Introduction Cartes politiques de l`Europe en 1850 et en 1914 : Etats

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Introduction
Cartes politiques de l’Europe en 1850 et en 1914 :
Etats, régimes politiques et revendications des nationalismes
Programme
Introduction - Cartes politiques de l’Europe en 1850 et en 1914
Cette introduction vise à opérer des constats éclairants pour la suite, enrichis par un retour
sur les acquis et par quelques explications; elle peut et doit être brève.
L’étude de cartes politiques (frontières et régimes) révèle la coexistence :
– d’États multinationaux et d’États-nations, dont certains s’organisent durant la période.
On observe que persistent des revendications nationales non satisfaites.
Ces informations et le travail conduit sur les cartes étudiées précédemment permettent
d’aborder les tensions que nourrit le nationalisme de puissance (rivalités coloniales,
implication des grandes puissances dans les Balkans, russification des minorités, etc.);
– de pays de tradition autoritaire et de pays de tradition libérale. La démocratie libérale est
réalisée en Europe du Nord et de l’Ouest ; on l’a déjà abordée grâce au cas français.
Elle constitue une référence, y compris dans les régimes politiques autoritaires, dont
certains en ont une lecture formelle (Russie). Une tradition autoritaire multiséculaire
appuyée sur les hiérarchies sociales traditionnelles est un frein vers l’évolution
démocratique (Allemagne, Autriche-Hongrie).
Il convient de s’appuyer sur les notions déjà vues en seconde (thème VI) et il est possible
de favoriser un éclairage mutuel avec le programme d’éducation civique, juridique et sociale
de première (pouvoir, représentation, légitimité, État de droit, république, démocratie).
Le programme de géographie invite à une articulation avec ce thème («L’exemple des États
issus de l’empire austro-hongrois permet de comprendre le poids des héritages et le rôle
des frontières»).
Problématique : comment les oppositions et les tensions qui parcourent l’Europe
à la fin du XIXè siècle ont-elles conduit à la Première Guerre Mondiale ?
I - Les nationalités en Europe au XIXè siècle
1 - L’origine des nationalités
a) L’héritage de la Révolution Française
* La Révolution française* a apporté l’idée du droit des peuples à disposer d’euxmêmes. C’est une idée qui affirme que la conscience d’appartenir à un peuple
donnait le droit de réclamer un Etat* pour celui-ci : c’est affirmer le principe que c’est
le peuple qui a la souveraineté.
Cette idée était en totale opposition avec les principes de l’Ancien Régime* où des
peuples se trouvaient réunis non par leur volonté mais par la volonté des souverains
(princes, rois, empereurs) pour qui l’unité de l’état repose sur eux et non sur un
peuple particulier. Ces principes ont été répandus dans toute l’Europe pendant la
période napoléonienne (1799-1815).
Cependant, en 1848-1850, la majorité des Etats européens sont des régimes
monarchiques autoritaires ou absolutistes, et ce principe du droit des peuples à
disposer d’eux-mêmes n’y est pas appliqué. VOIR Carte page 188.
* D’autre part, face aux conquêtes napoléoniennes dans les Etats allemands, un mot
nouveau y apparaît, en réaction à l’invasion française, celui de Nation. Ce motEn
Allemagne, l’idée de « nation » trouve son origine dans le romantisme allemand qui
sacralise le passé, qui insiste sur le retour aux racines du peuple, aux traditions
germaniques. Ce mot nation signifie alors : « communauté d’individus ayant en
commun une langue, une histoire et une culture (souvent aussi une religion), ainsi
que la volonté de vivre ensemble. »
Une nation (on emploie aussi le terme de « nationalité* ») peut donc se trouver dans
trois situations : elle peut vivre tout entière dans un Etat (on parle alors d’Etat nation)
; elle peut être répartie sur plusieurs Etats ; elle peut être en minorité dans un Etat
dirigé par une autre nation. Voir b) Les aspirations nationales vers 1850
Définitions
Révolution française : elle commence en 1789 et la période révolutionnaire se termine
avec la fin de l’Empire napoléonien en 1815.
