Mémoire final

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Conservatoire National des Arts et Métiers
(MCVA - Management des Compétences
et Validation des Acquis)
Mémoire présenté en vue d’obtenir le
DIPLOME DE CADRE CHARGE DE LA FONCTION FORMATION
par Pascal Bonnin
L’EVOLUTION DES COMPETENCES
DANS LES PROJETS
DE DEVELOPPEMENT LOCAL
Jury
Président :
Serge de Witte
(directeur du cycle de formation « consultants en management des entreprises par les
compétences » )
Membres :
Yolande Costantini
(consultante en ingénierie de formation)
Anne Froment
(directrice de l’ADEFPAT)
Vincent Merle
(professeur titulaire de la chaire emploi, acquisitions professionnelles)
Christine Vern
(directrice régionale de la formation « consultant en management des
entreprises par les compétences » à Toulouse)
25 mai 2004
FFPS Sud - Mémoire final - Pascal Bonnin - 16/04/17 ______________________________________________________________________________________
1
SOMMAIRE
INTRODUCTION : LES ENJEUX DE L’ORGANISATION PAR PROJET
1
PREMIERE PARTIE : LA DEMARCHE D’INVESTIGATION
4
1. MON HYPOTHESE DE TRAVAIL
4
2. LA METHODE D’INVESTIGATION
4
DEUXIEME PARTIE : LE CADRE DE REFERENCE
8
1
9
LA COMPETENCE
1.1
La notion de compétence
1.2
Le développement des compétences
10
1.3
La place de la compétence dans l’action
11
1.4
Les modalités d’acquisition de la compétence
11
2
9
LE PROJET
2.1
La notion de projet
12
2.2
La gestion de projet
14
2.2.1
Les grandes phases du projet
14
2.2.2
Le management du projet
16
2.2.3
L’organisation du projet
17
2.2.4
Les relations sociales dans le groupe projet
19
3
PARTICULARITES DES PROJETS MULTI – PARTENAIRES DANS LE
DEVELOPPEMENT LOCAL
21
3.1
La notion de temps
21
3.2
L’organisation du groupe projet multi-partenaire
21
3.3
Le management
22
3.4
La prescription des objectifs et le contrôle
23
3.5
L’émergence de leaders
23
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2
TROISIEME PARTIE : L’EVOLUTION DES COMPETENCES DANS 4 PROJETS
24
1
24
LES CONTEXTES, ENJEUX ET LA DESCRIPTION BREVE DES PROJETS
1.1
Le projet de mise en réseau d’une offre promotionnelle en hôtellerie de plein air
24
1.2
Le projet d’exposition vente de minéraux et fossiles
25
1.3
Le projet de mise en valeur de trois plantes du patrimoine local
26
1.4
Le projet de développement d’un sport plein air dans un village de caractère
27
2
LE DIAGNOSTIC COMPARE DES PROJETS
28
2.1
La stratégie du projet
28
2.2
Les activités mises en œuvre dans les projets et leurs évolutions
30
2.3
L’organisation du projet
33
2.4
La dynamique sociale du groupe projet
35
2.5
Les facteurs - clefs de la structuration des compétences observés dans les projets
37
3
LES MODALITES D’EVOLUTION DES COMPETENCES
38
3.1
La démarche progressive du projet
38
3.2
La dynamique sociale du groupe projet
44
3.3
La communication
47
QUATRIEME PARTIE : DEVELOPPER DES COMPETENCES GRÂCE AU PROJET
52
(influence du projet et de sa conduite sur le développement des compétences)
1
L’ALTERNANCE IDEE / CONCRETISATION
53
2
LA CONFRONTATION DES REPRESENTATIONS
54
3
LA FORMALISATION
55
4
LA DYNAMIQUE DU DEVELOPPEMENT DES COMPETENCES DANS LE PROJET
56
5
RETOURS SUR HYPOTHESES
57
58
CINQUIEME PARTIE : ENSEIGNEMENTS EN MATIERE DE CONDUITE DE PROJETS
58
3. LES LIMITES ET PRECAUTIONS
4. PRECONISATIONS : ACCOMPAGNER LE DEVELOPPEMENT DES COMPETENCES
DANS LES PROJETS
61
CONCLUSION
63
BIBLIOGRAPHIE
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3
INTRODUCTION
LE CONTEXTE : LES ENJEUX DE L’ORGANISATION PAR
PROJET
LES GRANDS CHANGEMENTS DE L'ECONOMIE
Le monde a subi plus de changements au XXe siècle que dans toute l'Histoire qui le précède. Dans
le champ de l'économie, on a pu constater des évolutions considérables notamment depuis le milieu
du siècle. Notre économie postindustrielle a vu le développement de l'incertitude économique, qui
conduit les entreprises à être réactives. L'apparition et la progression rapide de technologies
génériques ont recomposé le paysage industriel, avec un décloisonnement des frontières
traditionnelles entre métiers. La globalisation de l'économie génère une forte concurrence, qui se
joue aujourd'hui à l'échelle planétaire. Enfin, l'émergence d'une société basée sur la connaissance
rend les agents (salariés, consommateurs, citoyens, actionnaires) à la fois plus informés et plus
exigeants.
Face à ces mutations profondes, il a bien fallu que nombre d'entreprises s'organisent autrement :
s’est opérée une redistribution des activités nécessaires à la production de biens et services, tant au
sein de l'entreprise31, qu'au niveau de « filières » de production. Les organisations ont aussi été
amenées à être plus réactives, plus flexibles, plus attentives à la demande des consommateurs ou
usagers, et à se préoccuper de la qualité. Dans ce contexte, de nouvelles formes d’organisation
apparaissent. Les améliorations, les changements, de nouvelles structures sont mis en place, par
exemple avec…
…DES PROJETS POUR ETRE REACTIF OU PRO-ACTIF
La notion de gestion par projet a en effet permis de mobiliser des compétences très diverses, qui
sont la plupart du temps détenues par plusieurs personnes, dans le but de créer quelque chose de
nouveau : un bâtiment, un nouveau concept de produit, un contrat commercial complexe, un
nouveau modèle d'avion...
Quand les personnes mobilisées ne sont pas présentes dans la même entité (entreprise,
administration, association...), on a affaire à des fonctionnements de projets multi-partenaires,
nécessaires dans les organisations en réseau ou dans la création ponctuelle de nouveaux biens,
services ou équipements.
C'est le cas par exemple dans les industries mobilisant de la sous-traitance (aéronautique,
automobile, chemins de fer britanniques...), dans l'organisation de filières agro-alimentaires
(production agricole, transformation, distribution, commercialisation).
31
Dans des organisations matricielles, des organisations de type apprenantes, des fonctionnements par projets, certaines
démarches qualité
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1
LE DEVELOPPEMENT LOCAL : une logique de projets multipartenaires
Cette logique de co-opération s’est développée à la suite de la crise des années 70. « En un temps
très court, des contrées qui avaient connu l’opulence sont condamnées. La crise […] s’amplifie dans
les zones fragiles […]. Ses effets affectent l’ensemble des structures économiques, sociales et
culturelles de territoires importants32 ».
Dans ce contexte, pour répondre à des demandes de proximité, les collectivités ou associations
sont amenées à se pencher sur des problèmes de plus en plus complexes, nécessitant la
contribution de plusieurs acteurs33. Par exemple, le renouveau démographique d'un territoire rural,
avec de nouveaux foyers dont les deux conjoints sont actifs, nécessitera des services à la petite
enfance. Il sera important, pour créer une crèche associative, d'associer :
 des futurs usagers ;
 la caisse d'allocations familiales (financeur de ce type d'opération) ;
 la commune (maître d'ouvrage de l'équipement, et parce qu'il s'agit d'une prérogative
publique) ;
 un architecte qui concevra et pilotera la construction de l'équipement (maître d’œuvre) ;
 la Protection maternelle et infantile (Conseil général) qui donnera l’agrément administratif.
Parallèlement, depuis les années 80, on assiste à une décentralisation lente mais certaine, de
l'action publique. Ce véritable mouvement de fond se manifeste de multiples façons, notamment par
la réforme du fonctionnement de l'Etat34, et des politiques publiques qui mettent de plus en plus
l'accent (dans les textes en tout cas) sur l’émergence d’initiatives par des acteurs les plus proches
du terrain, voire par les bénéficiaires eux-mêmes35.
Fort de ce mouvement, le développement local se définit de plus en plus comme l'émergence
d'initiatives locales qui peuvent être économiques, sociales ou culturelles, et qui concourent au
développement d’un territoire local : le quartier, une petite ville, un territoire rural. La dimension de
proximité s'accompagne d'une dimension participative. C'est en impliquant les prestataires, usagers
et autres acteurs d'un projet local qu'on donne les meilleures chances au projet de s'implanter
durablement. Les référents de la gestion de projet dans le domaine industriel et la demande sociale
de proximité ont engagé les pouvoirs publics à imposer le modèle du projet et la concertation
comme corollaires de nombreux financements publics au développement36.
On a affaire ici à des logiques transversales, qui vont au-delà du métier ou de la branche. Faire
travailler ensemble des acteurs proches dans l'espace et interdépendants les uns des autres ne
32
Patrick Senault, « Formation-développement, origines, principes et méthodes », revue Pour, Paris, GREP, 2003.
p 141.
33
C’est ce que Katalin Kolosy définit, dans l’introduction d’un mémoire collectif thématique de DESS, comme l’approche en
réseau, caractérisées par « le renforcement mutuel des stratégies d’acteurs sous la forme de partenariats locaux »
(Esposito Giovanna - Eymat Dephine - Kolosy Katalin, « le concept de développement local: réflexion pour une définition
théorique du concept », mémoire thématique collectif DESS COCITS – Université Paris VIII, juillet 1997).
34 Délégation de prérogatives aux régions en 1983, puis partage des responsabilités et des ressources entre communes
(ou leurs groupements), départements, régions, et Etat central. A propos des prérogatives des collectivités publiques, le
terme consacré en droit public est « compétence ». On ne l'emploiera pas ici pour éviter la confusion car il ne s'agit pas de
la même définition de la compétence.
35
Les collectivités publiques, dans leurs procédures de développement (rural, urbain, aménagement régional), comportent
de plus en plus d’injonctions de ce type.
36
Les fonds structurels européens, les initiatives communautaires, le fonctionnement des territoires de projets (loi sur les
Pays, politiques de la ville, contractualisation des Parcs Naturels Régionaux...), comportent de plus en plus d’injonctions
en terme de projet, de transversalité, et de concertation (d’après des travaux du laboratoire « dynamiques rurales » Université de Toulouse, ENSA, INRA).
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s'improvise pas. Les praticiens37 dans ce domaine font travailler ensemble autour de projets, des
acteurs ayant des compétences et/ou des enjeux différents et complémentaires.
En effet, ces projets liés au développement local nécessitent la collaboration de plusieurs personnes
issues d’organisations différentes. Dans ces cas-là, le projet en tant qu’organisation à part entière
est une entité sans frontière apparente, non circonscrite dans une organisation plus pérenne. Il
s’ensuit que ni le choix des participants, ni les objectifs ne sont imposés par une hiérarchie. Comme
il n’y a pas de prescription des objectifs, ceux-ci doivent faire l’objet d’une co-construction pour que
la production des participants aille dans le même sens.
Partant d’une idée et d’une analyse stratégique, le projet passe par différentes phases. Les activités
mises en œuvre évoluent. La notion de compétences mobilisées dans le projet revêt alors une
importance particulière. Il m’a paru intéressant de relier les acquis du cycle FFPS à ma pratique
professionnelle à l’ADEFPAT38, en observant l’évolution des compétences dans les projets de
développement local.
-------
37
Agents consulaires (Chambres de métiers, de commerce et d'industrie, d'agricultures), « développeurs » des
collectivités (animateurs des politiques de la ville ou de développement rural, techniciens des agences de développement
économique, des comités d'expansion, des comités de bassin d'emploi, des missions locales...), et bien entendu les
consultants qui agissent en appui.
38 L’ADEFPAT (Association pour le développement par la formation des pays aveyronnais et tarnais) est une association
para-publique qui élabore et finance des formations en accompagnements de projets de développement local.
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3
PREMIERE PARTIE
LA DEMARCHE D’INVESTIGATION
Dans le développement local, le projet est une forme d’action couramment pratiquée, regroupant
des personnes issues de d’organismes différents. Dans la suite du mémoire, on qualifiera donc ces
projets de « multi-partenaires ». Le projet comme forme d’organisation permet de mobiliser des
compétences détenues séparément par plusieurs personnes, au travers de plusieurs phases. Les
activités qui y sont mises en œuvre devront s’adapter au cheminement du projet.
Ce mémoire a pour objet l’évolution des compétences dans les projets « multipartenaires », observés dans le contexte du développement local.
-------
1. MON HYPOTHESE DE TRAVAIL
En abordant ce mémoire, je pars avec l’idée largement préconçue que :
 au fur et à mesure de l’avancement du projet « multi-partenaires », ses protagonistes
découvrent de plus en plus de contraintes liées à l’environnement social du projet et à
l’organisation. Ils seraient alors amenés à intégrer un nombre plus important de paramètres
dans la stratégie et dans l’action. Ils développeraient nécessairement des compétences tout au
long du projet pour faire face à la complexité de sa mise en œuvre.
 plusieurs modalités de développement des compétences interviennent.
-
L’aller et retour entre une idée (une représentation de l’objet à construire) et le concret (la
construction de cet objet) permettrait de former la compétence dans l’action.
-
L’implication de plusieurs acteurs dans un projet (à l’intérieur ou à l’extérieur du groupe
projet) amènerait les participants à ces groupes projet à confronter leurs représentations.
Je formule l’ hypothèse que les participants à des groupes projet développent des
compétences pour et grâce au projet.
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2. LA METHODE D’INVESTIGATION
Pour vérifier mon hypothèse, j’ai diagnostiqué le fonctionnement de plusieurs groupes projets. Je
me suis attaché à décrire :
 leur organisation ;
 leur management et l’ingénierie du projet ;
 les caractéristiques des participants ;
 les compétences qu’ils mettent en œuvre.
2.1. La sélection des projets
Pour disposer de suffisamment d’informations et pour ne pas limiter l’analyse à ce qui pourrait
sembler un cas particulier, les informations à recueillir concernent 3 à 4 groupes projets.
Les critères retenus initialement pour le choix de ces groupes projet ont été les suivants :
- des groupes projets composés de personnes issues d’organisations différentes, car ce mémoire
traite de groupes projets multi-partenaires;
- des groupes projets diversifiés, traitant de secteurs d’activité différents (TPE/PME de production,
économie sociale, activité culturelle ou touristique...) ;
- des projets qui comportent une finalité économique.
Il ne m’a pas été possible de retenir un projet concernant un groupe de très petites, petites ou
moyennes entreprises de production. On pourrait craindre que le panel de projets retenus ne soit
pas suffisamment représentatif de la finalité économique.
Les projets ayant fait l’objet d’observations :
- un projet de mise en réseau de gérants de camping pour commercialiser des séjours hors
saison ;
- un projet de mise en valeur économique et touristique de trois plantes du patrimoine local ;
- un projet de création d’une d’exposition - vente de minéraux ;
- un projet de dynamisation d’une commune s ‘appuyant sur des activités liées à l’endurance
équestre.
Pour les trois premiers projets, on trouve un fort enjeu économique induisant une logique
« productive » et des exigences de résultat.
-
Pour les gérants de campings, l’enjeu est la désaisonnalisation, qui lisse la saison et permet
de capter un chiffre d’affaire supplémentaire sans investissement. Cette désaisonnalisation est
nécessaire car la saison se concentre de plus en plus sur des périodes courtes en été, ce qui
se traduit par des baisses de chiffre d’affaires pour certains, ou des stagnations pour d’autres.
-
Pour la mise en valeur de trois plantes du patrimoine local, la plupart des personnes
concernées dans le groupe projet ont un enjeu économique non négligeable : enjeu de
création d’une activité d’artisanat d’art, enjeu de pérennisation de l’office du tourisme avec des
activités reconnues par la collectivité, enjeu de diversification des activités pour une
pépiniériste, enjeu de diversification des produits et de la clientèle pour une exploitation
agricole réalisant de la vente directe.
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5
-
Pour le projet d’exposition vente de minéraux, le porteur de projet souhaitant créer son activité
professionnelle à son compte a un fort enjeu économique personnel en même temps qu’un
enjeu social de sortie du chômage et de reconnaissance de ses compétences.
Pour le quatrième projet, la finalité économique est plus indirecte. Le maire de la commune, entouré
de quelques responsables associatifs (initiateurs et animateurs de la démarche) se positionnent
plus comme des assembleurs n’ayant pas d’enjeux économiques personnels.
2.2. Diagnostic des projets retenus
Chaque projet a fait l’objet d’un diagnostics de fonctionnement, y compris la réalisation d’un
référentiel de compétences des participants à différentes phases.
Je n’ai pas, comme prévu initialement, réalisé des référentiels de compétences de 2 à 3 personnes
par groupe projet, puisqu’un des quatre projets est diagnostiqué sans référentiel de compétences.
Sur ce projet, le travail de recueil d’information a été commencé et n’a pu être terminé. Des
difficultés survenues sur le projet m’ont conduit à privilégier la résolution de problèmes. Par contre,
ce projet m’a parfois permis de confirmer par le contre-exemple certaines interprétations tirées des
autres projets. Les difficultés rencontrées ici n’induisent donc pas de limites, elles m’ont au contraire
permis d’enrichir la méthode.
Les informations recueillies permettent donc de décrire le fonctionnement de chaque groupe projet,
et de caractériser les grands traits de ce fonctionnement au regard d’un cadre de référence.
2.3. Les moments d’observation des projets et d’analyse des
compétences
La durée de maturation des projets observés est longue. Pour l’un d’entre eux, elle a été de plus de
2 ans. Il m’a donc fallu prendre le parti de réaliser les observations à trois moments différents,
moments parfois éloignés du début de l’élaboration du projet ou de sa fin, mais comprenant
l’ensemble des phases du projet.
temps
Première phase
Deuxième phase
Troisième phase
Premier recueil
d’informations
Second recueil
d’informations
Troisième recueil
d’informations
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2.4. Analyse
L’analyse des diagnostics réalisés a permis :
-
de repérer les liens entre compétences mises en œuvre à trois moments du projet et
caractéristiques du fonctionnement de ces groupes projet ;
de caractériser les compétences acquises ainsi que leur mode d’acquisition ;
d’en ressortir des recommandations en matière d’accompagnement des projets multipartenaires.
------Pour vérifier l’hypothèse que les projets nécessitent et génèrent des compétences nouvelles, j’ai
prévu de conduire un certain nombre d’observations de terrain, et d’analyser l’évolution des
compétences dans les projets observés. Il est nécessaire préalablement à mes investigations,
d’expliciter les notions que j’utilise : qu’est-ce que la compétence, comment se développe-t-elle,
qu’est-ce qu’un projet, comment se gèrent les projets, quelles sont les particularités des projets de
développement local ? C’est ce que je vais m’efforcer de préciser dans le chapitre suivant.
