L’écolier au spectacle Saison 2009/2010
Au cours de cette année scolaire, vos classes de Grande section de maternelle ou de CM2 se verront
proposer un spectacle gratuit, donné par une compagnie reconnue, pendant le temps scolaire, à proximité de
votre école. Cette rencontre, avec des artistes professionnels, conduira l’élève à devenir un «véritable
spectateur». Cet objectif ne sera pleinement atteint que s’il s’accompagne d’un travail en amont et après le
spectacle.
Ce projet, qui vise avant tout l’épanouissement de l’enfant - découverte de la culture vivante, construction
personnelle, développement de l’imaginaire, formation de l’esprit critique, … s’inscrit dans une approche de
généralisation de l’éducation artistique et culturelle (B.O. n°19 du 8 mai 2008 / circulaire n°2008 059)
cohérente avec le socle commun de connaissances et de compétences.
Il est le fruit d’un partenariat entre la Ville de Metz, l’Education Nationale, la Ligue de l’Enseignement et la
Fédération des MJC de la Moselle, et participe d’une démarche culturelle globale en direction des écoles,
traduisant une volonté commune de respecter et d’appliquer le droit à la culture pour les enfants.
Extrait du courrier adressé aux directrices et directeurs des Ecoles de la Ville de METZ
Inspection Académique de la Moselle - Direction des services départementaux de l'éducation nationale
Ville de Metz
Ligue de l’enseignement de la Moselle
Fédération des MJC de Moselle
Le théâtre n’est pas le lieu du vrai, mais celui de l’illusion et de la convention. La découverte
de cet art par les enfants doit donc être préparée et accompagnée d’un travail ultérieur.
En classe, avant le spectacle.
Pour aider l’enfant à devenir spectateur, il est préférable de le sensibiliser à ce qu’est une représentation théâtrale
plutôt que de travailler sur un spectacle et son contenu. Il est donc plus pertinent de présenter les moyens que ce
dernier utilise au lieu de l’opposer systématiquement à la télévision.
Un lieu spécifique, avec ses règles…
Décrivez, ou visitez un lieu théâtral pour découvrir sa spécificité : ses espaces, ses métiers, son vocabulaires, …
Expliquez ou expérimentez les rituels liés au lieu et au déroulement d’une représentation : l’installation en silence,
le “noir” avant le début de la représentation, la non-interférence entre l’espace scénique et l’espace du public ; et
les interdits : pas d’intervention, d’échange avec les voisins ...
Avec les plus petits, dramatisez le trajet, le voyage, visualisez l’itinéraire, le déroulement de la journée. La
pratique du jeu dramatique, par l’expérimentation, facilite l’appropriation de ces conventions et « rituels » et permet
de comprendre que jouer nécessite un travail, une rigueur, que c’est un métier.
Ces situations de jeu permettront également aux enfants de découvrir la nécessité d’établir des codes :
« quand est-ce que ça commence » ? nécessité d’un code de lumière ou de son, passage au noir, …
« jusqu’où on peut aller en jouant » ? nécessité de délimiter des espaces par des lumières, un décor,
des accessoires, …
« on n’entend rien ! » nécessité d’observer le silence lorsqu’on spectateur, …
« on comprend pas pourquoi il fait ou dit ça » nécessité de trouver des « signes » compréhensibles à adresser
au public,…
Une appropriation collective du projet de sortie au théâtre
Associez autant que faire se peut les enfants à la préparation de la sortie :
lecture des plaquettes de saisons culturelles,
choix des spectacles : selon des critères de cible d’âge, de forme artistique, d’éloignement, de coût,…
réservation des places et du transport éventuel
Une pédagogie de la curiosité… et de la "prise de risque"
Aller au spectacle doit d’abord être une fête : alors, jouez sur l’attente, l’impatience, le plaisir à venir, en élaborant
un calendrier, un compte à rebours, de la sortie et de ce qui va la précéder.
Malgré toutes les informations que vous possèderez en amont et qui vous donneront l’illusion de savoir à quoi vous
attendre, aller au spectacle, c’est accepter d’être surpris, dérouté mais aussi de ne pas en retenir tous la même
chose…
C’est pourquoi on peut imaginer quelques situations de jeu permettant d’élaborer des fictions, toutes
légitimes…mais bien sûr toutes fausses. Ainsi, on préparera les enfants - et les enseignants - à accepter, après la
représentation, les interprétations différentes : après un spectacle, chacun ses émotions, chacun sa vérité.
Un exemple de situation de jeu : le jeu de l’affiche
Procurez-vous une affiche du spectacle que vous allez voir. Fabriquez un cache permettant de ne laisser
apparaître qu’une petite zone de l’affiche, un quart, par exemple. A chacun, selon ce que cet élément lui évoque,
de choisir un lieu, un personnage, un accessoire, ou une action. Plus tard, déplacez le cache : il ne vous reste plus
que trois possibilités : les quatre de départ moins celle que vous avez déjà choisie.
