Innovation et conservatisme : le patronat girondin autour de la création de la
Société philomathique de Bordeaux et de ses expositions (dans les années
1800-1840)
Hubert Bonin, professeur d’histoire économique à l’Institut d’études politiques de Bordeaux et à l’UMR
GRETHA-Université Montesquieu Bordeaux 4 [www.hubertbonin.com]
Le patronat girondin aura été vilipendé à chaque moment de l’histoire économique où des
tensions ont pesé sur le dynamisme de la croissance et de l’emploi en France comme si la
Gironde avait sans cesse tardé à saisir le train de l’expansion et en redescendait plus tôt et
plus longuement en période de récession ou de crise structurelle. Et il a été de bon ton
dans le monde académique d’évoquer la désindustrialisation, la sous-industrialisation, la
langueur de l’esprit d’entreprise, le sous-investissement, le caractère étriqué des initiatives
stratégiques. Ces anathèmes et ces lieux communs ont été avancés de façon à la fois facile
et fallacieuse en oubliant des données de base toutes simples : l’éloignement par rapport
aux pôles de ressources minières
1
et textiles
2
des révolutions industrielles, le poids de
l’économie rurale traditionnelle et notamment de la forêt et du vin, la sous-
industrialisation du Sud-Ouest dans son ensemble
3
et une localisation dans l’un des « culs-
de-sac » de l’Europe, marqué par un enclavement par rapport aux grands axes de transport
et éloigné du croissant reliant l’Angleterre aux régions du Pô ou du moyen Danube à
travers l’Europe du nord-ouest et du centre-ouest. Vouloir appliquer à la Gironde des
grilles d’analyse valables pour les régions industrielles des deux révolutions industrielles
successives relève de la forfaiture intellectuelle, et il a toujours été évident que, après le
« déclin » irrémédiable de l’économie transatlantique articulée autour du système de la
traite (en direct et surtout indirectement, en pôle d’approvisionnement de la Côte
d’Afrique et du monde des planteurs des Caraïbes), Bordeaux ne pouvait plus prétendre
agir en force de levier de l’économie-monde en cours de remodelage.
C’est dans un cadre limité, celui de capitale d’une région rurale alimentant l’arrière-pays en
productions industrielles pour ses consommations intermédiaires ou transformant une
partie de ses ressources naturelles, de port pouvant participer à l’économie du négoce
ultramarine, et de plate-forme régionale de prestations de services industriels au monde
citadin qu’il faut replacer l’histoire économique girondine. Celle-ci a pu bénéficier par
surcroît d’investissements extérieurs, nationaux (Schneider dans les chantiers navals, des
sidérurgistes dans telle ou telle usine de transformation du métal) ou étrangers (d’IBM aux
deux usines Ford), mais la construction d’un environnement favorable à l’affirmation de la
force d’attraction des zones industrielles n’a rien à voir avec le dynamisme patronal
girondin mais bien plutôt de l’aménagement du territoire, spontané ou maîtrisé, même si
1
Malgré les « minières » du Périgord ou des Landes : cf. Yvon Lamy, Hommes de fer en Périgord
au XIXe siècle, Lyon, La Manufacture, 1987.
2
Cf. Gérard Gayot, Les draps de Sedan (1646-1870), Paris, EHESS, 1998. Serge Chassagne, Le coton
et ses patrons en France, 1760-1840, Paris, EHESS, 1991. Giovanni-Luigi Fontana & Gérard Gayot
(dir.), Wool : products and markets (19th-20th century), Padua, CLEUP, 2004
3
Jean-Pierre Poussou, « Le Sud-Ouest de la France est-il au XIXe siècle une région sous-
industrialisée et sous-développée ? », in L’économie française du XVIIIe au XXe siècles. Perspectives
nationales et internationales. Mélanges offerts à François Crouzet, Presses de l’Université de
Paris-Sorbonne, 2000, pp. 643-670. François Crouzet, « Les origines du sous-développement
économique du Sud-Ouest », in L’économie française du XVIIIe au XXe siècles. Perspectives
nationales et internationales. Mélanges offerts à François Crouzet, Presses de l’Université de
Paris-Sorbonne, 2000, pp. 335-344.