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DEUXIEME PARTIE
LE CADRE DE REFERENCE
Le projet permettant d’apporter une réponse à un problème, dans des situations complexes et
uniques, il va nécessiter la mise en œuvre avec succès, par plusieurs acteurs, d’une série
d’activités. Les solutions mises en œuvre dans le cadre de projets, et l’organisation nécessaire pour
les concrétiser, n’étant pas reproductibles dans le cadre de procédures pré-formatées, les notions
de compétence et de développement des compétences y revêtent une importance particulière.
S’agissant de l’intervention de plusieurs acteurs pour mener à terme un projet, il est aussi
nécessaire de s’intéresser à cette forme d’organisation qu’est le projet.
Les apports apports en formation, mes lectures complémentaires, et mon expérience de la conduite
de projets de développement local m’amènent à poser les bases sur lesquelles s’appuie mon cadre
de référence :
 La capacité d’un individu à réaliser quelque chose est indépendante du contexte dans lequel il
se trouve39, alors que la compétence se rapporte à une activité donnée, dans un contexte de
travail précis.
 La compétence est une notion abstraite se rapportant à l’individu. S’agissant de groupes de
travail, on ne peut donc parler de compétences collectives. Par contre, s’intéresser à la
compétence dans l’action collective nécessite de comprendre :
 l’articulation entre les compétences individuelles ;
 la construction collective des représentations ;
 l’organisation du groupe.
On ne parlera donc pas ici de compétences collectives40, mais bien des compétences
individuelles des acteurs d’un groupe projet, ainsi que des facteurs sociaux et managériaux
influençant leur mise en œuvre et leur développement.
Je me réfère ici à la notion de capacité comme un ensemble des ressources propres d’un individu : motivations,
connaissances, expérience, méthodes, savoir-faire…
40 Sophie Gache constate dans son mémoire de diplôme du CNAM de cadre de la fonction formation : « Pour une
ingénierie des compétences collectives », que la compétence reste une construction individuelle ; que la construction
collective des représentations communes est nécessaire pour un co-investissement des compétences individuelles, et que
la valeur ajoutée d’une action collective dépend du management et de l’organisation du groupe.
39
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8
 Un projet conduit par des individus différents ne peut être observé comme une organisation
sociale mécanique et fonctionnelle. Les rapports sociaux entre les individus dépendent autant
d’intérêts motivés rationnellement que de sentiments subjectifs d’appartenance à un même
ensemble et d’aspects affectifs. Les acteurs du groupe projet y entrent avec leur histoire
personnelle, leur parcours préalable, leurs motivations propres, entraînant des jeux stratégiques,
une répartition des activités et des rôles dans le groupe.
-------
1. LA COMPETENCE
La question posée par ce mémoire est celle de l’acquisition des compétences dans les groupes
projet. La notion de compétence étant centrale dans le sujet traité, il est important de la définir. Audelà de la définition, et afin de comprendre comment elle s’acquiert ou se développe, il est
nécessaire de se référer aux savoirs, éléments composant cette compétence, et à leur mise en
dynamique.
1.1. La notion de compétence
De nombreuses définitions de la compétence existent. Certaines d’entre elles, issues de la
psychologie, distinguent savoirs théoriques, savoir-faire, et savoir être (d’autres parleront de savoir
faire comportementaux). Pourtant, des personnes ayant des traits de personnalités très divers
peuvent se révéler tout aussi compétentes pour réaliser la même activité. Le savoir être n’est-il pas
pour partie de l’acceptation de traits de culture de la situation de travail, pour partie du savoir-faire
ou des connaissances (savoir théorique) des codes sociaux en vigueur, pour partie de la
motivation41 ? Je reprendrais ici la définition du cycle FFPS, issue des travaux de Gérard
Malglaive42.
La compétence est une combinaison, dans l’activité, de savoirs formalisés (théoriques et
procéduraux), et de savoirs en actes (savoir-faire et savoir pratique).
La compétence est individuelle : chaque individu mobilise de manière différente les savoirs dont il
dispose. Elle est contextuelle, (valable dans une situation donnée), et contingente (elle peut varier
dans un même contexte selon les circonstances de sa mise en œuvre).
41 Voir
à ce propos l’ouvrage d’Annick Penso Latouche : « Savoir être, compétence ou illusion », Editions Liaisons, Paris,
2000.
42
Les différentes formes de savoir et la définition proposée dans ce chapitre font référence à la théorie développée par
Gérard Malglaive, dans « Enseigner à des adultes », PUF, 1993.
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9
Retenons de cette définition, que la compétence des participants à un groupe projet est celle
qui s’exprime dans le projet... , et pas dans un autre projet ou dans une autre situation
sociale ou professionnelle, puisqu’un autre projet ou une autre situation implique un
changement de contexte.
De plus, s’agissant de la conduite d’un projet, la compétence va s’exprimer dans des
activités spécifiques à la conduite du projet.
1.2. Le développement des compétences
Savoirs formalisés, savoirs agis
Nous apprenons à partir de ce que nous connaissons, de ce qui est transmissible (parce que
formalisé). Ces savoirs formalisés sont nécessaires pour agir.
La dynamique des savoirs : savoir pour agir…
En formalisant des acquis (savoirs théoriques : ce qu’est l’objet sur lequel on agit et ses propriétés),
on peut les transmettre, les remettre en actes plus facilement, et mieux les mobiliser.
Mais les connaissances ne suffisent pas à elles seules : pour les investir dans l'action, il faut des
méthodes (procédures, règles, ce qu’il faut faire pour transformer un objet, le mode opératoire pour
agir dessus, « si j’observe ça – je fais telle chose »...). Ce sont les savoirs procéduraux. En
appliquant des méthodes sans en comprendre les fondements (savoirs théoriques), on ne peut pas
régler tous les problèmes : les procédures sont toujours adaptées à des cas particuliers.
Pour agir en situation de travail, rien ne sert d’avoir des connaissances ou de savoir des méthodes
si on ne sait pas mettre en acte (savoir-faire).
Mais nous apprenons aussi par l’action. En formalisant et en thématisant ce que nous apprenons
par l’action, nous enrichissons nos capacités.
La dynamique des savoirs : …et agir pour savoir
A partir de notre expérience, de nos pratiques, nous pouvons déduire des « lois », des théories,
nous pouvons décrire ce sur quoi nous agissons, nous pouvons formaliser des connaissances.
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Les savoirs pratiques sont les savoirs que l’on ne sait pas formaliser ou expliquer (le tour de main,
l’expérience, le « flair »…). Quand on arrive à l’expliquer, on ne parle plus alors de savoir pratique
mais d’une combinaison des trois autres savoir : les savoirs théoriques, renseignant sur l’objet traité,
permettent d’agir dessus (savoir faire) avec l’aide de règles, méthodes, sorte de modes d’emploi de
l’action (les savoirs procéduraux).
1.3. La place de la compétence dans la réussite de l’action
La compétence n’est pas seule en jeu dans la réussite d’une action entreprise. La formule pseudomathématique P=(CMOR)E=k© développée par le laboratoire d’études FFPS décrit la performance P
comme dépendant non seulement de la compétence (C), mais aussi de la motivation (M), des
objectifs donnés (O), et des ressources allouées (R), le tout dans un environnement donné.
La compétence (Savoir Agir) s’insère dans un triptyque Savoir agir / Vouloir agir / Pouvoir agir.
L’observation de l’action des personnes travaillant sur un projet n’apporte donc de renseignement
que sur le résultat visible, mais ne dit rien du processus cognitif qui les a conduits à réaliser cette
action. Il est important de se pencher sur les savoirs qu’ils ont mobilisés et combinés dans cette
action.
1.4. Les modalités d’acquisition de la compétence
Comme on l’a vu ci-dessus, les différentes formes de savoir ont une origine différente. Les savoirfaire et savoirs pratiques sont des savoirs en acte, ils s’acquièrent dans l’action. Les savoirs
pratiques sont caractéristiques de l’action contextualisée et ne sont donc pas transmissibles. Par
ailleurs, il est souvent difficile de les décrire. Pour cette raison, ils ne peuvent s’acquérir qu’en
agissant, avec une expérience personnelle longue.
Au contraire, les savoir-faire peuvent aisément se montrer, notamment en faisant référence à des
savoirs théoriques et à des savoirs procéduraux. Il est alors possible de les transmettre par la
démonstration. Ils peuvent s’apprendre en agissant, par des répétitions de gestes, de
raisonnements, d’actions élémentaires.
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Les savoirs théoriques se développement par l’acquisition de connaissances, que ce soit par de la
formation « académique » ou par de l’auto-formation (lectures, discussions, information…). Comme
les savoirs procéduraux consacrent le passage de la théorie au « faire », ils nécessitent de
s’exercer à faire en appliquant la procédure requise.
Enfin, comme la compétence est une combinaison de savoirs et qu’elle s’exprime dans l’activité, il
est important de noter que l’ensemble de la compétence s’acquiert dans l’activité. Rien ne sert
isolément de savoir ou de savoir-faire, si l’on ne sait réaliser l’ensemble de l’activité dans le contexte
de travail réel. D’où la grande importance de la réalisation en contexte réel de l’activité, à plusieurs
reprises.
Dans la compétence, il est certes question des savoirs mobilisés, mais aussi de leur mise en
dynamique. Savoirs théoriques, savoirs procéduraux, savoir-faire, et savoirs pratiques se
combinent dans l’action. L’acquisition de ces savoirs seuls ne peut donc suffire pour
développer des compétences. Il est nécessaire de savoir aussi les combiner en les
investissant dans l’action.
Concernant l’action sur un projet, la compétence étant contextuelle, l’acquisition de
compétences se fait en situation dans le projet, en mettant en œuvre des activités liées au
projet, mobilisant des savoirs formalisés des savoirs agis. Enfin, la compétence n’est pas
seule en cause dans la réussite du projet. La disponibilité de ressources, le management, la
motivation facilitent la finalisation de l’action.
2. LE PROJET
De nos jours, la notion de projet est très courante. Elle est utilisée dans de multiples contextes : au
niveau personnel (projet professionnel, projet de vie), dans les organisations (projet éducatif, projet
de service, projet associatif, projet d’entreprise), en politique (projet de société), en architecture
(projet, avant-projet de construction), en développement local (projet de territoire, projet structurant,
d’aménagement). On parlera dans ce mémoire du projet comme mode d’organisation de l’action.
Encore faut-il au préalable préciser sa définition, car le mot projet peut prêter à confusion.
2.1. La notion de projet
Le terme de projet fait l’objet de définitions très diverses. En voici six extraites du Petit Robert
(édition de 1987) :
« image d’une situation, d’un état que l’on pense atteindre. »
« ce que l’on se propose de faire à un moment donné »
« exécution, réalisation »
« travail, rédaction préparatoire, premier état »
« canevas, ébauche, esquisse »
« description, dessin, modèle antérieur à la réalisation »
On peut aussi noter dans le Larousse (édition de 1995) :
« ce que l’on a l’intention de faire »
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L’AFITEP (association francophone de management de projet) définit ainsi le projet :
« Le projet est un ensemble d'actions à réaliser pour satisfaire un objectif défini, dans le cadre
d'une mission précise, et pour la réalisation desquelles on a identifié non seulement un début, mais
aussi une fin. »43
De son côté, l’AFNOR définit le projet comme « une démarche spécifique qui permet de structurer
méthodiquement et progressivement une réalité à venir. Un projet est défini et mis en œuvre pour
élaborer la réponse au besoin d’un utilisateur, d’un client, ou d’une clientèle et il implique un objectif
et des actions à entreprendre avec des ressources données. »44
Pour Jean-Pierre Boutinet45, « Le but projeté est destiné à osciller continuellement entre une visée
à poursuivre et un programme à réaliser. […] La présence de la visée au sein du programme permet
au projet de maintenir son exigence de globalité, et donc de ne pas se laisser réduire à une série
d’objectifs. ». Le projet « intègre au sein de la même figure la conception et l’exécution ». De plus,
« La démarche par projet s’avère l’outil approprié pour gérer la complexité et l’incertitude. Une
situation trop simplifiée ne nécessite pas, sinon abusivement le recours au projet ».
Comme on peut le voir à la lecture de ces définitions très variées, le terme de projet est
polysémique. Notons qu’il exprime autant :

une attente de changement (de l’ordre de l’affectif, du désir) ;

une projection dans l’avenir, un objet imaginé (de l’ordre du concept, de la construction
intellectuelle, de l’abstraction) ;

une réalisation en cours ou terminée (de l’ordre du concret, de la construction réelle) ;

un chemin pour y parvenir (de l’ordre de la trajectoire, du plan, de la méthode).
A partir de ce panorama et de mon expérience, je retiens la définition suivante :
Un projet est la recherche, la définition et la concrétisation par un ensemble d’acteurs, d’une
réponse à un problème posé dans une situation complexe et unique. Il s’appuie au préalable sur
une situation initiale, un problème posé, des enjeux repérés.
Le projet est, au départ, une idée. Il ne peut se définir complètement a priori, il se conçoit et se précise
en cheminant vers sa concrétisation, au gré des aléas, contraintes et opportunités qui ne peuvent tous
être connus dès le départ.
Le projet vise un état futur qui est sensé avoir amélioré l’état initial. La situation attendue donne ce
qu’il est visé d’obtenir comme « produit de sortie » au regard de la situation initiale. L’atteinte de cet
objectif nécessite une série d’étapes et de moyens qui se prévoient au début et s’ajustent en
cours de réalisation. Des finalités, valeurs conductrices du projet, guident l’ensemble de cette
démarche.
Le projet est mis en œuvre par un ou plusieurs acteurs. Si la complexité de la situation nécessite la
contribution de plusieurs acteurs, il est nécessaire, pour garantir la concrétisation du projet, qu’un acteur
se positionne comme le « porteur du projet ».
En dehors d’un portage clairement identifié, le projet risque de rester une idée insuffisamment prise en
compte pour être traitée.
AFITEP - Dictionnaire de management de projet, 4ème édition, AFNOR, Paris – 2000.
AFNOR – Management de projets, 1998.
45 D’après Jean-Pierre Boutinet – « Anthropologie du projet », PUF, Paris, 1993 (3ème édition), p 226.
43
44
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2.2. La gestion de projet
2.2.1. Les grandes phases du projet
Une vision linéaire
La notion de temps est très importante dans la conduite d’un projet. En effet, la situation attendue,
dans les cas qui nous intéressent, est repérée dans le temps. Dans un projet de développement
local, il n’est pas rare de voir des projets s’inscrivant dans des durées longues, de l’ordre d’une à
trois années. Dans une entreprise, les temps impartis pour atteindre un objectif sont plus courts car
« le temps c’est de l’argent ».
Pour passer d’une situation initiale à une situation souhaitée, le projet va passer par trois grandes
phases, qui peuvent se diviser elles-mêmes en différentes étapes.
 L’élaboration du projet. Il s’agit de définir précisément ce que l’on attend, puis de décrire le
concept et l’objectif que l’on se donne pour résoudre le problème posé. Le futur est entrevu à
travers un objet qui n’existe pas concrètement mais que l’on désire.
 L’organisation du projet. Après avoir conçu le résultat et la « forme » du résultat attendu, il est
nécessaire de prévoir les moyens dont on va se doter pour mettre en œuvre le projet. Le futur
est alors entrevu à travers les moyens perçus pour y parvenir.
 La finalisation du projet. Il s’agit alors de mener les actions prévues et qui conduisent à livrer
le résultat final. Cette finalisation, quand elle s’accompagne d’une évaluation, peut être suivie
d’une actualisation, d’ajustements destinés à l’adapter à une situation qui a changé avec le
temps d’élaboration du projet.
Chacune de ces phases peut être découpée en grandes étapes, décrites dans le tableau suivant :
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UNE VISION ITERATIVE
La vision linéaire décrite ci-dessus n’est pas complètement satisfaisante pour plusieurs raison.
Tout d’abord, dans la phase d’élaboration, les acteurs mobilisés sur le projet font appel à des
idées de solution concrètes entrevues dans des phases de mise en œuvre du projet. Inversement,
dans la phase de mise en œuvre, des idées de solutions nouvelles peuvent apparaître, et donc
nécessiter de revenir sur la conception du projet pour l’améliorer.
La phase d’organisation permet de repérer des limites de nature à revenir à la définition
stratégique.
Ensuite, force est de constater que chacune des nombreuses actions nécessaires au projet peut
être conçue et planifiée comme un micro - projet, comportant lui aussi des aléas. Il s’ensuit qu’on
retrouve dans la phase de finalisation une évaluation permanente de ce qui est réalisé. Les
ajustements nécessaires conduisent à repenser le projet tel que défini au départ. Il y a donc à
nouveau des étapes d’analyse et de définition stratégique, puis d’organisation lors de la mise en
œuvre.
On a ainsi une imbrication des différentes phases du projet, avec des zones de recouvrement et des
« moments » d’ajustement entre elles.
Sur la base des apports de l’ingénierie concourante46, on peut alors schématiser l’avancement du
projet en faisant ressortir une concomitance des grandes phases et une superposition des axes d’
« élaboration », de « phasage », et de « raffinement » de la solution (voir tableau suivant) :
46
D’après Pascale Bossard et Françoise Darses, dans « Ingénierie concourante : de la technique au social »
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2.2.2. Le management du projet
Différents niveaux de management et responsabilités
Dans le cadre de projets complexes faisant intervenir plusieurs acteurs, il est nécessaire de qualifier
les différents niveaux de responsabilité. Les référents de la conduite de projet dans le secteur du
BTP et en droit des marchés publics distinguent deux niveaux de management47 :
-
-
Le maître d’ouvrage, futur propriétaire de l’objet projeté, qui émet des prescriptions compte
tenu de la situation attendue qu’il définit, et des moyens qu’il est prêt à y consacrer.
« L’ouvrage, c’est le résultat du projet48 ».
Le maître d’œuvre, chargé de construire l’objet projeté. « L’œuvre, c’est le processus
projet49 ».
L’AFNOR distingue deux niveaux de responsabilité :
-
-
la direction d’un projet : coordination des actions, maîtrise / ajustement de la mise en œuvre,
et répartition des ressources. C’est la maîtrise d’ouvrage qui assure la fonction de décision,
la fonction d’aide à la décision relevant de la maîtrise d’œuvre ;
la gestion d’un projet : gestion des hommes (organisation, communication, animation),
gestion technique (objectifs, méthodes, qualité) et gestion des moyens (planification, coûts,
délais). C’est la maîtrise d’œuvre qui assure la fonction de gestion d’un projet, elle agit pour
le compte du maître d’ouvrage.
Spécificité du management de la conception
Selon Yvan Barrel et Christian Guyon, observant des styles de management dans des entreprises
organisées selon un modèle taylorien, « toute l’habileté du leader consiste à tirer parti des
caractéristiques pertinentes de ses collaborateurs pour réaliser efficacement l’affectation des tâches
clés et adopter le style convenant à chacun50 ». Dans les collectifs de travail centrés sur la
conception, la notion d’animation est très importante : en effet, « les phases de co-conception
engendrent une forte coopération. [..] Les partenaires de la conception développent la solution
conjointement : ils partagent un but identique et contribuent à son atteinte grâce à leurs
compétences spécifiques, ceci avec des contraintes très fortes de coopération directe pour garantir
le succès de la résolution du problème. ». La dynamique de la synchronisation cognitive sur l’objet
traité et sur les actions à mener « est à l’initiative et à la charge de tous les acteurs, et non le
résultat d’un effort de cohérence produit par le seul chef de projet comme on l’imagine souvent 51 ».
