M.Gaudin / Préparation au Capet / Immunologie Coopération cellulaire – Fichier Coop_cellu_capet.doc La coopération cellulaire (dans le système immunitaire) Questions préalables : "dans le SI" non explicité mais demandé par la prépa ; est-ce qu'on inclut les effets généraux de la RI ? Est-ce qu'on inclut les coopérations avec des cellules non immunes ? On profitera de ce cours pour élargir un peu le cadre strict du sujet et compléter les apprentissages d'immunologie. On parle parfois de "sixième sens circulant" pour le SI, qui participe assurément à l'homéostasie (homéostasie du point de vue antigénique). Le SI repose sur des cellules aux activités spécialisées voire très spécialisées, qui dépendent les unes des autres. Le SI ne peut être efficace que si les cellules qui y concourent interagissent les unes entre les autres. Au-delà, un grand nombre de cellules non immunitaires participent aussi, directement ou indirectement, à cette fonction immunitaire. Cette gigantesque coordination implique donc toute une série de coopérations cellulaires, le plus souvent à faible distance, éventuellement à plus grande distance. I - Coordination des phénomènes immunitaires : A - Les trois temps de la réponse immune : 1) Premier temps - La réponse innée : Deux intervenants principaux : - les phagocytes – PRR/PAMP pattern recognition receptor ; pathogen associated molecular pattern : par exemple le récepteur du mannose des macrophages, les récepteurs "scavengers" (= éboueurs) qui fixent des débris lipidiques, les Toll-like Receptors (TLR), une grande famille moléculaire, qui reconnaissent chacun un motif donné (TLR4 à LPS bactériens ; TLR3 à ARN double brin des virus, etc.), la protéine sérique de liaison au lipopolysaccharide (LBP), protéine capable de reconnaître et de se fixer sur un grand nombre de structures lipopolysaccharidiques de bactéries, se fixe par ailleurs sur le CD14 des neutrophiles et peut déclencher la phagocytose. - le complément par la voie dite alterne – autoactivation du C3 en surface de cellules. Production de signaux (cytokines : IL-1, NO ; C3a et C5a) déclenchant d'autres phénomènes, Cf. 2) 2) Deuxième temps – Les réponses induites non spécifiques : En réponse aux signaux émis notamment dans la phase décrite ci-dessus, des mécanismes se mettent en route : - "un gros morceau" : l'inflammation (sans entrer dans les détails !! Cf. III) - et aussi NK, interférons, … L'inflammation permet de drainer un maximum d'antigènes (soit sous forme soluble, soit sous forme "apprêtée" (CMH) vers les OLII et donc de stimuler ainsi l'immunité spécifique. Version du 05/04/09 1 M.Gaudin / Préparation au Capet / Immunologie Coopération cellulaire – Fichier Coop_cellu_capet.doc 3) Troisième temps – Les réponses spécifiques : En réalité presque toutes les réponses sont plus ou moins spécifiques ; par immunité spécifique on entend donc une immunité capable de s'adapter très précisément aux motifs antigéniques correspondants ("immunité adaptative"). Deux voies principales : - la médiation cellulaire, impliquant les Ig produites par les LB - la médiation humorale impliquant o T8 cytotoxiques reconnaissant l'Ag par leur TCR o Th1 inflammatoires o NK, sous dépendance des autres intervenants. B - Les nécessaires contrôles de la réponse immune : 1) La tolérance au Soi : Anticorps (BCR) et TCR produits par des mécanismes aléatoires de recombinaison génétiques entre segments complémentaires (Cf. CDJ dans H, VJ dans L ; TCR analogue à Fab avec chaîne α=L et β=H). Ces remaniements ont lieu dans les OLI. Or en périphérie rarement reconnaissance des peptides du Soi, pourtant issus de systèmes génétiques indépendants. Donc dans OL I il existe un système de "tri" et d'élimination des cellules auto-réactives : "éducation du SI" ou "induction de la tolérance au Soi". Ces systèmes sont au service d'une protection générale de l'organisme. 