2
des patrons ont été influents à la Chambre de commerce (et d’industrie)
4
quand des
décisions d’aménagement y ont été prises. Cet essai aborder ces thèmes de l’esprit
d’entreprise
5
et du conservatisme du patronat girondin en se concentrant sur les réponses
apportées par aux mutations de son environnement économique pendant le démarrage de
la première révolution industrielle, donc en travaillant sur les décennies accompagnant la
création de la Société philomathique en 1808 et les huit expositions qu’elle organise (1827,
1828, 1830, 1838, 1841, 1844, 1847 et 1850)
6
de façon modeste, avant leur transfert sur les
Quinconces à partir de celle de 1854.
1. Choc et déclin de l’esprit entrepreneurial ?
Autour de 1808 et grosso modo jusqu’aux années 1830/1840, le choc de la perte de la
colonie clé des Caraïbes et de l’effondrement du système de la traite sapent les bases de la
prospérité de l’économie portuaire girondine
7
- bien au-delà des conséquences des
mouvements révolutionnaires eux-mêmes
8
. Le conservatisme domine, dans les idées,
puisque nombre de patrons sont favorables à la Restauration l’un des dirigeants de
Marie-Brizard accueille les Anglais en grand uniforme de la Garde nationale en 1814 et,
surtout, rêvent ou se satisfont d’un retour au « système économique » antérieur ; les deux
patrons de Marie-Brizard vivotent dans leur facile commerce d’alcools tout en consacrant
leur temps à des collections ; des confrères envoient encore quelques bateaux tâter de la
traite des Noirs en essayant de contourner l’embargo britannique au large des côtes
africaines. Silvia Marzagalli a narré « l’américanisation » provisoire de certains marchands
girondins qui se sont installés aux États-Unis pour devenir des « neutres » et continuer
leur négoce transatlantique malgré le blocus
9
, tandis que la course attirait quelques
4
Paul Butel (dir.), Jean-Claude Drouin, Georges Dupeux & Christian Huetz de Lemps, Histoire de
la Chambre de commerce et d’industrie de Bordeaux, 1705-1985, Bordeaux, CCIB, 1988.
5
Cf. Rondo Cameron, « L’esprit d’entreprise », in La France et le développement économique de
l’Europe, 1800-1914, Paris, Seuil, 1971 (Princeton, 1961). David Landes, « French entrepreneurship
and industrial growth in the 19th century », Journal of Economic History, mai 1949, 9, n°1, pp. 45-
61. Hélène Vérin, Entrepreneurs, entreprise. Histoire d’une idée, Paris, Presses universitaires de
France, 1982. AFHE, Entreprises & entrepreneurs, XIXe-XIXe siècles, Paris, Presses de l’université de
Paris-Sorbonne and AFHE, 1983.Patrick Verley, Entreprises et entrepreneurs du XVIIIe siècle au
début du XXe siècle, Paris, Paris, Hachette, 1994.
6
Cf. leur évocation dans : Christelle Lozère, Bordeaux colonial, 1850-1940, Bordeaux, Éditions Sud
Ouest, 2007.
7
Paul Butel, « Crise et mutation de l’activité économique à Bordeaux sous le Consulat et
l’Empire », Revue d’histoire moderne & contemporaine, juillet-septembre 1970, pp. 540-558.
Michel Figeac, Histoire des Bordelais. Tome I. La modernité triomphante (1715-1815), Bordeaux,
Mollat & Fédération historique du Sud-Ouest, 2002. Paul Butel, « Les difficultés du commerce
maritime bordelais sous le Directoire. L’exemple de l’adaptation à la conjoncture de guerre
maritime », Congrès national des sociétés savantes, 1969, n°94, tome II, pp. 331-344.
8
Jean-Claude Perrot (dir.), Voies nouvelles pour l’histoire économique de la Révolution, Annales
historiques de la Révolution française, 1982. Hubert Bonin, « La Révolution française a-t-elle brisé
l’esprit d’entreprise ? », L’Information historique, n°5, 1985, pp. 193-204. François Crouzet, « Les
conséquences économiques de la Révolution française. Réflexions sur un débat », in Jean-Charles
Asselain (dir.), volution de 1789, guerres et croissance économique, special issue, Revue
économique, tome 40, n°6, novembre 1989, pp. 1189-1203. Louis Bergeron, “Les milieux d’affaires
la guerre et la paix (1792-1815)”, in Erik Aerts & François Crouzet (dir.), Economic Effects of the
French Revolutionary and Napoleonic Wars, Proceedings of the tenth international economic
history congress, Leuven University Press, 1990, pp. 14-21. François Caron (dir.), Entreprises et
Révolutions, numéro spécial, Histoire, économie et société, premier trimestre 1993.