Encore faut-il que le chef de projet initie un fonctionnement du groupe qui permette cette
dynamique.
47
Voir la définition plus précise de la loi n°85-704 du 12 juillet 1985 (loi MOP)
Sandrine Fernez Walch, « Management de nouveaux projets, panorama des outils et pratiques », p 52.
49 Ibid
50 Barrel Yvan et Guyon Christian, « Un leader, des styles de management », Revue française de Gestion n° 124, juillet –
août 1999, pp 38 – 50.
51 Françoise Darses, dans « Ingénierie concourante : de la technique au social », page 52.
48
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Retenons que dans le cadre de projets complexes mobilisant plusieurs acteurs, pour pouvoir
échanger et « co-concevoir », les membres du groupe projet doivent être en accord sur deux
points : l’objet qu’ils traitent (en réalité, des propositions de solutions concrètes concernant un but
abstrait), et les actions à mener (qui permettent d’entrevoir des solutions). Le maître d’œuvre – chef
de projet doit alors s’assurer que les hypothèses de travail et les objectifs à long terme sont connus
de tous, et surtout partagés par tous.
2.2.3. L’organisation du projet
Les activités du projet et leur répartition.
Différents acteurs peuvent être amenés à jouer un rôle significatif dans la mise en œuvre du projet :
Comme futur usager, comme « réalisateur » d’actions nécessaires, comme fournisseur de moyens
au projet, comme propriétaire, comme gestionnaire…
Compte tenu de la progression itérative du projet, et compte tenu du nécessaire consensus sur la
stratégie adoptée, il est important que l’ensemble de ces acteurs concernés soient présents dès la
définition du projet.
Dans une organisation donnée, les activités n’ont pas la même importance. Pour un même emploi,
on peut distinguer :
 des activités au cœur de l’emploi, qui sont celles spécifiques à l’emploi, qui justifient l’existence
de cet emploi dans l’organisation, ou qui en tout cas ne pourraient être supprimées de
l’emploi ;
 les activités périphériques sont les autres activités importantes pour cet emploi, mais non
déterminantes ;
 les activités annexes qui ne sont ni importantes, ni déterminantes ;
La même distinction entre activités « cœur de l’emploi », périphériques et annexes peut exister dans
un projet. Par soucis de mieux décrire le projet à travers des caractéristiques importantes de sa
gestion, on s’attachera plutôt à distinguer les activités en fonction des grands axes de mises en
œuvre :
- activités stratégiques (produisant les fondements du projet) ;
- activités de gestion du projet (pour l’organiser et faciliter le fonctionnement du groupe projet) ;
- activités plus opérationnelles (de conception et de finalisation d’objets intermédiaires ou de l’objet
final) ;
- activités annexes dont, à la limite, le projet pourrait se passer.
Les instances du projet
On l’a vu plus haut, le déroulement du projet est circonscrit dans le temps. L’organisation qui permet
de le mettre en œuvre l’est aussi. Cela est d’autant plus vrai dans les projets multi-partenaires car
ils ne sont pas circonscrits dans une organisation plus pérenne… à moins que le projet ne consiste
en la création d’une organisation regroupant les mêmes acteurs que ceux du projet.
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17
Pour réaliser le projet, des compétences détenues par des acteurs différents sont nécessaires. Ces
acteurs peuvent être mobilisés dans le cadre du groupe projet ou de groupes de travail, instances
« ad hoc » permettant de croiser idées, informations, points de vue, et de bénéficier simultanément
de l’ensemble des savoirs nécessaires. Ces différentes instances interviennent par cercle
concentrique autour du maître d’ouvrage et du maître d’œuvre, ainsi que schématisé dans le
schéma ci-dessous.
DEFINITION ET RÔLE
Maître d’ouvrage
Commanditaire du projet. (voir plus haut)
Maître d’œuvre
Garant du bon aboutissement du projet, chef de projet.
Groupe projet
Groupe élargi
Groupes de travail
Réunion des principaux acteurs du projet. C’est l’instance qui conçoit,
enrichit et/ou s’approprie la définition de la stratégie et l’organisation. Elle
participe activement à la finalisation du projet. Elle participe aussi au
maintien de la cohérence entre le problème posé, le but à atteindre et les
actions à mener.
Mobilisation plus ponctuelle des acteurs périphériques. Cette instance
permet d’enrichir le projet, de faire prendre du recul au groupe projet, de
recueillir des informations sur (et des réactions de) l’environnement.
Réunion d’acteurs contribuant ponctuellement au projet pour solutionner
des points particuliers. Centrés sur une étape, une action concrète, ou
un problème délimité, ils peuvent se constituer ponctuellement en appui
du groupe projet. Ils sont composés de personnes issues du groupe
projet et/ou du groupe élargi.
La communication
Par nature complexe, le projet est susceptible de concerner un grand nombre d’acteurs, dépassant
largement le cercle du groupe projet. La communication a une grande importance pour :
-
construire une représentation partagée de la situation attendue, et faire connaître cette
intention à d’autres acteurs qui peuvent être concernés dans une moindre mesure ;
-
échanger des informations au sein du groupe projet, avec l’environnement proche (groupe
élargi) et l’environnement plus large.
La communication peut prendre la forme de confrontations, utile si elle est contrebalancée par un
climat de coopération lors de retours d’expérience ou d’activités de conception.
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Les ressources du projet
Les ressources à mobiliser pour la mise en œuvre du projet peuvent être repérées au départ
comme des ressources à mobiliser (nécessaires pour agir), comme des ressources opportunités
(autour desquelles se bâtit en partie la stratégie), ou comme ressources contraintes (avec
lesquelles il faut faire).
Elles peuvent être financières, matérielles, organisationnelles, technologique, en partenariat,
informatives, en temps…
Il est important d’identifier au mieux ces ressources lors de la détermination des choix stratégiques
puis lors de l’organisation du projet. L’absence ou la non-adéquation des ressources retarde le bon
déroulement des actions nécessaires. Cela peut aller jusqu’à remettre en cause le projet.
L’évaluation et l’ajustement du projet
Comme on l’a vu plus haut, le projet confronté aux aléas doit sans cesse se repositionner. Le
groupe projet ne peut le faire qu’en évaluant en continu la mise en œuvre du projet, avec pour
références :
-
la finalité, c’est à dire l’intention de résoudre un problème donné, et de le faire
conformément aux valeurs implicites ou explicites du groupe ;
-
l’objectif de réalisation du projet ;
-
les sous-objectifs, c’est à dire les produits attendus des étapes ou actions à mener pour
mettre en œuvre le projet.
2.2.4. Les relations sociales dans le groupe projet
L’histoire personnelle des acteurs du projet
Les acteurs d’un projet, que ce soit individuellement ou en groupe, vont s’impliquer vers une
réalisation nouvelle en fonction de leur histoire personnelle.52 En effet, leurs enjeux et leurs
motivations, leurs connaissances, leurs représentations du projet sont le fruit d’un vécu particulier.
Ce vécu vient de l’influence de leur environnement social, mais aussi de leur expérience d’action sur
celui-ci. Cette histoire personnelle a donc une influence aussi sur leurs relations avec les autres
acteurs du projet.
Les jeux de pouvoir53
Le pouvoir réside dans la marge de liberté dont dispose chacun des partenaires, ou que chacun se
donne. L’action collective étant un construit social, sa genèse et son maintien supposent des jeux
structurés qui opèrent directement sur le comportement des acteurs. Il est important alors de
repérer :
-
la rationalité des comportements, ce qui pousse les acteurs du groupe projet à adopter
certaines positions, à agir dans tel ou tel sens. Cette rationalité dépend du vécu de
chacun et du contexte du projet (avec des incertitudes, des enjeux, des ressources, dans
les champs technique, organisationnel, économique, socioculturel) ;
-
les rapports entretenus entre les participants au groupe projet, mais aussi vis à vis de
l’environnement. En effet, le projet ne peut pas être isolé du monde dans lequel il
Voir à ce propos les notions d’habitus, de construction sociale de la réalité, et de capital culturel et social, de Pierre
Bourdieu. (Pierre Bourdieu « Raisons pratiques. Sur la théorie de l’action », Editions de minuit, Paris, 1994.)
53 D’après Michel Crozier et Erhardt Friedberg, dans « L’acteur et le système ».
52
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19
s’insère. On l’a vu plus haut, d’autres acteurs périphériques au groupe projet ou plus
lointains ont aussi à voir avec le projet ;
-
La nature des jeux stratégiques : offensifs / défensifs, alliances / oppositions /
négociations, individuels / collectifs, durables / instables…
Les jeux de pouvoir peuvent être à l’origine de positionnement personnels ou institutionnels, de
nature à faciliter ou perturber le déroulement du projet.
Les règles et conventions de fonctionnement54
Comme dans tout groupe social, le bon fonctionnement est permis par des règles, qu’elles soient
implicites ou explicites. Dans le cadre des groupes projets, organisations peu structurées et non
inscrites dans une organisation plus pérenne, on a plus souvent affaire à des règles implicites. Les
relations entre les gens sont alors régies par des « conventions » : les habitudes de travail en
commun se prennent à partir d’un consensus implicite sur les finalités du projet, mais aussi à partir
des jeux d’acteurs, des rapports de force internes et externes au groupe. Ces habitudes de travail
en commun sont importantes tant parce qu’elles soudent le groupe que parce qu’elles régulent son
fonctionnement.
L’évolution du groupe
Le projet passe par plusieurs phases, même si l’on a vu qu’il y a des recouvrements importants
d’une phase sur l’autre. Le groupe va donc être dans des positions différentes selon le moment du
déroulement du projet.
Dans la phase d’élaboration du projet, le groupe se structure autour de la construction d’une
représentation partagée de la problématique et du résultat attendu.
Dans la phase d’organisation, le groupe construit le processus du projet. Remarquons que les
membres du projet risquent de se trouver dans des rapports de force et des stratégies d’acteurs
(internes ou externes au groupe) car il s’agit notamment de l’accès aux moyens humains, matériels
ou financiers.
Dans la phase de finalisation, le groupe passe à l’acte. A ce moment il y a une nécessaire
coopération des personnes compétentes et de celles dont l’implication est indispensable.
Retenons, à propos de la dynamique du groupe projet que celle-ci va avoir une influence
considérable sur l’organisation et le management, donc sur la mobilisation et la mise en
œuvre des compétences.
La composition du groupe projet est un déterminant important de cette dynamique, car elle
va influencer la cohésion du groupe, la répartition des activités, mais aussi les jeux de
pouvoirs.
Les jeux stratégiques à l’œuvre dans le groupe, les règles et conventions de fonctionnement,
et le management, vont déterminer la manière d’agir ensemble, tant dans le comportement de
chaque participant que pour le management humain du groupe par le chef de projet. Cela est
d’autant plus vrai qu’il y a dans les projets multi-partenaires une grande part d’autoprescription des objectifs. Si ce n’est pas « chacun pour soi », en l’absence d’objectifs
imposés à tous, c’est notamment parce qu’il y a un minimum de cohésion, d’accords
(souvent informels, tacites) sur la stratégie.
54
D’après la théorie de la convention, citée par Philippe Bernoux dans « La sociologie des organisations ».
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3. PARTICULARITES DES PROJETS MULTI – PARTENAIRES DANS LE
DEVELOPPEMENT LOCAL
La mise au jour de facteurs clef d’évolution des compétences dans les projets de développement
local peut donner quelques enseignements pour la conduite de projets dans les entreprises. Encore
faut-il au préalable en connaître les limites. Aussi avant d’aborder l’étude empirique, il est
nécessaire de caractériser les différences entre les deux contextes : elles ont des conséquences en
matière de conduite des projets.
La notion de temps
Dans les projets de développement local, la notion de temps est plus lâche, notamment car :
-
-
les accords nécessaires sur la stratégie sont longs à obtenir, car ils sont le fait de
nombreux acteurs dont les enjeux et stratégies peuvent être très divers ;
les premières ressources nécessaires pour ce travail (la disponibilité des participants, les
aspects logistiques liés aux rencontres, les appuis en animation, ingénierie…) ne
concurrencent pas des ressources productives (excepté à l’échelle de chaque participant
qui peut être confronté à des choix entre son temps productif – dans son « entreprise »
personnelle – et le temps qu’il consacre à un projet extérieur à son « entreprise ») ;
les paramètres liés à la réussite du projet concernent des processus de changement
longs (la dynamique d’une profession départementale, la mobilisation d’une organisation
sociale complexe à l’échelle cantonale …). Ces processus de changement sont
confrontés à des résistances émanant de l’environnement du groupe projet, qui n’est pas
soumis à la prescription de la hiérarchie comme pourraient l’être telle ou telle catégorie
d’employés d’une entreprise.
Ainsi, il n’est pas rare de voir des projets se construire sur des délais de l’ordre de 1 à 2 ans, voire
plus, notamment dans leur phase de conception.
Par contre, si l’un des acteurs clef du projet a des impératifs de temps (si son revenu dépend du
projet, si son intérêt dans le projet est lié à une production saisonnière, ou s’il engage des
ressources importantes pour lui), il peut faire peser la contrainte des délais sur les autres.
L’organisation du groupe projet multi-partenaire
Souvent partant d’une idée, plusieurs acteurs se retrouvent solidaires dans une résolution de
problème. Ce n’est pas un chef d’entreprise ou un hiérarchique qui prescrit la nécessité d’agir, mais
des enjeux ou des opportunités partagés (au moins sur une première analyse).
Les regroupements d’acteurs peuvent être les suivants, en fonction des besoins spécifiques :
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Type de
regroupement
Motivations couramment rencontrées pour ce type
de regroupement
L’adhésion à des décisions importantes nécessite une
construction collective de l’ensemble du projet.
Fédératifs
Le volume de « travail » est réparti entre plusieurs personnes
selon des sensibilités.
Le nombre de personnes facilite l’exhaustivité des points abordés,
et la créativité.
L’adhésion à des décisions importantes nécessite une
construction de l’ensemble du projet avec des futurs partenaires.
Complémentaires
Le panel de compétences nécessaires ne peut être détenu par
une seule organisation ou par une seule personne.
La diversité des points de vue facilite l’exhaustivité des points
abordés, et la créativité.
Les particularités des regroupements d’acteurs de projets multipartenaires
Par la suite, dans la phase d’organisation, la répartition des activités pose la question même de la
composition du groupe projet, à moins d’avoir :
-
à externaliser des activités (en cas d’absence d’acteurs disposant de compétences sur
tel ou tel thème) ;
-
à négocier de nombreux accords sur tous les points avec des acteurs connaissant peu le
projet (en cas d’absence d’une partie importante pour finaliser le projet).
Le management
Les projets de développement local quant à eux ne font pas l’objet d’une telle division des
responsabilités. Il se peut tout d’abord que le maître d’ouvrage ne soit pas encore déterminé dans
un groupe qui s’auto – prescrit le travail sur un problème à résoudre (la structure de portage du
projet peut très bien faire partie des solutions à construire en cours de projet). On a alors une
évolution du management du projet qui peut se caractériser de la manière suivante.
Forme de
manageme
nt
Idée, définition
Maîtrise
d’ouvrage Leader informel
Maîtrise d’œuvre par le Leader
Maîtrise d’œuvre ou délégation à un intervenant
extérieur
Phase du projet
Organisation
Recherche d’une maîtrise
d’ouvrage
Maîtrise d’œuvre par le
Leader ou délégation à un
intervenant extérieur
Finalisation
Maître d’ouvrage identifié
Maîtrise d’œuvre par le maître
d’ouvrage ou délégation à un
intervenant extérieur
Les formes de management par grande phase du projet
Il se peut ensuite que le maître d’ouvrage s’implique suffisamment dans la réalisation pour assurer
des fonctions de maître d’œuvre. On a alors affaire à un management comprenant tant la direction
que la gestion. Cela permet de rester souple, réactif pour s’adapter en permanence à
l’environnement social, mais peut générer des incidents par la confusion des rôles joués par le chef
de projet (par exemple quand il est lors d’une réunion en position à la fois d’animation, de
production, et de décision).
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La prescription des objectifs et le contrôle
La forme de composition du groupe et les conventions de fonctionnement de ce type d’organisation
font qu’il y a une auto-prescription des objectifs. En fait, il serait plus juste de dire que la
détermination des objectifs est le fruit d’une construction commune, ou tout au moins d’accords plus
ou moins aboutis de l’ensemble du groupe.
De plus, le mode de management décrit ci-dessus comprend tant la participation à la détermination
des objectifs, que l’animation de la détermination des objectifs et le contrôle (auto-contrôle), ce qui
peut introduire un biais dans l’animation du groupe. En effet, il peut être difficile pour un chef de
projet d’animer la prise de décision et la répartition des activités, et dans le même projet de contrôler
leur mise en œuvre.
L’émergence de leaders
Comme on l’a vu plus haut, le chef de projet, leader du groupe, est celui qui va conduire le projet en
s’appuyant sur le groupe projet. Il peut tirer son pouvoir :
 des moyens « matériels » qu’il est capable de mobiliser pour mettre en œuvre le projet, ce qui
l’amène à « porter » le projet ;
 de sa capacité à mobiliser le groupe projet et d’autres acteurs, ce qui l’amène à animer le
groupe.
S’il est important que le projet soit porté par un chef de projet pour aller au-delà du stade de l’idée,
rien ne garantit que ce chef de projet sera le même pendant toute la durée du projet. En effet, des
modifications peuvent intervenir dans le projet, dans les jeux d’acteurs, dans le parcours du chef de
projet, ou dans la disponibilité des moyens. Cela peut remettre en cause la position du chef de
projet.
------Après avoir exposé ma méthode d’investigation, je viens de préciser au travers de quelle grille de
lecture j’aborde l’évolution des compétences dans les groupes projet. Ce cadre de référence précise
en effet les notions de compétence et de projet, ainsi que le contexte particulier des projets de
développement local. C’est sur la base de ces notions-là que je vais analyser, dans quatre projets,
l’évolution des compétences de plusieurs personnes et les facteurs d’évolution de ces
compétences.
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TROISIEME PARTIE
L’EVOLUTION DES COMPETENCES DANS 4 PROJETS
A partir d’un cadre de référence posant les concepts utilisés, je vais, pour comprendre l’évolution
des compétences dans les projets, analyser le fonctionnement de quatre projets.
Dans un premier temps, je présenterai succinctement chacun des quatre projets ayant fait l’objet
d’investigations.
Dans un second temps, je mettrai en évidence leurs caractéristiques dominantes facilitant le
développement des compétences. Pour cela, je vais analyser les activités mises en œuvre, les
stratégies, l’organisation, et la dynamique sociale des quatre projets.