2) La coordination d'activités cellulaires spécialisées : En réalité il n'y a pas trois temps de la RI, mais un ensemble coordonné d'évènements. Chaque temps est en lien avec les deux autres. Le macrophage est par exemple au cœur de chacune de ces étapes, qui en réalité se superposent plus qu'elles ne se succèdent. Et Coordo RIS : CPA/T/B etc.! II - Les signaux impliqués dans la coopération cellulaire immunitaire : A - Les grands types de communication intercellulaire : 1) En terme de mode de transfert de l'information : pas de dia On distingue la communication : - par contact direct : par signaux membranaires (il vaut mieux éviter le terme "paracrine" car il n'y a pas de sécrétion) ; - par médiateur soluble : donc avec sécrétion d'un messager. Dans tous les cas, la communication nécessite une cellule émettant le signal mais aussi une cellule le recevant ; cette dernière doit disposer du récepteur adéquat (on dit parfois qu'elle est compétente). 2) En terme de distance d'action du médiateur soluble : On distingue : - l'action autocrine, d'une cellule sur elle-même : exemple de l'IL2 Version du 05/04/09 2 M.Gaudin / Préparation au Capet / Immunologie Coopération cellulaire – Fichier Coop_cellu_capet.doc l'action paracrine, d'une cellule sur une autre cellule, à faible distance, par simple diffusion sans reprise par la circulation sanguine (donc par un médiateur soluble, au sein d'un unique tissu) : le cas de la plupart des exemples comme IL8 (chimioattractant des phagocytes) - l'action endocrine, d'une cellule sur une autre cellule (plutôt de groupe cellulaire à groupe cellulaire), à plus longue distance, avec reprise par la circulation sanguine (donc par un médiateur soluble, avec des effets généraux / systémiques) : exemple des cytokines inflammatoires que sont IL1, IL6 et TNFα. On parle parfois enfin d'action juxtacrine pour désigner des messages solubles émis entre cellules au contact direct l'une de l'autre. - 3) En terme d'effet : Un même message peut avoir des effets très variables : - effet activateur - effet inhibiteur - effet modulateur Des messages différents peuvent interagir entre eux : - effet agoniste o synergie o redondance - effet antagoniste Enfin un médiateur peut avoir un effet très spécialisé ou au contraire pléiotrope. B - Médiateurs solubles : 1) Cytokines : Définition : - Première découverte : le "pyrogène endogène" (future IL1) en 1948. Terme cytokine introduit en 1947 par Stanley COHEN. - Les cytokines sont une famille de molécules peptidiques de poids moléculaire modéré (8 à 50 kg.mol-1). - Vaste famille assez diverse de protéines dont le point commun est essentiellement d'être produites par des lymphocytes. La plupart ont une action exclusivement locale, mais quelques unes ont malgré tout un effet systémique sous certaines conditions. - En général produites après activation et sécrétées immédiatement (?) – demie-vie courte car peptides dégradables par protéases extracellulaires. Nomenclature : - n'a pas cessé d'évoluer ! bcp de vieilleries traînent encore. o Monokines et lymphokines sont à éviter car en réalité la plupart sont produites par des types cellulaires différents. o Interleukine : de leuco à leuco ; en réalité pas toujours vrai mais le terme est désormais conservé. Symbole " Il " + n° o Chimiokines (chemokine en anglais) : petites prot basiques de 70 à 125 AA, à effet chimioattractant… mais certaines IL aussi ! Et les chimiokines ont parfois des effets activateurs… Terme ambigu ? Version du 05/04/09 3 M.Gaudin / Préparation au Capet / Immunologie Coopération cellulaire – Fichier Coop_cellu_capet.doc - Classification proposée en CCL (Cys-Cys Ligand) et CXCL (Cys X Cys Ligand) selon la structure o en réalité donc : pas toujours très rigoureux. Nombreux types cellulaires donc aucun consensus. 2) Autres types de messagers solubles : On retrouve des médiateurs plus généraux impliqués aussi dans la modulation de la RI : - dérivés de l'acide arachidonique : prostaglandines, leucotriènes – souvent sécrétés par des cellules non immunitaires (sécrétion plaquettaire par exemple), - des amines vasoactives : histamine produite par les mastocytes - des peptides neuronaux : substance P, neuropeptide, cholécystokinine, pour lesquels il existe des récepteurs sur les lymphocytes. - les corticoïdes : cortisol Jusqu'où pousser cette notion de signal ? exemple du cas particulier des anticorps qui peuvent être reconnus par des cellules de l'immunité