9
Silvia Marzagalli, « Un Américain à Bordeaux : Joseph Fenwick, premier consul des États-Unis »,
Revue historique de Bordeaux, 2002, n°1, pp. 73-90. Silvia Marzagalli, « Ralliement et résistance à
la législation napoléonienne : les cas des négociants de Bordeaux et de Hambourg », in Marc
Agostino, Françoise Bériac & Anne-Marie Dom (dir.), Les ralliements, Bordeaux, CROCEMC, 1997,
3
armateurs hardis
10
. D’autres patrons ont eux aussi vécu à court terme, en purs tacticiens,
sans méditer sur de nouveaux « modèles économiques », car ils ont pu tirer parti des
affaires connexes procurées par la guerre, en accompagnant le ravitaillement des troupes
en Espagne, par exemple, en s’insérant dans des circuits plus ou moins « gris » de lettres
de change tout comme les Rothschild de Londres, rappelons le, faisaient passer par la
France de quoi financer les troupes britanniques en Espagne… Bref, une économie de
« coups », voire de parasitisme par rapport aux flux d’affaires créées par les guerres
11
, tend
à prédominer en toute improvisation, qui révèle plus d’agilité et d’habileté que
d’innovation stratégique. Mais, après tout, c’est toujours de l’esprit d’entreprise, car le
capitalisme est tout autant constitué de « spéculations » que de projets d’investissement.
Cet état d’esprit de relatif attentisme est confirmé enfin par le rapport à l’État, dont
nombre de patrons girondins souhaitent qu’il prenne en charge la « défense » des intérêts
portuaires français, par le soutien de la flotte, des chantiers navals, ou autres. Le rôle clé de
Portal
12
au ministère de la Marine en est l’expression sous la Restauration. Le patronat de
Bordeaux serait donc « réactionnaire », donc au moins « conservateur ».
Cependant, cette accumulation de « petites » initiatives marchandes permet au port de
renouer avec l’activité ; et il grouille de crédit, de change et donc de lettres de change
avec le rétablissement des maisons d’escompte modestes et dynamiques, rejointes par des
Portugais comme les Pereira –, de négoce classique d’alcools (dont Marie-Brizard &
Roger
13
), de chantiers navals mi artisanaux mi industriels par leurs méthodes de travail et
leur localisation sur les pentes des rives de la Garonne, encore pour beaucoup sur le quai
de Paludate, mais déjà aussi sur Lormont. Les secteurs économiques en croissance sont
classiquement articulés autour du port, par conséquent, avec les filières de l’agro-
alimentaire
14
, des alcools, de la transformation du bois, de la transformation du métal, de
la fabrication de voiles, etc. Ce foisonnement est bien entendu suspendu dans les moments
d’incertitude politico-conjoncturels, comme à la fin de l’Empire (vers 1810-1815) ou lors
des récessions du commerce et du crédit qui ponctuent les monarchies constitutionnelles ;
mais la reprise est réelle, mais elle ne fait pas de Bordeaux un levier de la modernité de la
première révolution industrielle en plein décollage. L’on voit même des familles relever la
tête et renouer avec les affaires qu’elles animaient avant la période révolutionnaire et
pp. 127-139. Marzagalli Silvia, « A vital link in wartime: The organization of a trade and shipping
network between the United States and Bordeaux, 1793-1815 », Research in Maritime History,
n°15, 1998, pp. 199-219. Silvia Marzagalli, Les boulevards de la fraude. Le négoce maritime et le
Blocus continental, 1806-1813. Bordeaux, Hambourg, Livourne, Villeneuve-d’Ascq, Presses
universitaires du Septentrion, 1999. Silvia Marzagalli, « Guerre et création d’une réseau
commercial entre Bordeaux et les États-Unis, 1776-1815. L’impossible économie du politique », in
Silvia Marzagalli & Brunot Marnot (dir.), Guerre et économie dans l'espace atlantique du XVIe au
XXe siècles, Pessac, Presses universitaires de Bordeaux, 2006, pp. 375-394.
10
Michel Casse, « La course à Bordeaux en 1793. Un état de la question », in Marzagalli Silvia
(dir.), Bordeaux et la marine de guerre, Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux, 2002, pp.
121-151.