-------
1. LES CONTEXTES, ENJEUX ET LA DESCRIPTION BREVE DES
PROJETS
Les quatre projets observés ont pour contexte le milieu rural. Ils sont liés à des dynamiques de
développement : intercommunal pour deux d’entre eux, départemental ou communale pour les deux
autres. Au moment de la rédaction du mémoire, les deux premiers sont finalisés. Les deux autres,
de plus longue haleine, s’inscrivent dans des durées plus longues mais ont déjà fait l’objet de
réalisations intermédiaires significatives.
1.2. Le projet de mise en réseau d’une offre promotionnelle en hôtellerie
de plein air
Le département de Midi-Pyrénées où ce réseau se met en place bénéficie d’atouts touristiques
certains. Le climat y est favorable à la baignade dans de nombreuses rivières et lacs en été, les
paysages et sites remarquables sont variés et attrayants, et le patrimoine architectural, historique, et
gastronomique y est support de nombreuses activités touristiques.
Au nombre de 164, les campings y représentent une capacité d’hébergement de plus de 10.000
emplacements. La plupart adhèrent à la centrale de réservation départementale et à la fédération
départementale de l’hôtellerie de plein air. Sous l’impulsion de deux administrateurs de cette
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fédération et avec l’appui de la chambre de commerce et d’industrie, un groupe de gérants de
campings motivés a souhaité s’organiser pour développer la vente en « basse » saison. Avant cette
initiative, aucune action collective de cette importance n’avait été entreprise. Concurrents devant
une clientèle diffuse, les gérants de camping ne communiquaient entre eux que dans le cadre des
négociations professionnelles avec les partenaires du tourisme (conseil général, comité
départemental du tourisme, centrale de réservation, chambres de commerce et d’industrie, parc
naturel régional, fédération départementale des offices du tourisme…).
Pour les gérants de camping engagés dans cette action, le projet était conçu au départ uniquement
pour rallonger la saison. Cela devait pour eux avoir un impact sur leurs résultats, car avec le même
équipement, ils peuvent augmenter leur chiffre d’affaires. Il était par ailleurs bien compris des
leaders de cette action qu’elle pouvait apporter un développement de la qualité des pratiques de
commercialisation, et une amélioration de la qualité des prestations par une connaissance plus fine
des attentes des touristes. Les initiateurs et leaders du projet ont donc proposé aux gérants de
campings une formation « marketing », préalable nécessaire à une action de commercialisation
collective.
Puis est apparue une finalité plus « sociale » clairement formulée par l’ensemble des participants :
[agir collectivement] « doit nous permettre de prendre du recul sur la gestion de l’entreprise »,
« d’être complémentaires et non concurrents pour certaines actions », et « d’échanger sur nos
problèmes, par exemple les problèmes juridiques qu’on peut rencontrer avec des clients ».
1.2. Le projet d’exposition - vente de minéraux et fossiles
Situé dans une zone de coteaux à l’ouest du Massif Central, dans le Lot, la structure de Pays sur
laquelle a lieu ce projet regroupe plusieurs communautés de communes ayant une forte identité
historique, culturelle et économique. Un des traits de cette identité est la richesse du sous-sol, due à
une géologie particulière. La diversité et la qualité des roches mères en ont fait de tous temps une
ressource économique importante : poterie, tuileries et briqueterie, pierres d’œuvre, minéraux
industriels (quartz, silice), sans oublier l’attrait touristique : grottes, découvertes récentes de fossiles
de ptérausaures, grande variété de fossiles et calcites recherchées par les minéralogistes,
paysages et patrimoine architectural.
Le porteur de projet, demandeur d’emploi, est passionné de minéralogie et de spéléologie. Depuis
son enfance, il s’est constitué une collection de plus de 3 000 minéraux, dont une partie a une
valeur commerciale de l’ordre de 150 à 1000 euros par pièce. Il s’est formé par lui-même dans ce
domaine. Il y a acquis un niveau d’expertise qui l’amène à travailler en réseau avec d’autres
minéralogistes au niveau national, et à écrire des articles dans des revues spécialisées. Il envisage
de créer une activité économique sur ce thème, seul dans un premier temps, avec la perspective de
création d’emplois. Ce projet aurait par ailleurs l’intérêt de contribuer à l’offre d’activité touristique du
territoire, et de valoriser le bâtiment communal (ancienne école) dans lequel il est locataire.
Un premier travail d’étude de son projet, réalisé avec l’appui des politiques de retour à l’emploi, le
conduit à préciser son idée et à en esquisser la faisabilité. Le rez-de-chaussée désaffecté de
l’ancienne école conviendrait parfaitement pour accueillir son projet. Il lui est donc nécessaire
d’associer à sa réflexion des représentants de la commune (propriétaire de l’immobilier) et de la
communauté de communes qui est susceptible de réaliser l’investissement, voire de s’engager dans
une gestion mixte de l’entreprise.
Lors de débats internes, le conseil de communauté a rapidement validé l’intérêt de soutenir ce
projet, qui cadre bien dans la stratégie du syndicat mixte du Pays. De plus, la communauté venant
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de s’agrandir, sa politique de développement économique est en panne et ce premier projet (« tout
bouclé, tout cuit ») lui permet d’affirmer qu’elle agit concrètement, ce qui rassure les élus parfois
réticents à l’action intercommunale.
Pour le porteur initial du projet, futur gérant d’une entreprise d’exposition - vente de minéraux, la
finalité est de faire vivre une activité économique pourvoyeuse de son emploi. Il s’agit pour lui de
professionnaliser, de stabiliser et d’officialiser une activité amatrice d’échange et de vente de
minéraux, en l’enrichissant d’un volet « pédagogique » (montrer des minéraux, faire partager sa
passion). Pour la collectivité, cette activité contribue au développement économique par la création
d’un emploi. DE plus, elle participe à la dynamique touristique en s’appuyant sur une ressource
locale stratégique.
1.3. Le projet de mise en valeur de trois plantes du patrimoine local
Le bourg centre rural tarnais où a lieu ce projet s’est développé en partie sur une économie paraagricole, s’appuyant notamment sur la forte vocation agricole de la région. Le marché local, existant
depuis plusieurs siècles, a drainé l’activité commerciale agricole régionale de Perpignan à Albi (foire
aux bovins et aux volailles, fruits et légumes, marché au gras…). Cette forte vocation agricole et
agroalimentaire a conduit à la création d’un abattoir de bovins, puis récemment à la création de
plusieurs PME de transformation agroalimentaire : abattage - découpe de volailles, préparation de
viandes bovines ou ovines, préparation de plats cuisinés ou de conserves, charcuteries
artisanales…
Historiquement, le développement de cette activité agroalimentaire s’est appuyé en partie sur trois
plantes importantes : l’anis (en biscuiterie, en préparation de boissons, en condiment), le safran
(essentiellement comme condiment mais aussi comme plante tinctoriale), et le pastel (plante
tinctoriale qui a fait la richesse du « pays de Cocagne » du XIV ème au XVIII ème siècle, dans un
triangle Toulouse – Albi – Pamiers).
L’office du tourisme local est une association ayant reçu délégation (et des moyens nécessaires) de
la communauté de communes pour assurer des missions d’accueil de touristes et de
développement économique. A la suite d’une rencontre de producteurs de safran dans le Quercy,
deux administratrices de l’office du tourisme ont eu l’idée de s’appuyer sur ces 3 plantes comme
support d’animation culturelle et économique locale.
Comme premier ballon d’essai, les initiateurs de ce projet souhaitent réaliser un événement local
sur ce thème sous la forme d’expositions vente de producteurs, d’expositions retraçant l’histoire et
la culture de ces 3 plantes, et d’animations autour des goûts et des odeurs… Etant donnée la
difficulté de mobiliser dans un groupe projet des acteurs économiques liés à ce thème, ils se sont
rabattus sur une réalisation plus modeste : une journée thématique dans le cadre de l’exposition
artisanale estivale gérée par l’office du tourisme. La manifestation autour des 3 plantes est alors
conçue autant comme un support d’animation supplémentaire de l’exposition estivale (qui génère
20 000 euros de recettes pour l’office du tourisme, et de l’ordre de 100 000 euros pour les artisans
exposants), que comme la préfiguration d’actions de développement économique et culturel plus
ambitieuses à terme.
Autour de quelques administrateurs de l’office du tourisme et de sa permanente, des acteurs
économiques ont donc été mobilisés pour concevoir cette manifestation, dans une perspective de
retombées économiques locales à moyen et long terme, et de pérennisation plus ambitieuse.
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En toile de fond, cette opération revêt une importance particulière pour l’office du tourisme. En cas
de réussite, un tel projet est de nature à développer l’autofinancement de l’association, donc à
contribuer à sa pérennité dans un contexte de difficultés structurelles pour les petits offices du
tourisme et syndicats d’initiatives.
1.4. Le projet de développement d’un sport équestre dans un village de
caractère
Le village lotois support de ce projet est un village de caractère, avec une architecture remarquable
et un cadre environnant agréable mais ingrat pour les activités productives. Enclavé (à une demiheure de la ville la plus proche et à plus d’un quart d’heure d’un bourg centre avec les services
minimums), il vit essentiellement de l’agriculture et ses habitants non-agriculteurs ont pour la plupart
une activité en ville. La commune perd des habitants. On constate un vieillissement de la
population, une disparition des commerces et services (il n’en restait plus aucun dans la commune
au démarrage de ce projet). Une forte pression foncière est induite par des migrants,
essentiellement des touristes étrangers pour une résidence secondaire, et des retraités.
Sans action particulière de la part du conseil municipal, et à moins d’un événement improbable qui
génère de l’activité économique ou un essor démographique, la commune peut se trouver
condamnée à terme à régresser faute d’emplois locaux, de commerces, de services. Les
déséquilibres déjà constatés dans la pyramide des âges, dans la gestion foncière, dans les
ressources communales, risquent de s’aggraver.
Le bourg centre le plus proche, autre village de caractère de notoriété nationale, est le chef-lieu du
canton. Il s’y organise une manifestation équestre connue au niveau national, dans un cadre naturel
de qualité. Cette manifestation consiste en un parcours qui passe par le village support du projet. A
cette occasion, il y a un très fort afflux de visiteurs, sportifs ou spectateurs. Dans le village aussi
s’organisent des épreuves équestres, dont le sérieux est reconnu par les connaisseurs. De
nombreux habitants ont la passion de ce sport, certains d’entre eux sont même devenus des semiprofessionnels dans le domaine de l’entraînement, ou dans la modélisation informatique des
parcours d’entraînement.
Un groupe projet s’est constitué à l’initiative du maire et a décidé de s’appuyer sur le thème du sport
équestre pour re-dynamiser l’économie du village55. Ce groupe, sous l’impulsion du maire, fait
l’hypothèse que la notoriété des activités équestres locales peut se développer, et qu’en s’appuyant
sur les atouts de la commune (cadre naturel et cachet architectural), ils peuvent installer des
activités économiques (commerces, restauration…) et créer des emplois dans le domaine équestre
(centre d’entraînement, logiciel de suivi des performances…) ou de l’artisanat d’art. Définir plus
précisément un tel projet et le mettre en œuvre ne pouvait se faire uniquement avec le conseil
municipal : il est apparu nécessaire de s’appuyer sur le milieu associatif aussi parce qu’il a une
connaissance assez fine du milieu équestre, et qu’il est en mesure de communiquer largement avec
les habitants sur cette opération.
Les initiateurs de ce projet prévoient que celui-ci s’étalera sur une période très longue et ne pourra
se faire qu’avec une adhésion forte des habitants. Ils s’attachent aussi à une finalité de
dynamisation de la vie locale par les habitants eux-mêmes.
55
Les difficultés de réalisation de ce projet au moment où est rédigé le mémoire me font porter dessus un jugement qui
peut paraître négatif. Il est important de signaler que les difficultés rencontrées par ce groupe ont été ponctuelles et ne
préjugent pas des résultats obtenus sur des actions particulières (micro-projets dans le projet). De plus, le trait est un peu
noirci par la mise en exergue de dysfonctionnements riches en informations sur l’évolution des compétences dans un
projet.
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2. LE DIAGNOSTIC DES PROJETS
Les diagnostics présentés dans les tableaux ci-dessous sont simplifiés à l’extrême, afin de mettre
en exergue, par comparaison, les facteurs de développement des compétences.
2.1. La stratégie du projet (voir aussi tableau illustratif page suivante)
Les enjeux et finalités du projet
Les enjeux personnels, sociaux, socio-économiques, économiques, des participants au groupe
projet jouent, dans les 4 projets observés, sur la motivation. Cette motivation est déterminante sur
l’implication dans le projet, et sur l’acquisition des compétences. Mais on le verra plus loin, ces
enjeux personnels sont aussi à l’origine de jeux de pouvoirs internes au groupe.
Des enjeux socio-politiques (développer le tourisme de plein air dans le département, re-dynamiser
un village, mettre en valeur un patrimoine à l’échelle du Pays…), quand ils sont suffisamment
compris par les partenaires institutionnels, permettent d’obtenir plus de moyens utiles au
développement des compétences : conseil, animation, formation - action… (voir ci-dessous)
Les objectifs du projet
Dans trois des quatre projets observés, les objectifs décrits sont précis. Il s’agit ici de leur
formulation lors de la dernière phase du projet. Pour ces trois projets, les objectifs étaient plus
vagues au départ : par exemple « créer un musée des minéraux » est devenu en phase finale
« L’exposition - vente démarre dans le bâtiment communal école en avril 2004 ».
Ils se sont précisés, affinés en cours de projet, à l’occasion d’activités d’ajustement stratégique.
Les moyens mobilisés
Certains moyens mobilisés auprès de partenaires institutionnels (Chambre de Commerce, Syndicat
Mixte de Pays, Conseil Général, Communauté de communes, association de Pays…) peuvent avoir
un effet important sur le développement des compétences. Ces moyens permettent d’agir à
différents niveaux :
 sur l’acquisition de savoirs, par l’apports de savoirs nouveaux : formation, expertise,
conseil ;
 Sur la dynamique de groupe, facilitant l’échange de savoirs : animation, formation – action ;
 Sur la mise en œuvre de l’activité et la structuration de la compétence :
- en faisant agir les acteurs du groupe projet : animation.
Par exemple, dans le projet « trois plantes du patrimoine local », le maître d’œuvre
animateur, lors de la prise de décision, a impulsé la réalisation d’activités nouvelles.
- en agissant avec les acteurs du groupe projet : animation, conseil.
Par exemple dans le projet d’exposition - vente de minéraux, en co-concevant
l’organisation fonctionnelle du bâtiment avec le futur gestionnaire.
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Tableau illustratif des éléments de stratégie des projets
PROJET
Mise en
réseau
hôtellerie de
plein air
Enjeux, finalités
Enjeu économique fort.
Une finalité socioprofessionnelle
(agir collectivement) a été un levier
de motivation important, et un
moyen pour le groupe de s’affirmer
comme un acteur du tourisme
dynamique et autonome.
Deux finalités distinctes :
 Pour le maître d’ouvrage :
Exposition
mettre en valeur un bâtiment en
vente de
mauvais état et garder un locataire
minéraux et
entreprenant.
fossiles
 Pour le maître d’œuvre : vivre
de sa passion.
Enjeux de positionnement
stratégique de l’office du tourisme.
Mise en
Pour des partenaires, le projet
valeur de
peut être un levier de
trois plantes
développement local (économique,
du patrimoine
culturel, touristique) par le
local
patrimoine.
Sport
équestre
dans un
village de
caractère
Finalité démographique (enrayer le
déclin) et économique (réimplanter
des activités sur la commune).
Enjeu politique : le projet a fait
partie du programme électoral, il
faut le réaliser.
Facteurs clef /
évolution des
compétences
Les enjeux économiques et sociopolitiques agissent sur la
motivation des acteurs du projet.
Les enjeux économiques et sociopolitiques sont compris par les
partenaires institutionnels, ce qui
facilite l’accès à des moyens.
Objectifs du projet
Résultats attendus :
- augmenter la fréquentation en basse
saison
- structurer le groupe de gérants en réseau
commercial
(les objectifs se sont précisés peu à peu)
Résultat attendu :
- L’exposition - vente démarre dans le
bâtiment communal école en avril 2004
(les objectifs se sont précisés peu à peu).
A court terme :
- réaliser une manifestation culturelle
modeste et y impliquer des acteurs locaux.
A long terme :
- générer d’autres projets de
développement local sur ce thème
(Structuration progressive des objectifs).
Résultat attendu : peu précis
- Installer des activités sportives, et des
activités économiques dans le village
- Développer l’accueil touristique
(peu d’affinage des objectifs, action
« opportuniste »)
Les objectifs se précisent au fur et à
mesure : cela permet une construction
progressive et collective de l’image de
l’objet attendu.
Moyens mobilisés
Appuis extérieurs :
Logistique, appui d’un
consultant, formation,
formation-action, appui à
la gestion des réservations
Moyens propres du projet :
site internet, imprimés,
présence sur des salons
Aides à l’investissement.
Expertises (juridique…).
Appuis en animation et en
formation-action dans le
cadre du développement
local.
Financement de la
manifestation par l’office
du tourisme et la
commune.
Appuis en expertises,
animation et en formationaction dans le cadre du
développement local.
Des réseaux relationnels.
Appuis en formation-action
dans le cadre du
développement local.
Budget communal pour les
aménagements du projet.
Des appuis (formation,
animation, conseil, expertises, formation-action,)
facilitent l’acquisition de
savoirs, la dynamique de
groupe et la mise en
œuvre des activités du
projet.
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Démarches adoptées
Démarche progressive, partant
des motivations de base des
gérants de camping (augmenter
le hors saison).
Importance égale accordée aux
résultats et au fonctionnement.
Confrontation de deux logiques.
Stratégies individuelles, puis
découverte des enjeux des
autres parties, ce qui a conduit
à une ré-élaboration stratégique
commune (deux stratégies
convergentes).
Démarche progressive, après
découverte des limites de l’idée
ambitieuse de départ.
Importance égale accordée aux
résultats et au fonctionnement.
Démarche opportuniste et sans
objectifs opérationnels à court
terme, ni hiérarchisation des
objectifs.
Stratégie non ouverte aux
réactions de l’environnement.
Les démarches itératives et
progressives facilitent la
construction de la compétence.
Importance accordée au
fonctionnement : cf. tableaux
suivants.
- en facilitant le rôle des maîtres d’ouvrage et maître d’œuvre : conseil auprès des managers
Par exemple dans le projet de l’hôtellerie de plein air, l’intervenant en formation-action a
eu un rôle d’appui de proximité auprès du maître d’œuvre du projet, et dans une
moindre mesure, auprès du maître d’ouvrage.
- en amenant le groupe projet à adopter une démarche progressive : conseil, animation
Par exemple dans le projet « trois plantes du patrimoine local », le maître d’œuvre a
conduit le groupe à distinguer des objectifs opérationnels – réaliser une manifestationtest en 2003, et des objectifs à plus long terme – une année par plante, puis un projet
complexe dans 5 ans.