dont ils modulent l'activité… 3) Récepteurs aux cytokines : On l'a vu, pas de cytokine sans récepteur ! Logiquement, puisque les cytokines sont de nature assez diverse (bien que toutes peptidiques ! mais pas de motif structural commun), il n'existe pas de récepteur "typique". - en général : o affinité très forte (Kd = 10-10 à 10-12 mol.L-1) nécessaire car concentration très faible (nmol.L-1 à pmol.L-1 !!) o transmembranaire (extra/mb/intra) o multimérique (plusieurs ss-U) – souvent trimériques - un exemple : R-IL2 o dimère d'affinité moyenne IL2-Rβ, dédié à la transduction du signal IL2-Rγ, commun à d'autres cytokines (4, 7, 9, 15, 21) o + IL2-Rα trimère de haute affinité o les déficits chaine γ se traduisent d'absence totale de réponse immune spécifique et une réponse non spécifique gravement atténuée : phénotype SCID (syndrome sévère combiné d'immunodéficience, "enfants bulles") ; premier essai durablement efficace de thérapie génique (Alain Fischer, 99) mais leucémies induites par le vecteur rétroviral… 4) Voies de transduction : Là encore, pas de récepteur typique donc pas de transduction typique. Quatre voies de transduction au moins : - NFκB - MAP-kinases - JAK-STAT - Protéines G Version du 05/04/09 4 M.Gaudin / Préparation au Capet / Immunologie Coopération cellulaire – Fichier Coop_cellu_capet.doc 5) Action coordonnée des médiateurs chimiques : Anomalies IL2 ou IL2-R : génération de pathoprofils très variés, allant de l'immunodéficience légère au SCID ; ceci suggère qu'il existe d'autres voies parallèles ou complémentaires à l'activation par l'IL-2, et/ou effet-dose. D'une manière générale, les messages chimiques délivrés et reçus sont multiples, les modulateurs possibles du relais intracellulaire nombreux (facteurs de transcription…) : avec un nombre limité de messages, on peut exercer une communication fine et variée. C - Signaux de contact : 1) Les molécules d'adhésion intercellulaire : Qui dit délivrance de signal par contact dit support du contact, et maintien de celui-ci le temps nécessaire à la transduction du signal. Les protéines d'adhésion intercellulaires jouent un rôle fondamental, autorisant ou non des interactions entre cellules (si pas d'adhésion pas d'échange !). Ces protéines jouent aussi un rôle fondamental dans la (re)localisation des cellules immunitaires. Ces molécules font partie des ICAM (molécules d'adhésion intercellulaires) ; on y retrouve intégrines (reconnaissant des séquences peptidiques, notamment des fibres de la MEC : fibronectine…), sélectines (reconnaissant des séquences polyosidiques), des protéines de la superfamille des immunoglobulines (nb : rien à voir avec l'anticorps !)… Exemple : extravasation par diapédèse GN dans la réponse inflammatoire : - les GN interagissent faiblement par leur radical Sialyl-Lewis avec la Esélectine exprimée par les cellules endothéliales des capillaires ; cette interaction permet au GN de ralentir et de sortir du flux central, rapide ; en quelque sorte les GN roulent à la surface de la paroi vasculaire ; - lorsque le territoire sous-jacent est inflammé, les cellules endothéliales expriment des ICAM supplémentaires (ICAM-1) qui reconnues par des protéines du GN (LFA-1 = antigène de fonction leucocytaire n°1, formé par l'assemblage de CD11:a et CD18) permettent une forte interaction du GN à la paroi vasculaire ; celui-ci est "stoppé" de manière prolongée ; - des protéines exprimées par les cellules endothéliales (CD31) permettent au lymphocyte de se glisser entre celles-ci (diapédèse) et de sortir de la lumière vasculaire (extravasation). La coopération cellulaire dans la RI met donc en jeu des cellules immunitaires mais aussi beaucoup d'autres cellules, dont les cellules endothéliales ou les cellules de la matrice extracellulaire qui concourent à offrir un support aux cellules immunitaires. 