petite-Bretagne.
451 : Attila, Fléau de Dieu, franchit le Rhin, à la poursuite des Wisigoths, dévaste Metz, Reims et
Troyes et s’arrête avant Paris (2 000 habitants), peut-être grâce aux prières de Sainte Geneviève, une
mystique d’une trentaine d’année (qui mourra à 89 ans). Le Panthéon se dresse sur la montagne qui
porte son nom.
Marchant sur Orléans, il finit par fuir devant une coalition menée par le Gallo-Romain Aetius et le
Wisigoth Théodoric. Il est rejoint aux champs Catalauniques : 50 000 Huns contre 60 000 fédérés et
165 000 morts ! (quand on aime, on ne compte pas…)
Théodoric est mort dans la bataille.
Attila repart dévaster le nord de l’Italie et meurt d’un saignement de nez.
Aetius, dernier grand empereur, est assassiné par l’obscur Valentinien III.
476 : Odoacre, un chef Germain, dépose Romulus Augustulus, un enfant qu’il avait placé sur le trône
de l’empereur. Il s’installe à Ravenne et renvoie les insignes de la fonction impériale à Zénon,
empereur romain d’Orient, par respect pour ladite fonction. De Romulus à Romulus.
LES FRANCS / LES MÉROVINGIENS
430 : les Francs Saliens s’installent autour de Cambrai, Clodion le Chevelu est à leur tête.
Les Francs ont pour coutume de diviser leur royaume entre tous leurs fils. Mais, pour quelques
générations, le hasard fera qu’il n’y aura qu’un seul fils mâle en vie à la mort de son père.
448 : Son fils Mérovée lui succède. Il était présent aux Champs Catalauniques. Il donnera son nom à
la dynastie des Mérovingiens.
458 : Childéric succède à Mérovée. Son royaume s’étend autour de Tournai sur une partie de la
Belgique. Il veut gouverner seul, se fait chasser et se réfugie chez un roi voisin. Il séduit sa femme.
461 : On le rappelle dans son royaume où Basine le rejoindra après avoir quitter son mari sans rien
dire. Childéric l’épouse. Ils ont un fils : Clovis.

481 : Childéric meurt. Clovis devient roi à 15 ans.
Quand Clovis devient roi (carte p.54) :
- les Wisigoths, des ariens qui harcèlent les
représentants de l’église romaine, occupent tous le
sud-ouest jusqu’à la Loire et la côte méditerranéenne
(Toulouse),
- le royaume Burgonde s’étend le long de la Saône et du
Rhône jusqu’au lac de Constance à l’est et la Loire à
l’ouest,
- le royaume gallo-romain de Syagrius s’étend au nord
de la Loire de la Bretagne à la Moselle (Soissons),
- le royaume de Alamans le prolonge à l’est,
- le royaume de Francs Ripuaires est entre celui des
Francs Saliens et des Alamans.
Clovis veut tout conquérir.
486 : Après avoir fixé une date avec Syagrius, ils se livrent
bataille et Syagrius est vaincu dans les grandes largeurs. Il fuit
à Toulouse chez Alaric, jeune roi des Wisigoths. Mais celui-ci
le renvoie à Clovis qui le fait égorger avant de s’installer à
Soissons.
Le vase de Soissons
Après le pillage, les Francs partageait le butin en tirant au sort. L’évêque de Soissons voudrait
récupérer un vase en argent qu’il aime bien. Clovis le réclame à ses soldats mais l’un d’eux refuse et
écrase (brise) le vase d’un coup de hache. Silence de mort. Clovis ne dit rien. Mais un an plus tard,
lors d’une revue de troupe, il retombe sur le soldat et jette les armes de ce dernier à terre sous
prétexte de mauvais entretien. Le soldat se penche et Clovis lui assène, à son tour, un coup de hache
sur le crâne : « Ainsi as-tu traité le vase de Soissons ! » (« Souviens-toi du vase de Soissons ! » est la
sentence, légèrement fautive, qui est restée dans les esprits.)
Dans les années qui suivent, Clovis conquiert peu à peu le royaume de Syagrius et se débarrasse des
Francs saliens qui pourraient le gêner (essentiellement des cousins, voire des frères).
493 : Il épouse Clotilde, nièce de Gondebaud, roi des Burgondes, chrétienne.
496 : À l’appel des Ripuaires, il va se battre contre les Alamans. À Tolbiac (actuelle Zülpich), au sud
de Cologne), le sort de la bataille est indécis. Clovis s’agenouille et fait appel au « Dieu de Clotilde ».
Les Alamans reculent.
Le 25 décembre (sujet à caution), il est baptisé à Reims, par l’évêque Rémi. « Depona colla,
Sicamber » devient « Courbe la tête, fier Sicambre » (le barbare est soumis). En fait, il fallait
comprrendre : « Dépose tes colliers, Sicambre » (oublie tes amulettes de païens).
Il est le premier roi germanique à se faire baptiser (France, fille aînée de l’Église) et il gagne ainsi un
précieux allié.
500 : Pour venger Clotilde, il attaque Gondebaud. Celui-ci avait fait tué son père, alors roi, sa mère et
ses frères. Il le bat et en fait son allié pour attaquer Alaric.
504 : Alaric meurt à la bataille de Vouillé (vers Poitiers) pendant que Gondebaud prend Narbonne.
C’est à cette époque que Clovis choisit Paris comme capitale (30 000 habitants), plus centrale que
Soissons.
511 : Mort de Clovis et partage de son immense royaume.
On sait tout ça grâce à Grégoire, évêque de Tours (573-594) qui rédigea
une Histoires des Francs.
C’est le début d’un siècle de boucherie au plus haut niveau.
Clovis a 4 fils qui meurent peu à peu laissant Clotaire seul maître (558).
Cruel, violent, sanguinaire, il ira jusqu’à faire torturer et brûler l’un de ses
fils, un peu rebelle.
Ensuite, globalement, deux royaumes vont s’affronter : la Neustrie et
l’Austrasie. Deux figures féminines marqueront l’époque : Brunehaut, qui
épouse le roi d’Austrasie en 566 et Frédégonde, qui épouse celui de
Neustrie un peu plus tard.
Frédégonde fera assassiner tous ceux qui la dérangent, y compris, sans
doute, son mari avant de mourir paisiblement dans son lit. Elle donne
naissance à Clotaire II.
Celui-ci va torturer sa rivale, Brunehaut, qui ne valait guère mieux, mais
tout de même, et l’attachera, nue, par un bras, une jambe et les cheveux à un cheval furieux. Elle
meurt dans d’atroces souffrances à près de 70 ans.
Clotaire II est seul maître de tout le royaume. Il va le léguer à son fils unique : Dagobert.
629 : le bon roi Dagobert
623 : Dagobert est roi d’Austrasie, il obtiendra la Neustrie en
629, à la mort de son père. Il s’installe alors à Paris et voyage
dans tout son royaume pour rendre la justice. Le fameux Éloi,
pas encore saint, fut l’un de ses principaux conseillers. Plutôt
pacifique, il se bat quand même à ses frontières et ramène au
calme les Bretons et les Saxons.
Il met l’Église dans sa poche par de nombreux dons,
notamment à la basilique de Saint-Denis qu’il fonde en
l’honneur du premier évêque de Paris (nord-est de Paris) où il
se fera inhumé à sa mort, lançant une longue tradition. Cet
homme n’avait qu’un défaut, un goût immodéré pour les
femmes.
La chanson date de la Révolution et faisait en fait allusion à
Louis XVI, connu pour son étourderie.
Les deux rois qui lui succèdent on respectivement neuf et trois
ans. Apparaissent alors, sur le devant de la scène, les maires
de palais qui « assistent » ces rois trop jeunes. Ce sont en fait
des majordomes, mais la clef des vivres leur donne un pouvoir
qu’ils sauront étendre, assez rapidement, sur l’ensemble des
fonctions royales.
LES PIPPINIDES
Pépin de Landen, mort en 640, est le fondateur de la dynastie des Pippinides (Pépinides), dynastie
parallèle qui va peu à peu se substituer à celles des Mérovingiens.
Pépin de Herstal, fils du premier, profite des guerres incessantes entre Austrasie et Neustrie pour
s’imposer en chef militaire. À la tête d’une armée qu’il s’est monté tout seul, il vainc le roi de Neustrie
mais ne le chasse pas (687). Il préfère lui laisser son trône mais lui imposer comme maire un homme
à lui.
De fait, lui et ses successeurs vont confisquer le pouvoir des rois qu’ils vont placer sur le trône, le plus
souvent des enfants ou des adolescents que l’on sort parfois de leur abbaye-prison pour les montrer
aux peuples. Éginhard, biographe de Charlemagne, va imposer à des générations d’écoliers l’image
des ces rois gras et chevelus promenés sur des chars à bœufs, donc fainéants.

732 : Charles Martel arrête les Arabes à Poitiers
Charles Martel est le fils de la maîtresse de Pépin, Alphaïde. Pépin meurt en 715 et Charles,
emprisonné par sa « belle-mère » Plectrude, s’évade et prend le titre de maire de Neustrie en 718. Il
sort un roi fantoche de sa poche, ou plutôt d’une abbaye, premier d’une série de trois.
Grand chef de guerre, il gagne son surnom du fait que la soudaineté de ses attaques assomme ses
ennemis comme un marteau.
À cette époque, quelques hordes musulmanes organisent des razzias dans le Languedoc et
l’Aquitaine. Eudes, roi d’Aquitaine, fait appel à Charles qui arrête les Arabes à Poitiers (732). Une
habile propagande fera de Charles le sauveur de la Chrétienté, propagande qui fonctionne encore
pour la plupart des historiens et l’ensemble de la population française. Le pape lui donnera le titre de
subregulus (presque roi) et Charles s’assiéra directement sur son presque trône.
Le symbole est beau (632-732) mais l’expansion musulmane ne s’arrêtera en fait en 751, à Talas
(Kazakhstan) par une victoire sur l’armée chinoise. De plus, Poitiers n’empêchera pas les Musulmans
de continuer leurs avancées à travers le Massif Central, jusqu’à Tours et jusqu’en 759, sans compter
l’installation d’un comptoir commercial florissant du côté de Marseille. On retrouvera, entre Auvergne
et Atlantique, quelques fiefs dont les seigneurs portaient des noms peu chrétiens, et ce pendant
plusieurs siècles.
À sa mort, il divise son presque royaume entre ces deux fils légitimes, Carloman et Pépin, et un
bâtard, Grifon. Ce dernier, ainsi que plusieurs régions et les Alamans se révoltent. Les deux frères
vont mâter tout ça dans des bains de sang et décident de ressortir un roi de leur manche pour rétablir
la paix. Ça marche et Carloman décide de prendre l’habit de moine en 747 (Mont Cassin, Saint Benoît
de Nursie) et Pépin le Bref reste seul aux commandes.
Pépin envoie des émissaires à Rome avec une questions « Au sujet des rois qui sont en France et qui
n’exercent pas le pouvoir, est-ce que cela est bon ou mauvais ? » Ce à quoi le pape répond : « Il vaut
mieux appeler roi celui qui exerce, plutôt que celui qui n’exerce pas le pouvoir royal. » Et Zacharie
ordonne que Pépin soit fait roi. Il avait tout pour plaire au pape : appui plus solide et moins lointain que
l’empereur byzantin, réformateur de l’église franque (il chasse quelques évêques ivrognes, ignares,
débauchés ou les trois), descendant d’un saint (Arnould) et du sauveur de la Chrétienté (Charles
Martel).
En 750, Pépin réunit les grands et se fait élire roi. Quant à Chilpéric III, on le renvoie dans son
monastère, non sans l’avoir tondu, où il mourra en 755.

751 : Pépin le Bref, premier roi carolingien.
Il est d’abord oint par Boniface, que son père, Charles Martel, avait envoyé convertir les Germains (il
finira par se faire massacrer en 754) puis par le pape, Étienne II, venu lui demander de l’aide contre
les Lombards. Étienne oindra à cette occasion Pépin mais aussi son fils, le petit Charles, qui
deviendra grand ; le frère de Charles, Carloman ; la mère de Charles, Berthe au grand pied (singulier,
pluriel ?) inaugurant ainsi la royauté de droit divin.
768 : Mort de Pépin, il divise son royaume entre ses deux fils : Charles et Carloman. Les deux se
querellent, mais pas très longtemps : Carloman meurt à son tour en 771.
CHARLEMAGNE
Charles a de grandes idées quant à l’organisation de son pays, mais il lui faut deux choses : la paix
intérieure et de l’argent. Et pour faire d’une pierre deux coups, il va passer une grande partie de son
temps à guerroyer aux frontières :
- contre les Bretons, qui refusent de payer leur tribut. Il y crée une marche ( marquis) qu’il
confie à un certain Roland.
