14/06/10
INTERVENTION SYNDICATS SEMINAIRE CNCD 15 JUIN 2010
Mon intervention s’articulera autour de 3 axes:
1. Tout d’abord, démontrer en quoi crise climatique, épuisement des ressources naturelles et
inégalités sociales sont étroitement liés, voire indissociables
2. Ensuite, présenter la position des syndicats autour de ces questions
3. Enfin, rappeler quelles sont les principales revendications des syndicats dans le cadre des
négociations internationales sur le climat
1) crise climatique, épuisement des ressources naturelles et inégalités sociales sont
étroitement liés
Les conséquences des changements climatiques et de la destruction des ressources naturelles sont
également sociales !
Nous ne sommes pas tous égaux devant les conséquences des changements climatiques.
Les première victimes sont les plus démunis, et en particulier ceux du Sud :
- 262 millions de personnes ont été annuellement affectés par des désastres climatiques sur la
période allant de 2000 à 2004.
- Plus de 98% d’entre elles vivent dans des pays en développement.
- près d’un milliard de personnes se verront obligées de quitter leur domicile d’ici 2050 en
raison du changement climatique, de la dégradation environnementale et des conflits qui en
résultent, les femmes étant affectées de manière disproportionnée.
- Impact sur l’agriculture et la pêche : arrêt de la culture de certaines plantes dans certaines
régions, suite au glissement des zones climatique
- Impact sur la santé : L’augmentation de la fréquence et de l’intensité des vagues de chaleur
entraînera un surcroît de pertes humaines. Souvenons nous de l’été 2003, où la vague de
chaleur a provoqué entre 20 000 et 30 000 décès, suite à des affections cardiaques,
vasculaires et/ou pulmonaires
- Réfugiés climatiques : Augmentation exponentielle du nombre de réfugiés climatiques : Les
Nations unies (ONU) évaluent à 50 millions le nombre d’habitants qui pourraient être
contraints de quitter leur lieu de vie en raison des conséquences du changement climatique
(avancée du désert de Gobi en Chine , inondations au Bangladesh et dans le delta du Nil,
submersion d’archipels comme les îles Tuvalu). D’ici à la fin du siècle, le nombre des réfugiés
climatiques pourrait être porté à 150 millions. D’autres sources estiment que le nombre de
réfugiés climatiques pourrait atteindre 200 millions à l'horizon 2050. L’ouragan Katrina a
démontré à quel point, même dans l’hémisphère Nord, les humains sont fragiles et, surtout,
inégaux face aux conséquences directes du changement climatique
- Accès à l’eau : comme l’a très bien démontré Ricardo Petrella, l’accès à l’eau sera un enjeu
majeur. Dans les pays du Sud, la diminution de l’approvisionnement en eau combinée à la
baisse des récoltes pourra entraîner à terme des conséquences sociales très sérieuses :
famine, guerre
Les habitants des pays du Sud seront, une fois encore, les premières victimes du réchauffement
climatique avec une responsabilité qui incombe, en grande partie, aux pays industrialisés ;
Outre notre responsabilité envers ces populations, le réchauffement climatique aura également des
impacts sur notre pays: diminution du pouvoir d’achat des plus défavorisés liés à l’augmentation des
prix des matières premières, risque de délocalisations, impact sur la santé ;
Le changement climatique, en ajoutant des barrières supplémentaires au développement, contribue
au cercle vicieux de la pauvreté. Les catastrophes écologiques telles que les sécheresses, les
inondations ou la diminution des ressources naturelles ont des conséquences directes sur les plus
pauvres. Elles aggravent des situations économiques et sociales déjà critiques (par exemple, la
diminution des ressources en eau augmente le chômage, qui, à son tour, contribue aux flux
migratoires qui vide les campagnes de leur main d’œuvre et aggrave la crise économique des zones
rurales).
Social et environnemental sont donc indissociables!!!
L’économie de marché est responsable du réchauffement parce qu’elle est basée sur la concurrence
et l’accumulation. Les décisions de production ne sont pas prises en fonction de l’utilité et de
l’écologie, mais des profits. Des choses inutiles ou nuisibles sont réalisées dans le seul but de
satisfaire l’actionnariat.
La crise financière et économique que la planète traverse depuis l’automne 2008 vient renforcer la
crise climatique : limitation des moyens pour lutter contre les changements climatiques, retour des
protectionnismes dévastateurs, manque d’ambition sous prétexte de répondre à la crise financière.
Les changements climatiques n’attendent pas. Un processus naturel aux conséquences éminemment
sociales est enclenché et il ne fera qu’augmenter dans les années à venir. Il faut à la fois oser
remettre en question ce modèle sur-consumériste engendré par le capitalisme mais aussi éviter que
les pays en développement succombent à l’appel des sirènes et reproduisent un schéma en faillite.
Lutter contre les changements climatiques, c’est sauver la planète, mais aussi, surtout pour nous
syndicats, ceux qui vivent dessus !
Pour nous syndicats, les changements climatiques et la question sociale sont définitivement
étroitement liés. Lutter contre le réchauffement et protéger les travailleurs sont les deux faces d’une
même médaille
2) Quand syndicat rime avec Climat.
Pour le monde syndical, le changement climatique soulève d’importantes questions liées à l’emploi, à
la justice sociale, à l’équité et aux droits de l’homme. Des questions qui traversent les frontières et
les générations.
Il est essentiel que la lutte contre la dégradation environnementale et le changement climatique soit
menée à bien en tenant pleinement compte des objectifs syndicaux généraux de justice sociale, de
travail décent et d’égalité de genre, dans le cadre d’une stratégie de transition équitable du mode
actuel de production et de consommation vers une alternative durable à faibles émissions de
carbone et résiliente au changement climatique.