2) Molécules de signalisation : Les échanges intercellulaires nécessitent une communication souvent riche et complexe ; on distingue conceptuellement : - des signaux principaux (impliquant le plus l'antigène lors des étapes de réponse spécifique) : exemple TCH-Ag-CMH - des signaux complémentaires : cosignaux, aux effets variés. Ce qui implique des transductions multiples et complexes dans la cellule. Version du 05/04/09 5 M.Gaudin / Préparation au Capet / Immunologie Coopération cellulaire – Fichier Coop_cellu_capet.doc 3) La synapse immunologique : Les interactions entre cellules coopérant dans la RI nécessitent ainsi la mise en œuvre simultanée de nombreuses protéines : - signaux chimiotactiques initiaux, - molécules d'adhésion intercellulaire intervenant progressivement, - ligands (membranaires ou solubles – donc mise en jeu sous-jacente de l'appareil de sécrétion !!), - récepteurs, - protéines de transduction du signal, - protéines complémentaires (stabilisation, etc.) On a longtemps cru que la simple diffusion membranaire selon le modèle de la mosaïque fluide suffisait à expliquer cette convergence. Mais les contacts entre cellules sont trop étroits et trop prolongés pour que ce modèle soit satisfaisant. La publication en 1997 du modèle des radeaux lipidiques (K.Simons et E.Ikonen formulent l'hypothèse des radeaux lipidiques. Les sphingolipides et le cholestérol auraient la capacité de se rassembler pour former une plate-forme d'attachement à certaines protéines membranaires) modifie cette vision des choses. En 1998 Dustin propose le modèle de synapse immunologique ; il décrit comment la mise en place de contacts étroits et prolongés est indispensable à la délivrance des signaux de coopération. Exemple : l'activation des cellules T4 par les CPA - Rappels : o Dans OLII o CPA (= en général cellules dendritiques), issues des territoires inflammés, donc CPA "préactivées" o LT4 mature inactif devient LT4 mature, activé, en T4 auxiliaire des B (h2) ou proinflammatoire (h1) - Mise en jeu : o Des signaux chimiotactiques : CPA sécrète CCL19 et CCL21 : Attraction les TDCD4 + Remodelage du cytosquelette du LT et polarisation du LT o des molécules d'adhésion cellulaire, impliquées dans la migration des cellules (CPA, LT) vers le ganglion lymphatique ; dans leur adhésion réciproque ; on retrouve en particulier les sélectines (L-sélectine exprimée par les lymphocytes, P- et E-sélectine exprimées par l'endothélium vasculaire) mais aussi les intégrines exprimées en particulier par les leucocytes en général (LFA-1), des molécules de la superfamille des immunoglobulines (CD2) ; o un signal principal, l'Ag : les T4 "lisent" le contenu du CMHII via leur TCR (+CoR = T4) ; s'il y a reconnaissance de nouvelles molécules d'adhésions sont démasquées, renforçant le contact ; o un signal secondaire : B7 (CD80) de la CPA activée, reconnue par CD28 du lymphocyte – il existe d'autres cosignaux ; o d'autres signaux complémentaires d'immunomodulation semblent exister : IL4, IL12, IFNγ, qui expliquent la différenciation en LT 4h1 ou LT4h2. o De molécules de transduction : MAP-kinases et PLC Version du 05/04/09 6 M.Gaudin / Préparation au Capet / Immunologie Coopération cellulaire – Fichier Coop_cellu_capet.doc III - Mise en jeu des coopérations cellulaires dans le système immunitaire : A - Coopérations étroites (de contact ou paracrine) : 1) Élimination de cellules : a) NK : (nb : coop° ?) Les NK sont des cellules à activité cytotoxique "non adaptable" ; cependant leur activité au départ modérée est modulée par plusieurs paramètres : - L'activité cytotoxique des cellules est renforcée par des protéines exprimées en surface des cellules (certains auteurs évoquent des protéines virales ; on parle plus souvent de protéines de stress cellulaire comme MICA et MICB MHC class I chain-related genes A / B) ; le pouvoir cytotoxique des NK est aussi renforcé en présence de certains médiateurs exprimés en contexte infectieux (IFNα et β), IL12 ; - La reconnaissance du CMHI par diverses protéines de surface des NK (Ly49…) bloque l'action cytotoxique des NK – beaucoup de virus bloquent l'expression du CMHI. - Les NK présentent des RFcγ (CD16) reconnaissant les IgG1 et IgG3 fixées à l'antigène ; lorsque cette reconnaissance a lieu en surface d'une cellule elle permet d'augmenter la réponse cytotoxique du NK (on parle d'ADCC antibody-dependent cell-mediated cytotoxycity). NB : cas un peu limite puisque l'anticorps peut être produit à distance dans