- en Espagne, contre les Arabes [lors du retour d’une campagne désastreuse, en 778, alors qu’il
franchit le col d’Ibaneta, l’arrière-garde, commandée par Roland, est attaquée par des Vascons
( Basques). Roland, voyant sa mort proche, tente de briser Durendal ( faille de Roland)
puis sonne de l’olifant (défense d’éléphant). Charlemagne l’entend mais Ganelon lui fait croire
qu’il entend mal. Le cor sonne trois fois avant que Charlemagne se bouge, mais trop tard, tout
le monde est mort. Ganelon mourra aussi, d’après la chanson composée par Turold au début
du XIIe siècle.]
- en l’Italie, contre les Lombards et les Sarrasins ;
- en Carinthie, contre les Avars ;
- enfin, et surtout, contre les Saxons, à l’est.
La plupart de ces campagnes sont également justifiées par la défense de la foi chrétienne, qu’il tente
d’imposer au passage aux Avars et aux Saxons.
L’empereur à la barbe fleurie (flori signifierait plutôt éclatant et sur la statuette équestre du Louvre, il
n’a pas de barbe du tout), plaisait aux femmes, du haut de son mètre quatre-vingt-dix (cf. : son
squelette) et il en a autant usé que Dagobert.
- Himiltrude, sera répudiée en 770 en raison de son origine modeste (mère de Pépin le Bossu).
- Désirée, fille du roi des Lombards, que Berthe est allée chercher à Pavie, est laide.
Heureusement, son père envahit l’année suivant les États du pape, ce qui donne à
Charlemagne l’occasion de les combattre et de répudier Désirée.
- C’est à cette époque qu’il croise Hildegarde, jeune beauté de 13 ans. En 783, elle meurt en
accouchant d’une fille : c’ était le 9ème enfant qu’elle donnait à Charles, dont Louis, le survivant
de jumeaux de 778.
- Après Hildegarde, il aura encore deux femmes, Fastrad (deux filles) et Liutgarde (une fille).
Après la mort de cette dernière, en 799, il ne prendra plus que des concubines qui lui donneront
encore 7 enfants, sans compter les totalement illégitimes. En père attentionné, il veille jalousement et
affectueusement sur toute cette « petite » famille.
Charlemagne guerrier, Charlemagne père. Passons au Charlemagne administrateur.
Son royaume est divisé en unités administratives qu’il confie chacune à un de ses fidèles compagnons
(en latin, comes, comitis  comte, comté). Pour surveiller les actions de ces comtes – et pour faire
appliquer les lois, décidées avec les grands du royaume – ils envoie les missi dominici, toujours par
deux, un évêque, un laïc.
Il crée aussi 250 pagi, habités par des pagenses ( paysans).
La loi se fait très sévère, notamment par rapport aux mendiants, s’ils sont en état de travailler, et aux
voleurs (la mort après trois vols).
781 : Charlemagne rencontre Alcuin à Parme. Ce moine saxon, directeur de l’école épiscopale de
York, l’impressionne par son savoir. Il le fait venir à Aix-la-Chapelle où il enseignera dorénavant.
Charles est un de ses fidèles élèves.
Alcuin crée un scriptorium où il met au point la lettre caroline, toujours en usage. Il fait appel à l’aide
de moines réfugiés en Irlande qui n’ont pas connu les troubles des invasions barbares. À l’époque, la
lecture et l’écriture ont failli se perdre et plus personne ne savait lire la bible de Saint Jérôme, publiée
au Ve siècle.
789 : Charles ordonne au clergé d’ouvrir partout des écoles que tous les enfants doivent fréquenter,
quelle que soit leur origine. Ils y entrent à l’âge de 7 ans, suivent un enseignement oral que les plus
doués poursuivront jusqu’à maîtriser les 7 degrés de la connaissance (grammaire, rhétorique,
dialectique, arithmétique, géométrie, musique, astronomie).
Féru de sciences, Charles parlait couramment grec et latin mais ne saura jamais écrire, malgré son
acharnement à la tâche.

800 : Charlemagne couronné empereur à Rome
En 799, Léon III échappe de peu à un attentat commandité par l’empereur de Byzance. Charles
envoie des hommes à sa rescousse et lui rend visite au Noël de l’année suivante. Alors qu’il se
prosterne devant l’autel pour prier, Léon débarque avec une couronne et lui pose sur la tête.
Charles, dans un premier temps, n’est pas très heureux de cette surprise. Il n’a que faire de ce titre
qui risque, au mieux, d’attiser la jalousie déjà marquée (cf. : l’attentat) de Byzance. Il s’en
accommodera finalement fort bien.
En 806, Charles avait déjà divisé son royaume entre ses trois fils, mais deux d’entre eux meurt, il ne
restera que Louis lorsque Charles s’éteindra en janvier 814 à l’âge respectable de 72 ans.
LES CAROLINGIENS
813 : Charlemagne se sent proche de la mort. En 806, il avait divisé son empire entre ses trois fils
mais deux d’entre eux meurent peu après. Il ne reste que le Louis. Charles demande aux grands de
l’empire de lui transférer la couronne impériale. Aucun ne refuse.
814 : Charles s’éteint. Il est couronné une deuxième fois à Reims par le pape Étienne IV.
Avant, il aura pleuré, agenouillé, front contre terre, sur le tombeau de son père. De là, lui viendra son
surnom de Pieux. Personne influençable, il s’entoure de conseillers, essentiellement ecclésiastiques.
817 : Le portique d’Aix s’effondre sur le cortège impérial. Louis n’est que blessé mais voit que la vie
est fragile. Il décide d’un partage de l’empire entre ses trois fils : Lothaire (empire), Pépin (Aquitaine)
et Louis (Bavière).
819 : En seconde noces – il était veuf – il épouse Judith. En 823, naît Charles. Il va le doter en
prenant un peu sur la part de Lothaire. Ce dernier n’est pas content et de nombreuses tensions
agitent la famille.
831 : Nouveau partage. Personne n’est content et les trois aînés s’unissent contre leur père.
833 : Ils le destituent. Il passera un an dans un monastère avant que ses enfants ne se battent pour le
rétablir. Les choses se tassent, Pépin meurt en 838, ce qui profite d’abord à Charles, le chouchou de
son papa et de sa maman.
839 : 4ème partage : Lothaire aura tout l’est, Charles, tout l’ouest, Louis ne conserve que la Bavière. Il
réunit une armée contre son père mais celui-ci meurt l’année suivante, en 840.
Lothaire revendique alors le partage de 817, qui laisse la seule Aquitaine à Charles. Louis revendique
celui de 831, où son père l’avait mieux doté pour rabattre son caquet à Lothaire. Une première bataille
(50 000 morts) oppose Lothaire à ses frères. Ces derniers gagnent mais se font ensuite harceler. Ils
décident alors de se prêter un serment de fidélité et d’assistance mutuelle.
842 : Le(s) serment(s) de Strasbourg. Louis s’adresse à ses troupes en tudesque [le mot vient d’une
recommandation de 813 des évêques au prêtres afin que ces derniers s’adressent au peuple en
langue populaire (tiudesc, en langue germanique de l’époque qui donnera Deutsch)] et Charles en
langue romane.
Les batailles s’enchaînent entre les frères pendant que les Normands commencent à remonter les
fleuves du nord et que les Maures pillent la Provence. Les trois frères décident de s’entendre. Des
experts se réunissent pendant 9 mois pour établir un partage équitable.

843 : Le traité de Verdun.
-
Lothaire reste empereur et conserve les deux capitales : Aix et Rome et obtient une bande
centrale de 200 km de large sur 2000 de long, la Francia media.
Louis II le Germanique obtient les territoires de l’est : la Francia orientalis.
Charles II le Chauve, ceux de l’ouest : la Francia occidentalis.
-
Une division entre les petits-fils de Lothaire va laisser le nord à Lothiare II. C’est lui qui donne son nom
à cette région qui deviendra la Lorraine.
Le territoire central ne cessera, au cours des années, de faire l’objet de la convoitise de ses deux
voisins. Jusqu’à ce qu’il disparaisse presque totalement. Alors, l’est et l’ouest continueront à
s’affronter entre eux, et ce jusqu’en 1945.
Sans doute suite à une explosion démographique, les peuples du nord arrivent sur leurs drakkars et
pillent tout sur leur passage.
- 843 : Nantes, Bordeaux, Toulouse…
- 845 : Paris (la même année, les Bretons se révoltent, Charles ne sait plus que faire).
- 885 : 700 drakkars (plus de 40 000 hommes) assiègent Paris que Eudes défend.
Sous les règnes de Charles le Chauve et de Louis II le Bègue, la féodalité se développe. Elle est la
conséquence de deux phénomènes :
- l’ordre voulu par Charlemagne a rendu des populations mouvantes au gré des invasions en
sédentaires.
- les problèmes auxquels les rois sont confrontés les poussent à laisser une certaine liberté
(notamment leurs propres lois) aux grands du royaume (descendants des comtes mis en place
par Charlemagne) en échange de leur fidélité.
Peu à peu le pouvoir se disloque et les châteaux sur mottes apparaissent un peu partout. Le seigneur
protège ses vassaux et ses serfs en échange de sa protection. La société tripartite s’installe vraiment
(ceux qui combattent, ceux qui prient, ceux qui travaillent / oratores, bellatores, laboratores, Aldabéron
de Laon, 1020). Au cours de la cérémonie de l’hommage, les vassaux se remettent entre les mains du
suzerain et obtiennent en échange un fief. Certains sont si importants qu’ils prennent à leur tour des
vassaux. Se forment donc un pyramide avec le roi à son sommet, mais le pouvoir réel de ce dernier
se trouve dilué dans l’ensemble de la pyramide.
Des luttes incessantes vont opposer les vassaux entre eux, voire les vassaux contre leur suzerain,
occasionnant beaucoup de pillages.
Pendant ce temps, la France continue de subir les assauts des Normands. Jusqu’en 911. Charles III
le Simple (en référence à la simplicité et la droiture de ses jugements), troisième fils de Louis II, est
alors roi, succédant à ses deux frères.
Rollon, chef normand, subit une défaite. Il était banni de sa Norvège natale et ne peut donc y
retourner. Charles lui propose alors de défendre Rouen, Évreux et Lisieux en échange d’un serment
de fidélité et du baptême de tous ces hommes.
Petite parenthèse sur la définition de guerre et de bataille. Rollon subit une défaite et obtient la
Normandie. Cela peut paraître surprenant. En fait, la bataille fait partie du processus de paix. La
guerre, à l’époque, consiste essentiellement en chevauchée de pillage sur les terres du voisin.
Personne n’apprécie cet exercice : les champs sont massacrés, le bétail aussi, voire quelques serfs
au passage. Pas très bon pour l’économie. Ces guerres, le plus souvent privées, vont ensanglanter
l’Occident pendant quelques siècles.
La bataille, elle, est prévue, presque planifiée. Lorsque Clovis attaque Syagrius, il le prévient et tous
deux décident d’un endroit où se retrouver. C’est ainsi que ce déroule une bataille : les deux armées
se retrouvent, suite à un accord entre leur chef, et se combattent. Le but n’est pas tant de tuer que de
capturer les seigneurs de l’armée adverse. Toutes les morts sont déplorées (on ne parle évidemment
pas ici de la piétaille, quoiqu’elle aussi mérite d’être épargnée).
À l’issue de la bataille, peu différente dans sa forme, voire dans ses conséquences, du tournoi, on se
retrouve et l’on redéfinit les liens de vassalité et de suzeraineté.
En accordant la Normandie à Rollon, Charles fait d’une ennemi, certes récemment défait mais
toujours potentiellement dangereux, un allié qui pourra devenir précieux.
En ces temps troubles, va se développer le monachisme bénédictin.
EN 529, un ermite dont la sainteté avait attiré plusieurs personnes, fonde le monastère de MontCassin et y rédige une règle vers 540. Elle sera reprise par Saint Benoît d’Aniane qui la répandra sous
le règne de Louis le Pieux.
910 : Fondation de Cluny, rattachée directement à Rome. Elle aura beaucoup de filles : plus de mille
au début du siècle suivant.
950 : Les clunisiens organisent le pèlerinage de Compostelle.
1098 : Robert de Molesme, lassé des ors dans lesquels se complaît Cluny, victime de son succès,
fonde Cîteaux. On quitte l’habit noir pour un habit écru, on se recentre sur la prière, le travail,
l’humilité.
1112 : Les ornements ont fini par envahir aussi les abbayes cisterciennes, victimes elles aussi, de leur
succès. Bernard fonde Clairvaux. Les nouveaux moines adoptent l’habit blanc.
Après Louis II le Bègue (mort en 879), deux dynasties vont se partager le trône (n’oubliez pas que la
fonction royale est élective) : les Carolingiens, descendants de Louis et donc de Charlemagne ; et les
Robertiens, descendants d’un cousin des deux aînés de Louis le Pieux (Eudes, le premier, avait
défendu Paris contre les Normands). Tous auront du mal à se maintenir sur le trône et auront
tendance à mourir assez jeunes.