La démarche adoptée
L’un des quatre projets a adopté une démarche non progressive. L’absence de structuration des
objectifs (pas d’objectifs concrets à court terme, pas d’étapes pour se poser, évaluer et ajuster) et
l’absence d’adaptation formelle du projet aux aléas rencontrés a donné à certains participants
l’impression de ne pas savoir où ils allaient, comment il fallait y aller, et de ne pas progresser sur
le projet. Au contraire, dans les trois autres projets, il y a eu alternance successive de moments
de définition (puis d’ajustement) stratégique, d’organisation (puis d’affinement de l’organisation),
et de finalisation (conception et réalisation d’objets intermédiaires, puis de l’objet final). De leur
propre aveu, les acteurs de ces trois projets n’auraient pu mettre en œuvre les activités finales
sans cette progressivité de la démarche qui leur a permis d’apprendre en faisant.
2.2. Les activités mises en œuvre dans 3 projets et leurs évolutions
Les activités stratégiques
Les activités stratégiques sont réalisées par l’ensemble des acteurs du projet, mais à des degrés
différents. De simples participants (n’étant ni leader, ni maître d’ouvrage, ni maître d’oeuvre)
enrichissent et valident des éléments stratégiques proposés par les personnes en situation de
management. Les intitulés présentés ci-dessous ne tiennent pas compte de ces différences.
Phases
Activités
Phase I
Phase II
Phase III
Mise en
réseau
hôtellerie de
plein air
Définir et communiquer la
stratégie du projet en tenant
compte de l’environnement
et du marché
Ajuster la stratégie du
groupe projet en tenant
compte des aléas et
opportunités rencontrés
Evaluer et ajuster la
stratégie du groupe projet
en tenant compte des
acquis constatés
Exposition
vente de
minéraux et
fossiles
Définir le concept du projet
d’exposition-vente
Préciser la stratégie du
projet d’exposition-vente
Ajuster la stratégie du projet
aux contraintes économiques
et implications des
partenaires
S’accorder sur l’intérêt et les
finalités du projet
Mise en valeur Définir le concept, et la
de trois
place du projet dans un
plantes du
ensemble plus vaste (autres
patrimoine
évènements locaux,
local
dynamique du village).
S’accorder sur l’intérêt et
les finalités du projet
Préciser la stratégie du
projet en tenant compte
d’éléments de faisabilité
Préciser la stratégie du
projet
Ajuster la stratégie du
projet aux contraintes
économiques et
implication des
partenaires
Intitulé
générique
Définir la stratégie du
projet
Evolution
constatée
L’activité de définition stratégique devient une activité de précision, puis d’évaluation /
ajustement. L’évolution de son intitulé laisse entrevoir une prise en compte croissante
de facteurs nouveaux, et une plus grande précision.
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Evaluer et ajuster la
stratégie du projet
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Les activités de gestion du projet
Tout comme les activités stratégiques, les activités de gestion sont réalisées par l’ensemble des
acteurs du projet à des degrés différents. De simples participants enrichissent et valident des
éléments de gestion proposés par les personnes en situation de management. Dans deux des
quatre projets, de simples participants au départ se sont attelés à des activités de gestion après
la première phase (ce qui a eu pour effet pour eux de développer considérablement les
compétences mobilisées). Les intitulés présentés ci-dessous ne tiennent pas compte de ces
différences. Certaines de ces activités ne sont réalisées que par une ou deux personnes en
situation de management.
Phases
Phase I
Phase II
Phase III
Mobiliser des gérants de
camping pour structurer un
projet
Structurer le
fonctionnement du groupe
Finaliser le fonctionnement
du groupe en vue de le
pérenniser
Piloter la réalisation du projet
Gérer les relations avec les
partenaires
S’informer sur les moyens à
mobiliser
Mobiliser le maître
d’ouvrage, propriétaire du
bâtiment envisagé
Gérer les relations avec
les partenaires
Mobiliser les moyens au
service du projet
Mobiliser le système
maître d’ouvrage
Gérer les relations avec les
partenaires
Mobiliser les moyens pour
finaliser le projet
Mobiliser le système maître
d’ouvrage et les partenaires
détenant des moyens
Communiquer sur le projet
(auprès des partenaires et
du comité de pilotage)
Organiser l’avancement du
projet avec le système
maître d’ouvrage
Communiquer sur le projet
(auprès des partenaires)
Activités
Mise en
réseau
hôtellerie
de plein
air
Exposition
vente de Communiquer sur le projet
minéraux (auprès des partenaires et
du comité de pilotage)
et fossiles
Mobiliser des moyens pour
l’étude du projet
Mobiliser des acteurs économiques (exposants), et culturels (détenteurs de savoirs)
Mise en Organiser le fonctionnement
valeur de du groupe projet
trois
Obtenir l’aval du conseil
plantes du d’administration de l’office
patrimoine du tourisme
Mobiliser des ressources
local
pour la définition du projet
(conseils, formation-action,
budget propre…)
Mobiliser les participants
au groupe projet
Intitulé Communiquer avec
l’environnement
générique
Co-piloter la finalisation du
projet
Mobiliser le système maître
d’ouvrage
Piloter le fonctionnement
du groupe projet
Informer le conseil
d’administration de
l’avancement du projet
Communiquer sur le projet
avec des partenaires
susceptibles d’aider le
projet
Structurer le
fonctionnement du
groupe
Mobiliser des moyens
pour étudier le projet
S’informer sur les moyens Gérer les relations avec
mobilisables pour étudier l’environnement
et finaliser le projet
Organiser le projet
Piloter le fonctionnement du
groupe projet
Communiquer sur le projet
(auprès des partenaires)
Solliciter l’appui de
partenaires pour la première
édition de la manifestation
Mobiliser et animer les
acteurs du projet
Mobiliser les moyens pour
finaliser
Gérer les relations avec
l’environnement
Piloter la réalisation du
projet
Evolution De nouvelles activités apparaissent (ex. structurer le fonctionnement…).
constatée Certaines activités changent de contenu (ex. organiser  piloter la réalisation…).
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Les activités opérationnelles et de conception
L’ensemble des acteurs du projet contribue à la réalisation en se spécialisant selon leurs
compétences, leurs motivations. Il y a partage du travail. Seules les activités de conception et
d’évaluation sont réalisées par l’ensemble du groupe projet.
Les compétences rencontrées dans les trois projets sont très diverses car elles ont trait à des
opérations spécifiques à chaque projet. Pour faciliter la lecture, on reprendra juste ici en synthèse
les intitulés génériques.
Phases
Phase I
Phase II
Phase III
Activités
Intitulé
générique
Evolution
constatée
Evaluer la réalisation
Activités de conception
de l’objet projeté ou des d’objets intermédiaires
Activités de pré-étude et
objets intermédiaires
Ajuster la conception
d’ébauche de l’objet
du projet
Activités
«
d’étude
»
du
projeté
projet
Activités de réalisation
Activités d’ébauche des
d’objets intermédiaires
Activités de réalisation
objets intermédiaires
des objets
Activités de finalisation
intermédiaires
du projet
De nouvelles activités apparaissent. La première phase ne voit que des activités de
conception et d’ébauche, la seconde phase voit apparaître des activités de
réalisation d’objets intermédiaires. La troisième phase est une phase d’ajustement /
finalisation.
Les activités annexes
Dans 3 des 4 projets observés, les activités annexes sont celles qui motivent le plus, car les
participants y trouvent la part affective de leur implication dans le projet :

ECHANGER DES INFORMATIONS COMMERCIALES, JURIDIQUES, OU SUR LA GESTION DES CAMPINGS,
pour le projet hôtellerie de plein air ;

ENTRETENIR ET ETOFFER SA COLLECTION, ECHANGER, VENDRE DES MINERAUX ET FOSSILES, pour
le projet d’exposition – vente de minéraux ;

ECHANGER DES INFORMATIONS SUR LA VIE COMMUNALE et COMMUNIQUER SUR LA COMMUNE ET LA
PASSION DU CHEVAL, pour le projet de village des arts et du cheval…
Ces activités sont vecteurs de relations conviviales dans le groupe projet, ou d’accomplissement
d’une passion personnelle. Elles ne sont déterminantes ni dans la réalisation du projet, ni dans
l’évolution des compétences.
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2.3. L’organisation du projet (voir aussi tableau illustratif page
suivante)
La structure formelle de l’organisation
La participation de l’ensemble des acteurs du projet est nécessaire aux activités stratégiques et
d’organisation. En effet, chaque acteur concerné y apporte sa vision et ses connaissances. Par
exemple dans le projet « trois plantes du patrimoine local », l’un est archiviste, l’autre impliqué
dans une association de développement, un troisième apporte une connaissance du tourisme, un
autre encore décrypte le fonctionnement social du village. Dans le projet « hôtellerie de plein
air », l’ensemble de gérants de camping qui seront gestionnaires de cette offre promotionnelle
sont associés au projet. Ils y apportent la connaissance des contributions et des contraintes qui
pourront être les leurs dans le fonctionnement futur du projet.
L’ensemble des connaissances et points de vue sur le projet est mis en commun et débattu, ce
qui donne au produit de l’activité une stratégie (ou une organisation) de dimension collective plus
forte.
Chacun y reçoit aussi les savoirs nécessaires aux activités opérationnelles. Dans le projet de
« l’hôtellerie de plein air » et des « trois plantes du patrimoine local », c’est l’ensemble des
participants au groupe qui est en phase avec le projet car ils en ont conçu les fondements
(articulation entre enjeux / finalités / objectifs / moyens) et les méthodes d’action. Cela les rend
plus compétents et autonomes dans la mise en œuvre des activités opérationnelles du projet.
Par exemple cela n’est vrai dans le projet d’exposition - vente de minéraux qu’à partir du moment
où le groupe projet existe entre les deux protagonistes. Auparavant, le projet n’avançait pas.
La participation de l’ensemble des acteurs du projet au groupe projet les met aussi en position
d’apprendre au contact des leaders qui ont souvent une expérience de la conduite de projet et de
l’animation de groupe (projet de l’hôtellerie de plein air), de la conception de produits (projet des
trois plantes du patrimoine local)…
L’environnement institutionnel, socio-économique ou politique contribue à la structuration de la
compétence, pas toujours dans une instance formelle, en apportant des informations, des
remises en causes, des enrichissements du projet.
Le processus de décision et de contrôle
La prise de décision collective responsabilise les acteurs du projet qui gagnent en autonomie
dans l’application de ces décisions. Ils en connaissent mieux les fondements. On se trouve de
fait dans une situation d’auto-prescription, puisque ceux qui formulent la décision (ou qui y
participent activement) sont aussi ceux qui sont chargés de la mettre en œuvre. En participant à
la prise de décision, ils intériorisent les prescriptions (objectifs, étapes, actions à réaliser, moyens
à mobiliser…). Ils s’en sentent responsables (donc sont plus motivés), et peuvent plus facilement
s’auto-contrôler sur les activités qui sont de leur ressort.
Les débats lors de revue de projet et de retours d’expérience permettent un partage des
représentations et une capitalisation des savoirs de contexte et des savoirs méthodologiques.
Le management
Le fonctionnement participatif met les acteurs en position d’agir sur le projet à tous les niveaux.
Ils sont donc dans des situations concrètes d’activités nouvelles pour eux, car même si la plupart
d’entre eux ont déjà participé à d’autres projets, ils se trouvent dans un contexte nouveau, ils
abordent une nouvelle complexité. Ils acquièrent à ces occasions des compétences. Le rôle des
maîtres d’ouvrage et celui des maîtres d’œuvre gagne à être bien partagé, sans interférence de
l’un sur l’autre. Il n’en reste pas moins que les maîtres d’ouvrage donnent le ton en matière de
fonctionnement participatif en insistant sur son importance auprès du groupe. De leur côté, les
maîtres d’œuvre proposent et régulent les modalités de la participation (décisions partagées,
écoute active, revues de projet…).
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Tableau illustratif de l’organisation du projet
PROJET
Structure formelle de l’organisation
Un noyau de leaders anime un groupe projet, avec une
répartition des activités opérationnelles par petits groupes.
Mise en
Les activités stratégiques et de gestion sont en partie
réseau
réalisées par l’ensemble du groupe.
hôtellerie de Cela permet une transmission de compétences des
plein air
leaders vers les autres, et une connaissance par tous des
fondements du projet.
L’environnement (acteurs périphériques mobilisés sur le
pilotage) contribue au projet de manière informelle en
apportant des informations.
Deux protagonistes agissent seuls au départ, puis
Exposition ponctuellement avec d’autres acteurs.
vente de
Il y a déblocage de situations à partir du travail commun :
minéraux et la compréhension des points de vues et contraintes de
fossiles
l’autre a facilité l’avancement des phases suivantes.
L’environnement (acteurs périphériques mobilisés sur le
pilotage) contribue au projet dans une instance formelle.
Le groupe s’élargit peu à peu pour s’adjoindre des
Mise en
compétences nécessaires, y compris pour affiner la
valeur de
stratégie et l’organisation du projet.
trois plantes
Les acteurs périphériques sont mobilisés ponctuellement
du
au sein du groupe projet pour recueillir des informations
patrimoine
(stratégiques, de contexte, sur les moyens…) et confronter
local
des visions du projet.
Sport
équestre
dans un
village de
caractère
Le projet regroupe élus et responsables associatifs
Il y a peu de liens entre le groupe et l’environnement
institutionnel
Processus de décision / contrôle
Management
Les décisions sont préparées par les leaders
mais toujours soumises à l’enrichissement et la
validation du groupe.
Le contrôle des activités réalisées est collectif. Le
retour sur expérience fait en réunion permet un
fonctionnement par essai-erreur et une prise en
compte de tous les points de vue.
Le maître d’ouvrage et le maître
d’œuvre se partagent clairement
les rôles.
Les deux leaders veillent à
l’implication de tous, et forment de
futurs « dirigeants » en associant
des personnes à leur action de
management du projet.
Les décisions stratégiques concernant les deux
acteurs sont prises d’un commun accord, après
analyse conjointe de la situation.
Chaque acteur contrôle de son côté la mise en
œuvre des décisions la concernant.
Le futur gestionnaire est maître
d’œuvre. La plupart des membres
du groupe projet représentent la
maîtrise d’ouvrage d’une partie du
projet (murs, investissements
mobilier, future activité).
Les décisions sont prises par l’ensemble du
groupe, après analyse de la situation. L’aide à la
décision est faite par un intervenant extérieur.
Le maître d’ouvrage contrôle l’usage des moyens
qu’il engage. Chaque participant au groupe
contrôle les actions sur lesquelles il s’engage.
Essai / erreur : même remarque que pour le
projet.
Le maître d’ouvrage prend la plupart des
décisions et en contrôle le plus souvent
l’application. Il les soumet à son conseil
municipal quand la commune est concernée.
Le maître d’ouvrage s’appuie sur
une maîtrise d’œuvre avec un
intervenant extérieur.
Le style participatif dominant a un
effet mobilisateur et met les
participants au groupe en position
d’agir sur le projet.
Il y a confusion entre la maîtrise
d’ouvrage et la maîtrise d’œuvre.
Le maître d’ouvrage confie peu
d’autonomie au maître d’œuvre.
Participation de l’ensemble des acteurs du projet et des
Prise de décision collective.
Facteurs clef / futurs concernés (usagers, gestionnaires…).
Style de management participatif.
évolution des
Auto-contrôle du groupe sous la forme de débats, Clarification des niveaux de
compétences Lien formel ou informel avec l’environnement institutionnel, revue de projet, retours d’expérience.
responsabilité.
socio-économique ou politique.
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34
Dans le groupe de gérants de camping, ce mode de fonctionnement a permis de renouveler
presque intégralement les personnes en charge du projet au bout de deux ans. De nouveaux
leaders ont émergé : en agissant peu à peu aux côtés des deux managers du projet, ils ont
appris à leur contact.
2.4. La dynamique sociale du groupe projet
(voir aussi tableau illustratif page suivante)
Les enjeux personnels et jeux de pouvoir
Une connaissance réciproque des enjeux personnels facilite l’implication et les échanges de
points de vue dans les groupes projet. Dans deux projets, une mise au clair des positions
personnelles a permis aux acteurs du projet de progresser en connaissant les enjeux et les
contraintes d’autres participants, donc d’en tenir compte dans les activités du projet. Mais cette
mise au clair permet aussi la confrontation. Par exemple les tensions (et les débats qui ont suivi)
dans le groupe « trois plantes du patrimoine local » ont conduit à un affinement de la stratégie et
de l’organisation du projet, parce que des points de vue exprimés sont venus remettre en cause
des idées préconçues (« l’office du tourisme doit se professionnaliser » versus « donnez-moi les
moyens de professionnaliser » etc.).
Les conventions d’accord
Les conventions d’accord sont fortes dans les 4 projets observés. Ce sont elles qui soudent les
participants. Sans elles, la concertation, la prise de décisions collective, l’analyse commune des
contextes… seraient moins faciles, car ces conventions agissent sur la motivation de chaque
participant.
Dans certains cas, l’ensemble des acteurs du projet n’avaient pas l’habitude d’agir en mode
projet sur une action complexe. Agir dans un groupe où d’autres connaissent ce mode de travail
les rassure : ils découvrent alors peu à peu que tout ne peut être résolu d’avance, qu’ « il faut
bien commencer par un bout » et aborder progressivement le reste par la suite.
Les formes de communication
Les formes de communication basées sur l’écoute et le débat, mais aussi la confrontation,
apportent un croisement des visions du projet, et une pratique de la résolution des problèmes.
La formalisation d’acquis sur le projet se fait de manière écrite sous la forme de “dossiers projet”,
ou orale, en retours d’expérience ou en préparation de réunions. Elle permet, dans trois projets
de vérifier la teneur d’accords. Elle permet aussi de faire émerger des représentations partagées
qui deviennent des référents du projet (fondements théoriques de l’action) ou des modes
d’actions (procédures ou règles de travail propres au groupe).
Le passage à l’écrit est l’occasion pour chacun de contrôler, de préciser, de conclure qu’il est en
phase avec le projet. C’est un moment d’ajustement important. Dans l’un des projets, l’absence
de communication claire vers l’environnement révèle des difficultés de communications internes
au groupe et des désaccords.
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35
PROJET
Enjeux personnels et jeux de
pouvoir
Conventions d’accords
Forme de communication
Le dialogue, l’écoute active,
prédominent. L’avis de tous est
important, surtout lors de
confrontations.
Les documents de communication
externes permettent de vérifier et de
formaliser l’accord du groupe
Au départ, méfiance, puis
communication plus fluide à partir du
travail collectif.
Des documents de communication vers
l’environnement sont rédigés par le
futur gérant. Ils sont l’occasion de
prendre conscience du trajet et de
capitaliser sur les compétences mises
en œuvre.
Des enjeux personnels très divers :
La passion du patrimoine
La communication dominante est la
Mise en
reconnaissance sociale, intérêt
local
discussion à bâtons rompus canalisée
valeur de
économique, épanouissement
La volonté de sérieux dans
par le maître d’œuvre.
trois plantes personnel, mission professionnelle.
la démarche (autenticité
Documents écrits : cf ci dessus
du
Des tensions internes passagères ont historique, rigueur du
La résolution des conflits se fait avec
patrimoine parfois pesé sur les échanges ou sur projet…)
une mise à plat des motivations
local
la motivation lors de la manifestation. La plupart des acteurs
personnelles. Cela permet aussi
avaient une culture du projet d’affiner les enjeux stratégiques.
