CHAPITRE 10 : L’AVENIR DES RESSOURCES EN EAU
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Chapitre 10 : L’AVENIR DES RESSOURCES EN EAU
Table des matières
1. MEILLEURE CONNAISSANCE OU MEILLEURE EVALUATION ? .................................... 10-2
2. REEVALUATIONS DES RESSOURCES EXPLOITABLES ET UTILISABLES ....................... 10-3
3. ET SI LE CLIMAT CHANGEAIT ? ................................................................................. 10-4
3. 1. Précipitations ........................................................................................................................................... 10-4
3. 2. Ecoulements ............................................................................................................................................. 10-5
3. 3. Hausse du niveau de la mer ................................................................................................................. 10-7
4. DES RISQUES DE DENATURATION SONT PLUS PROBABLES ET PROCHAINS ............. 10-8
4. 1. L’occupation du sol ................................................................................................................................ 10-8
4. 2. L’érosion des sols et la désertification .............................................................................................. 10-9
4. 3. L’exploitation des ressources renouvelables peut nuire à leur renouvellement ................ 10-10
4. 4. Le dépérissement des ressources en eau irrégulières maîtrisables ........................................ 10-10
4. 5. Les dégradations de qualités ............................................................................................................. 10-10
ANNEXE ......................................................................................................................................................... 10-12
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Au XXIème siècle, du moins durant son premier quart, les ressources en eau des pays
méditerranéens seront-elles celles d’aujourd’hui ?
Les ressources en eau sont d’abord ce qu’on en sait : une première réponse se rapporte
donc à l’état futur et au progrès escompté des connaissances sur ce que la nature offre
aux méditerranéens. Mais il ne s’agira pas seulement d’en savoir plus, mais de choisir à
meilleur escient le niveau de pression que les eaux de la nature peuvent supporter sans
dégradation de leur potentiel utilisable ni de leur fonction dans la biosphère : les
ressources futures seront surtout mieux évaluées, notamment dans une optique de
gestion durable.
Les réévaluations ne pourront faire abstraction des sensibilités du renouvellement
naturel des ressources en quantité comme en qualités aux impacts du développement
humain. En premier lieu, aux effets du changement climatique global en perspective sur
la région méditerranéenne ; mais aussi et sans doute plus immédiatement aux
incidences de l’évolution des sociétés méditerranéennes, en population et en mode de
vie et de développement.
1. MEILLEURE CONNAISSANCE OU MEILLEURE EVALUATION ?
La « connaissance des ressources en eau » naturelles, fruit des investigations et
observations hydrologiques et autres, n’est pas achevée ni figée. Ses défauts et
incertitudes actuels ont été rappelés au chapitre 1er. Le prochain quart de siècle verra
certainement les connaissances hydrologiques progresser, notamment sur la variabilité
des régimes (ne serait-ce que grâce à l’allongement des périodes d’observation) et sur
la géographie détaillée des apports (grâce au perfectionnement et à la généralisation
des modélisations), en somme sur la dynamique des « hydrosystèmes » à toutes
échelles. Ces progrès seront souvent interactifs avec la croissance des exploitations et
des utilisations, notamment dans le cas des eaux souterraines, donc de la part des
ressources « sous contrôle ».
La tendance aux révisions en hausse des estimations de ressources nationales ou
régionales à mesure que les connaissances de base devenaient plus complètes,
remarquée dans le passé (chap. 1er, Figure 1-16) pourrait se prolonger encore en
quelques pays ; néanmoins une stabilisation des estimations globales et moyennes est
à prévoir, à terme assez proche, au profit d’un affinement spatio-temporel.
C’est la connaissance qualitative des ressources qui devrait progresser le plus grâce à
l’expansion des observations ad hoc (en nombre de points, en fréquence, en variété de
« paramètres » analysés) et aux avancées de compréhension de la genèse et des
sensibilités des qualités des eaux, liées aux efforts de prévention des pollutions, mais
aussi de préservation des milieux de vie aquatique autant que de l’eau-ressource.
Une meilleure possibilité d’évaluation des ressources en eau réellement exploitables et
utilisables devrait en résulter et celles-ci devraient davantage prendre le pas sur les
ressources dites « naturelles » (cf. chap. 2) pour les comparaisons aux demandes
projetées. Cependant les critères de ces évaluations resteront variés et eux-mêmes
évolutifs.
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2. REEVALUATIONS DES RESSOURCES EXPLOITABLES ET UTILISABLES
Les évaluations de ressources exploitables et utilisables étant subordonnées à différents
critères (cf. chap. 2), c’est l’évolution de ces critères et de leurs priorités qui sera le
principal moteur de réévaluation, d’abord en ce qui concerne les ressources
renouvelables internes.