LES PREMIERS CAPÉTIENS
En 987, Hughes, un collatéral des Robertiens, morts sans héritiers, tout comme les Carolingiens,
monte sur le trône. Il est choisi en raison de son ascendance, mais aussi parce qu’il est l’un des plus
faibles entre les grands qui se partagent le royaume. Son surnom de Capet lui vient de son habitude
de porter le morceau de cape de Saint Martin.
À cette époque, le domaine royal s’étend entre Paris et Orléans. Hughes y ajoute quelques fiefs et
abbayes dispersés dans le bassin parisien.
Mais dès son accession à ce trône dont personne ne veut vraiment, il désigne son fils comme
successeur et fait valider son choix par les grands réunis.
Hasard heureux, pendant 10 générations, il y aura toujours un héritier mâle. Donc, 10 Capétiens se
succèdent sans problème : Robert II, Henri Ier, Philippe Ier, Louis VI, Louis VII… Sous les trois derniers
de cette liste, le domaine royal commence à s’agrandir, la plupart du temps sans recourir à la guerre
mais par des politiques matrimoniales habiles et en faisant jouer le droit de mainmorte (récupérations
par la couronne de fiefs en déshérence).
L’autorité royale s’impose également, notamment grâce à Suger, abbé de Saint-Denis et conseiller et
ami de Louis VI puis de Louis VII. Il théorise le concept de la couronne : celle-ci représente la
continuité de la fonction royale et devient plus importante, symboliquement, que celui qui la porte.
Cette théorie renforce l’acuité et la portée de la tradition inaugurée par Hughes d’associer le fils du
roi au trône du vivant de ce dernier. Dorénavant, on peut dire « le roi est mort, vive le roi ! ».
Suger va également favoriser la naissance des communes urbaines qui acquerront des droits
particuliers. Les rois vont d’ailleurs multiplier ce type de libertés dans leur domaine afin d’affaiblir les
domaines voisins : en accordant des privilèges aux paysans qui cultivent ses terres, le roi rend jaloux
ceux des terres voisines. D’où fuites de ces populations opprimées vers les fiefs royaux, voire
révoltes. Le seigneur est alors obligé de faire appel au roi pour rétablir l’ordre, ce que ce dernier fait en
échange du renouvellement du lien de vassalité.
De tous les mariages organisés par les Capétiens, le plus intéressant fut sans doute celui de Louis VII
avec Aliénor d’Aquitaine : cette duchesse règne sur un grand quart sud-ouest du territoire français
actuel, c’est l’un des plus puissants vassaux du roi de France. Mais ce mariage ne donne pas
d’enfants et Louis décide de répudier sa femme, au grand dam de Suger qui voit là la perte d’un
immense avantage pour le royaume.
Le mariage est annulé en 1152. En 1154, Aliénor épouse Henri II Plantagenêt. Ce qui place le roi de
France de France dans une fâcheuse posture face à son puissant vassal, le roi d’Angleterre.
Certes, le domaine royal s’est agrandi, depuis Hughes Capet (cf. : carte). Il s’est légèrement étendu et
les territoires, autrefois discontinus, se sont finalement rejoints en un tout cohérent. Les duchés et
comtés qui l’entourent ainsi que le comté de Toulouse sont fidèles au roi de France.
Mais Henri II, déjà maître de la
Normandie, de la Bretagne et de
l’Anjou, voit entrer dans son giron le
Poitou, l’Aquitaine, l’Auvergne et la
Gascogne. Il est vassal du roi du
France pour près des 2/3 du royaume
de ce dernier.
LES CROISADES
1078 : Jérusalem tombe aux mains des Seldjoukides.
1095 : À l’issue du concile de Clermont (maintenant, Clermont-Ferrand), le pape Urbain II appel à la
croisade pour délivrer les Lieux Saints.
Outre cette justification religieuse, il est de diplomatique (venir au secours de l’empire romain
d’Orient), d’économique (maintenir et faire progresser le commerce avec l’Orient), démographique (la
population européenne va passer de 5 à 10 millions d’habitants entre 1000 et 12000) et surtout de
politique (depuis quelques temps déjà, l’Église et les gouvernants européens tentent d’imposer la paix
sur le continent, ou du moins la fin des guerres privées entre les seigneurs de fiefs : les croisades vont
envoyer quelques générations de bouillants chevaliers guerroyer hors de la Chrétienté).
1096 : Pierre l’Ermite, précédé de sa réputation de saint, prêche la croisade auprès des plus démunis.
En avril, il en a réunis plus de 100 000 autour de Cologne d’où il va partir pour une expédition
lamentable, faite de vols, de crimes, de pogroms anti-Juifs à travers le Saint Empire pour s’échouer
aux portes de Nicée. Ils se feront tous massacrés par les Turcs dont les armées entourent la capitale
impériale. On raconte que pendant des dizaines d’années leurs ossements formeront comme une
petite montagne.
1096 : Départ de la croisade des barons avec Godefroy de Bouillon à leur tête. Après avoir fait tomber
quelques villes turques, ils s’emparent de Jérusalem en 1099 et y perpètrent un massacre qui fera
couler des flots de sang dans toute la ville. Le souvenir de cet événement marquera durablement les
relations entre Arabes et Croisés.
1145 : Départ de la deuxième croisade, avec Louis VII a sa tête, afin de venir en aide aux nouveaux
États Latins d’Orient qui peinent à se maintenir face aux attaques incessantes de tribus arabes,
heureusement désorganisées. Aliénor ne veut pas laisser partir son mari seul. Elle se joindra donc à
l’expédition avec ses suivantes, formant une cour très bruyante : on parlera même de la croisade
« caquetante ». Mais elle ne fera pas que parler avec, entre autres, son oncle, Raymond de Poitiers.
Son attitude irrité le roi au plus point et sera pour beaucoup dans la répudiation qui suivra leur retour
en France.
1187 : Saladin réussit le véritable exploit de réunir enfin sous une même bannière les différents
royaumes arabes. Cela fait, reprendre Jérusalem aux Croisés n’est plus qu’une formalité.
1189 : Départ de la troisième croisade avec, excusez du peu, le roi d’Angleterre, Richard Ier Cœur de
Lion, le roi de France, Philippe II Auguste et l’empereur du Saint Empire Romain Germanique,
Frédéric Ier Barberousse. Ce dernier ne verra jamais la Palestine : il meurt, noyé, dans un torrent de
Cilicie, le 10 juin 1190.
Français et Anglais se retrouvent devant les remparts d’Acre, ville qui tombe entre leurs mains en
mars 1191. Richard, chevalier fougueux, s’attire toute la gloire au détriment de Philippe et de Léopold,
duc d’Autriche. Le premier décide rejoindre la France après une entrevue entre les chefs croisés et
Saladin au cours de laquelle l’accès à la Ville Sainte pour les Chrétiens est négociée dans une
atmosphère de respect mutuel. Le deuxième capturera Richard sur son chemin de retour et le
maintiendra en captivité jusqu’en février 1194 (Aliénor, sa mère, s’acquittera d’une colossale rançon).
Les croisades suivantes seront une suite de ratage lamentable. Nous en reparlerons avec Louis IX qui
organisera, sans plus de succès, les deux dernières.
PHILIPPE II AUGUSTE (1180-1223)
De retour en France, Philippe va œuvrer à l’agrandissement du domaine royal et l’affermissement de
son pouvoir sur les seigneurs qui dépendent de sa couronne. Pour cela, les croisades seront une
précieuse aide : si lui revient sain et sauf, la noblesse française a payé un assez lourd tribut. Et
Philippe de relancer avec une nouvelle vigueur la politique de mainmorte inaugurée par ses
prédécesseurs. D’autre part, à défaut d’y être mort, d’autres nobles sont demeurés en Orient et
Philippe va profiter de ces vacances de pouvoir pour réaffirmer son autorité.
Profitant également de la captivité de Richard, il s’empare de la Normandie, propriété u roi anglais.
Il va aussi réorganiser l’administration du pays en déléguant ses pouvoirs dans les provinces
françaises à des hommes de qualités, la plupart issus du peuple : dans le nord, on les appellera baillis
(de l’ancien français « baillir » = administrer), dans le sud et l’ouest, on les appellera sénéchaux.
Le royaume prospère et Philippe embellit Paris (rues pavées, halles, enceinte, forteresse du Louvre…)
Sitôt de retour, Richard tente tout pour reprendre la Normandie. Il meurt bêtement d’une flèche perdue
alors qu’il inspectait, sans armure, ses lignes. Aliénor, 80 ans, viendra lui fermer les yeux.
1202 : Jean, le deuxième fils d’Aliénor, enlève la fiancée d’un seigneur poitevin. Celui-ci s’en plaint
auprès de son suzerain, Philippe. Le roi convoque Jean qui, roi de même depuis la mort de son frère,
refuse de se présenter. Philippe lui confisque aussitôt ses terres françaises : Jean perd d’un coup la
Normandie, le Maine, l’Anjou et le Poitou et gagne son surnom de « sans Terre ».
1214 : La nouvelle puissance de la France fait des mécontents. Le comte de Flandre et celui de
Boulogne, vassaux de Philippe, souhaitent un rapprochement avec l’Angleterre pour favoriser leur
commerce de laine (on n’a pas fini d’entendre parler de cette question commerciale !). L’Angleterre de
Jean sans Terre, justement, qui voudrait bien récupérer ses biens. Et jusqu’à l’empereur germanique,
Othon IV de Brunswick, qui craint pour ses frontières.
Tout ce petit monde va former une vaste coalition contre la couronne de France et tenter de la prendre
en tenailles : les comtes et l’empereur, au nord-est ; l’Anglais, à l’ouest.
C’est par là que les choses vont commencer. Jean à débarquer et se dérobe aux tentatives de
Philippe. Mais celui-ci se doute qu’un plus gros morceau l’attend au nord. Alors, il envoie son fils, le
jeune Louis, qui gagnera son surnom : le Lion. En effet, il fait fuir les Anglais à la suite de la bataille de
La Roche-aux-Moines. Nous sommes le 2 juillet.
Le 27 juillet, alors que Philippe n’est pas encore au courant du succès de son fils, c’est lui qui va livrer
bataille, autour de Bouvines, alors que nous sommes un dimanche, jour sacré pendant lequel il est
interdit de se battre. Mais Philippe aura Dieu pour lui : ce n’est pas lui qui attaque, il ne fait que se
défendre. Et écrase son adversaire après avoir été lui-même en péril.
Le triomphe est complet : Othon a fui, les comtes sont capturés et montrés au peuple, enferrés. C’est
aussi l’aube d’un sentiment national : des hommes de plusieurs régions de France, et non la seule
armée du roi – dont une grande partie était menée par Louis – sont présents à cette bataille. Et pour
la première fois, ces hommes ont le sentiment de se battre pour quelque chose de plus grand que leur
province d’origine.
C’est aussi le triomphe de l’orthodoxie catholique sur les débuts de réformisme que l’on sent poindre
dans l’esprit des monarques anglais et germanique. La France prend la deuxième place dans la
Chrétienté, après le pape, place jusqu’alors réservée à l’empereur.
C’est donc une France puissante, riche et organisée que Philippe II laisse à son fils quant il meurt en
1223, un 14 juillet !
LOUIS VIII le Lion (1223-1226)
Son court règne sera surtout marqué par la croisade contre les Albigeois. Le but premier de cette
croisade est politique : reconquérir le comté de Toulouse où une nouvelle croyance a vu le jour. Le
catharisme est une religion égalitariste et manichéenne. Issue du mouvement initié dans la région
lyonnaise (et qui trouvera refuge dans les Alpes) par Pierre Valdo, cette nouvelle religion met en avant
des thèmes qui seront repris par le protestantisme : sacerdoce universel, mise à disposition des écrits
bibliques, rejet d’un clergé corrompu et « malcroyant ». Toutefois, elle rejette l’Ancien Testament et
prône l’égalité des principes du Bien et du Mal.
Les Cathares sont évidemment convaincus d’hérésie par Rome, ce qui sera prétexte aux rois de
France pour tenter de les éradiquer. Les Purs, comme se nommaient les principaux dignitaires de
cette religion, ne l’étaient sans doute pas autant que ça. Mais ils n’étaient sans doute les « démons »
qu’ont décrits les moines de l’Inquisition. Toujours est-il que, rejetant l’autorité papale, mais aussi
royale, les rois de France n’auront de cesse que de les éliminer. La croisade s’étendra de 1207 à
1244.