Deux déplacements de cache plus tard, chacun aura choisi ses quatre éléments, pour le dernier, on n’a pas le
choix ; et devra proposer une phrase commençant par « Ce serait l’histoire de…, figureront obligatoirement
les 4 éléments. Autant d’histoires naîtront, qui seront toutes aussi légitimes et peu crédibles.
Dévoilez complètement l’affiche, et imaginons une autre phrase commençant par « Ce serait l’histoire de… ». Il y
a fort à parier que de nouveau vous obteniez autant de propositions que d’enfants…
Et ne croyez pas qu’après le spectacle, la vérité va se dévoiler. Après, chacun a le droit de se reconstruire sa
propre histoire…
Autres situations pour jouer avant le spectacle
Inventer et jouer des « bandes-annonces » de ces spectacles imaginés, ou en écrire les 2 premières pliques et
tenter de les jouer.
Toujours penser dans ces situations de jeu dramatique à répondre aux questions :
« Où ça se passe ? »,
« Qu’est-ce qu’ils font ? »,
« Pourquoi ils le font ? »,
Mais en utilisant le langage du théâtre qui n’est pas forcément le langage parlé : les réponses peuvent naître d’un
élément de décor, d’un accessoire, d’un geste, d’un regard, d’un son, d’une lumière, etc.
Quelques pistes pour accompagner le jeune public : en route vers le spectacle …
Si vous accueillez le spectacle au sein de votre établissement :
Pour qu’il y ait du Théâtre, il faut créer un déplacement vers un ailleurs qui n’est pas le lieu du quotidien.
Idéalement, l’espace du spectacle est un lieu spécifique. Sinon, aménagez le local scolaire en lui faisant subir
une véritable transformation : occultation, définition des espaces scène, ...
Au théâtre, tout est signe. Alors si les enfants aperçoivent les cerceaux de la salle de jeux, l’extincteur, ou les
tableaux de conjugaison, ils parasiteront leur lecture du spectacle…
Prévoyez également un ou plusieurs sas entre le dehors et l’espace du spectacle, car tout ce qui se passe
avant la représentation influe sur son déroulement.
Juste avant le spectacle, à l’école ou à l’extérieur :
On ne va pas au théâtre comme au stade, alors si on a chanté dans le bus, on ne peut pas rentrer tout de suite
dans la salle de spectacle.
L’installation des enfants est sans doute le moment le plus délicat. Respectez leur rythme, entrez par petits
groupes successifs, soyez attentifs à leurs appréhensions. Une fois installés, vérifiez leur bonne visibilité.
Idéalement, laissez faire ce travail par le personnel d’accueil du théâtre.
Soyez également attentifs à vos dernières paroles : essayez d’éviter d’accumuler recommandations stressées et
interdictions en rafales.
Soyez des spectateurs comme les enfants. Si vous vous installez sur les côtés, votre chaise en biais pour mieux
les surveiller, vous induisez que ce spectacle ne va être intéressant qu’à moitié, puisque vous ne le regardez
que d’un œil.
Asseyez-vous au milieu d’eux pour les rassurer et pouvoir intervenir discrètement si nécessaire : il vaut mieux
tendre la main pour toucher une épaule que d’être contraint à donner de la voix pendant le spectacle.
Si des parents, grands-parents, ou assistantes maternelles accompagnent les enfants, convainquez-les de ne
pas sous-titrer le spectacle : qu’ils fassent confiance à l’intelligence sensible des enfants ; ni de les assaillir de
commentaires en direct, certes, ça part d’un bon sentiment, mais ça contribue à gâcher la représentation pour
les enfants et peut inciter les enfants eux-mêmes à commenter pour d’autres.
Après le spectacle.
"J’ai rien compris !"
Très souvent les adultes qui accompagnent les enfants aux représentations attachent une grande importance à
l’idée d’une compréhension exhaustive du spectacle. Ils pensent par exemple que des mots compliqués constituent
des obstacles infranchissables pour les enfants.
On n’a pas besoin de tout comprendre pour apprécier un spectacle : chaque spectateur transforme ce qu’il perçoit,
chacun appréhende un spectacle, une exposition, un concert en fonction de sa sensibilité, de son histoire…
Chacun est libre de ressentir ou pas des émotions face à une œuvre. Il n’y pas une bonne ou une mauvaise façon
de l’appréhender.
Un spectacle n’est pas un objet magique que seul des initiés pourraient décrire, comprendre. Fréquenter un
spectacle est à la fois une expérience intime et collective que chacun appréhende en fonction de ce qu’il est, au
moment où il le vit…
L’intime et le collectif
Voir un spectacle, c’est à la fois faire un voyage intime et vivre une expérience collective.