La forte motivation “politique” du
L’attachement au village
Deux acteurs imposent leur point de
Sport
maître d’ouvrage a été partagée en
L’activité sportive de plein
vue. Il n’y a que peu de débat, peu de
équestre
début de projet, puis les autres
air comme support de
confrontation des représentations.
dans un
acteurs se mettent en retrait, ne se
développement du village
Les apports de l’extérieur sont niés ou
village de sentant pas entendus ou ne voyant
contestés.
caractère
pas le concret et la faisabilité du
Les divergences internes ne sont que
projet.
peu perçues par les leaders.
De fortes conventions
Ecoute, débat, confrontation.
Facteurs
Des échanges sur les enjeux
soudant le groupe.
clef /
personnels.
Formalisation d’accords et
évolution
Une compréhension du
communication avec l’environnement
des
projet comme mode d’action proche du projet (oralement ou sous la
compétences
qui se construit peu à peu.
forme de “dossiers du projet”).
Des enjeux personnels économiques
pour tous les acteurs du groupe projet
Mise en
et socioprofessionnels pour les
réseau
leaders.
hôtellerie de
Des jeux de pouvoir essentiellement
plein air
entre le groupe et l’environnement.
Le métier identique
qu’exercent les participants.
Puis peu à peu la conviction
que les solutions collectives
aux problèmes de cette
profession sont pertinentes.
La culture de projet émerge.
Deux enjeux distincts :
L’ancrage du projet dans le
 pour le maître d’ouvrage : mettre
village
en valeur un bâtiment en mauvais état La valeur du bâtiment retenu
Exposition
et garder un locataire entreprenant.
pour héberger le projet
vente de
 pour le maître d’œuvre : vivre de
La culture du projet se
minéraux et
sa passion.
construit peu à peu.
fossiles
Des jeux de pouvoirs qui s’estompent
à partir du travail collectif.
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36
Mode de relation
Coopération à l’intérieur du
groupe
Compétition avec d’autres
acteurs institutionnels
Au départ, négociation passive
(“l’autre me doit ceci, j’ai droit à
cela”…).
Puis coopération.
Coopération, teintée de
rapports de force internes et de
négociations sur les visions du
projet (en terme de moyens, de
contenus…).
Domination du maître
d’ouvrage et d’un leader
informel sur les autres acteurs
du groupe projet.
Alternance de confrontation et
de coopération.
La place de la négociation est
importante.
Les modes de relation
L’alternance de confrontation (l’autre “voit” différemment) et de coopération (on a des visions et
connaissances complémentaires) enrichit les compétences. La négociation se retrouve dans toutes
les activités s’apparentant à de la conception (élaboration de la stratégie, conception de
l’organisation, conception d’objets intermédiaires…).
Dans le projet de sport équestre dans un village de caractère, on constate qu’il y a peu de
coopération dans la conception : le maître d’ouvrage et un autre leader informel du groupe
déclament des propositions de manière péremptoire. Ces propositions ne sont pas négociées (pour
l’un d’entre eux) ni négociables (pour l’autre). Il s’ensuit que les membres du groupe projet n’ont que
peu appris. De plus, ils ne se reconnaissant pas dans certains aspects du projet, ils ont des
difficultés à y agir.
2.5. Les facteurs - clefs de la structuration des compétences observés
dans les projets
Avant toute analyse plus complète de la manière dont se structurent les compétences dans le
projet, on peut déjà pointer quelques facteurs-clef agissant sur le développement des compétences.

La stratégie doit correspondre tant aux enjeux du problème posé qu’aux enjeux des
acteurs impliqués dans le projet. Cette stratégie s’affine dans une démarche
progressive, avec un enrichissement croisé des activités de définition stratégique,
d’organisation et de finalisation. S’agissant de l’évolution des compétences, on peut
donc parler de structuration progressive.

Des enjeux socio-économiques forts justifient des moyens en « matière grise » :
fonctions d’animation, d’expertises, d’ingénierie de projet, de formation au projet…

L’organisation comprend les principaux acteurs de la mise en œuvre du projet, agissant
de la définition stratégique à la finalisation.

Quand cette organisation est encadrée par des managers ayant le souci de la
dynamique de groupe, c’est le style de management participatif qui va faciliter
l’acquisition de compétences en laissant une grande place à l’action des autres
participants. De plus, les managers, ainsi que d’autres personnes impliquées dans le
projet, par leurs enjeux personnels et/ou leur expérience, sont à même de « tutorer », de
guider d’autres membres du groupe projet, de favoriser l’apprentissage du projet et de la
culture de projet.

La dynamique de groupe, en privilégiant l’écoute et la coopération favorise l’apport
croisé des l’ensemble des acteurs autour d’objectifs communs. En privilégiant aussi la
confrontation des idées et les critiques, elle favorise l’expression de la différence.

Les moments de communication sont l’occasion de formaliser les acquis du projet.
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3. LES MODALITES D’EVOLUTION DES COMPETENCES
De ces diagnostics ressortent quelques facteurs clefs de la structuration des compétences,
sur lesquelles on reviendra par la suite. Il en ressort aussi des modalités d’évolution des
compétences. On s’aperçoit en effet que la structuration progressive d’activités de plus en
plus complexes, grâce à la démarche itérative du projet, mobilise et construit des
compétences nouvelles. Deuxième modalité, l’enrichissement croisé entre les acteurs en
présence (qui échangent des savoirs et confrontent leurs représentations) est lié à la
dynamique du groupe. Enfin, la formalisation, réalisée à l’occasion d’actions de
communication interne ou externe au groupe, met au jour des connaissances et savoirs
procéduraux nouveaux.
3.1. La démarche progressive du projet
L’intégration progressive de la complexité
Au fur et à mesure de l’avancée du projet, les participants au groupe projet découvrent des
éléments nouveaux, comprennent de mieux en mieux les enjeux, ont à réagir face à l’apparition
d’aléas… Tout cela les conduit à ajuster en permanence la stratégie. Il y a complexification de la
(des) compétence(s) stratégique(s). Ils en deviennent plus précis, plus incisifs dans leur action au
regard du problème posé et des enjeux.
Exemple 1.
Pour le futur gestionnaire de l’exposition – vente de minéraux et fossiles, la compétence
stratégique observée en phase 1 s’enrichit de nombreux savoirs au cours de l’action. On le
constate par l’apparition de nouvelles connaissances, d’une méthode, et de savoir-faire lors de
l’observation en phase 2 et 3.
Cet enrichissement a été rendu nécessaire par la découverte d’éléments nouveaux dans l’action
lors des phases précédentes :
- l’intérêt de mettre à profit tout ce que le patrimoine local peut apporter de complémentaire au
projet ;
- les divergences de points de vue et d’implication de la collectivité ;
- les contraintes économiques, les seuils de viabilité ;
- les écarts entre le positionnement personnel de départ et le positionnement souhaitable du
projet.
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38
Compétence : Définir le concept du projet
Phase I :
Phase II : préciser la
définir le concept du projet
stratégie du projet
Phase III : Ajuster la
stratégie du projet
CONNAISSANCES
NOUVELLES
CONNAISSANCES
NOUVELLES
CONNAISSANCES
Le classement des minéraux et des fossiles
La composition physico-chimique des minéraux
La géologie, les spécificités de la géologie locale
Rudiments de paléontologie
L’histoire des minéraux et fossiles
Le patrimoine local
support d’intérêt pour
la minéralogie
Le positionnement des
partenaires sur le projet
SAVOIRS PROCEDURAUX
NOUVEAUX SAVOIRS
PROCEDURAUX
NOUVEAUX SAVOIRS
PROCEDURAUX
Méthode de hiérarchisation des motivations
Méthode simple d’analyse d’informations locales
Méthode simple d’estimation de l’intérêt d’une telle
activité pour le public
Méthode simple d’estimation de la faisabilité
économique
Méthode de définition stratégique d’une activité ancrée
dans le tissu local
Méthode simple
d’analyse du
positionnement des
partenaires
SAVOIR-FAIRE
NOUVEAUX SAVOIRFAIRE
Repérer les clientèles possibles d’une telle activité
Rechercher des informations sur des exemples
d’activités similaires
Faire un état des lieux des centres d’intérêt du
territoire compatibles avec le projet
Explorer la complémentarité d’une telle activité avec
des sites, thèmes ou activités locales
Echanger sur les connexions possibles avec d’autres
activités ou sites
Classer les enjeux personnels et les opportunités à
exploiter
Choisir un positionnement et le qualifier
Estimer l’intérêt du public pour des activités de
découverte du monde minéral
Estimer la faisabilité économique du projet
Analyser les enjeux, forces, faiblesses et opportunités
Exploiter des
informations sur des
exemples d’activités
similaires
Ajuster le classement
des enjeux personnels
et les opportunités à
exploiter
Préciser le
positionnement de
départ
SAVOIRS PRATIQUES
NOUVEAUX SAVOIRS
PRATIQUES
//////
La valeur symbolique d’une collection de minéraux et fossiles
NOUVEAUX SAVOIRFAIRE.
Redéfinir les axes
prioritaires du projet
Préciser le
positionnement de
départ
Analyser les centres
d’intérêt des partenaires
compatibles avec le
projet
Ajuster le
positionnement
personnel et du projet
Donner une dimension vis à vis des partenaires
(ambition) au projet
Ajuster la dimension
(ambition) du projet
NOUVEAUX SAVOIRS
PRATIQUES
//////
La conception de l’organisation et de méthodes pour agir
L’avancement du projet et l’action collective nécessitent des référents, procédures et savoir-faire
propres au projet et communs à l’ensemble des acteurs. Dans les projets observés, ces procédures
et savoir-faire spécifiques au projet ont été construits par le groupe projet.
Exemple 2.
Ainsi, dans le projet de l’hôtellerie de plein air, les savoirs suivants ont été élaborés par le groupe
dans le cadre de l’activité d’organisation, à un moment t0, et ont été ré-investis dans des activités
du projet à un moment t1 :
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39
(suite de l’exemple 2.)
Les axes stratégiques et objectifs du projet
Les objectifs et échéances du projet
Méthode d’organisation des réunions du groupe
Méthode d’analyse des actions de la promotion collective engagée
Règles de fonctionnement de l’outil Stop Résa conçu par le groupe
Enrichir le système Stop Résa (conçu par le groupe) et le faire évoluer
Envoyer régulièrement ses disponibilités aux autres participants
Sur la base d’un problème posé, d’une idée de départ, puis d’axes stratégiques comme référence
de l’action, en progressant vers la définition et la réalisation, le groupe projet va nécessairement
devoir se structurer. Il va concevoir des procédures propres au projet, celles qui permettront au
groupe de coopérer, de gérer le projet, de concevoir et réaliser des objets (finaux ou intermédiaires)
ou d’en prévoir les modalités d’usage.
Exemple 3.
A partir de l’impulsion de départ, le groupe hôtellerie de plein air a mis en œuvre des
compétences d’organisation. De nouveaux savoir-faire sont apparus dans ces compétences
d’organisation : planifier les différentes étapes du projet, élaborer des modalités d’actions
partagées, critiquer et améliorer le système de réservation.
Ces savoir-faire ont permis de créer des règles de travail organisant le groupe (modalités d’action
du groupe) ou le projet (règles de fonctionnement de l’outil stop résa). Ces mêmes règles de
travail ont facilité la réalisation des activités opérationnelles (« tout le monde s’est investi dans
l’action », « on était 15 au départ et on est 15 à l’arrivée ») malgré quelques frottements (« je me
suis retrouvé tout seul avec la diffusion des dépliants ») qui ont été suivi d’améliorations.
Pour s’organiser, pour concevoir, pour produire et pour s’améliorer, on constate :
- l’apparition d’activités nouvelles dans le projet (voir plus haut les activités des 3 projets) ;
- la création de nouveaux savoirs formalisés propres au projet et de nouveaux savoir-faire
nécessaires à l’action ;
…donc la mise en œuvre de nouvelles compétences.
La dynamique croisée des trois types d’activités dans une démarche progressive
On constate dans 3 des 4 projets observés que les activités liées à chaque grande phase ont un lien
fort avec les activités des deux autres.
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Dans les projets observés, c’est en partant d’une idée que se forge l’embryon du projet. L’activité de
définition stratégique permet de contextualiser l’idée et de déterminer les grands axes du projet et
les actions à mener. Cette progression s’accompagne d’une prise de recul.
Exemple 4.
La description suivante de la démarche de la manifestation des 3 saveurs, faite par un des
acteurs du projet, illustre bien cette prise de recul (les parties soulignées sont destinées à mettre
l’accent sur la progressivité de l’avancement du projet) :
« Au début, on avait dans l’idée de faire quelque chose sur le safran, puis d’y associer le pastel.
On a pensé que ça pourrait faire un des temps forts de l’animation du village qu’on veut relancer.
En creusant un peu, on s’est rendu compte que ça demanderait beaucoup d’énergie et qu’on
pourrait dans un premier temps le tester en le faisant avec l’expo artisanale. » Puis après
plusieurs mois de travail (recueil et analyse d’information, analyse stratégique, conception de la
première édition), le groupe a donné au projet une ambition encore plus importante tout en
continuant à travailler sur une première manifestation légère pour mobiliser habitants et acteurs
de la vie locale.
Puis, partant d’une définition stratégique (qui continue à se préciser), les groupes projet observés
ont commencé à s’organiser et à concevoir.
La conception elle-même s’appuyant sur la définition stratégique, produit des savoirs théoriques de
contexte (renseignant sur les enjeux, les contraintes spécifiques au projet, les caractéristiques
locales, les opportunités à exploiter…) utiles à l’affinement stratégique.
L’organisation du projet amène les acteurs du projet à produire des procédures d’action utilisées
dans les activités de conception et de réalisation.
On s’aperçoit que les différentes phases du projet sont génératrices de compétences pour d’autres
phases, permettant ainsi un affinement à la fois stratégique, de l’organisation, de la conception et de
la réalisation. En fait, de par l’interdépendance des grandes phases nécessaires à l’avancement du
projet, les activités réalisées dans chacune de ces phases produisent ou enrichissent des savoirs
nécessaires à d’autres activités.
On a pu repérer les apports en développement des compétences d’un type d’activité à l’autre. Ces
apports croisés sont reportés dans le tableau page suivante :
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41
Les apports croisés en compétences entre grandes phases du projet
On peut y constater que la précision, les ajustements et la finalisation du projet sont des supports de
mise en dynamique des savoirs nécessaires à l’action. Cette dynamique provoque un
accroissement des compétences dans une stratégie plus fine, avec une organisation plus
pertinente, et vers une réalisation plus précise, que l’on peut schématiser de la manière suivante.
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42
Les difficultés, aléas, enjeux rencontrés pendant l’élaboration du projet conduisent à une
complexification des actions à mener. Cela nécessite :
- l’acquisition (parfois la production) de savoirs nouveaux
- la réalisation d’activités nouvelles (donc de compétences nouvelles)
- l’enrichissement des compétences mises en œuvre sur l’ensemble du projet
La stratégie en devient plus fine, l’organisation plus pertinente, et l’objet à réaliser de plus en plus
précis. Ces trois grandes données du projet (stratégie, organisation, réalisation) interagissent l’une
avec l’autre, ce qui permet de développer des compétences par l’intégration d’éléments nouveaux. On
peut schématiser cet enchaînement de la manière suivante :
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3.2. La dynamique sociale du groupe projet
3.2.1. L’échange de savoirs détenus séparément par les membres du groupe
Les différents protagonistes du projet trouvent un intérêt à agir ensemble. Cette action collective va
amener des personnes détenant des savoirs particuliers à travailler avec d’autres personnes
détenant d’autres savoirs. Il s’ensuit des échanges croisés de savoirs permettant la mise en œuvre
de compétences nouvelles.
Lors d’échanges d’information, de discussions, de débats, les participants au groupe projet sont
amenés à apporter des informations ou à exposer des méthodes qu’ils possèdent.
Exemple 5.
Dans le projet « endurance équestre dans un village de caractère », dont je n’ai pu réaliser la
totalité des analyses, le savoir intitulé « Les possibilités d’agir dans le domaine de l’endurance
équestre… » émane d’un apport croisé des membres du groupe projet : l’un apporte sa
connaissance du milieu de l’endurance, l’autre ses connaissances de la manifestation sportive
emblématique d’un village voisin, plusieurs autres croisent des informations sur la compatibilité
avec les structures communales…
3.2.2. Les regards croisés et confrontations
La coopération de plusieurs acteurs autour d’un projet n’est pas un travail collectif sans heurts. Au
sein du groupe, ou entre acteurs du groupe projet et acteurs périphériques, des différences de
vision du projet, des critiques croisées, des retours d’expériences sont l’objet de confrontations
parfois vives.
Exemple 6.
Ainsi, dans le projet de mise en valeur de trois plantes du patrimoine local, « au début, [les deux
initiatrices du projet] avaient [leurs idées sur le] projet sans échanger avec nous dessus. On n’a
pas toujours été d’accord avec ce qu’elles voulaient. On en a discuté… ».
Cela se traduit dans la compétence décrite page suivante (la première colonne, phase 1,
concerne uniquement un des initiateurs du projet, les deux phases ultérieures ont été mises en
œuvre par l’ensemble du groupe projet).
Au fil de la réalisation du projet, l’idée de départ s’est transformée de manière importante, la
stratégie du projet s’est construite à la suite de discussions, de désaccords, qui ont fait émerger
des représentations nouvelles, des prises de recul.
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Compétence : Elaborer la stratégie du projet (puis l’affiner en tenant compte d’éléments de faisabilité)
Phase I
Phase II
Phase III
Connaissances
Nouvelles connaissances
Nouvelles connaissances
Exemples de mise en valeur du
La situation locale (partenaires,
Connaissances « enrichies »
patrimoine culinaire dans un autre organisation sociale et
des 3 plantes
département.
intercommunale…)
Evolution du contexte
Quelques connaissances des 3
(situation locale, partenaires…)
Quelques éléments de l’histoire
plantes et de leur intérêt
locale
patrimonial
Quelques caractéristiques
concernant les 3 plantes
Savoirs procéduraux
Nouveaux savoirs procéduraux
Nouveaux savoirs procéduraux
Une modalité de mise en valeur du Méthode de recherche, tri et
/////
patrimoine culinaire
analyse d’informations
Savoir-faire
Nouveaux savoir-faire
Nouveaux savoir-faire
Transposer l’idée de mise en
S’approprier les idées de départ
Affiner la ligne de conduite
valeur observée ailleurs pour
Débattre de l’idée de départ
Contrôler la rédaction
l’adapter au contexte local
Enrichir et modifier les idées de
d’éléments stratégiques
Exposer l’idée à d’autres acteurs
départ
composant le groupe projet
Débattre des enjeux, finalités et
objectifs du projet 3 saveurs.