Il en reste beaucoup de traces dans l’époque contemporaine : des traces spirituelles, avec un certain
nombre de personnes qui tentent de remettre cette religion au goût du jour (sans beaucoup de
succès) ; des traces architecturales avec les fameux châteaux cathares qui font le bonheur du
tourisme local. En fait, ces châteaux n’ont de cathare que leur emplacement : ils ont été construits par
les rois de France suite à leur reconquête du comté de Toulouse. Du temps où ils servaient de refuge
(ultime dans le cas du plus célèbre d’entre eux : le château de Montségur) aux Cathares, ils étaient
encore faits, comme pratiquement toutes les places fortes de l’époque, très essentiellement de bois,
avec parfois un donjon en pierre.
Deux épisodes de cette croisade restent célèbrent. En 1209, les troupes de Simon de Montfort, légat
du pape, se massent devant Béziers. Au moment de l’assaut, il dit à ses hommes, un peu réticents à
l’idée de tuer des coreligionnaires (tout le sud n’était pas devenu cathare et les catholiques étaient
encore largement majoritaires au sein de la population) : « Tuez-les tous ! Dieu reconnaîtra les
siens ! » Même s’il n’est pas certain que le légat ait prononcé cette parole, elle est rentré dans
l’histoire et est devenue presque proverbiale.
Louis VIII achèvera cette reconquête du sud en 1226, mais il mourra de dysenterie. Le calme revient
mais ce n’est qu’en 1244 que les derniers irréductibles mourront dans le bûcher dressé au pied du
château de Montségur où ils avaient trouvé refuge.
LOUIS IX, dit SAINT LOUIS (1226-170)
Le jeune Louis IX n’a que 12 ans quand son père meurt subitement. Sa mère, Blanche de Castille,
assure la régence d’une main de fer. Jusqu’à sa mort, en 1252, elle conservera une influence certaine
sur son fils, le maintenant, notamment, dans une vie très dévote.
Très vite, elle fait face à une révolte des barons qui voient dans cette régence l’occasion de reprendre
un peu de leur ancien pouvoir. Mais elle réussit à les contrer et à maintenir l’unité du pays. Comme
elle le refera plus tard lorsque son fils quittera longuement le royaume.
En 1234, elle abandonne la réalité du pouvoir à son fils. Celui-ci va continuer l’œuvre de réforme
initiée par son grand-père :
- perfectionnement et plus grande justice de l’administration ;
- révision du système judiciaire avec la mise en place de ce qui deviendra la jurisprudence.
- création d’une université gratuite destinée aux plus pauvres confiée à son confesseur, Robert
de Sorbon (elle deviendra la Sorbonne) ;
- frappe des premières pièces d’or françaises : les écus ;
- érection de la Sainte-Chapelle pour y abriter des reliques de la Passion : des morceaux de la
couronne d’épine, de la vraie croix, de la lance et de l’éponge.
Au-delà du réformateur, saint Louis est surtout un ennemi sanguinaire de tous les ennemis de la
Chrétienté. Au nom de sa foi, il organise les deux dernières croisades, qui l’éloigneront durablement
du royaume : la septième, de 1248 à 1254 et la huitième, en 1270, au cours de laquelle il trouvera la
mort, au pied des remparts de Tunis. Ces deux croisades n’auront que très peu de succès.
De ce roi, très vite devenu saint, il reste surtout dans l’esprit des Français l’image de la justice qu’il
rendait, un peu partout en France, au pied d’un chêne. En voyageant dans les provinces françaises,
vous trouverez ainsi de nombreux chênes supposés avoir donné de l’ombre à la royale justice.
PHILIPPE III le Hardi (1270-1285)
Dans une large mesure, il va poursuivre l’œuvre de pacification du royaume de son père. Un seul
évènement de son règne est resté dans les esprits grâce à un opéra de Verdi, Les vêpres siciliennes.
L’oncle de Philippe, Charles d’Anjou, avait hérité de la couronne de Sicile. Mais l’attitude des Français
lassa très vite les Siciliens qui décidèrent de se révolter : les cloches des vêpres du 30 mars 1282
sonnèrent le début du massacre. Il dura un mois. Pierre d’Aragon s’empara alors du royaume. C’est
en essayant de lutter contre le souverain espagnol que Philippe trouva la mort quelques années plus
tard, en 1285, à Perpignan.
Une conséquence plus lointaine de cette campagne : le rêve italien qui marquera les rois de France
au début de la Renaissance.
PHILIPPE IV le Bel (1285-1314)
Philippe le Bel est resté beaucoup plus présent que son père dans la mémoire des Français. Non
parce qu’il renforça encore l’efficacité de l’administration du royaume. Ni parce qu’il sera à l’origine de
la création de ce qui deviendra les États généraux (une assemblée réunissant des représentants du
clergé, de la noblesse et de la bourgeoisie qui peut consentir à la levée d’impôts exceptionnels). Ni
même en raison de son conflit avec l’Angleterre qui s’achèvera par un traité assorti du mariage de sa
fille, Isabelle, avec le futur Édouard II (même si ce mariage sera d’une importance cruciale dans le
déclenchement d’une fameuse guerre qui durera plus de Cent ans). Et surtout pas pour la défaite de
Courtrai (1302), contre la Flandre, défaite qui doit sonner de façon plus agréable à nos amis belges
puisque les éperons d’or des chevaliers français vaincus finirent comme décoration de Notre-Damede-Courtrai.
Ce qui est resté dans l’esprit des Français, c’est, d’une part son opposition à la papauté, dont l’attentat
d’Anagni (1303) marquera l’apogée (Guillaume de Nogaret, envoyé par Philippe pour enlever le pape,
échoue dans son projet mais brutalise le Saint Père, allant jusqu’à le gifler) et qui aboutira à la
soumission de Rome, soumission qui transportera la cour papale en Avignon.
Mais surtout, d’autre part, sa lutte contre les Templiers. Cet ordre, fondé lors de la première croisade,
est rapidement devenu un des principaux banquiers de l’Europe. Sa vocation première était de
protéger les pèlerins sur le chemin de la Ville Sainte, et donc de leurs biens. Les « pauvres chevaliers
du Christ » devinrent ainsi tellement riches qu’ils attirèrent l’attention de Philippe, avide d’argent pour
mener à bien ses réformes. Les chevaliers lui refusent l’accès à leur trésor ? Qu’à cela ne tienne,
Philippe n’aura de cesse de les détruire. Le pape lui-même soutient cette initiative : les ordres
chevaliers sont des créations très indépendantes. Trop. En particulier les Templiers.
Un long procès (1307-1314) mené par Guillaume de Nogaret (encore lui !) aboutira à des confessions
délirantes sur les pratiques de l’ordre : blasphème, idolâtrie, sodomie… tout y passe. Et les Templiers
finiront presque tous sur le bûcher. En particulier le Grand Maître de l’ordre, Jacques de Molay. Sur le
bûcher dressé à Paris, il est brûlé vif (mars 1314) devant le roi en personne, non sans l’avoir maudit :
il le convoque, ainsi que le pape Clément V, devant le tribunal de Dieu, avant 40 jours. De Molay va
plus loin dans ses imprécations et maudit la descendance de Philippe « jusqu’à la septième
génération ». Maurice Druon, dans sa série de romans Les rois maudits a immortalisé cette sentence
et reconstitué ses conséquences. Car l’histoire va donner raison au Grand Maître : le pape mourra en
avril et le roi en novembre de la même année, et ses fils (Louis X – et son fils Jean Ier, à titre
posthume – , Philippe V et Charles IV) se succèderont sur le trône sans laisser d’héritier mâle.
La couronne passera donc à Philippe de Valois, fils de Charles de Valois, frère de Philippe le Bel.
Petite parenthèse sur les règles de succession au trône de France. Alors que tous les fils de Philippe
le Bel meurent sans descendance mâle, celui qui devrait monter sur le trône n’est autre que
Édouard III d’Angleterre, petit-fils de Philippe par sa mère, Isabelle (joliment surnommée la Louve).
C’est que réapparaît la loi salique (des Francs saliens) qui dit qu’aucune femme ne peut monter sur le
trône de France (mais Isabelle n’a jamais revendiqué le trône) et même que les femmes ne peuvent
transmettre la dignité royale. Cette loi surgit à point nommé et en surprend plus d’un : si aucune
femme n’est jamais monté sur le trône, elles sont nombreuses à avoir hérité de fief très importants
(Aliénor d’Aquitaine, pour ne citer qu’elle). Alors pourquoi cette différence faite pour le trône de
France ?
On a évoqué des relectures peu sûres du texte franc d’origine, texte qui serait très équivoque. Mais
au-delà de ces débats de traducteurs de bas-latin, beaucoup d’historiens sont persuadés que cette loi
était tout simplement un faux forgé par les juristes de l’entourage royal.
Quoiqu’il en soit, à compter de cette date, ne pourra montre sur le trône de France qu’un mâle
descendant par les mâles d’un roi de France.
LA GUERRE DE CENT ANS (1338-1453)
Lorsque Philippe VI monte sur le trône, tout se passe bien et Edouard III a même prêté l’hommage au
nouveau roi pour les terres qu’il possède en Guyenne.
Le problème viendra de Flandre : cette dernière opère un commerce florissant avec l’Angleterre. Elle
importe de la laine anglaise et exporte des tissus. Philippe VI fait peser de très lourds impôts sur la
Flandre. Trop lourd. Les Flamands se rebellent et décident de reconnaître Edouard comme roi de
France (il est le petit-fils de Philippe le bel).
1340 : Les Français décident de bloquer l’Écluse, avant-port de Bruges en créant un barrage de
bateaux. Les Anglais détruisent ce barrage. C’est un désastre pour la flotte française.
1346 : Les Anglais débarquent en Normandie. Les deux armées vont se rencontrer à Crécy. 15 000
chevaliers français trop fougueux se font massacrer par 1 200 piétons et 5 000 archers anglais.
1347 : Edouard assiège Calais et menace de massacrer toute la population. La ville envoie six
bourgeois vêtus d’une simple chemise et une corde au cou pour donner les clefs de la ville à Edouard.
Ce dernier se montre clément mais cet épisode a marqué les mémoires : quelques siècles plus tard,
Rodin en fera l’un de ses chefs-d’œuvre.
1348 : Venue d’Orient par la Crimée, la peste débarque à Marseille et gagne l’ensemble de l’Europe.
80 000 morts à Paris, 35 000 à Lyon, 25 000 000 dans toute l’Europe, autant en Asie.
1350 : Philippe VI meurt. Son fils, Jean II, lui succède mais Edouard revendique le trône.
1356 : Nouvelle défaite de la chevalerie française à Poitiers. Jean est capturé.
1359 : Edouard, à défaut de la couronne, réclame les terres des Plantagenêts. Charles, le fils de
Jean, refuse. Les Anglais débarquent à nouveau mais Charles mène une politique de terre brûlée
efficace : l’armée d’Edouard, affamée, erre dans la plaine de la Beauce.
1360 : Paix de Brétigny. Edouard renonce à la couronne et se contente de l’Aquitaine. Enfin franc
(libre) des Anglais, Jean crée le franc d’or (3,88 g d’or fin).
À l’époque, sur les marchés, les changeurs de monnaie sont installés sur des bancs ( banque).
Lorsque les affaires sont mauvaises, ils cassent leur banc (en italien, banca rotta  banqueroute).
1364 : Mort de Jean. Charles V monte sur le trône. Avec l’aide de Du Guesclin, il va chasser les
Anglais, améliorer l’armée, le tout en rendant les impôts plus justes et plus efficaces. Ce très bon roi
est un des grands oubliés de notre histoire.
Alors que Du Guesclin a laissé une trace plus profonde. Aîné d’une famille de petite noblesse, il est
plus ou moins renié par ses parents, essentiellement en raison de sa laideur. Mais, à défaut d’être
beau, il est fort, très fort : à 6 ans, il renverse la lourde table où la famille prenait ses repas ; à 16, il
défait 10 chevaliers lors d’un tournoi. Il devient chef de bande et, petit à petit, entre dans l’entourage
de Charles. En 1363, il épouse la plus belle, Tiphaine de Raguenel, avec laquelle il vivra le parfait
amour. En 1370, il est connétable (chef des armées françaises). Cette ascension sociale, ce mariage
parfait, cette réputation d’invincibilité le font entrer dans l’histoire de France, mais surtout dans la
légende.
1380 : Mort de Charles V. Le petit Charles VI à 8 ans et ses oncles (dont le duc de Berry qui
commandera le célèbre livre d’heures, Les Très Riches Heures) gouvernent et pillent le royaume.
1388 : Charles règne enfin seul en s’entourant des Marmousets, anciens conseillers de son père et ne
faisant pas partie de la noblesse.
1392 : Charles est pris de folie. On déterminera plus tard qu’il était atteint de schizophrénie, maladie
qui ira en empirant et ne lui laissera que peu de répit jusqu’à sa mort. Cela ne l’empêche pas
d’épouser Isabeau de Bavière.