Deux tendances contraires pourront s’affirmer suivant le critère le plus sujet à révision et
le plus déterminant.
Réévaluation en baisse par prise en compte de contraintes environnementales de
préservation de la nature plus fortes. Tendance généralement dominante dans les
pays du Nord
Réévaluation en hausse par relèvement des plafonds des coûts d’aménagement et
d’exploitation (y compris des coûts externes) jugés supportables, sous l’effet surtout
de la raréfaction des disponibilités, mais néanmoins dans les limites des capacités
économiques de chaque pays, qui resteront inégales.
Ou encore grâce à des progrès d’accessibilité permis par des innovations
techniques améliorant le rendement de l’aménagement des eaux (par exemple :
réduction des pertes par évaporation ou de l’envasement des réservoirs) ou des
modes d’exploitation (par exemple : techniques de forage et de pompage d’eau
souterraine profonde, captage des émergences d’eau douce sous-marine…).
Parfois aussi par abaissement des exigences de qualité, pour certains usages du
moins. En particulier des ressources en eau saumâtre utilisables pourraient être
davantage prises en compte dans certains pays : par exemple en Israël, les
quantités d’eaux saumâtres utilisées croîtraient de 125 hm3/an en 1997 à 180 en
2020 (Israël Water Commission, 1998).
Par ailleurs la prise en compte, dans certains cas, des « ressources secondaires »,
c’est-à-dire de la possibilité de remobiliser des retours d’eau, notamment de drainage
(exemple en Egypte) peut conduire à évaluer des ressources utilisables supérieures aux
ressources naturelles.
Cette tendance est plutôt dominante dans les pays du Sud et de l’Est les ressources
renouvelables estimées exploitables tendront de plus en plus à égaliser les ressources
naturelles dont elles sont déjà proches, et qui constituent leur borne supérieure, du
moins en tant que ressource renouvelable primaire.
Ces tendances divergentes pourraient atténuer un peu l’écart Nord-Sud.
Les ressources non renouvelables, notables essentiellement dans plusieurs pays du
Sud (cf. Chapitre 2), pourront elles-aussi être sujettes à réévaluation d’exploitabilité
suivant les plans adoptés : exploitabilité accrue à court ou moyen terme, au détriment de
la durée à long terme, ou l’inverse.
Les ressources externes exploitables sont également sujettes à des risques
d’appauvrissement à des consommations croissantes et/ou à des détériorations de
qualités dans les pays amont « fournisseurs » (par exemple celles de la Grèce). Ou
encore à des tensions géopolitiques. Elles pourraient par contre être accrues par des
aménagements ad hoc en pays amont, nécessairement en concertation et partage des
gains entre pays amont et aval. Ce serait le cas des ressources externes de l’Egypte si
les aménagements réducteurs de pertes par évaporation projetés et amorcés au
Soudan (canal de Jonglei) étaient réalisés au bénéfice commun des deux pays. Dans
cette hypothèse, à prendre en compte dans un scénario optimiste, les ressources
externes de l’Egypte augmenteraient en stade final de 9 km3/an, donc de 16 %. Ce
serait le seul exemple majeur dans le bassin méditerranéen.
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3. ET SI LE CLIMAT CHANGEAIT ?
Quels seraient les effets du changement de climat imputable à l’effet de serre
additionnel, en perspective au cours du XXIème siècle, sur les ressources en eau ?
Les ressources en eau naturelles sont à l’évidence fortement conditionnées par les
variables climatiques qui déterminent les apports (précipitations, températures), donc
sensibles à des changements des moyennes qui servent à définir les climats ; toutefois,
des modifications de régime à moyenne égale auraient sans doute plus d’incidences sur
les ressources que des changements de moyennes avec le même gime.
Les études et recherches sur le changement climatique et ses conséquences se sont
multipliées au cours de la dernière décennie dans le monde entier (cf. travaux de l’IPCC)
et commencent à être régionalisées, notamment en région méditerranéenne (Jeftic & al.
1992, 1996 ; Palutikof & al. 1992, 1996 ; Rosenzwieg & al. 1997 ; Karas 1997 ; Medias-
France 2001 cf. Bibliographie annexe).
La résolution spatiale des modèles climatiques globaux reste cependant encore assez
lâche et assez loin de l’échelle pertinente pour l’évaluation des ressources par bassin.
Les estimations de changement s’en tiennent par ailleurs, pour la plupart, à celles des
moyennes annuelles, et elles décrivent des changements d’état moyen sans préciser la
dynamique d’évolution ni les horizons d’occurrence probables.