Analyser l’évolution du contexte
Recueillir des informations sur les
enjeux stratégiques
Apporter sa vision des problèmes
posés et de la stratégie à adopter
Savoirs pratiques
Nouveaux savoirs pratiques
Nouveaux savoirs pratiques
L’intérêt personnel à participer à
ce projet
Le cheminement d’une action de
développement local
Concevoir un projet de
développement local
Ces confrontations ont aussi lieu lors de retours d’expérience, qui sont l’occasion de revenir sur les
erreurs, les dysfonctionnements. Cela fait réagir plusieurs participants au groupe sur des
représentations, il se dégage alors une représentation nouvelle du problème traité, de la
compréhension d’un contexte donné, d’une information mal comprise…
Exemple 7.
Dans le groupe de gérants de camping, des frottements sont apparus quand le groupe évalue
des actions réalisées : les écarts de vision du projet (ou de l’étape, ou de l’action ponctuelle) sont
source de discussions qui amènent les uns à formuler, reformuler, expliciter leur vision, les autres
à exprimer une différence de point de vue. L’échange suivant relevé lors d’une réunion du groupe
montre l’apport de ces confrontations :
« La diffusion des dépliants [sur un salon] n’a pas eu de super résultats // C’est pas forcément le
nombre qu’on y a mis, le problème, c’est qu’on n’a pas de fichier fiable si le couponning a pas
marché // n’empêche qu’on a balancé 5000 brochures et que le retour est pas terrible, et si le
couponning a pas marché, c’est qu’on a confié un bon paquet à [un partenaire] // oui c’est vrai, ça
leur prend du temps et ils n’ont pas l’habitude, ils veulent pas recueillir des contacts // finalement
ce qui est important, c’est plus la qualité des contacts qu’on a. On devrait améliorer le mode de
distribution de nos dépliants »).
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Les apports de cette discussion ont été incorporés dans les deux compétences suivantes en
phase III du projet:
- Activité 6 : Gérer un ficher de clients prospects
Savoirs théoriques
Savoirs procéduraux Savoir-faire
Référents en matière de
marketing touristique
Les finalités du projet
Les contraintes d’un partenaire
contribuant au recueil
d’adresses
Méthodes de recueil
d’adresses
Méthode de gestion d’un
fichier client
Les conditions de réussite
du couponnage
Savoirs
pratiques
Recueillir et mettre en commun des fichiers
clients par recoupement de fichiers et
couponnage
Qualifier les fichiers client
Trier et analyser les fichiers clients
Editer les fichiers clients pour la diffusion des
documents de promotion
- Activité 7 : Evaluer et reconduire des actions de promotion et de communication
Savoirs théoriques
Savoirs procéduraux Savoir-faire
Savoirs
pratiques
Référents en matière de
marketing touristique (bases
théoriques)
L’impact d’un salon
Caractéristiques et possibilités
d’internet
Les comportements d’achat
des touristes
Les règles d’élaboration
d’une brochure
Méthode d’analyse des
actions de promotion
(contacts, obtenus,
brochures diffusées)
Méthode simple de
délégation
Modalités de diffusion de
dépliants
Analyser les résultats obtenus pour la première
L’accroche d’un
promotion
document de
Analyser des supports de communication
promotion
Elaborer une maquette de support de
communication
Analyser la fréquentation des clientèles pour une
opération de promotion ou de communication.
Formaliser les caractéristiques attendues d’un
site internet pour sa conception (partie
communication)
Déléguer et contrôler la réalisation d’un support
de communication en ligne
3.2.3. La co-action entre plusieurs acteurs du projet
Cette modalité de fonctionnement est importante car elle est de nature à mettre en dynamique les savoirs.
C’est en agissant avec des personnes ayant de l’expérience, de l’assurance, que certains participants au
groupe projet mettent en œuvre leurs compétences.
Dans trois des quatre projets, des participants au groupe projet ont développé des compétences en
agissant de concert avec un autre participant :
- des managers du groupe projet ayant une expérience du projet, (4 personnes sur 3 projets) ;
- des intervenants extérieurs (experts, consultants – formateurs, animateurs, architecte…) ;
- et parfois de simples participants (deux personnes dans le projet de mise en valeur de trois plantes
du patrimoine local).
3.2.4. Les conditions de fonctionnement du groupe
La succession d’essais / erreurs, l’écoute, la confrontation des représentations, les relations du groupe avec des
personnes de l’environnement du projet, la co-action avec un autre acteur (du groupe ou extérieur au groupe)
ne peuvent développer des compétences qu’à certaines conditions, que l’on retrouve dans les facteurs – clef
du développement des compétences (voir plus haut) :
-
un groupe composé d’acteurs détenant des savoirs, des visions du projet, des expériences
diverses ;
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46
-
une confiance mutuelle entre les membres du groupe projet, qui émane souvent d’un accord
important sur les enjeux, finalités et objectifs du projet ;
-
un climat fait d’écoute, de confrontation et de droit à l’erreur ;
-
une fonction de management, de médiation dans la dynamique de groupe, qui facilite l’expression,
les échanges, et le transfert de compétences (co-action).
Une fonction de médiation, les conventions d’accord, l’organisation du groupe, le droit à l’erreur sont autant de
conditions qui facilitent l’expression, les regards croisés, la confrontation des représentations les retours sur
expériences (essai / erreur). Tout cela permet aux participants au groupe projet de découvrir de nouveaux
savoirs avec l’ensemble du groupe et de les mettre en pratique. Cela leur permet aussi de faire évoluer leurs
propres représentations, ce qui contribue au développement de leurs compétences et facilite le fonctionnement
du groupe.
3.3. La communication
3.3.1. La verbalisation de retours sur expérience
A plusieurs moments, dans trois des quatre groupes projet, des retours sur expérience ont permis
au groupe d’exercer un contrôle a posteriori sur ses actions, dans le but d’évaluer chemin faisant la
qualité des productions intermédiaires, de s’assurer de leur conformité avec les fondements du
projet (objectifs, finalités, enjeux), et d’améliorer ce qui leur paraît insatisfaisant. Les moments de
débat qui ont lieu pour ces retours sur expérience sont l’occasion de verbaliser des acquis, des
difficultés, de mettre à jour des modalités d’action (pour ajuster la production par exemple).
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47
Suite de l’exemple 7.
Les verbalisations qui ont eu lieu dans l’exemple 7 cité ci-dessus concernent la mise au jour des
savoirs suivants :
Savoirs formalisés
L’impact d’un salon
Les conditions de réussite du couponnage
Les contraintes et le fonctionnement du partenaire
La discussion qui a suivi s’est conclue par la mise à jour d’un savoir procédural :
le [bon] mode de distribution des dépliants.
L’avancement du travail du groupe nécessitant une succession de débats ouverts (analyses) et de
synthèses, il est important de formaliser des accords pour conclure une phase de synthèse. Ces
accords représentent pour le groupe projet des référents de l’action. Les activités réalisées par la
suite font en effet référence à des décisions ou des accords portant sur la stratégie, l’organisation
ou la conception (la vision) du projet.
Exemple 8.
Dans le projet de mise en valeur de trois plantes du patrimoine local, l’évaluation de la première
manifestation a permis de rappeler, mettre à jour et/ou d’actualiser :
Les fondements initiaux du projet
Les objectifs de la première manifestation
La méthode de mise en place de la manifestation
L’organisation du groupe projet
Les résultats obtenus
Les contraintes, limites… de cette première réalisation intermédiaire
Pour l’un des participants, « au fur et mesure qu’on en parle, on se l’approprie, on arrive mieux à
cerner les objectifs, on cerne mieux où en sont les autres sur le projet quand on échange, on
s’organise mieux ».
3.3.2. La présentation du projet à des partenaires
et la rédaction de documents « revue de projet »
Dans les quatre projets observés, la plupart des membres du groupe se sont trouvés confrontés à
d’autres acteurs de l’environnement du projet. En effet :
-
certaines informations n’étaient pas détenues par des participants au groupe projet, mais
par d’autres acteurs, par exemple des personnes mobilisées dans le groupe d’appui au
projet ;
-
une part importante des décisions dépend de l’environnement : celles concernant des
appuis financiers extérieurs, des partenariats ponctuels ;
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48
-
certains partenaires non représentés dans le groupe projet et ayant apporté un appui
ponctuel (en ingénierie de projet, en animation, en formation - action…) demandent un
retour sur l’avancement du projet, sur les étapes franchies, les actions mises en œuvre…
De ce fait, il a fallu communiquer. Que ce soit à l’oral ou à l’écrit, il a été nécessaire d’expliquer le
projet, de convaincre, de solliciter des « retours », d’entendre des points de vues différents, de tenir
compte de remarques venant de l’extérieur…
Exemple 9.
Dans le projet de mise en valeur de trois plantes du patrimoine local, un participant au projet
constate : « à la réunion avec la mairie et la communauté de commune, j’ai découvert plein de
trucs. On avait sacrément avancé depuis le début ». Pour le porteur de projet d’une exposition
vente de minéraux : « depuis qu’on discute avec le maire et la communauté, je comprends mieux
leur position. […] On a su faire le bon montage juridique. […] Ce que je prévois maintenant est un
peu différent ». Au contraire, pour un participant au projet d’endurance équestre, dans une
réunion au cours de laquelle le groupe ne communiquait rien sur le projet, et son avancement :
« on a l’impression de tourner en rond ».
Et de fait, dans les deux premiers cas, on a pu constater un développement des compétences
important après la formalisation. Pour le troisième cas cité ci-dessus, à défaut d’informations
validées sur les compétences à trois moments du projet, on ne peut que constater l’enlisement
du projet à des moments donnés et le désinvestissement des participants au groupe projet.
3.3.3. La formalisation des acquis
La communication, dans trois projets, a été un excellent moyen de formalisation des acquis. En
effet, les participants au projet se servent de leur expérience, ils repartent de ce qui a été défini,
organisé, réalisé pour expliquer ou rédiger. Il s’agit autant de :
-
leur connaissance du projet, de son sens, du problème à résoudre et des moyens d’y
parvenir (les référents du projet) ;
-
le cheminement qui y a conduit, indiquant les grandes lignes de méthodes employées par
le groupe ;
-
les actions mises en œuvre… et parfois même l’écart entre ce que savaient faire
initialement les participants au groupe projet, et ce qu’ils sont parvenus à faire.
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49
En retour, ils ont des réactions de leurs pairs au sein du groupe projet (lors des retours
d’expérience) ou de l’environnement. Mais aussi, communiquer amène à s’interroger sur ce qui a
été fait, ce qui est projeté. Cela donne une autre vision :
-
du projet ;
de ce qu’on a été capable de mettre en en œuvre ;
de la manière qu’on a eue de s’y prendre.
Ce double retour (environnement et prises de conscience interne au groupe projet) enrichit le travail
sur le projet : il y a affinement des référents du projet, affinement de l’organisation, affinement des
méthodes de production des objets intermédiaires ou de l’objet final. La communication (interne ou
externe) a donc contribué à la structuration de la compétence de deux manières :
-
en répertoriant et en expliquant la manière d’y arriver, ce qui met à jour les imperfections
et permet d’y remédier, ou de s’y prendre différemment à l’avenir ;
-
en faisant prendre conscience aux personnes de ce qu’elles ont produit, de ce qu’elles
ont su faire. Connaissant leurs capacités, les personnes agissent plus aisément dans le
projet.
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Des verbalisations, des explications, des rédactions de documents sur le projet mettent au jour des
savoirs théoriques de contexte, des fondements du projet, ou des méthodes. Ces savoirs sont
réinvestis dans les activités réalisées par la suite. Ces mêmes activités, mises en œuvre avec plus
de compétences, feront l’objet à nouveau de retours sur expérience, ou revue de projet, ou
verbalisations…
------Après avoir mis en évidence, au travers des diagnostics de quatre projets, les modalités
d’acquisition des compétences, revenons sur la première partie de l’hypothèse de départ. On peut à
présent affirmer que les participants à un groupe projet sont amenés à développer des
compétences pour conduire un projet.
En effet, on a vu plus haut qu’ils sont contraints de développer des compétences pour tenir compte :
- de données de contexte
- de contraintes externes (enjeux institutionnels, réalités socio-économiques, disponibilité
de moyens…)
- de contraintes internes (fonctionnement du groupe, difficultés d’avancement du projet).
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QUATRIEME PARTIE
DEVELOPPER DES COMPETENCES GRÂCE AU PROJET :
influence du projet et de sa conduite sur le développement
des compétences
A ce niveau de la réflexion, nous disposons de quelques indications nous permettant d’aborder la
deuxième partie de l’hypothèse. Mais pour vérifier si (et de quelle manière) le projet et sa
conduite par un groupe d’acteurs sont facteurs de développement de compétences, nous allons
confronter au cadre de référence les observations sur les modalités de développement des
compétences.
------1. L’ALTERNANCE IDEE / CONCRETISATION
Comme on a pu le voir, la démarche du projet nécessite une alternance d’activités stratégiques,
d’activités de gestion (organisation) du projet, et d’activités opérationnelles… chaque type
d’activité étant susceptible d’apporter des informations à l’ajustement stratégique, à l’affinage de
l’organisation, ou à la finalisation. Ainsi, la figure du projet permet, en cheminant d’une simple
idée vers une réalisation complexe, de mettre en œuvre des activités de plus en plus complexes.
Il s’ensuit un enrichissement progressif des compétences mises en œuvre.
Pour Claude Levy Leboyer56 (citant Mac Cauley – 1991), affronter une situation nouvelle dans le
cadre d’un projet, ou s’atteler à une opération qui pose problème nous oblige à mobiliser des
savoirs nouveaux, à structurer de nouvelles compétences.
Dans ses travaux sur la formation des adultes, Gérard Malglaive 57 distingue trois formes de
relations entre l’action et la cognition :
 l’action non contrôlée par la cognition (les habitudes) ;
 l’action accompagnée par la cognition ;
 et l’action maîtrisée par la cognition.
Réaliser un projet ne peut se faire en s’appuyant sur les habitudes car la notion de projet fait
appel à la construction d’une solution unique et adaptée. Nous sommes donc ici dans l’action
accompagnée ou maîtrisée par la cognition.
Pour Gérard Malglaive, « le moteur fondamental de l’action accompagnée par la cognition n’est
autre que […] l’alternance des essais et des erreurs extériorisées et intériorisées de l’action58 ».
56
Claude Levy Leboyer, « La gestion des compétences », Editions de la découverte, Paris, 1996.
Gérard Malglaive, « Enseigner à des adultes », PUF, Paris, 1993, PP 180 à 184.
58
Ibid, p 180.
57
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52
« Sur la base de la représentation telle qu’elle est59 » (dans le projet, l’idée de départ, ou par la
suite la stratégie, les objectifs, les représentations de l’objet à construire ou de ses propriétés),
« l’action s’engage ou bien s’anticipe cognitivement. Il en résulte un état effectif ou une
représentation anticipée comme devant résulter de l’acte produit ou à produire. Un nouveau
contrôle sur l’état suivant ou sur sa représentation entraîne la poursuite de l’action ou une rétroaction cognitive ». En effet, lorsque des transformations inhabituelles sont constatées sur les
objets à la suite d’actes, « une rétro-action purement mentale amène à restructurer la
représentation […] Cette restructuration est solidaire de la découverte de nouveaux observables
[…] Le jeu cognitif de la pro-action et de la rétro-action s’arrête lorsque la transformation est
jugée satisfaisante dans la totalité de son déroulement anticipé60 ».
On peut considérer qu’une idée de départ, les objectifs, les caractéristiques de l’objet à construire
ou d’objets intermédiaires… sont des représentations, dans la mesure où ces objets à construire
ne sont pas réels mais projetés. L’action des participants aux groupes projet les amène donc à
constater concrètement des différences entre ce qu’ils avaient prévu par anticipation et qui se
passe réellement. Ils en tirent des enseignements aussi souvent qu’ils constatent des écarts,
dans une alternance que l’on peut schématiser de la manière suivante :
2. LA CONFRONTATION DES REPRESENTATIONS
Selon J.L Le Moigne, cité par Pascale Bossard et Pierre Leclair, « raisonner conception, c’est […]
enchevêtrer une représentation des connaissances et une formalisation des raisonnements ». Et
« La participation au processus de conception d’acteurs venant de fonctions différentes ne peut
réussir véritablement qu’à la condition que chacun comprenne les savoirs et les contraintes des
autres acteurs avec lesquels il doit coopérer61 ». Pour Patrick Mayen, « il n’y a rien de tel que de
constater que les autres n’ont pas les mêmes points de vue62 ».
59
Ibid, p 181.
Ibid, p 182.
61
Bossard Pascale, Chanchevrier Claude, Leclair Pierre (sous la direction de), « Ingénierie concourante, de la
technique au social », Economica, Paris 1997.
62
Intervention de Patrick Mayen (chercheur à l’ENESAD de DIJON au laboratoire de didactique professionnelle) lors
des universités d’été du tourisme rural, cité par le journal SOURCE, n°67 – septembre 2003. Voir aussi le cas des
60
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53
Sophie Gache63 constate, dans son mémoire de diplôme de Cadre de la Fonction Formation, que
la compétence collective dépend de la bonne articulation des représentations des individus dans
les collectifs de travail.
Nous avons en effet constaté plus haut que la présence de plusieurs personnes débattant d’un
projet fait évoluer la représentation de chacun, enrichissant les visions du projet, de ses
fondements, des méthodes d’action, les connaissances nécessaires… visions et connaissances
qui représentent autant de conceptions utiles à l’action.
Les travaux du courant socio-constructiviste et la théorie du conflit socio-cognitif64 mettent bien
en lumière l’importance des interactions sociales. Comme les connaissances que nous détenons
sont subjectives, l’intersubjectivité (induite par l’échange entre plusieurs acteurs) recompose
cette connaissance, l’actualise. Autrement dit, chacun a une représentation différente d’une
connaissance donnée, et la découverte d’un point de vue différent, d’une autre vision des
choses, remet en cause la représentation initiale pour la transformer, l’enrichir.
relations conseiller – agriculteur dans l’article « Concevoir une démarche pour le développement des compétences de
conseil, analyse du travail et évaluation du dispositif d’accompagnement », revue fasçade (INRA, systèmes agraires et
développement), n° 15 – juillet septembre 2002, Versailles.
63
Gache Sophie, « Pour une ingénierie des compétences collectives », mémoire présenté en vue d’obtenir le diplôme
de cadre de la fonction formation, CNAM, Paris, 1998.
64
Aumont, B, Mesnier, R.-M., « Les mécanismes du conflit socio-cognitif », in L'acte d'apprendre, Paris : Puf, pp 191195, 1992.
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3. LA FORMALISATION
Selon Gérard Malglaive, les enseignements tirés des conséquences inhabituelles d’actes
transforment les représentations, les structures mentales gouvernant l’action : « Les structures et
leurs schèmes peuvent rester non conscients […], rendant ainsi l’action efficace sans que les
raisons de cette efficacité soient clairement présentes à l’esprit. Ils peuvent également s’expliciter
et donner lieu à des modèles de l’objet qui s’investissent alors dans l’action et permettent son
contrôle au moyen de calculs explicites anticipant les actes à produire comme la représentation
des états à obtenir…65 ».
Ces représentations nouvelles peuvent s’expliciter par la formalisation, qu’elle soit verbale ou
écrite. En effet, toujours selon Gérard Malglaive, « formaliser, c’est prendre conscience des
ressorts de l’organisation de l’action et manifester cette conscience dans un langage adéquat66 ».