Etat : un territoire délimité par des frontières et soumis à une même autorité.
Ancien Régime : c’est ainsi que les Révolutionnaires français désignaient le régime qui
précédait la Révolution en France, le régime de la monarchie absolue. Cette expression en
est venue à désigner, au XIXè siècle, les régimes politiques monarchiques autoritaires
(contrairement aux Républiques démocratiques ou aux Monarchies constitutionnelles).
Nationalité : ce mot a deux sens. Tout au long du XIXè siècle, il a le même sens que
« nation ». Puis, à partir du moment où les Etats établissent des documents d’identité pour
identifier les habitants d’un pays, ce mot prend peu à peu le sens qu’on lui connaît
aujourd’hui : « appartenance à un Etat dont on est citoyen ».
Etat-Nation : Etat indépendant qui rassemble des personnes qui se reconnaissent toutes
(ou presque) comme appartenant à une seule nation.
b) Les aspirations nationales vers 1850
Exercice
En vous aidant de la carte page 186, complétez la colonne 2 de ce tableau suivant
en donnant les exemples qui vous apparaissent comme les plus pertinents :
Citez trois Etats nations
Citez trois nationalités
divisées en plusieurs
Etats
Citez trois grands états
multinationaux
Citez cinq nationalités
sans Etat (qui sont en
minorité dans un Etat
dominé par une autre
nationalité)
Leçon
La plupart des nationalités qui n’ont pas d’Etat Nation, ont des aspirations
nationales : c'est-à-dire qu’elles aspirent à l’unité dans un seul Etat (comme les
Italiens) ou qu’elles ont la volonté d’obtenir un Etat (comme les Irlandais).
Attention cependant, les mouvements nationalistes ne concernent en général que la
partie la plus lettrées de ces populations.
c) L’écrasement du « Printemps des peuples »
* Les aspirations nationales se sont exprimées par des mouvements politiques
nationalistes et parfois des révoltes, particulièrement entre 1848 et 1851 : pour cette
période, on a parlé du « Printemps des peuples » car les aspirations nationales se
sont exprimées par des soulèvements dans toute l’Europe (et particulièrement dans
l’Empire d’Autriche, dans les Etats italiens et dans les Etats allemands).
En même temps que l’indépendance, ces révolutionnaires réclament la mise en place
de Républiques libérales (régime dans lequel les habitants jouissent des libertés
fondamentales).
* Mais les souverains mis en cause par ces insurrections réagissent avec violence et
écrasent tous ces mouvements.
Les soulèvements révolutionnaires et nationalistes du Printemps des peuples
La répression des soulèvements par les régimes princiers autoritaires
2 - Les revendications ont-elles été satisfaites au
début du XXè siècle ?
Voir Carte page 187
a) L’Italie et l’Allemagne, deux unités réalisées par la guerre
* L’échec du « Printemps des peuples » de 1848 a disqualifié, en Italie et en
Allemagne, l’idée que l’unité nationale serait obtenue par une révolution
démocratique. C’est pourquoi, deux royaumes, le Piémont en Italie et la Prusse en
Allemagne, s’engagent dans l’unification autour d’eux, et utilisent la guerre et la
diplomatie pour lutter contre leur ennemi commun : l’Empire d’Autriche.
* Chronologie
Unité italienne
1858 : le Piémont et la France s’allient.
1859 : la France intervient en Italie
contre l’Autriche ; les Etats du nord de
l’Italie se rattachent au Piémont.
1859-1861 : la plupart des Etats d’Italie
rallient le Piémont qui proclame
l’indépendance de l’Italie en 1861.
1866 : l’Italie et la Prusse s’allient.
1866 : l’Italie reçoit la Vénétie.
1870 : l’Italie s’empare des Etats du
pape (il ne lui reste que la Cité du
Vatican) et Rome devient sa capitale.
Unité allemande
1862 : Bismarck devient chancelier du roi de Prusse.
1866 : alliance entre la Prusse et l’Italie.
1866 : la Prusse écrase l’Autriche et annexe des
territoires allemands.