1393 : Louis d’Orléans, frère du roi, régente le royaume. Il s’oppose à son oncle, Philippe de
Bourgogne, qui voudrait rapprocher la France de l’Angleterre. Ces deux personnages fondent deux
clans, les Armagnacs et les Bourguignons, qui s’affronteront pour le pouvoir jusqu’en 1436,
affaiblissant ainsi dangereusement le royaume.
1399 : En Angleterre, Richard II est renversé par son cousin Henri IV Lancaster.
1413 : Henri V succède à son père et revendique à son tour la couronne de France.
1415 : 1 700 chevaliers français, tous des Armagnacs, sont fait prisonniers à la bataille d’Azincourt.
L’un deux est Charles d’Orléans, petit-fils de Charles V et père du futur Louis XII. Il deviendra surtout,
en sa cour de Blois, l’un des plus grands poètes de son temps, avec Villon.
1419 : Henri V s’empare de la Normandie et veut signer la paix. Mais avec qui ? Isabeau, femme de
Charles VI, s’est rapprochée des Bourguignons. Avec Philippe, petit-fils du fondateur de ce clan, elle
fait signé à son mari le désastreux traité de Troyes :
 Charles VII est déclaré bâtard.
 Henri V devient roi de France et d’Angleterre (titre que les rois d’Angleterre porteront
jusqu’à ce que Georges III y renonce en 1801. Il épouse une des filles de Charles VI.
 La France se retrouve, de fait, avec trois rois : Charles VI, Charles VII et Henri V.
1422 : Henri V meurt en août en laissant un fils âgé de 10 mois ; Charles VI meurt en octobre.
Charles VII (1422-1461) conserve quelques fidèles dans le centre et le midi mais sa position est très
faible. Heureusement, le futur Henri VI est encore dans les langes.
1428 : Une jeune bergère de 16ans entend des voix. Elle habite la commune de Domrémy et s’appelle
Jeanne. Certains ont voulu trouver une explication rationnelle à ces voix. Laissons-les à leurs
spéculations et préservons le mystère.
1429 : En mars, elle rencontre le roi à Chinon. Intrigué par cette jeune fille déguisée en garçon, il
décide de la mettre à l’épreuve en ne se faisant point connaître. Toutefois, malgré la présence de
toute la Cour dans cette salle, Jeanne se dirige droit vers le roi. Mais s’est en lui révélant qu’il n’est
pas un bâtard qu’elle gagne définitivement du souverain.
Il faut sacrer le roi, et cela ne peut se faire qu’à Reims. En mai, Jeanne reprend Orléans et la troupe
arrive à Reims en juillet, évitant soigneusement la capitale.
1430 : Elle est capturée par les Bourguignons et remise aux Anglais qui la juge et la condamne au
bûcher. Elle meurt brûlée vive à Rouen le 30 mai 1431. Charles l’a abandonnée pour des raisons
politiques. Elle voulait chasser les Anglais par la force alors qu’une issue diplomatique, moins risquée
et plus pérenne, commençait à se dessiner pour le jeune roi.
1431 : Henri VI est couronné à Paris. Il n’a que 9 ans.
1436 : Après s’être finalement réconcilié avec Philippe de Bourgogne, Charles VII peut rentrer dans
Paris en étant certain de se faire acclamer par l’ensemble du peuple, déchiré entre les différentes
factions depuis plus de 40 ans.
Le temps de la reconquête n’est pas venu. La position de Charles est forte, il va en profiter pour
assainir son royaume :
 1437 : la Pragmatique Sanction est sa réponse au concile de Bâle. Le roi s’accorde la
nomination des évêques et s’arroge la mainmise sur la fiscalité pontificale.
 1439 : la grande Ordonnance supprime les armées seigneuriales au profit de la royale.
 1451 : la taille, impôt exceptionnel levé pour l’entretien des armées quand elles sont en
campagne, sera désormais allégée mais perçue tous les ans, guerre ou pas.
1450 : La victoire de Formigny sonne comme la revanche des défaites passées et remet la Normandie
dans le giron français. La Guyenne tombe en 1453 après la victoire de Castillon (environs de
Bordeaux, maintenant, Castillon-la-Bataille).
LOUIS XI le Prudent
Louis XI a laissé derrière lui une image désastreuse : malingre, superstitieux, se délectant de la
souffrance des prisonniers qu’il enfermait dans de petites cages de fer…
Cette image et cette réputation sont l’œuvre, dans un premier temps, de chroniqueurs bourguignons
qui commenceront à tisser cette légende noire environ cinquante ans après sa mort. Voltaire, Walter
Scott, Hugo, Dumas se contenteront de lire les bourguignons et les livres scolaires de la III ème
République se contenteront de relire Scott et Dumas…
Ceci dit, il est vrai qu’il était malingre et superstitieux. Au-delà, il faut se méfier des apparences en
général, et des Bourguignons en particulier. Et quitter bien vite la légende pour s’intéresser aux faits.
À commencer par ces cages : elles étaient en bois, d’une part, mais surtout, elles étaient aussi
spacieuses que des chambres de Formule 1 et surtout plus confortables.
Sa réputation d’avarice lui vient des années qui précédèrent la mort de son père. Ce dernier déteste
ce fils trop intelligent et qui ne cesse de lui reprocher son adultère affiché avec la belle Agnès Sorel,
au mépris de la mère de Louis. Charles fait tout pour l’éloigner du pouvoir et va le laisser sans
ressources. Louis prendra, à cette époque, des habitudes d’économies qui siéront mal, par la suite, à
son statut royal.
La haine des Bourguignons s’explique également : durant ces années d’exil, Louis est recueilli par son
oncle, Philippe le Bon, duc de Bourgogne (en fait, pour rappel, Philippe le Bon est le petit-fils de
Philippe le Hardi, lui-même fils cadet de Jean II qui lui donna la Bourgogne. Philippe le Hardi était le
chef du clan Bourguignon contre les Armagnacs, cf. : plus haut).
À cette époque, Philippe est sans doute le souverain le plus puissant d’Europe : il possède, en plus de
la Bourgogne, la Franche-Comté, la Flandre et l’Artois, provinces toutes particulièrement riches. Cette
puissance fut une menace pour le royaume de France au cours de la guerre de Cent Ans. Louis s’en
souvient et cherchera par tous les moyens à la faire plier devant la couronne de France, quitte à être
oublieux des faveurs, très intéressées, de son « oncle ».
Charles le Téméraire succède à Philippe, son père en 1467. Jusqu’à sa mort, dix ans plus tard, il
tentera de faire de son duché un royaume en réunissant ses terres du nord (Flandre et Artois) à la
Bourgogne et à la Franche-Comté. Et Louis fera tout pour s’y opposer. Ce dernier n’a qu’une envie :
démanteler la puissance bourguignonne. Le temps et l’habileté politique, plus que la guerre, lui
donneront raison : pendant que le Téméraire s’épuise dans des conflits permanents au cours
desquels il fera preuve d’une grande cruauté et qui finiront par lasser ses alliés anglais et
germaniques, Louis intrigue, complote, pactise et finalement, à la mort dramatique de son adversaire,
tire tous les marrons du feu.
La Bourgogne est démembrée, la France récupère le duché ainsi que la Picardie et Marguerite, petitefille du Téméraire et épouse promise du Dauphin de France, Charles, hérite du reste (essentiellement
la Franche Comté, l’Artois ainsi que ce qui correspond à une partie de la Belgique et des Pays-Bas
actuels).
Au-delà de ces questions de représentations, Louis XI
fut un bon roi qui réussit, tout en épargnant son peuple,
à relever une France mise à mal par les carnages de la
guerre de Cent Ans. Il ranime le commerce, développe
l’agriculture, améliore la justice et l’administration,
invente la poste et soutient l’introduction de
l’imprimerie.
De plus, dans sa lutte contre Charles le Téméraire, il
n’hésite pas à se mettre lui-même en danger, voire à
s’humilier, pour arriver à ses fins sans recourir au sang
de ses soldats.
On peut toutefois comprendre les critiques dont il fit
l’objet. Son refus des honneurs dus à son rang, sa
méfiance vis-à-vis de la noblesse, ses attentions à
l’égard d’une bourgeoisie encore naissante et
entreprenante étaient trop éloignés des valeurs de
l’aristocratie de l’époque. Et ses superstitions, sa
crainte de la mort, furent un objet facile de raillerie pour
les positivistes des Lumières et des siècles suivants.
L’incompréhension qui entoura ce roi dès son plus
jeune s’attache toujours à lui et sans doute pour
longtemps encore : noires ou dorées, les légendes sont
souvent plus fortes que la réalité.
Charles VIII l’Affable
Charles n’a que treize ans à la mort de son père. Sa sœur, Anne de Beaujeu en a vingt-deux et
assure la régence. C’est une femme forte qui fait trembler de peur son jeune frère. Elle est follement
amoureuse de Louis d’Orléans, son cousin (petit-fils du frère de Charles VI, Louis d’Orléans, qui fut
assassiné par Jean sans Peur). Mais lui aime une autre Anne, la future duchesse de Bretagne. Anne
de Bretagne que Charles finira par épouser après avoir mater la révolte qui couvait dans ce duché
encore indépendant.
Ajoutez à ceci que Louis est le successeur désigné de son cousin sur le trône si ce dernier meurt sans
enfant et l’on frise le théâtre de boulevard.
Le mariage de Charles et d’Anne, même s’il fut célébré sur les cadavres de la défaite bretonne, finit,
contre toutes attentes, par être heureux, à défaut de prolifique : Charles sut compenser son physique
peu avenant et son intelligence « limitée » par un empressement auprès de sa jeune épouse qui finit
par la charmer.
Mais la grande histoire d’amour de Charles, c’est l’Italie. Les Anjou en ont été définitivement chassés
du royaume de Sicile par Alphonse V d’Aragon. À la mort du fils de ce dernier, Ferdinand, Charles
décide de reprendre ce qu’il estime être son héritage. Il lance donc, en 1494, la première guerre
d’Italie. Elle ne rencontre pas un grand succès et l’armée française retourne chez elle non sans
difficulté. Mais elle ramène avec elle la Renaissance italienne et les fêtes du château d’Amboise
prennent une nouvelle couleur.
1498 : alors qu’il est en train de monter une deuxième expédition en Italie, Charles se cogne la tête
contre un linteau de porte. Quelques instants après, il s’effondre et se montre incapable de parler. Il
meurt quelques heures plus tard.
Louis XII le Père du peuple
À peine sacré, Louis annule son mariage avec Jeanne la Difforme, sœur de Charles que Louis XI
l’avait forcé à épouser (le mariage n’avait pas donné d’enfant et Anne, par contrat, était contrainte
d’épouser le successeur de Charles). Et c’est avec bonheur qu’il peut enfin vivre son amour si
longtemps contrarié pour la belle Anne. Très vite, ils ont une fille, Claude, qui épousera un certain
François d’Angoulême.
Louis est un bon roi, mais surtout un roi populaire : les impôts baissent, la justice est reprise en main
et le peuple est régulièrement favorisé par les décisions royales. Louis aime la guerre mais va la faire
en-dehors de France, plus ou moins sur les traces de son cousin en Italie. C’est le duché de Milan
qu’il revendique (sa grand-mère est une Visconti). Mais les deux guerres qu’il mènera (1499-1504 et
1507-1513) seront des échecs.
En 1514, à la mort d’Anne, Louis épouse Marie Tudor, sœur d’Henri VIII avec lequel les choses
tendaient à s’envenimer. Cette jeunesse de seize ans (il en a cinquante-deux) l’entraîne de fête en
fête. Mais pour peu de temps : il meurt le 1er janvier 1515, laissant un royaume prospère mais aux
caisses plutôt vides à son successeur, un certain François d’Angoulême.
François Ier (1515-1457)
François d’Angoulême est né en 1494 au pied d’un arbre, au milieu des vignes de Cognac. Il a la
beauté et la prestance de son arrière-grand-père, Louis d’Orléans, et son cousin, Louis XII, n’ayant eu
que des filles de son mariage avec la belle Anne de Bretagne, le prend sous son aile : il sera sans
doute son successeur.
Quand il monte sur le trône, les caisses sont vides. Il faut de l’argent, et vite. Alors François monte
une expédition pour l’Italie où il souhaite reconquérir le duché de Milan et le royaume de Naples.
1515 : 40 000 hommes franchissent les Alpes. Aux alentours de Marignan, ils rencontrent les Suisses
engagés par le pape, possesseur du duché. C’est un vrai carnage qui laissera plus de 20 000 morts.
Sur le champ de bataille, François demande à Pierre du Terrail, seigneur de Bayard, de l’adouber
chevalier (le pont de Garigliano, 1504). Mais c’est sans doute une légende forgée en 1525.
1516 : Concordat de Bologne (le roi de France prend le contrôle de l’Église en France jusqu’à la
Révolution). Paix perpétuelle de Fribourg (les Suisses s’engagent à ne plus combattre la France et à
ne répondre qu’à son appel.