11
Cf. Silvia Marzagalli, « Hambourg, Bordeaux et les États-Unis dans les années 1790 : quelques
remarques à propos des circuits commerciaux en temps de guerre », in Bernard Lachaise &
Burghart Schmidt (dir.), Hambourg-Bordeaux. Zwei Städte und ihre Geschichte. Bordeaux-
Hambourg. Deux villes dans l’histoire, Hambourg, Dobu Verlag, 2007, pp. 389-398.
12
Pierre-Barthélémy Portal, Mémoire du baron Portal, ministre de la Marine et des Colonies et
ministre d’État sous les rois Louis XVIII et Charles X contenant ses plans d’organisation de la
puissance navale de la France, Paris, Librairie d’Amyot, 1846.
13
Hubert Bonin, Marie Brizard, 1755-1995, Bordeaux, L’Horizon chimérique, 1995.
14
Cf. Hubert Bonin, « L’industrie agroalimentaire du grand Sud-Ouest aux XIXe-XXe siècles. Un
renversement historique du positionnement dans les flux économiques », in Jacques Marseille
(dir.), Les industries agroalimentaires en France. Histoire & performances, Paris, Le Monde
Éditions, 1997, pp. 121-160.
4
bonapartiste, telle celle de Balguerie-Stuttenberg
15
, les Gradis, Johnston, Schyler, Guestier,
Bethmann, Wustenberg, Delbos, Faure ou Blanchy, dont les maisons ont été créées entre
1724 et 1795.
2. L’esquisse de modèles et systèmes nouveaux ?
Pourtant, parler de reconstruction de l’économie du passé, de retour en arrière,
d’attentisme et de pur jeu tactique, donc in fine d’immobilisme, serait trompeur. La
capacité d’insertion de l’économie classique dans des processus innovateurs est en effet
réelle, comme le prouvent nombre d’études publiées depuis un quart de siècle sur des
branches, des entreprises ou des familles
16
. Dès ces années 1810-1840, des initiatives sont
prises. Le patronat entame une étape de son renouvellement, car Bordeaux accueille des
Britanniques et des « Germaniques »
17
, mais aussi des provinciaux issus d’autres régions
(comme les Calvet) ou de l’hinterland garonnais (notamment des Protestants venus de tel
ou tel « bassin » à entrepreneurs, comme les Maurel et les Prom, etc. Bordeaux redevient
une place ouverte au vent de l’esprit d’entreprise, un tremplin à ascension de self made
men.
Quelques maisons familiales créées entre 1803 et 1850
Gaden
1803
Tandonnet
1805
Exshaw
1805
Cayrou
1809
Devès
1810
Mestrezat
1814
Hanappier
1817
Lestapis
1818
Cruse
1819
Brousse
1824
Calvé
1825
Calvet
1825
De Luze
1826
Maurel & Prom
1826-1831
Teisseire
1830
Seignouret
1830
Entrée d’Eschenauer dans une maison de négoce
créée en 1821
1831
Louis Delbos
1832
Lalande
1840
Quancard
1844
Buhan
1849 et
1854
Galibert & Varon
1850
15
Henry Lambercy, « Pierre Balguerie-Stuttenberg, 1779-1825 », Revue économique de Bordeaux,
n°134, juin 1910, pp. 97-144 ; n°135, juillet-août 1910, pp. 152-170 ; n°136, septembre-octobre 1910,
pp. 195-203. Jean Valette & Jean Cavaignac, Grands notables du Premier Empire : « Gironde »,
volume n°13, Paris, Éditions du CNRS, 1986. M. Billaudel, « Notice sur P. Balguerie-Stuttenberg,
négociant », in Almanach général judiciaire, administratif et commercial du département de la
Gironde, année 1847, Bordeaux, Imprimerie et librairie Th. Lafargue, 1847, pp. 595-611.
16
Paul Butel, Les dynasties bordelaises, de Colbert à Chaban, Paris, Perrin, 1991. Philippe Gardey,
Négociants et marchands de Bordeaux de la Guerre d’Amérique à la Restauration (1780-1830),
thèse de doctorat, Université de Paris 4-Sorbonne, 2006.
17
Michel Espagne, « Les Allemands de Bordeaux au début du XIXe siècle. L’exemple des familles
Gaden, Meyer, Klipsch », in Gilbert Merlio & Nicole Pelletier (dir.), Bordeaux au temps de
Hölderlin, Francfort et Paris, Peter Lang, 1997, pp. 53-78.