La prospective du changement climatique s’attache au XXIème siècle et les horizons
visés, lorsqu’ils sont explicités ce qui est rare vont bien au-delà de 2025 : 2050-2060
en France, pour le bassin du Rhône (GICC), par exemple.
Comme le résume bien la synthèse de Médias-France pour le Plan Bleu :
« Sur le bassin méditerranéen, les modèles sont peu nombreux. La complexité de sa
topographie, de ses déterminants climatiques et les interférences nombreuses avec les
activités humaines conduisent à des conclusions parfois contradictoires et très
incertaines ; ainsi par exemple les conclusions de certains travaux de recherche
régionaux évoquent un risque de diminution des précipitations sur la rive sud de la
Méditerranée alors que d’autres y prévoient des précipitations accrues. D’une manière
générale, les résultats concernant les températures semblent plus fiables que ceux sur
les précipitations et les évènements extrêmes (tempêtes, sécheresses,…) ».
En effet, les experts sont beaucoup plus diserts sur les changements de température
première variable affectée que sur ceux des précipitations (traduites seulement en
écart relatif par rapport aux moyennes actuelles, uniformément appliqué à de grandes
régions indépendamment des gradients pluviométriques) et encore moins sur les
changements des variables hydrologiques (total runoff) dont dépend l’estimation des
ressources en eau naturelles renouvelables. Ces indications sont d’une valeur limitée
pour procéder à des réévaluations prévisionnelles de ressources qui devraient se baser
sur des simulations de régime d’apports au moins mensuels, voire de préférence (en
région méditerranéenne) décadaires ou journaliers.
Malgré ces réserves, qui invitent à beaucoup de prudence, il y a lieu de considérer les
résultats des premiers essais de pronostics pour les pays méditerranéens, ou du moins
les sous-régions.
3. 1. Précipitations
Les scénarios de changement des précipitations moyennes ne prévoient pas tous ni
partout, des écarts de même sens. Les projections de Polutikof et Wigley (1996) pour
2030-2100 prévoient des diminutions de 10 à 40 % au Sud, dans la plus grande partie
de l’Afrique septentrionale, ainsi que dans le Sud de l’Espagne, de 10 % en Espagne
centrale, France méridionale, Grèce et au Proche-Orient, mais un accroissement,
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jusqu’à 20 %, en Italie centrale. Pour toute la région les projections de Rosenzwieg et
Tubiello (1997) prévoient une augmentation générale suivant un modèle, mais une
diminution de 1,5 à 7,3 % après 2020 suivant un autre. Les moyennes saisonnières font
aussi l’objet de projections divergentes au Nord : accroissement (+ 15 %) des pluies
d’hiver en France, diminution (- 5 %) en Espagne (MIMAM 1998).
Ainsi que le résume bien J. Karas (1997) :
« The patterns of precipitation produced by different model runs are so divergent that it
is difficult to have confidence in any single projection. »
Les experts s’accordent néanmoins, pour la plupart, sur deux tendances futures
dominantes :
zonalité plus accusée : accroissement en moyenne au Nord des 40e et 50e
parallèles, donc en France, en Italie, dans les Balkans du Nord et en Turquie ;
diminution plus ou moins prononcée au Sud, Espagne, Italie du Sud, Grèce,
Chypre, et tous les pays du Sud.
saisonnaliplus contrastée : accroissement des pluies moyennes d’hiver, de l’ordre
de 10 % (surtout au Nord et à L’Est), diminution des pluies moyennes d’été, de 5 à
15 %, en seconde moitié du XXIème siècle, en tout cas à l’horizon 2100.
En corollaire une aggravation des sécheresses conjoncturelles, en fréquence et en
ampleur, est généralement admise, sans toutefois qu’on puisse préciser dans quelle
mesure.
Concluons avec J. Karas (1997) que « Clearly, there remains considerable uncertainty
over how precipitation will change over the Mediterranean region in response to the
changing composition of the atmosphere. However, the balance of evidence seems to
suggest reductions in precipitation over much of the region, with a possible transitional
period for some areas due to aerosol effects.”
3. 2. Ecoulements
Les résultats d’exercice disponibles sont plus rares et concernent surtout l’Europe :
L’Espagne MIMAM 1998, CEDEX 2000). Avec + de température moyenne et
5 % de précipitations moyennes (uniforme), l’écoulement diminuerait de 20 % en
moyenne, mais de 25 à 50 % au SE, dans les bassins de l’Ebre et du Guadiana (une
carte détaillée des écarts dans cette hypothèse a été établie).
La France un exercice local de simulation par modélisation a été tenté sur deux
sous-bassins du Rhône : l’Ain (Jura, régime océanique), l’Eyrieux (bordure du Massif
central, régime méditerranéen), avec comme hypothèses pour 2050 :
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