1519 : François offre 1t5 d’or aux 7 grands électeurs de l’empereur ; Charles en donne 2 : il est élu.
1520 : aux environs de Calais, François s’apprête à recevoir Henri VIII afin de sceller avec lui une
alliance contre Charles. Il y met le plus de faste possible, plantant mille tentes d’or et d’argent qui
donneront son nom à cette entrevue : le camp du Drap d’or. 3 semaines de fêtes s’ensuivent mais
aucun traité. Quelques jours plus tard, Henri rencontre, à Gravelines, un Charles modestement vêtu et
accompagné avec lequel il signe un accord secret pour isoler François.
1525 : désastre de Pavie (due à une faute tactique grossière de François) où meurt Jacques de
Chabanne, seigneur de La Palice (« Monsieur de La Palice est mort / Mort devant Pavie / Un quart
d’heure avant sa mort / Il faisait encore envie » qui devient, au XVIIIe siècle, « Il était encore en vie ») :
l’armée française est décimée et François est fait prisonnier. Il sera libéré contre rançon mais la
rivalité entre François et Charles ne cessera jamais.
1539 : l’ordonnance de Villers-Cotterêts. Un hasard de l’histoire inscrit cette initiative royale dans un
contexte linguistique plus que favorable avec Du Bellay, Ronsard, Rabelais, Montaigne, pour ne citer
que les plus célèbres auteurs de cette époque.
Ce que l’on nommera abusivement l’absolutisme commence à se faire jour avec François I er. Le
Conseil du roi, hérité des premiers Capétiens et même au-delà, réunit tant de monde qu’il est difficile
de décider. François va le réduire à quelques proches, dans le cadre du Conseil étroit, qui seul
prendra les décisions. Les efforts additionnés de tous les rois qui l’ont précédé paient : pouvoir
centralisé, qui éloigne les prétentions des barons locaux ; administration efficace et entièrement
dévouée au roi ; impôts mieux répartis pour financer le tout, François Ier est alors obéi comme nul
autre monarque occidental.
1534 : dans la nuit du 17 au 18 octobre, des placards sont affichés partout :
Articles véritables sur les grands horribles et insupportables abus de la messe papale
Entre autres, la théorie de la transsubstantiation est remise en cause.
La même année, Jacques Cartier aborde les côtes du Canada. En 1535, il arrive à Québec puis
Montréal après avoir remonté le Saint-Laurent.
De nombreuses actions violentes, allant jusqu’au massacre et au bûcher vont ternir la fin du règne de
François Ier.
Mais Diane de Poitiers sera là pour l’illuminer. Maîtresse du roi depuis les années 1530 (du moins
certains le prétendent), elle sera surtout la favorite de son fils, le futur Henri II.
Henri II (1547-1559)
Autant son père fut faste, autant Henri est taciturne, austère. Il chasse les dames de la cour et
recommande la tempérance aux hommes. Mais il apprécie par-dessus tous les exercices physiques,
notamment les tournois.
Il meurt bêtement lors de l’un d’eux d’une lance fichée dans l’œil. Toute la science d’Ambroise Paré ne
suffira pas à le maintenir en vie.
Il a conquit les évêchés de Metz, Toul et Verdun et repris Calais aux Anglais mais par le traité de
Cateau-Cambrésis, il renonce à l’Italie, ce qui sera fort mal vécu dans le royaume.
L’Italie qui avait apporté la Renaissance, Léonard de Vinci, mort dans son château de Clos-Lucé, la
tête reposant sur les mains de François, l’école de Fontainebleau, résidence favorite du même roi,
pourtant très itinérant et qui entraînait toute sa cour derrière lui, d’Azay-le-Rideau en Chambord.
L’Italie, ce rêve qui s’évanouit. Et va bientôt accoucher d’un cauchemar.
François II (1559-1560)
À la mort d’Henri II, le jeune François n’a que 15 ans. Il est donc majeur mais tout de même bien
jeune. Marié à la très belle Marie Stuart, il laisse gouverner les oncles de cette dernière, les Guise,
que nous retrouveront trois plus tard à la tête du parti catholique.
François est un jeune homme instable, influençable, qui laissera un très mauvais souvenir et les
romanciers le dépeindront comme une sorte d’adolescent insupportable et caractériel. Ceci dit,
adolescent, il l’était bel et bien et la bonne santé de son père ne laissait en aucun présager qu’il aurait
à quitter sa confortable place de Dauphin pour le trône aussi vite.
Quoiqu’il en soit, de santé fragile, il meurt après quelques mois de règne dans des souffrances
terribles qui le font hurler de douleur plusieurs jours avant sa mort.
Les guerres de Religion (1562-1598)
Peu avant sa mort, s’est joué un épisode qui préfigure les guerres civiles qui ensanglanteront la
France jusqu’à la fin du siècle.
Les Protestants sont alors au nombre de deux millions dans le royaume. L’ensemble de la population
ne s’en émeut guère mais les Guise voient ce développement des idées nouvelles d’un très mauvais
œil. Ce que les Réformés comprennent vite. Ils décident d’enlever François II et de mettre sur le trône
Louis de Condé, frère d’Antoine de Navarre et donc oncle du futur Henri IV. C’est un prince du sang
très bien placé dans l’ordre de succession en cas de défection des enfants d’Henri II et de Catherine
de Médicis.
Le complot est découvert et cent conjurés finissent pendus au balcon du château d’Amboise où
l’enlèvement devait avoir lieu.
Quant à Louis, les preuves contre lui sont trop faibles et il n’est qu’emprisonné. Il sera libéré après la
mort de François par Catherine, devenue régente et qui, soucieuse d’équilibre, tient à ce que ce
prince du sang protestants reste en vie afin de faire contrepoids à l’influence, qu’elle juge néfaste, des
Guise.
Charles IX (1560-1574)
Charles IX est donc devenu roi mais il n’a que dix ans et la régence est, logiquement, assumée par sa
mère. Comme presque toutes les périodes de régence, les années qui suivent la mort de François II,
même si cette tendance se fait déjà sentir dès la mort d’Henri II, seront l’occasion pour la noblesse de
tenter de reprendre une partie du pouvoir que les rois de France n’ont cessé de lui grignoter.
La question religieuse ne fait que renforcer les velléités émancipatrices des noblesses des deux
camps. Et Catherine, grande admiratrice de Jeanne d’Albret (la mère du futur Henri IV) aimerait,
comme cette dernière a réussit à le faire dans son petit royaume de Navarre, pouvoir établir une
coexistence pacifique entre les deux clans dans l’ensemble du royaume.
Malgré les efforts incessants de Catherine, les tensions ne font que monter au sein du royaume et
elles ne trouveront d’exutoire que dans la guerre. Ou plutôt, les guerres : elles seront huit à se
succéder de 1562 à 1598 et verront deux grandes familles s’affronter. Du côté catholique, nous
connaissons déjà les Guise. Chez les protestants, aux côtés des Condé et des Bourbon, on trouve
également les Coligny, qui prendront effectivement la tête du parti protestant.
L’épisode le plus connu (à vrai dire, le seul connu) de ces guerres sera à l’origine de la quatrième.
Alors que Catherine essaie toujours de ménager les deux camps (elle déjà réussit à faire signée trois
trêves mais qui seront toutes sans lendemain), elle pense avoir trouvé la solution idéale : marier sa
fille, Marguerite (c’est Dumas qui lui donnera le surnom par lequel elle est entrée dans la légende) à
Henri, le fils de Jeanne d’Albret. L’union d’une catholique et d’un protestant devrait faire taire toutes
les querelles.
Après beaucoup d’hésitations, Jeanne accepte et Henri fait son entrée dans Paris, avec une
nombreuse suite, en juillet 1572. Le mariage est célébré le 18 août. Et abouti au contraire de ce que
voulait Catherine : Coligny se sent plus assuré que jamais et exige une guerre contre l’Espagne (il a
presque convaincu Charles, qui considère l’amiral comme son père mais Catherine refuse, bien que
l’Espagne jette de l’huile sur le feu pour affaiblir la France en soutenant les catholiques) ; quant aux
catholiques, ils se sentent bafoués par ce mariage qui pourrait mener un protestant sur le trône de
France. En effet, descendant en droite ligne, et par les mâles, de Saint Louis, Henri est le principal
prétendant au trône si les enfants de Catherine ne peuvent, à leur tour, enfanter. Catherine avait-elle
mesuré ce « risque » ? Peut-être même a-t-elle souhaité, en alliant ces deux branches capétiennes,
affermir les chances d’Henri de devenir roi. Auxquels cas les catholiques pourraient avoir raison
d’avoir peur.
Toujours est-il que ces derniers acculent Catherine à une décision énergique : des têtes protestantes
doivent tomber, à commencer par celle de Coligny. Catherine, afin d’éviter trop de sang, va jusqu’à
commanditer en secret un assassinat de l’amiral. Las, ce dernier échoue.
Le 23 août, alors que les fêtes suivant le mariage de Marguerite et Henri battent encore son plein
dans les rues parisiennes, mélangeant dans l’ivresse catholiques et protestants, une réunion se tient
au chevet d’un Charles dont l’on craint les fièvres récurrentes qui l’amènent si près de la folie.
Catherine et quelques chefs catholiques décident de l’exécution de quelques chefs protestants.
Quatre ou cinq, pas plus. Juste assez pour rassurer les catholiques et couper les ailes aux
protestants. Quand Charles apprend que Coligny fait partie de la liste, et qu’il y figure en première
place, il pâlit et s’écrie : « Qu’on les tue, mais qu’on les tue tous, qu’il n’en reste pas un pour me le
reprocher ! »
Catherine réussit à calmer les ardeurs des chefs catholiques présents : comme prévu, seules
quelques têtes tomberont. Mais, sans que l’on sache comment, cet ordre du roi se répand dans les
rues enivrées de Paris et dès l’aube du 24 août, jour de la Saint-Barthélemy, un massacre
redoutablement orchestré commence. Il durera cinq jours dans la capitale puis se répandra à travers
la France à un rythme lent, imposé par les moyens de communications de l’époque, mais inéxorable.
Le mois de septembre verra s’organiser jusqu’à Bordeaux et Toulouse des répliques de la SaintBarthélemy parisienne.
Charles en profite pour obliger Henri à la conversion : « La mort ou la messe ! » L’abjuration sera
confirmée en septembre.
Henri III (1574-1589)
Le 30 mai 1574, Charles IX succombe à la tuberculose. Son frère, Henri, lui succède. La littérature, en
particulier celle du XIXe siècle, en a dressé le portrait d’un homme entouré de ses favoris, les
« Mignons », amateur de belles toilettes et de bijoux, exagérément précieux… Pour les standards de
cette époque (le XIXe s.), nous dirons pudiquement un inverti avec tous les préjugés que cela
impliquait. Vouloir revenir sur cette vision négative de l’homosexualité pour réenvisager la figure de ce
roi qui continue à subir une réputation assez désastreuse serait une grave erreur. Non pas que l’on ait
raison de déconsidérer quelqu’un pour ses préférences sexuelles, mais il se trouve que la question est
d’autant plus sans objet qu’Henri, tout comme ses Mignons d’ailleurs, était ce qu’il est convenu
d’appeler un homme à femmes et aussi un grand amoureux (son histoire avec Marie de Clèves est
d’un romantisme achevé). Ce sont également de redoutables chefs de guerre qui se sont illustrés sur
de nombreux champs de bataille. On est bien loin du portrait qu’en dressa, entre autres, Dumas.
Effectivement, c’était aussi un fin lettré, un amoureux du beau et du raffiné sous toutes leurs formes.
Mais surtout, ce fut un assez bon roi qui poursuivit, dans un premier temps, l’œuvre de conciliation de
sa mère. Mais l’époque n’était pas à la demi-teinte et lorsqu’il fallut choisir son camp, il rallia la ligue
catholique. C’est à cette époque que François d’Alençon, le dernier fils de Catherine et Henri II meurt.
Il y a alors trois prétendants à la succession d’Henri III qui n’a pas d’enfants : le cardinal de Bourbon,
dont on sait qu’il ne renoncera pas à son chapeau rouge pour le trône de France ; Henri de Navarre,
dont la grand-mère était la sœur de François Ier mais surtout dont le père descend en droite ligne du
sixième fils de Saint Louis ; et en fin, Henri de Guise, descendant de Charles V et, soi-disant, de
Charlemagne (ah ! l’habileté des généalogistes de l’époque).
Ce dernier commence à se montrer beaucoup trop ambitieux et surtout jusqu’au-boutiste. Ce qui
effraie Henri III. Qui décide de le faire assassiner. C’est au château de Blois, le 23 décembre 1588,
qu’il tombera, percé de toute part par les épées de la garde rapprochée d’Henri III.