1867 : la Prusse fonde la Confédération de l’Allemagne
du Nord qu’elle dirige.
1870 : la Prusse qui a unit derrière elle tous les Etats
Allemands écrase la France.
1871 : Guillaume 1er proclame l’Empire (Reich)
allemand (dans la galerie des glaces à Versailles).
* Italie :
- Voir Document 1 page 190 et chronologie ci-dessus : entre 1859 et 1870,
les Italiens parviennent à se constituer en un seul état.
- Mais les Italiens estiment que deux territoires leur manquent pour réaliser
une unification complète de la nation italienne : on les appelle « les terres
irrédentes » (il s’agit du Trentin et de l’Istrie, deux régions de l’Empire d’AutricheHongrie). Le conflit change donc de nature, puisqu’il va opposer deux Etats qui se
disputent les terres en question : l’Italie et l’Empire austro-hongrois.
* L’Allemagne
- Voir document 1 page 192 et chronologie ci-dessus : du morcellement à
l’unité.
- Mais tous les Allemands ne sont pas satisfaits. En effet le mouvement
pangermaniste réclame un espace vital plus vaste pour les Allemands, qui
engloberait tous ceux qui sont de culture allemande mais vivent encore hors des
frontières de l’Empire, par exemple en Autriche (Voir le document 4 page 193 qui
est un manifeste du pangermanisme).
Bilan : le nationalisme des Italiens et des Allemands permet à ces deux nationalités
de réaliser leur unité au prix de plusieurs guerres qui affaiblissent l’Empire d’AutricheHongrie.
b) Dans les Balkans
* Voir cartes pages 186-187. Entre 1850 et 1912 l’Empire Ottoman a perdu presque
tous ses territoires européens au profit d’états qui s’agrandissent (la Grèce) ou
d’états nouveaux (la Serbie, la Roumanie …).
* Pourquoi parle-t-on de « la poudrière des Balkans » au début du 20è siècle ?
- D’abord parce que cette région est un enchevêtrement de populations très
différentes (voir cours de Géographie sur les Pays d’Europe Centrale et
Orientale et Carte page 187).
- Ensuite parce que les guerres balkaniques ont libérés certains peuples
slaves de la domination turque : cela renforce les rêves d’indépendance des peuples
slaves encore sous domination extérieures (ainsi les Serbes de l’Empire Ottoman ont
obtenu leur indépendance, alors que les Serbes de Bosnie sont sous la domination
autrichienne).
- D’autre part, les frontières des nouveaux pays qui apparaissent dans les
Balkans résultent des rapports de force entre les grandes puissances (Empires
autrichiens et russes) qui veulent chacun exercer une influence dans cette zone :
ainsi la Russie soutient l’expansion de la Serbie (c’est la solidarité slave) contre la
volonté de l’Autriche.
Bilan 2 : des nationalités insatisfaites
- L‘Empire d’Autriche-Hongrie est un empire multiethnique qui connaît des
tensions internes très vives (attisée par les Russes) car des nationalités réclament
leur indépendance (les Hongrois) ou le rattachement à un des nouveaux pays
apparus dans les Balkans (Serbes, Roumains).
- Les nationalistes italiens et allemands estiment que leur unification n’est pas
complète.
II - Le choc des nationalismes de puissance
Nationalisme de puissance : volonté d’un Etat d’accroître sa puissance par rapport
à ses voisins, afin d’accomplir un destin national considéré comme nécessaire et
« naturel ».
1 - Les rivalités en Europe
a) L’origine du nationalisme de puissance
* Il y a bien sûr toujours eu des conflits de puissance entre les Etats ! Cependant, à
la fin du XIXè siècle se développe une véritable idéologie que l’on appelle
« nationalisme de puissance ». Quelles sont les causes du développement de cette
idéologie en Europe de l’ouest notamment ?
* Le développement des Etats
- La concentration progressive des pouvoirs par l’Etat : celui-ci définit de plus
en plus des lois communes qu’il peut imposer sur tout le territoire grâce à des
fonctionnaires de plus en plus nombreux.