Dans les groupes projet, on a en effet constaté l’importance de la formalisation. Elle permet de
mettre à jour accords et désaccords dans la dynamique du groupe. De plus, c’est bien la
formalisation qui intervient pour relever des écarts entre le prévu et le réalisé et en tirer des
enseignements.
65
66
Ibid p 183.
Ibid p 230.
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55
4. LA DYNAMIQUE DU DEVELOPPEMENT DES COMPETENCES DANS
LE PROJET
Ces trois modalités de développement des compétences dans le cadre du projet peuvent être
complémentaires l’une de l’autre. En effet, la prise en compte des erreurs constatées dans
l’action provient autant de la confrontation des représentations que de la formalisation. De plus,
la formalisation sert autant la confrontation des représentations (lorsque les participants au
groupe projet verbalisent des divergences, ou des convergences de points de vue sur le projet)
que les retours d’expérience (pour remarquer et communiquer les écarts constatés, la cause de
ces écarts…). Il en résulte une combinaison que l’on peut modéliser de la manière suivante :
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5. RETOURS SUR HYPOTHESE
Revenons maintenant sur la seconde partie de l’hypothèse de départ.
Celle-ci postulait que les participants à des groupes projet développent des compétences
grâce au projet car :
-
l’aller et retour entre une idée (une représentation de l’objet à construire) et le
concret (la construction de cet objet) permet de former la compétence dans
l’action ;
-
l’implication de plusieurs acteurs dans un projet (à l’intérieur ou à l’extérieur du
groupe projet) amène les participants à ces groupes projet à confronter leurs
représentations.
Je posais comme probable que le projet lui-même et sa conduite avec d’autres acteurs
seraient des facteurs de développement des compétences.
Ces deux causes de développement des compétences par le projet (l’alternance idée / concret,
et la confrontation des représentations) sont en effet présentes. Mais il en est une troisième que
le diagnostic comparé de 4 projets a permis de mettre à jour : la formalisation. Celle-ci s’avère
importante, qu’elle soit écrite (on aurait souvent tendance à considérer la communication
essentiellement sous cet angle) ou orale, pour une prise en compte par les individus engagés
dans des projets des nouveaux savoirs découverts ou construits dans l’action.
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57
CINQUIÈME PARTIE
ENSEIGNEMENTS EN MATIERE DE CONDUITE DE PROJETS
Le diagnostic de quatre projets, dans le contexte du développement local, a permis de mettre en
évidence un certain nombre de facteurs clef du développement des compétences. Ceux-ci ont
trait aux intérêts en jeu et à la stratégie du projet, à sa gestion, à son organisation, et aux
relations sociales entre les acteurs du projet. Il en découle des pratiques de conduite de projet.
La description des modalités d’acquisition des compétences dans les projets éclaire ces facteurs
clefs.
Les pratiques de conduite de projet décrites dans ce chapitre sont tant utile au projet (puisqu’il
faut développer des compétences au fur et à mesure de l’avancée du projet), qu’à l’acquisition de
compétences. C’est pour faciliter l’alternance essai / erreur (le passage d’une idée à la
concrétisation), la formalisation (la communication interne et externe au projet), et la
confrontation des représentations (la dynamique du groupe projet) que les praticiens en appui
aux projets mettent en œuvre des actions de médiation, de conseil (sur le projet, sur son
management), de régulation, de mise en confiance, de facilitation de la production.
Les propositions qui suivent (assorties de limites et de précautions) vont dans ce sens.
-------
1. LES LIMITES ET PRECAUTIONS
Avant d’aborder toute généralisation, il est important de soulever les limites de cette analyse et
les précautions à prendre. Les facteurs de biais sont susceptibles d’introduire une dose de
subjectivité. Une trop grande spécificité de ce travail pourrait provenir de la méthode
d’investigation et d’analyse, ou d’un contexte d’observation trop particulier.
1.1. Une précaution liée à la méthode d’investigation
Il convient de rappeler ici que les notions de réussite du projet ou d’atteinte des objectifs sont
étrangères à l’objet de mon mémoire. La méthode d’investigation ne prévoit pas une analyse de
la performance des acteurs du projet, qui aurait pu s’observer au travers des résultats obtenus
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58
dans les projets. L’analyse porte donc sur leur compétence. Ne confondons pas compétences
(savoir agir), et la performance qui dépend aussi des moyens disponibles pour le projet (pouvoir
agir), des motivations des acteurs du projet (vouloir agir)67 et du management.
De ce fait, les conclusions qu’on peut en tirer concernent plus les conditions d’apprentissage du
projet et par le projet, que les bonnes manières de réussir un projet multipartenaires. Il n’en reste
pas moins que les compétences mises en œuvre et développées dans le projet vont avoir un
impact sur l’atteinte des objectifs.
1.2. Des limites liées aux facteurs de biais
J’ai redécouvert, durant mes investigations, une vision du projet que j’avais eue dans mon
expérience professionnelle de conduite de projet, ou d’animation de la conduite de projet : une
vision itérative. Cette vision personnelle n’est pas forcément un biais, si elle est largement
partagée.
Dans la mesure où d’autres68 conçoivent le projet comme une succession linéaire d’étapes bien
séparées les unes des autres dans le temps, il a été nécessaire pour moi de vérifier que cette
conception itérative pouvait être partagée. J’ai notamment soumis le résultat de mes
investigations aux personnes enquêtées, à des collègues de travail, à des consultants qui sont
intervenus sur ces chantiers…
De plus, je me suis attaché à repérer des modèles de gestion de projet dans la littérature. Celui
de l’ingénierie concourante décrit bien une superposition des axes d’élaboration, de phasage, et
de raffinement de la solution.
1.3. Des limites liées aux spécificités du développement local
Les projets observés ont une finalité économique certes, mais ils s’insèrent dans des logiques de
développement local. Le milieu observé n’est pas celui de l’entreprise mais un milieu
sensiblement différent : ces particularités, décrites dans le cadre de référence, appellent des
remarques quant aux limites de ce travail de mémoire.
Le tableau ci dessous tente de décrire quelques différences entre les deux contextes (entreprise
et développement local).
67
Voir à ce propos le cadre de référence, partie n°3 du mémoire.
On le voit notamment au travers des auteurs (la littérature sur la gestion de projet regorge de référents « linéaires »),
dans la pratique de consultants, dans des modèles de la gestion de projet. Voir à ce propos l’ouvrage Sandrine Fernez
Walch, « Management de nouveaux projets, panorama des outils et des pratiques ».
68
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59
Particularités du contexte du
développement local
Caractéristiques du contexte de
l’entreprise
Les projets disposent (ou se donnent) de
longs délais.
L’entreprise subit de fortes contraintes de
temps, liées à la disponibilité de ressources,
à la stratégie commerciale, ou à la rentabilité
des capitaux engagés en début de projet.
L’organisation du groupe est auto-prescrite
ou largement partagée.
L’organisation peut être prescrite par la
hiérarchie. Cela peut limiter la motivation des
participants au groupe projet (voir ci dessous
la prescription des objectifs).
L’organisation des fonctions de management
est souple.
Il existe une séparation nette des fonctions
de maîtrise d’ouvrage et de maîtrise d’œuvre
(plus courante dans le monde de
l’entreprise), assortie d’une délégation claire.
Cela facilite le travail du chef de projet.
Les objectifs peuvent être fortement prescrits
par la hiérarchie. Les acteurs du projet
Les groupes projet se prescrivent eux-mêmes s’adaptent alors aux contraintes qu’ils
les objectifs.
rencontrent, s’appuyant sur des marges de
manœuvre, créant ainsi des écarts entre
prescrit et réel69.
Les fonctions de management sont affectées
de manière évolutive.
L’évolution du projet peut nécessiter des
changements de personnes dans le
management, alors que ce type de décision
échappe au groupe projet dans une
entreprise.
Ces différences nous imposent de prendre les conclusions du présent mémoire avec beaucoup
de précautions s’il fallait les appliquer dans le domaine de l’entreprise.
Erhardt Friedberg, dans sa postface « prescription et ordre moral » de l’ouvrage collectif « coopération et
conception », pointe l’importance des rapports entre l’ingénieur (dans son rôle de prescripteur) et le sociologue, ainsi
que les rapports entre formel et informel, explicite et implicite.
69
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60
2. PRECONISATIONS :
ACCOMPAGNER LE DEVELOPPEMENT DES COMPETENCES DANS
LES PROJETS
Dans les diagnostics des quatre projets observés, on a pu relever un certain nombre de facteurs
clef du développement des compétences :
Les enjeux et finalités
La prise en compte des enjeux personnels internes au groupe projet ou des enjeux externes est
importante pour la régulation de la dynamique du groupe projet, pour la motivation des
participants, et pour l’accès à des moyens. Un minimum de compréhension (voire de partage)
par tous des fondements du projet facilite le fonctionnement du groupe en mode coopératif.
La conduite du projet
Avancer dans une démarche progressive (par la progressivité des objectifs, par la prise en
compte des aléas, par l’ajustement permanent…) nécessite une culture du projet. Si elle peut
s’acquérir en cours de projet, il est important au départ que les acteurs du projet soient guidés et
rassurés dans cette démarche.
L’organisation et le management du groupe projet
La composition du groupe projet (voire son ouverture), le climat de confiance et le droit à l’erreur,
la dialectique coopération / confrontation, la prise de décision, l’équilibre maître d’œuvre / maître
d’ouvrage, la mise en situation d’apprentissage, la conduite d’opérations nouvelles pour les
participants sont autant d’éléments de fonctionnement du groupe déterminants sur le
développement des compétences.
La communication
Si la communication a un rôle important pour la conduite du projet, elle est aussi une occasion
importante de formalisation des acquis. Communiquer sur le projet, à l’intérieur ou à l’extérieur du
groupe, à l’oral ou à l’écrit, c’est un bon moyen de prendre conscience d’avancées dans un
contexte complexe et incertain.
Force est de constater que la formation, ni même la formation-action, ne sont les seules solutions
pour apporter des compétences au groupe projet. D’après les expériences relatées plus haut, on
peut notamment constater que le développement des compétences peut être facilité par des
actions sur la conduite du projet, sur la dynamique de groupe, ou l’acquisition de savoirs.
Divers types d’interventions, qui peuvent se combiner entre elles, sont alors concernés. Le
tableau page suivante reprend les postures d’accompagnement de projet de nature à faciliter
l’acquisition de savoirs ou de compétences.
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61
Actions facilitant L’ACQUISITION DE SAVOIRS
Postures
d’ACCOMPAGNEMENT
DES PROJETS
INGENIERIE DE
PROJET
CONSEIL
EXPERTISE
Liées à la dynamique
sociale
Organiser le groupe projet
pour le mettre en situation
d’écoute, d’échanges, et
de confrontation des
représentations
Apporter des exemples
d’organisation similaire
Liées à la gestion du
projet
Facteurs facilitant
L’ACQUISITION DE
COMPETENCES
Organiser le projet avec
le groupe projet (de
l’idée à la
Concevoir avec le groupe
concrétisation)
projet
Apporter des exemples
de projets similaires
Animer les échanges
Faire émerger des accords
sur les objectifs et les
Proposer des méthodes
Faire agir
méthodes
de gestion du projet
ANIMATION DU
PROJET
Assurer une médiation
entre le projet et son
environnement
Faire produire au groupe
des référents propres à
leur projet
Faire appliquer les
procédures du projet
Faire évoluer les
procédures du projet
Renforcer les pratiques
de management de
projet
COACHING
Renforcer des pratiques
de management du groupe (notamment les allers/
TUTORAT DES
projet (maître d’œuvre et
retours entre définition
« MANAGERS » DU
maître d’ouvrage)
stratégique,
PROJET
organisation et
finalisation)
FORMATIONACTION
MEDIATION
COGNITIVE70
MEDIATION
RELATIONNELLE71
FORMATION
« CLASSIQUE »
Mettre au jour les savoirs
existants parmi les
membres du groupe
Faire évaluer
Faire ajuster
(accompagnement)
Accompagner les
managers du projet dans
leur action (sur le projet,
avec le groupe projet)
Susciter des évaluations /
ajustements permanents
et partagés
Faire mettre en actes des
apports méthodologiques
Guider la production de
méthodes du projet par Faire agir le groupe à
Faire émerger des accords le groupe
partir des méthodes qu’il a
sur les concepts, objectifs
produites
et méthodes
Décentrer les visions
Guider pas à pas les
du projet en « allant
Faire produire au groupe
participants au groupe
voir ailleurs »
des référents propres à
projet dans la mise en
son projet
œuvre
Apporter des référents
utiles au fonctionnement
du groupe
Apporter des référents
utiles au projet et à sa
gestion
La médiation cognitive est une forme d’intervention, privilégiant la découverte par les personnes en formation ellesmêmes des savoirs. Le formateur se comporte donc ici comme un médiateur entre les stagiaires et les connaissances,
concepts, théories, méthodes, et savoir-faire à acquérir.
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La médiation relationnelle permet d’accompagner le conflit socio-cognitif : c’est par l’action sur les relations entre des
individus que l’intervenant facilite la confrontation des représentations, l’échange de savoirs, l’acquisition de
compétences.
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CONCLUSION
Ainsi donc, un projet chemine mieux avec des compétences. Mais on a vu aussi qu’un projet
facilite la progression des compétences des acteurs qui s’y impliquent. On peut faire le pari
qu’après la finalisation du projet, qu’il soit réussi ou pas, il en reste quelque chose... que les
acteurs du projet aient développé leurs capacités pour les réinvestir avec plus de compétences
dans d’autres projets, ou dans d’autres actions collectives locales.
La thématisation, décrite par Gérard Malglaive comme complément de la formalisation dans la
structure dynamique des capacités, vient enrichir les capacités cognitives par généralisation et
décontextualisation de savoirs formalisés. Ceux-ci peuvent alors être réinvestis dans l’action,
dans d’autres contextes. A condition de thématiser les acquis de la conduite de projets, leurs
acteurs pourraient alors se resservir de ce qu’ils y ont appris dans d’autres projets, dans d’autres
« entreprises » mobilisant des capacités similaires.
Et de fait, il n’est pas rare de voir d’anciens porteurs de projet s’impliquer dans la vie publique,
nombre d’entre eux se retrouvent dans des conseils municipaux, voire aux commandes d’une
collectivité (commune, communauté de communes, syndicat de communes), ou d’une
organisation professionnelle. Probablement grâce à des capacités acquises en partie dans la
conduite de leur projet.
Développer des compétences dans et par le projet n’est pas propre aux projets multipartenaires.
Parallèlement aux investigations de ce mémoire, j’ai pu observer la conduite d’un projet dans une
entreprise agro-industrielle. Le groupe projet, constitué de managers de proximité et de
directeurs de site, était chargé de préparer l’ouverture d’un nouveau site de production, ce qui les
a amenés à travailler sur l’organisation de l’entreprise. Ils ont pour cela été accompagnés dans la
concrétisation de deux intentions (un nouveau site, une organisation améliorée), et dans la
formalisation d’outils (plans, fiches de fonction, procédures). Ils ont échangé leurs visions de
l’organisation et de la fonction de management dans le cadre de réunions de travail animées par
un consultant en management et organisation. On retrouve bien ici les trois modalités de
développement des compétences pour et par le projet, ainsi que des actions d’appui au projet. Il
en est resté quelque chose, des compétences acquises à cette occasion ont été ré-investies :
après le projet, des habitudes de fonctionnement en concertation se sont installées, le contenu
de l’emploi des managers de proximité s’est clarifié pour eux et s’est enrichi d’activités de
coordination.
Ces deux exemples de réinvestissement des capacités acquises tendent à montrer que le projet
en tant qu’organisation temporaire met les individus en situation d’apprentissage. Savoir
comment les compétences acquises dans le projet peuvent enrichir durablement les capacités
des individus, voilà qui donnerait à la figure du projet une réelle dimension formatrice au bénéfice
à la fois de l’action entreprise, et des personnes qui y participent.
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BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGES CONSULTES :
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« L'acte d'apprendre », Paris : Puf, pp 191-195, 1992.
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« La pédagogie : une encyclopédie pour aujourd'hui », Paris, ESF éditeur, 1993.
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25 - Barrel Yvan et Guyon Christian, « Un leader, des styles de management », Revue française
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26 - Bernoux Philippe, « Sociologie des organisations, nouvelles approches », Cahiers de
l’ANVIE, Sciences humaines n° 64, 1996, pp 47 – 51.
27 - Boutinet Jean-Pierre, « Les multiples facettes du projet », dossier « Faire des projets »,
Sciences humaines n°39, mai 1994, pp 20 – 24.
28 - Cerf Marianne, Maxime Françoise et Mayen Patrick, « Concevoir une démarche pour le
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29 - Chanard Alain, Lusson Jean-Marie, Proust Odile, Vaire Sylvain, « Acteurs locaux et création
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30 - Collectif : « Formation d’adultes et développement local », Paris, L’Harmatan, Revue POUR
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31 - D’Almeida Nicole et Nutkowicz Alain, « Où en sont les projets d’entreprise ? », Sciences
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32 - Dortier Jean-François, « Faire des projets. Du rêve à l’action », Sciences humaines n°39,
mai 1994, pp 18 – 19.
33 - Dortier Jean-François, « Les savoirs invisibles. L’intelligence au quotidien », Sciences
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34 - Gomez Yves, « Information et conventions : le cadre du modèle général », Revue française
de gestion n° 112, janvier – février 1997, pp 64 – 77.
35 - Lissilour Etienne « Organisation et management : fondements et analyses. De la théorie des
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36 - Minvielle Yvon, « Construire la notion de compétence », dans « Territoire et formation »,
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37 - Morin Francis, « Compétences, territoires et création d’activité », dans « territoire et
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38 - Senault Patrick « Formation développement, origine, principes, méthodes », Revue Pour,
Paris, GREP, 2003.
MEMOIRES CONSULTES :
39 - Dassonville Béatrice, « accompagner le changement organisationnel vers un fonctionnement
par projet », mémoire de DESS ‘‘Processus de formation et acquisition de compétences dans le
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40 - Esposito Giovanna - Eymat Dephine - Kolosy Katalin, « Le concept de développement local:
réflexion pour une définition théorique du concept », mémoire thématique collectif DESS COCITS
– Université Paris VIII, juillet 1997
41 - Gache Sophie, « Pour une ingénierie des compétences collectives », mémoire présenté en
vue d’obtenir le diplôme de cadre de la fonction formation, CNAM, Paris, 1998.
SITES VISITES :
Approches du développement et du projet, Université de Meknes,
http://fadpdr.free.fr/module1/Module1.html
Caspar René, « Le développement territorial : petite ou grande histoire ? » , Sol et Civilisation,
2001.
http://www.soletcivilisation.fr/teco/l22caspar.html
Concepts, méthodes et expériences sur le développement local.
http://globenet.org/horizon-local/
Durafourg Natacha, Vray Dominique, « Guide du pilotage du programme ‘‘Nouveaux services –
emplois jeunes’’ à l’usage des collectivités territoriales, des questions pour agir », réseau
ANACT, consultable sur le site www.anact.fr
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