
 
Tout  d’abord,  en  nous  entretenant  avec  certains  d’entre  vous,  nous 
avons acquis la conviction que nous connaissions, depuis plusieurs décennies, 
une  crise  majeure  du  monde  vivant  se  traduisant  par  un  risque  fort 
d’effondrement  de  la  biodiversité.  C’est  pourquoi  nous  avons  délibérément 
choisi  de  sous-titrer  notre  rapport  « l’autre  choc »,  en  guise  de  réplique  au 
« premier choc », c'est-à-dire le choc énergétique, celui dont tout le monde a 
conscience.  
Par  ailleurs,  ce  choc  illustre  le  télescopage  des  deux  évènements 
majeurs  qui  structureront  l’avenir  de  la  planète  et  de  l’humanité  dans  les 
prochaines décennies.  
Il s’agit, d’une part, de l’établissement d’un nouveau rapport de force 
entre  la  planète  et  l’humanité.  En  effet,  nous  ne  pouvons  pas  envisager  de 
passer impunément d’une planète peuplée par un milliard d’hommes en 1800 à 
six milliards d’individus en 2000 et près de neuf milliards en 2050, d’autant 
plus que, parallèlement, ces individus ont vu leurs pouvoirs scientifiques et 
technologiques s’accroître considérablement. 
D’autre  part,  qu’il  s’agisse  de  la  biodiversité  ou  de  la  crise 
énergétique,  il  convient  de  prendre  en  compte  l’accélération  du  temps.  En 
effet, si au cours de l’histoire notre planète a fait preuve d’une extraordinaire 
capacité  d’adaptation,  celle-ci  n’a  été  possible  que  parce  qu’elle  s’est 
effectuée dans des durées longues. 
A  partir  de  ces  conclusions,  nous  avons  dégagé  trois  grandes 
questions  qui  structurent  à  la  fois  notre  rapport  et  l’organisation  de  nos 
présents débats. 
Nous pouvons tout d’abord nous demander quelle est la réalité de la 
situation. En d'autres termes, comment évolue la biodiversité et quels sont les 
risques qui la menacent ? 
Et,  puisqu’il  nous  semble  acquis  que  la  biodiversité  régresse,  nous 
pouvons  nous  interroger  sur  les  mesures  qui  doivent  être  prises, 
immédiatement et dans le terme, pour éviter le pire. 
Enfin, dans le souci de dépasser la crise, la question se pose de savoir 
comment, à travers une meilleure connaissance de la biodiversité, l’humanité 
peut se donner de nouvelles perspectives de développement. 
En  conclusion,  aujourd’hui,  notre  principal  objectif  consiste  à  vous 
écouter. En effet, malgré quelques intuitions, que nous sommes d’ailleurs tout 
à fait prêts à remettre en cause, nous n’avons aucune certitude. La démarche 
du politique se distingue sur ce point de celle du scientifique. En effet, alors 
qu’il  est  souvent  attendu  des  politiques  qu’ils  affichent des certitudes, nous 
allons épouser la démarche scientifique qui consiste à mettre en avant le doute 
et l’interrogation.