l'organisme. En conséquence, l'activité du NK est modulée par les cellules de son environnement, y compris par les cellules cibles. b) Tolérance au Soi : Pour les cellules B : rôle des cellules stromales médullaires qui expriment un nombre élevé d'antigène (donc du Soi) ; si reconnaissance par BCR (IgM et D de surface) apoptose. On parle de sensibilité négative à / ou sélection négative par / l'Ag. Pour les cellules T : deux phénomènes successifs - une sélection positive par les cellules corticales épithéliales thymiques, qui "testent" que le TCR produit au hasard et associé au hasard à un des deux co-récepteurs CD4 ou CD8 est compatible avec l'un des CMH au moins de l'organisme ; ces cellules corticales coexpriment donc CMH I et II. S'il y a reconnaissance, il y a délivrance d'un signal de survie, sinon apoptose. - une sélection négative par les cellules dendritiques thymiques et les cellules épithéliales thymiques, qui coexpriment CMH I et II et permettent probablement une cross-présentation ; ces cellules "testent" que le TCR produit au hasard ne reconnaît pas un antigène présent, donc du Soi ; si reconnaissance par TCR apoptose. Les étapes du développement thymique sont donc sous étroite dépendance des cellules de l'environnement thymique, au service de l'homéostasie immunitaire. Version du 05/04/09 7 M.Gaudin / Préparation au Capet / Immunologie Coopération cellulaire – Fichier Coop_cellu_capet.doc 2) Activation de cellules : a) Interférons : NB : distinguer les IFNα et β (dits de type I) de l'IFNγ (dit de type II). L'infection par des virus de cellules induit par celles-ci la production de molécules appelées interférons de type I (IFN-α et IFN-β), appelées ainsi parce qu'in vitro elles interfèrent dans la réplication virale au sein de cellules néo-infectées. Leur synthèse est puissamment induite notamment par la présence d'ARN double-brin (structure spécifique des infections virales), et par d'autres mécanismes intracellulaires partiellement identifiés. Les IFN vont agir sur la cellule qui les produit (action autocrine), et sur les cellules voisines (action paracrine), en favorisant la production notamment de : - une protéine activatrice de la RNase qui va ainsi dégrader les ARN viraux ; - un inhibiteur de la traduction (la PKR qui phosphoryle le facteur eIF2) ; - des signaux d'arrêt du cycle cellulaire ; en conséquence, la synthèse protéique est limitée dans les cellules concernées, les ARN sont moins stables, la synthèse d'ADN est freinée, ce qui concourt à compliquer le développement viral. b) L'action des LTh1 : Différenciation des T4 vu à la fin du II, plus haut ; selon le contexte, deux devenirs principaux (il faudrait ajouter les "LTh3" ou lymphocytes T suppresseurs) ; rôle important donc de la CDF. En présence d'IL12 ou d'IFNγ, cette différenciation est orientée vers le sous-type T4 inflammatoire (Th1). Les T4 orientés vers une destinée de Th1 (inflammatoires) quittent les ganglions lymphatiques (perte de la L-sélectine) et circulent vers les foyers inflammatoires, attirés par les cytokines inflammatoires (+ expression de VLA-4 very late antigen qui reconnaît VCAM-1 exprimée par l'endothélium vasculaire activé). Ils peuvent y rencontrer des macrophages présentant sur leur CMHII le peptide dont ils sont spécifiques. Cette deuxième rencontre de l'antigène par les cellules T à présent activées (effectrices : LTh1) pousse les LTh1 à sécréter de l'IFN-γ (éventuellement déjà présent localement), du TNF-α, et à stimuler le CD40 du macrophage par le CD40-L qu'il exprime à sa surface. En retour le macrophage est alors surstimulé et voit décupler toutes ses facultés : phagocytose, fusion des phagosomes avec les lysosomes, sécrétion des dérivés toxiques de l'oxygène et de l'azote (on parle de "burst" oxydatif), sécrétion des cytokines inflammatoires, exposition de peptides sur le CMHII, etc. En un mot, le LTh1 exerce dans le territoire où il reconnaît son antigène une action "superinflammatoire". NB : Le macrophage produira aussi de l'IL-10, qui limite la synthèse d'IFN-γ ; sorte de rétrocontrôle négatif !! en vue de protéger les cellules de l'organisme. Le LTh1 intervient aussi dans