Il est capital de respecter le voyage intime de chaque enfant : si le spectacle l’a touché très profondément, il a le
droit de ne pas en parler…, s’il y a vu ce que personne d’autre n’a lu, c’est aussi son droit…, et s’il n’a pas aimé (ou
s’il a aimé) contrairement à la majorité de ses camarades, que tous sachent respecter cet avis…
On l’aura compris, si on peut « exploiter » un spectacle en classe, on évitera de le faire sur ce qui touche au plus
profond de chaque être…
Une approche de la lecture d’un spectacle
Afin de dépasser les traditionnels “j’aime / j’aime pas” et permettre aux enfants une meilleure compréhension du
langage théâtral, proposez une lecture du spectacle.
Dans un premier temps, recensez avec eux tous les signes de la représentation, de la façon la plus exhaustive et la
plus objective possible
1
: c’est une recherche d’indices à la manière d’une enquête policière. Il faut donc tenter
d’écarter tout jugement de valeur sur ces éléments.
Ce recensement objectif et rigoureux doit permettre à l’enfant de recomposer des images mentales qu’il gardera
plus longtemps. Pour aider les plus timides à s’exprimer, on peut proposer des jeux d’expression. Que chaque
phrase commence par : « J’ai vu… » ou « J’ai entendu… » ou « Il y avait… » ou « Ça m’a rappelé… », et limitez
chaque intervention à un seul élément.
Jetez tout ce matériau au tableau, dans un joli désordre : après seulement, on tentera de l’utiliser.
Un exemple d’utilisation du matériau collecté : l’expression poétique.
Avec les mots jetés au tableau, procédez par raccourcis, néologismes, mots composés, afin de « condenser » par
exemple le nom des objets et leur fonction, le statut des personnages et leur caractère, etc.
Si les enfants ont repéré « un tissu bleu pour faire la mer », « des sifflets pour faire comme les mouettes » et « un
homme très gros avec des coussins sous ses habits et qui tord la bouche», on pourra assez vite arriver à « un tissu
de mer », des « sifflets-mouettes » et un « grimaceux gonflé aux coussins » ! Faîtes-en trois phrases courtes, et
vous obtiendrez un texte plus fidèle au spectacle et plus juste que bien des critiques de théâtre ! Ces mots
poétiques ont été trouvés par des enfants au cours de nos expériences : ça marche pratiquement à tous les coups !
Autres exemples d’utilisation du matériau collecté.
Opérez des classements de tous ces éléments : par « catégories » (les objets, les sons, les personnages, les
lumières, les décors, etc. …) ou par « cohérence » (regroupez tous les sons, objets, décors, personnages,
lumières,…. qui concourent à construire un univers cohérent, et reconstituez les différents univers ou moments du
spectacle)
Vous êtes déjà en train d’analyser le spectacle, d’en dégager le « parti-pris de mise-en-scène »
2
.
On pourra également tenter de tirer avec eux « l’essence » du spectacle ou plutôt ce qui pour eux a été essentiel,
en tentant de caractériser le spectacle par un son, une couleur, une émotion, une réplique, etc.
Alors seulement, l’enfant pourra procéder à une critique d’humeur dans laquelle il donnera son sentiment sur le
spectacle : elle sera étayée et riche. Ces pistes permettent d’échapper à une « scolarisation » du rapport au
spectacle, et de d’exprimer les valeurs symboliques de cette œuvre. D’autres moyens peuvent enrichir cette
« éducation » du jeune spectateur: la pratique du jeu dramatique, les rencontres avec les équipes artistiques, les
répétitions publiques, la visite de lieux de spectacles, etc. ...
Bons spectacles!
1
Les signes de la représentation :
les décors (réalistes ou non...) les accessoires (fonction habituelle ou fonction détournée...)
les costumes (époques, tissus, ...) les éclairages (nombre, couleur, fonction dans le spectacle...)
le son (musique, bruitage, bruits de jeu, les comédiens (nombre, âge, sexe, taille, ...)
le jeu (gestuelle, humeur, regards, qualité de la voix, ...) le texte (ou l’absence de texte, les silences, ...)
le rapport scène/salle (frontal, “cirque”, vis-à-vis,...) les références (“ça me rappelle...”, “c’est comme dans...”)
les techniques d’expression choisies (jeu d’acteurs, marionnettes, clown, chœur, conte, ...)
2
Les partis-pris de mise en scène
Quels choix le metteur en scène a-t-il faits? Qu’a-t-il voulu montrer, souligner? Par quels moyens?
Théâtre de convention ou théâtre d’illusion? Tous ces signes sont-ils cohérents ?
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