Le 5 janvier 1589, Catherine de Médicis meurt. Quelques mois plus tard, Henri III est assassiné par un
moine avec la complicité d’une partie de la hiérarchie ecclésiastique. Auparavant, il s’était réconcilié
avec Henri de Navarre et tous deux essayaient de reprendre Paris où Henri de Guise était très
populaire, popularité que son assassinat n’a fait que renforcer. De plus, son frère cadet, Charles de
Lorraine, a repris le flambeau.
Henri III, dans son agonie, a le temps de déclarer Henri de Navarre comme son successeur. Mais
Charles ne l’entend pas de cette oreille et refuse de reconnaître cette succession, entraînant à sa
suite ce qu’il reste de la ligue catholique et surtout, Paris. Et surtout, en 1576, Henri de Navarre a une
nouvelle fois abjuré et rejoint la Réforme.
Henri IV le Grand (ou le Vert Galant)
Arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-petit-fils de Saint Louis, Henri IV descend, à
la dixième génération d’un des fils du saint roi. Il succède donc logiquement sur le trône à son (assez)
lointain cousin, Henri III.
1572 : mariage avec Marguerite de Valois.
1589 : mort de Henri III. Les Ligueurs proclament roi le cardinal de Bourbon, oncle du Béarnais (un
homme modeste malgré son immense fortune et qui ne fut que le jouet des ambitions des Ligueurs).
1590 : le 5 mars, le Parlement de Paris reconnaît Charles comme roi légitime. Le 14 mars, Henri IV
écrase l’armée catholique à Ivry (« Si vos cornettes vous manquent, ralliez-vous à mon panache
blanc ! Vous le trouverez sur le chemin de la victoire et de l’honneur ! ») Reste Paris à conquérir.
Pendant le siège de Paris, le roi s’ennuie. L’un de ses compagnons lui propose de l’accompagner à
son château pour qu’il se distraie. Il veut aussi lui présenter sa nouvelle maîtresse, une jeune fille de
dix-sept ans, Gabrielle d’Estrées. Henri en tombe aussitôt amoureux mais Gabrielle n’a que faire de
cet homme de quarante ans qui pue l’ail, entre autres odeurs accumulées entre des bains fort
espacés.
La belle résistera six mois, le temps de caser un peu toute sa famille. Elle donnera deux enfants à
Henri mais, en avril 1599, à la veille de son mariage avec lui le pape s’y opposait), enceinte d’un
troisième enfant, elle meurt, laissant Henri désespéré : « La racine de mon cœur est morte et ne
rejettera plus ! »
1593 : Henri se reconvertit au catholicisme, sous l’influence de Gabrielle
1594 :
Février : Il est sacré à Chartres, les Ligueurs tiennent encore Reims.
Mars : Il fait ensuite une entrée par la petite porte Neuve dans Paris, mais cette entrée discrète est
vite suivie d’un triomphe.
Décembre : Il échappe à une tentative d’assassinat d’un Jésuite. L’ordre est interdit en France
jusqu’en 1603.
13 avril 1598 : l’Édit de Nantes.
- liberté de conscience (sauf à Paris et en Bretagne) ;
- culte autorisé dans une ville par baillage ou sénéchaussée ;
- 150 lieux de refuge, armée potentielle de 30 000 hommes ;
- 45 000 écu pour payer les pasteurs.
Maximilien de Béthunes :
Il n’a que douze ans lorsqu’il traverse les rues ensanglantées de Paris, la nuit de la Saint-Barthélémy,
pour se réfugier dans le collège où il est élève. Il est protestant. Quelques jours plus tard, il rencontre
Henri : c’est le début d’une amitié indéfectible. Maximilien suivra Henri partout, dans les palais comme
dans les batailles où il sera plusieurs fois blessé. En 1606, le baron de Rosny devient duc et pair de
Sully. C’est sous ce nom qu’il est entré dans l’histoire et surtout pour avoir admirablement géré une
France laissée en ruine par quarante ans de guerre.
Il assainit les comptes et développe l’agriculture : « Labourage et pâturage sont les deux mamelles de
la France, ses vraies mines et trésors du Pérou. » Henri avait souhaité que tous les Français puissent
mettre « une poule au pot tous les dimanche », Sully fera tout pour que ce vœu s’exauce.
C’est à cette époque que se développent les colonies françaises en Amérique du Nord. Mais, Sully
s’en désintéresse : trop loin.
Ce n’est pas tout à fait le cas d’Henri. Laffermas, constatant les sommes astronomiques dépensées
pour l’achat de soies italiennes, commence à s’intéresser à l’économie et préconise un modèle qui
tient en 4 points :
- produire le plus possible en France,
- exporter le plus possible,
- importer le moins possible,
- attirer l’or et l’argent des autres pays pour pouvoir leur faire la guerre.
Dès Louis XI, des tentatives de cet ordre se mettent en place, notamment dans le domaine des
soieries. Le règne d’Henri IV va leur donner un essor sans précédent dont bénéficieront ses
successeurs :
- des mûriers sont plantés partout en France et des magnaneries sont imposées dans toutes
les paroisses.
- plusieurs manufactures sont crées, subventionnées et contrôlées (cuirs, dentelles, verreries,
tapis…) ;
- la plus célèbre d’entre elles, les Gobelins, accueillent des tapissiers flamands.
La journée du guichet : le 25 septembre 1609, Jacqueline Arnaud, abbesse de Port-Royal sous le
nom de Mère Angélique, refuse la visite de ses parents : elle ne leur parle qu’à travers la grille de la
porte. C’est le début d’une vague d’austérité dans cette abbaye : prière, travail, repos, communication
par gestes, refus de toute propriété… L’évêque d’Ypres, Cornelius Jansen, redécouvre, de son côté,
le chemin de ce dénuement. Cette doctrine portera son nom : le jansénisme.
1600 : Fraîchement divorcé de Margot, mais à peine remis de la mort de celle pour qui il avait tant
souhaité cette annulation de mariage, Henri se remarie avec Marie de Médicis. Plus pour sa dot que
pour elle…
Elle ne sera couronnée reine que le 13 mai 1610, alors qu’Henri est prêt à partir en guerre contre les
Pays-Bas pour de très bonnes raisons politiques et surtout pour y récupérer Charlotte de
Montmorency, mariée par le roi à Henri de Condé qui l’a envoyée là-bas pour la protéger des
intentions du vert Béarnais.
Le 14, il hésite à rendre visite à son ami Sully qui est resté alité. Il a un sombre pressentiment depuis
plusieurs jours. Il part quand même. Arrivé au n°11 de la rue Saint-Honoré, son carrosse est stoppé
par une charrette renversée. Un homme surgit alors de la foule, saute sur la roue du carrosse est
poignarde par deux fois la poitrine du roi. Atteint entre les côtes au deuxième coup, il meurt avant de
regagner le Louvre. François Ravaillac, comme la plupart de ceux qui l’ont précédé dans cette
tentative, subira le supplice destiné à ceux qui osent porter la main sur la personne du roi.
Deux heures après sa mort, le Parlement désigne Marie comme régente. Malgré son chagrin, elle
s’attellera à la tâche avec une énergie qui étonne tout le monde. Louis XIII n’a que neuf ans (« Ah ! Si
j’eusse été là, avec mon épée je l’eusse tué ! »).
Louis XIII (1610-1643)
Très vite, Marie de Médicis est nommée régente. Parmi sa suite, deux personnages vont prendre un
ascendant particulier sur elle : sa coiffeuse, Léonora Galigaï et son amant, un aventurier de petite
noblesse italienne, Concino Concini. Dans l'échelle des personnages détestés de l’histoire de France,
ce couple infernal a une place de choix. Il faut dire qu’ils se sont considérablement enrichis sur le dos
du pays qui les accueillait. Mais en poursuivant, finalement, la politique des rois de France : maintenir
la noblesse dans l'obéissance afin de renforcer le pouvoir royal.
Quant au jeune Louis, grand amateur d'exercices physiques, de chasse et de tambour, il ne semble
pas se passionner pour les affaires de l’État. Cela dit, sa mère fait tout pour le maintenir à l’écart des
prises de décisions, se montrant même à plusieurs reprises cassante et vexante, y compris en public.
Attitude que même Concini se permet d’avoir.
En 1614, bien que déclaré majeur, Marie confirme son mépris vis-à-vis de son fils et ce n’est que
poussé par quelques membres de son entourage que Louis décide de reprendre la place qui doit être
la sienne. Poussé également par une volonté politique propre : sa mère accumule les erreurs et le
royaume se retrouve à plusieurs reprises au bord de la guerre civile. Louis, qui conserve un souvenir
fort de son père, supporte de plus en plus mal cet état de fait.
Le 24 avril 1617, il fait assassiner Concini puis exécuter la Galigaï. Sa mère, enfin, est exilée à Blois.
Toutefois, à la tête de l’État, c’est surtout un changement de favoris qui s’opère : ceux de Louis
succèdent à ceux de Marie. Mais ils ne sont pas plus compétents. Et ce n’est qu’en 1624 que Marie
réussit à faire entrer au Conseil Richelieu. L’évêque de Luçon s’était fait remarquer lors des mauvais
États généraux de 1614-1615 et avait réussi à s’immiscer dans l’entourage de la reine. Les mauvaises
relations de cette dernière avec son fils expliquent que Richelieu ne rejoigne le roi que si tard. Mais ils
formeront un tandem d’une redoutable efficacité, animés qu’ils sont tous deux par l’idée qu’ils se font
de ce que doit être la grandeur de la France.
Deux grands axes vont guidés leur politique : éloigner la menace des Habsbourg qui, depuis le règne
de Charles Quint, encerclent la France et l’ont plongée dans un isolement diplomatique dangereux ;
réduire le pouvoir des protestants, non pour des raisons religieuses (même si Louis est un genre de
dévot avant l’heure) mais parce que, selon la formule restée célèbre du cardinal, les Réformés, avec
leurs places fortes et leur armée privée forment « un État dans l’État », ce que la toute-puissance du
roi ne saurait tolérer. Tous deux seront couronnés de succès et pour un coût « raisonnable ».
Après des combats presque incessants, le problème intérieur finira par se régler définitivement devant
les remparts de La Rochelle. Dernière place de sûreté à résister au pouvoir royal, elle finit par se
rendre le 28 octobre 1628 après plus d’un an de siège. Sa population est passée de 28 000 habitants
à un peu plus de 5 000. Ses remparts sont rasés.
C’est, entre autres, sous ces remparts que se construit la réputation sanguinaire de Richelieu (le
rouge cardinalice qu’il porte en serait une manifestation). Réputation amplifiée par les romans de
Dumas. C’est oublier que le cardinal n’avait rien contre le protestantisme en soi (ne va-t-il pas
d’ailleurs rompre avec la politique hispano-italienne de Marie de Médicis pour soutenir le combat des
princes protestants contre le Saint-Empire ?) et que tous les combats qu’il a mené contre cette
nouvelle religion furent provoqués par l’intransigeance de nobles protestants plus soucieux du pouvoir
et de l’indépendance que leur avait accordés l’Édit de Nantes que de la liberté de leur culte, qui ne
sera d’ailleurs pas remise en question.
Le problème extérieur, la question des Habsbourg, sera également résolu de manière à la fois plus
discrète et plus éclatante par les traités de Westphalie (1648) qui mettent fin à la guerre de Trente
Ans. Plus discrète car cette guerre qui aura mis à feu et à sang une grande partie du Saint-Empire
n’aura duré que treize ans, pour la France et très peu de combats se seront déroulés sur son sol.
Discrète également car les gains territoriaux sont doublement marginaux, dans leur surface et dans
leurs emplacements : quelques petits ajouts aux frontières à l’est des Pyrénées, dans les Alpes mais
surtout au nord-est de la France.
Éclatante car ses petits territoires viennent consolider les frontières françaises là où elles étaient le
plus fragile et au voisinage des territoires des Habsbourg. Éclatante surtout car ils signent la fin de la
puissance espagnole et le morcellement irréversible du Saint-Empire. L’équilibre européen est modifié
pour longtemps et la France y a pris un poids considérable qui préfigure l’hégémonie du Roi Soleil.
Toutefois, cette grande victoire, ni Richelieu, qui meurt en décembre 1642, ni Louis XIII, qui le rejoint
en mai de l’année suivante ne la verront, même si elle leur doit pratiquement tout.
Richelieu ne fut pas seulement un grand homme d’État. Il est entré dans l’Histoire de l’écrit de deux
manières distinctes mais fondamentales. La plus connue est la création de l’Académie française. En
fait, il donne un statut officiel à un groupe officieux de continuateurs zélés de l’œuvre de Malherbe.
Nous sommes en 1635. Quand on sait le rôle qu’a pu jouer la langue française dans la construction
de la nation, on comprend mieux cet intérêt de Richelieu pour les grammairiens.