l'activation des T8. Version du 05/04/09 8 M.Gaudin / Préparation au Capet / Immunologie Coopération cellulaire – Fichier Coop_cellu_capet.doc c) Th2 : En présence d'IL-4 (rôle de la CDF), le T4 se différencie en "T auxiliaire (vrai)" (Th2). La fonction première des cellules T auxiliaires (Th2) est d'activer les lymphocytes B dans le cadre d'une réponse immunitaire à médiation humorale. Les antigènes correspondants sont appelés antigènes thymodépendants. En effet, les cellules B naïves peuvent être des cibles des cellules T auxiliaires armées effectrices (déjà activées) : le lymphocyte B naïf exprime ses immunoglobulines à la surface de sa membrane (BCR), et peut à l'occasion capter l'antigène correspondant. L'immunoglobuline est alors internalisée, le peptide correspondant digéré et ses fragments présentés à la surface du CMHII : un lymphocyte Th2 activé peut alors reconnaître l'un des fragments présentés. Comme toute CPA, le LB peut selon le contexte présenter aussi alors du B7. A noter cependant que le peptide présenté n'est pas nécessairement la séquence reconnue par le BCR. La conséquence est immédiate : la cellule Th2 activée est en effet capable de répondre rapidement par des médiateurs sécrétés et par des protéines de surface, tournés vers la cellule B : - la plus importante des molécules de surface exprimée est le ligand du CD40 (CD40-L, de la famille du TNF), reconnu par un récepteur sur la cellule B, le CD40 ; - des médiateurs solubles sont aussi exprimés par le lymphocyte T armé, en particulier l'Interleukine-4 ; - + rôle des molécules d'adhésion voisines (LFA-1 et ICAM notamment). Ces médiateurs sont exprimés par le lymphocyte T préférentiellement à un pôle cellulaire, au niveau de l'interaction avec la cellule B naïve, et agissent de concert pour activer cette cellule B en cellule effectrice. Cf. synapse immunologique. Cette coopération cellule T / Cellule B, qui a lieu dans les organes lymphoïdes secondaires (en particulier les ganglions), est indispensable in vivo pour limiter les réponses accidentelles des cellules B aux antigènes du soi ; en effet en théorie l'éducation des cellules T limite l'activation des cellules B dirigées contre des antigènes du soi. B - Coopérations à plus grande échelle : 1) Un exemple de coopération locorégionale : l'inflammation "locale" L'inflammation est décrite comme un ensemble de quatre signes typiques (rougeur, chaleur, tumeur ou œdème, douleur ou plutôt hypersensibilité ; certains médecins ajoutent "perte de fonction"). Ces quatre signes sont dus à des effets régionaux des cytokines inflammatoires (cytokines activatrices : IL1, IL6, TNFα ; "chimiokines" attractantes : IL8, CCL5, CXCR10, etc.) : - le diamètre des artérioles à proximité augmente, drainant davantage de sang vers la zone inflammée ; par réaction le diamètre vasculaire est réduit en aval ce qui entraîne un ralentissement de l'écoulement ; cet afflux de sang se traduit par une rougeur et une sensation de chaleur ; Version du 05/04/09 9 M.Gaudin / Préparation au Capet / Immunologie Coopération cellulaire – Fichier Coop_cellu_capet.doc - la perméabilité vasculaire augmente : davantage de liquide plasmatique peut fuir vers les tissus où il s'accumule, générant un œdème ("tumeur"), en parallèle les fibres nerveuses douloureuses, déjà comprimées par l'œdème, abaissent en réponse aux cytokines leur seuil de sensibilité, se traduisant par une hypersensibilité douloureuse ("douleur"). L'inflammation a un double-intérêt fonctionnel : - faciliter l'apport éventuel via le plasma des acteurs solubles et cellulaires : l'inflammation (deuxième temps de la RI) est donc au service des réponses innées (premier temps) ; les cellules endothéliales expriment des molécules d'adhésion pour les phagocytes et les LTh1 ; les fibroblastes offrent un support à ces cellules pour qu'elles remontent le gradient d'IL8 notamment. - favoriser l'export des antigènes locaux (solubles, CPA) vers les ganglions lymphatiques correspondants, via l'augmentation du flux lymphatique ; l'inflammation est donc au service du troisième temps de la RI (RIS). La RIS viendra à son tour, plus tard, par les LTh1, renforcer l'inflammation ! L'hypersensibilité peut avoir un autre intérêt : l'animal ménage sa plaie, les quintes de toux et d'éternuement facilitent la protection de l'appareil respiratoire, etc. Effets sur le système nerveux périphérique : certaines cytokines (bradykinines, prostaglandines, histamine, etc.) augmentent la sensibilité des fibres sensitives notamment douloureuses et active tout le circuit de la douleur. Le système nerveux local émet en retour des cytokines (substance P) qui stimulent les mastocytes, renforçant encore l'inflammation (on parle du "pseudo-réflexe d'axone"). 