La Transition Juste
Nous réclamons une transition juste vers une économie pauvre en carbone.
Mettre en œuvre des programmes de transition juste implique concrètement :
- d’établir d’importants plans d’investissement pour développer une politique durable à long
terme en vue de maintenir et de créer de l’emploi décent ;
- de réaliser des études nationales, régionales et sectorielles sur les politiques liées au
changement climatique. L’impact de ces politiques sur l’emploi et les marchés du travail doit
être systématiquement analysé, en concertation avec les interlocuteurs sociaux ;
- de protéger celles et ceux qui travaillent dans des secteurs à risque. Cette transition doit
comprendre des politiques pour promouvoir des technologies propres et économes, le
développement d’un entrepreneuriat socialement responsable, la création de perspectives
d’emplois alternatifs et la diversification économique ;
- d’obtenir un engagement des gouvernements à consulter et encourager la participation
officielle des syndicats. Cette implication des syndicats est essentielle pour assurer une
transition efficace et effective vers une société durable ;
- de mettre sur pieds et de renforcer des programmes d’apprentissage des technologies dites
- « propres » à destination des étudiants et des travailleurs (via la formation) ;
- d’assurer une protection sociale forte. La vulnérabilité est source de réticence. Il faut assurer
la protection des travailleurs.
Nous sommes conscients que la transition vers une économie à faible émission de gaz à effet de
serre représente un défi colossal. Lorsque les transitions sont mal gérées, ce sont les travailleurs, et a
fortiori les plus pauvres d’entre eux, qui paient les pots cassés. Nous insistons donc sur le fait qu’il
faut soutenir et assister les travailleurs, y compris les plus vulnérables, durant le processus de
transition. La justice climatique, la défense des droits des travailleurs et la protection sociale forment
des préalables indispensables à toute transition juste et durable.
La responsabilité historique et la question du financement
Les pays industrialisés sont responsables de plus de 75% des GES présents dans l’atmosphère de
notre planète.
Ce fait est repris dans le projet de résolutions du Congrès mondial de la CSI qui se tiendra du 21 au 24
juin prochain à Vancouver.
La CSI reconnait également qu’en l’absence de mesures d’atténuation, de 50 à 75%de la croissance
des émissions de carbone provenant de l’utilisation de l’énergie pour les années 2000-2030 viendra
des pays en développement. Par conséquent, les nations développées et en développement ont
également la responsabilité d’œuvrer pour obtenir des réductions globales d’émissions des GES dans
l’atmosphère. Les nations développées doivent prendre l’initiative dans les mesures d’atténuation et
d’adaptation au changement climatique, à la fois au travers de réductions conséquentes de leurs
propres émissions et par le biais d’un financement adéquat des mesures que les pays en
développement doivent prendre, selon le principe des responsabilités communes mais différenciées
et des capacités respectives.
Quant au montant de l’aide, nous syndicats, nous insistons pour que les 85 milliards US$ par an de
financement public entre 2013 et 2017 que l’ONU estime nécessaires pour l’adaptation par les pays
en développement soient rendus disponibles. Le financement public nécessaire devrait être dégagé
pour rendre plus vertes les économies. Des sources innovatrices de financement devraient être
prises en considération. En outre, des mesures doivent être prises afin d’encourager des
investissements privés respectueux des normes du travail et des normes de durabilité de
l’environnement. Les actions à entreprendre peuvent inclure tant la transformation des secteurs
industriels que l’adoption de cibles en matière d’énergies renouvelables et d’efficience énergétique,
le recyclage, le non-recours à la déforestation, et le transfert des technologies nécessaires aux pays
en développement.
3) Négociations internationales sur le Climat : position des syndicats !
Notre position sur la poursuite des négociations est la suivante :
- Nous confirmons la nécessité d’arriver avec tous les pays à un accord ambitieux, contraignant
et équitable, négocié dans le cadre du Traité climatique des Nations-Unies, le but étant de
réaliser l’objectif d’une augmentation maximum 2°C aujourd’hui acquis. Il faut par
conséquent continuer à travailler sur la base des deux textes présentés à Copenhague
(Action concertée à long terme et Protocole de Kyoto). Ce sont essentiellement les pays
industrialisés qui doivent d’urgence faire la clarté sur leurs intentions. Un compromis
constructif doit être trouvé afin de sauvegarder les acquis du Protocole de Kyoto et d’obtenir
des engagements équivalents de la part des Etats n’ayant pas signé le Protocole.
- Le passage relatif à la “juste transition » dans le préambule du projet de texte doit être à tout
pris maintenu. Il semble faire l’objet d’un consensus général. Il a d’ailleurs obtenu le soutien
en plénière à Bonn des USA, du G77 et du Japon. :
- Le financement de la juste transition est crucial pour pouvoir aller de l’avant. Des moyens
supplémentaires sont nécessaires pour réaliser la transition vers une économie sobre en
carbone dans le Nord et dans le Sud. Des instruments de financement nouveaux et innovants
comme une taxe sur les transactions financières sont nécessaires pour générer ces moyens.
- L’Europe doit élaborer une stratégie de développement cohérente qui doit constituer la base
de sa stratégie de négociation. Cette stratégie doit offrir une perspective claire aux pays
développés et en développement. La transparence des objectifs sociaux et
environnementaux et une politique publique renforcée sont essentielles pour mettre en
place une dynamique constructive au lieu de l’approche défensive actuelle.
- Une stratégie de développement cohérente basée sur une vision claire d’une politique
industrielle européenne sobre en carbone signifie également que l’Europe et les Etats
membres ne doivent pas attendre les négociations internationales pour réaliser des progrès
au niveau de la politique interne. Un nouveau report des mesures ne fera que faire
augmenter le coût de la politique climatique.
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