- Les frontières des Etats sont beaucoup plus précisément définies ; les Etats
fixent des règles de nationalité ; les recensements se multiplient => les individus qui
avant passaient d’un territoire à un autre se sentent de plus en plus appartenir à un
Etat particulier.
* La nationalisation des sociétés
- Avec le développement des transports, de la presse de masse, du service
militaire national et de l’école, les individus se sentent de plus en plus citoyens d’un
Etat alors qu’avant ils se sentaient appartenir au petit territoire dans lequel ils vivaient.
- C’est aussi l’époque où l’on construit et diffuse une Histoire nationale (en
France : « nos ancêtres les Gaulois, Jeanne d’Arc … »), où l’on « fabrique » le
folklore, où l’on insiste sur ce qui fait l’unité de la Nation et la distingue des autres (en
Allemagne : la langue
- On assiste aussi aux premiers développements de la « racialisation » de la
Nation. Ainsi, en France, Arthur de Gobineau développe ses théories dans son livre
Essai sur l’inégalité des races (1855). Il utilise le développement de la science pour
expliquer qu’il existe des races, qu’elles ont chacune des caractères particuliers (la
« race française » est différente de la « race allemande ») et qu’elles sont, bien sûr,
inégale !
=> En Europe (surtout en France, au Royaume-Uni et en Allemagne) la diffusion de
l’idée qu’il y a « Nous » et « Eux », accompagnée de préjugés sur les « autres »,
provoque le développement du racisme contre les autres nations.
b) Le nationalisme d’Etat
* L’esprit de revanche en France
Il est lié à la défaite de 1870 et à la perte de l’Alsace-Lorraine (voir cours d’Histoire,
2è partie, chapitre 1).
* Le militarisme allemand
Le développement du pangermanisme s’accompagne d’une croissance très
importante de l’armée allemande.
c) Quels Etats sont en conflit en Europe ?
- L’Empire Russe et l’Autriche-Hongrie dans les Balkans.
- Le Royaume-Uni et l’Allemagne pour la puissance maritimes.
Bilan du I
La notion de « nationalisme » a évolué tout au long du XIXè siècle, passant d’un
« nationalisme ouvert » (le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, aspiration
romantique à la liberté …) à un nationalisme dit « fermé » (un patriotisme exacerbé,
affirmant la primauté de la défense des valeurs nationales et des intérêts nationaux ;
exemples : pangermanisme en Allemagne, nationalisme intégral de l’Action
française).
2 - Les rivalités coloniales
* Les puissances européennes sont en conflit pour la possession des derniers
territoires indépendants outre-mer (en Afrique, en Asie et dans le Pacifique).
* L’Allemagne s’estime lésée car elle a très peu de colonies.
Voir carte suivante
* Exemple : le Maroc
Les quatre états européens
cherchent à contrôler le
Maroc notamment à cause
de sa position stratégique
(détroit de Gibraltar).
Finalement la France va
s’imposer en 1912, mais
laisse le nord (le Rif) à
l’Espagne.
Conclusion :
- En 1914 on trouve en Europe trois types de régimes politiques : des démocraties
libérales (surtout à l’ouest et au nord), des régimes autoritaires et des régimes
absolutistes (surtout à l’est) Voir Cartes pages 188-189. Par rapport à 1850, il y a
plus de démocraties.
- Cependant tous ces Etats, quelque soit leur régime, connaissent un développement
du nationalisme de puissance et se préparent à un conflit.
Document - Un bilan pessimiste du XIXè siècle
- Ces Etats passent entre eux des alliances qui n’ont rien à voir avec le type de
régime : par exemple la république française s’allie avec l’Empire russe.
- Au début du 20è siècle les Européens se préparent donc à la guerre qu’ils jugent
inévitable et, pour beaucoup, souhaitable. Ils passent donc des alliances (voir
document 2 page 196):
- Triple Entente 1882 : France, Empire russe, Royaume-Uni ; états proches :
Serbie, Monténégro, Portugal.
- Triple Alliance 1907 : Empire allemand, Empire austro-hongrois, Italie
(signataire mais réservé) ; états proches : Bulgarie, Empire Ottoman.
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