2) Un exemple de coopération systémique : l'inflammation aiguë La réponse inflammatoire n'exerce pas que des effets locaux sur les seules cellules endothéliales ou de l'immunité, mais aussi sur des cellules plus lointaines : on parle de phase aiguë de l'inflammation pour ces effets distants généraux. Effets sur l'axe hypothalamo-hypophysaire et le système nerveux central : si quantité produites suffisantes, l'action conjuguée sur l'hypothalamus de l'IL-1 et un peu de l'IL-6 (on parle de pyrogènes endogènes, qui vont aussi favoriser la mobilisation des réserves métaboliques, etc.), et dans une moindre mesure du TNFα, entraîne la fièvre ; la hausse de la température corporelle qui s'ensuit vise un double objectif : à la fois limiter le développement de nombreux micro-organismes – surtout les virus – qui se multiplient difficilement au-delà de 37°C, mais aussi d'augmenter l'activité des enzymes leucocytaires, et donc l'intensité de la réponse immunitaire (et ces pyrogènes endogènes ont de plus aussi une action directe sur l'activité lymphocytaire). La somnolence et l'anorexie observées lors des infections est probablement due aussi à l'action de ces cytokines sur l'encéphale. Par ailleurs l'hypothalamus va favoriser la production et la libération par l'hypophyse de l'ACTH (AdrenoCorticoTrophin Hormon, ou hormone corticotrope), qui favorise la production de cortisol (effet immunosuppresseur), préparant ainsi la sortie de la réponse inflammatoire (sorte de rétro-contrôle de l'inflammation). Effets hépatiques : en réponse aux cytokines précitées, les hépatocytes vont modifier la composition qualitative et quantitative des protéines qu'ils produisent. On Version du 05/04/09 10 M.Gaudin / Préparation au Capet / Immunologie Coopération cellulaire – Fichier Coop_cellu_capet.doc parle de protéines de la phase aiguë ou encore de protéines inflammatoires, qui sont produites alors massivement; en particulier on peut citer : - des PRR dont : o protéine C-réactive, ou CRP, est considérablement augmentée ; cette protéine est capable de se lier au résidu phosphorylcholine de certains LPS bactériens et fongiques et d'activer alors très efficacement la cascade du complément, elle permettrait par ailleurs de fixer différents éléments nucléaires, favorisant leur apparition et limitant ainsi la formation d'auto-anticorps anti-nucléaires) ; o protéine amyloïde sérique (ou SAP) qui reconnaît les LPS ; o protéine liant le mannose (MBP) est aussi augmentée (en moindre proportions) ; cette lectine sérique déclenche la voie des lectines du complément ; - beaucoup des protéines du complément et de la coagulation ; - haptoglobine (prend en charge les chaînes de globine libérées dans la circulation, et la transferrine qui véhicule le fer) Cf. hémolyse possible dez zones inflammées ; - céruloplasmine ou la SOD (antiradicaux libres) ; - orosomucoïde (favorise cicatrisation et s'oppose à l'inflammation) ; - etc. Les effets médullaires : ces cytokines ont aussi une action sur la moelle rouge, où elles vont stimuler la libération des leucocytes vers la circulation sanguine. Conclusion : - SI : nombreux mécanismes distincts mais concourrant à une même fonction / nombreuses activités cellulaires coordonnées - Nécessité d'une coordination - Nombreux exemples ; concept clé de synapse immunologique - Il reste encore à découvrir des mécanismes probablement essentiels découverte de cellules T non Th1, non Th2, capables d'inhiber l'activation des Th1, Th2 ; découverte de Th1 activant ou inhibant les Lb ; etc. notion de T suppresseurs… Version du 05/04/09 11