C’est aussi dans un but intéressé et infiniment moderne qu’il prend sous aile, quelques années
auparavant, Théophraste Renaudot, alors l’un des médecins du roi, non pour ses connaissances
médicales mais pour la petite publication qu’il vient de créer, la Gazette, journal qui donne des
nouvelles courtes de France et du monde (ainsi que des offres d’emploi), le grand ancêtre de toute la
presse française.
Toutes ces grandes réussites n’empêcheront pas les feux de joie s’allumer un peu partout en France
à l’annonce de la mort du grand homme. Il faut dire que son action lui a valu la rancœur, voire la
haine, d’une grande partie de la noblesse et de la bourgeoisie. Seule la grandeur de la France
l’animait au mépris des ambitions locales et personnelles des uns ou des autres.
Quant à Louis XIII, point de feux de joie pour célébrer sa mort mais point de grande cérémonie non
plus. Conscient de la gravité de la situation financière de la France, il renonce au grand enterrement
qui accompagnait traditionnellement les rois défunts vers la basilique Saint-Denis.
À la cruauté du cardinal, on a longtemps opposé la niaiserie de Louis XIII. Les romanciers du XIX e s.
en font même un personnage de comédie (manipulé par Richelieu, trompé par sa femme), trait que
grossiront encore les nombreux cinéastes qui adaptèrent, entre autres, Les Trois mousquetaires à
l’écran. Pourtant, sa vie nous est parfaitement connue grâce aux nombreux écrits sur sa personne
rédigés de son vivant et qui démentent largement cette réputation ridicule. Mais quand le roman
réécrit l’histoire avec le talent de M. Dumas, l’histoire s’incline et cède la place à la légende.
Louis XIV (1643-1715)
Contre toute attente, le 5 septembre 1638, après vingt-trois années de mariage stériles, arrive
« l’enfant du miracle », Louis-Dieudonné, le futur Louis XIV. Il n’a donc même pas cinq ans quand son
père meurt et c’est devant un enfant apeuré que se prosterne sa mère, comme sujette du nouveau roi,
alors qu’elle vient de lui apprendre la terrible nouvelle.
Anne d’Autriche, donc, devient régente du royaume jusqu’à la majorité de son fils. Elle nomme
Premier ministre, le cardinal Mazarin, protégé de Richelieu (bien qu’elle détestât ce dernier). Il faut
préciser que Mazarin était également le parrain de Louis XIV et qu’il fut chargé de son éducation. On
a prêté à la reine-mère de nombreux amants. Ce qui fut, selon toute vraisemblance, totalement faux. Il
en va différemment de la liaison amoureuse qu’elle entretint, après la mort de Louis XIII, avec
Mazarin. Non seulement celle-là est à peu près certaine mais de nombreux indices portent à croire
qu’ils se marièrent même en secret.
Toujours est-il que c’est ce couple qui va véritablement gouverner la France jusqu’à la mort du
cardinal, en 1661.
Les premières années, Mazarin a les coudées franches et poursuit la politique de son prédécesseur.
La guerre de Trente Ans n’est pas achevée et le cardinal multiplie les impôts afin de la financer. Et si
la France, comme nous l’avons vu, est la principale bénéficiaire des Traités de Westphalie, personne
n’en sait gré au couple dirigeant : le peuple est exsangue et la noblesse voit là une très belle occasion
de reprendre la réalité du pouvoir.
De 1648 à 1652, la révolte de la noblesse va prendre des allures de guerre civile. Cette révolte porte
un nom qui est resté dans les mémoires : la Fronde, en référence à l’arme dont David se servit pour
terrasser Goliath. Mazarin doit fuir, accusé, à juste titre, de s’être enrichi au cours des dernières
années. Mais la reine elle-même fuit Paris une première fois avec le jeune roi et son frère au mois de
janvier 1649 pour échouer dans un château de Saint-Germain vide tout occupant et sans argent. Ils y
demeureront plusieurs semaines dans le dénuement le plus complet.
En février 1651, alors que la situation s’était accalmée, une fronde populaire pénètre dans le palais du
Louvre : le bruit a couru que le roi et sa mère avait fuit à nouveau. Une foule déchaînée se rue dans
les couloirs du château à la recherche du souverain et le trouve, terré dans sa chambre et craignant
pour sa vie. Il saura se souvenir de cette humiliation.
En septembre, il est déclaré majeur et la véritable guerre commence. Après près d’un an de combats
en Île-de-France, les Frondeurs réussissent à s’emparer de Paris en juillet 1652 et y sème la terreur,
la ruine et le désordre. Les Parisiens, las des excès de cette Fronde à laquelle ils ne voient plus
d’issue, finissent par accueillir triomphalement Louis XIV en octobre et même Mazarin, alors en exil,
peut y revenir sous les acclamations de ceux qui l’avaient tant honni en février de l’année suivante.
Il y aura bien encore quelques soubresauts dans le sud-ouest de la France mais c’est le pouvoir royal
qui sort vainqueur de ces affrontements sanglants.
Dans cette enfance et ses premières années de règne tumultueuses, on peut trouver les clefs de
certains aspects, parmi les plus connus, de ce que sera le règne du Roi-Soleil. C’est la peur de ce
Paris qui peut se révolter si facilement qui poussera Louis XIV à s’installer à Versailles. C’est la
volonté d’écraser définitivement les ambitions des grands qui sera à l’origine de l’étiquette complexe
de la Cour. C’est en fin la conviction qu’il faut ôter au Parlement ses pouvoirs en matière judiciaire et
aux Grands leurs traditionnelles places au Conseil qui le conduiront à gouverner seul, entourer
d’hommes choisis par lui pour leurs qualités, et non leur naissance, et qui lui doivent tout.
En 1659, le traité des Pyrénées met fin une suite de guerres contre l’Espagne qui durait depuis un
siècle. Préparé soigneusement par Mazarin qui souhaitait que la France reprenne son souffle, ce traité
est assorti d’une promesse de mariage : Louis épousera sa cousine germaine, Marie-Thérèse
d’Autriche et devra oublier la belle Marie Mancini, nièce de Mazarin, dont il était éperdument
amoureux. Le cardinal n’aurait pu rêver plus beau mariage mais il fit passer le destin de la France
avant celui de sa famille en s’opposant fermement à l’union de Louis avec Marie.
Le 10 mars 1661, au lendemain du décès de Mazarin, Louis XIV convoque le Conseil pour déclarer
que, désormais, c’est lui en personne qui se chargera des affaires du royaume. Et ses ministres ?
« Vous m’aiderez de vos conseils quand je vous les demanderai ! » Façon élégante de leur signifier
qui sera le maître.
Deux hommes de Mazarin visent la place de Premier ministre : Fouquet et Colbert. Tous deux ont fait
fructifier la fortune du cardinal au-delà de toutes mesures. Jules de Mazarin fut l’homme le plus riche
qui ait jamais vécu en France et le restera très probablement. Sa fortune, dont il profita fort peu mais
dont il fit bénéficier beaucoup, s’élevait à 35 millions de livres, soit la moitié du budget du royaume.
C’est peut-être elle, plus que le pouvoir qu’il détenait, qui lui valurent une haine si forte de la part de
ses ennemis mais surtout de l’opinion publique.
Mais revenons à nos deux hommes. Fouquet est persuadé qu’il sera choisi. Après tout, il était le
principal collaborateur de Mazarin, Colbert n’étant arrivé que par la suite. Mais, pris du vertige de sa
propre réussite, il va commettre plusieurs erreurs que Colbert se chargera d’ « embellir » pour
précipiter la perte de son concurrent. Nous n’en citerons que deux. Il propose à Louise de la Vallière,
alors favorite du roi, qu’elle lui cède ses faveurs contre une grosse somme d’argent. La belle,
offusquée, s’en ouvrira évidemment à son royal amant. Qui plus est, il choisit, pour commettre cette
bévue, le plus mauvais moment. Quelques années auparavant, Fouquet avait acheté le château de
Vaux-le-Vicomte et y fit des travaux d’embellissements sans pareils. Le roi, désireux de voir cette
merveille, Fouquet s’empressa de l’y inviter et organisa une fête somptueuse afin d’honorer son
souverain. Mais ce dernier prit ombrage de cet étalage de richesses. Cette fête, et son indélicatesse
vis-à-vis de la belle Louise, précipitèrent sa chute. De plus, il fallait bien trouver un coupable aux
malversations commises au nom du cardinal et expliquer ainsi, au moins en partie, cette fabuleuse
fortune que le roi avait reçue en héritage.
Sans compter Colbert qui mit juste ce qu’il faut d’huile sur le feu. Et devint le principal ministre de
Louis XIV.
Excellent administrateur, il donne son nom à une nouvelle doctrine économique : le colbertisme. Son
principe est simple : importer le moins possible, exporter le plus possible. Ce qui permet d’attirer en
France l’argent des pays voisins, argent qui permettra de faire leur faire ensuite la guerre. S’il a pris
son nom, ce système n’est pourtant pas très nouveau et Sully, sous le règne d’Henri IV, n’a pas agi
différemment.
Il favorise donc l’implantation de manufactures de tous types, la plus connue étant sans doute la
manufacture des Gobelins qui couvrira les murs de Versailles et des palais de l’Europe entière de ses
tapisseries. La galerie des glaces sera aussi l’occasion de montrer au monde que le savoir-faire
vénitien en matière de miroirs a pu être égalé, voire dépassé, par les artisans français de la
manufacture de Saint-Gobain.
Les historiens du XIXe siècle on construit la légende d’un Colbert « fils d’un modeste marchand de
draps de Reims » afin de mettre en avant le mérite, valeur par excellence de l’école républicaine, par
rapport aux privilèges de la naissance battus en brèche par la Révolution française. Mais l’histoire
était un peu trop belle pour être vraie : s’il est vrai que le père de Colbert n’était pas fabuleusement
riche, il en allait tout autrement du reste de sa famille, puissante dynastie de marchands et de
banquiers et c’est l’oncle de Colbert qui offrira les services de son neveu à Mazarin. Du mérite, le
jeune homme en a quand même à revendre. Mais sans l’entregent de son oncle…
Colbert, protecteur de l’industrie et du commerce, Louis XIV peut se concentrer sur l’art. D’abord par
goût : c’est un excellent danseur qui participera régulièrement aux spectacles organisés à Versailles.
Ensuite, par sens politique. Même si, parfois, les artistes dépasseront, en matière de célébration de sa
personne, les vœux du roi (la figure du Roi-Soleil et la devise « Nec pluribus impar », phrase à peu
près intraduisible mais que l’on peut interpréter en « Supérieur à tous », lui ont été plus ou moins
imposé et il n’en a fait qu’un usage très discret tout au long de son règne).
Enfin, il faut reconnaître à Louis XIV un grand sens de la mise en scène et la faculté de reconnaître le
et d’encourager le talent, eut-il parfois l’irrévérence d’un Molière.
C’est à Versailles que tous ces talents trouveront la possibilité de s’exprimer. Et se retrouveront
d’ailleurs là nombre des artistes qui avaient rénové Vaux-le-Vicomte : Jean de La Fontaine et Molière
(auquel s’adjoindra le maître de ballet et compositeur d’origine italienne Lully qui décéda pour une
cause particulièrement ridicule) pour les lettres ; Nicolas Poussin et Charles Le Brun, pour la peinture
et la décoration ; André Le Nôtre pour les jardins ; Louis Le Vau (sous les ordres, comme tous les
autres, de Jules-Hardouin-Mansart dont l’oncle donna son nom aux mansardes) pour l’architecture.
Pour ne citer que les plus célèbres.
L’agrandissement de ce château est l’une des premières décisions du règne personnel de Louis XIV
et les travaux commencent donc en 1661. Agrandissement car le site abritait un relais de chasse,
relativement modeste, qu’affectionnait particulièrement Louis XIII. Louis XIV d’ailleurs, contre l’avis de
ses architectes, refusa obstinément, en mémoire de son père, que ce premier bâtiment soit détruit. S’il
est difficile maintenant de le distinguer de l’ensemble de l’ouvrage, il en constitue toutefois le centre.
Durant tout le règne, le château sera en travaux permanents mais la Cour s’y installera quand même
en 1683 pour y demeurer jusqu’à la Révolution de 1789.
Cette année marque l’asservissement définitif de la noblesse à la personne du roi. La journée de ce
dernier est totalement ritualisée du lever au coucher et les nobles se pressent pour avoir le droit
d’assister leur souverain jusque dans ses plus intimes activités. S’ils se plient à devenir ainsi les valets
de Louis XIV, c’est que c’est le seul moyen de l’approcher pour faire valoir telle ou telle doléances. Et
si le roi se plie à cette mise en scène au final épuisante, c’est que c’est le seul moyen de filtrer les
fâcheux qui sans cela l’assailliraient en permanence : au moins, de la sorte, le flux en est maîtrisé.
Louis XV (1715-1774)
Louis XVI (1774-1792)
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