5
Ces « entrepreneurs » défrichent le champ de l’innovation. Les uns effectuent la transition
entre combinaison artisanale et industrie en diversifiant la production de bateaux :
Bordeaux devient (avec le Royaume-Uni et les États-Unis) l’une des grandes places
mondiales de la construction de clippers, les trois-mâts rapides qui assurent une part
croissante puis dominante des transports transocéaniques de fret lourd
18
; et les
techniciens des chantiers navals pratiquent ce que Maurice Daumas a appelé « l’innovation
de procédés » pour améliorer le profil des coques, la fiabilité des vaisseaux et les méthodes
de fabrication
19
. D’autres dirigeants conquièrent de nouveaux espaces de négoce : l’on
connaît comment des maisons sont revenues en Afrique subsaharienne, mais dans le cadre
d’un modèle économique nouveau, celui de la mise en valeur des ressources naturelles des
territoires accessibles par la « civilisation de l’agriculture commerciale » et participent au
transfert de la « modernité », comme au Sénégal et en Gambie. Si des familles
marseillaises ont été actives en Afrique centrale (les Régis au Dahomey, etc.) et autour du
fleuve Sénégal (Verminck et Bohn
20
, en amont de la CFAO), les familles girondines des
Maurel et des Prom
21
ont été des pionniers de la gomme arabique puis de l’arachide, ce qui
est moins « attractif » que l’invention de machines à vapeur ou de locomotives, mais ce qui
a été à l’origine d’une filière économique qui a duré un bon siècle
22
: armement maritime,
avitaillement, négoce, gestion du crédit, animation d’un marché national, huilerie (celle de
Maurel & Prom dès 1857 à Bacalan), ont contribué à rebâtir un « grand port ». Devès,
apparue en 1810, Merle, Pellegrin Frères ou Maurel & Prom, créée en 1822, anticipent sur
la vague ultérieure de création (1860-1880)
23
.
Un cas significatif est celui de la maison Devès : Justin Devès (1789-1866), fils d’un
marchand failli en 1806, débarque à Saint-Louis en 1810 après deux-trois années aux
États-Unis et y devient employé du marchand Potin (marié à une signare) ; il crée sa
propre affaire en 1815, monte à Bordeaux nouer des contacts en octobre 1818-mars 1819 ; il
convainc alors ses deux jeunes frères Bruno et Édouard de le rejoindre outre-mer, et une
association les réunit le 1er mai 1821 ; mais Justin I lui-même reste désormais à Bordeaux
même sans que nous sachions ce qu’il fait de son épouse signare Magdeleine Philipp et
18
Claude Briot & Jacqueline, Francis Renault, Clippers français, Douarnenez, Éditions du Chasse-
Marée, 1997. Cf. « Arman », in Hubert Bonin, Les patrons du Second Empire. Bordeaux & en
Gironde (dictionnaire), Paris, éditions Picard-Cénomane, 1999, pp. 45-51.
19
Roger & Christian Bernadat, Quand Bordeaux construisait des navires. Histoire de la
construction navale à Bordeaux, Camiac-et-Saint-Denis, Éditions de l’Entre-deux-mers, 2006.
Hervé Guichoux, L’histoire des chantiers navals de Bordeaux et de Lormont, cederom, Bordeaux,
2004.
20
Xavier Daumalin, « Frédéric Bohn, l’Africain, 1852-1923 », in Marcel Courdurié & Guy Durand
(dir.), Entrepreneurs d’empires, Collection de l’histoire du commerce et de l’industrie de Marseille
aux XIXe et XXe siècles, tome 13, Marseille, Chambre de commerce et d’industrie Marseille-Provence,
1998, pp. 199-268.
21
Cf. E. Baillet, Les Établissements Maurel & Prom, Bordeaux, 1923 [une histoire officielle].
22
Joan Droege Casey, Bordeaux Colonial Port of 19th Century France, Dissertation in European
Economies, New York, Arno Press, 1981.
23
Yves Péhaut, Les oléagineux dans les pays d’Afrique occidentale associés au Marché commun,
Bordeaux-Lille, 1974. Bernard Schnapper, La politique et le commerce français dans le Golfe de
Guinée de 1838 à 1871, Paris, Mouton, 1961. E. M’Bokolo, Noirs et Blancs en Afrique équatoriale :
les sociétés côtières et la pénétration française (vers 1820-1874), Paris-La Haye, Mouton-EHESS,
1981. A. Delcourt, La France et les établissements français au Sénégal entre 1713 et 1763. La
Compagnie des Indes et le Sénégal. La guerre de la gomme, Dakar, 1952. A. W. Lawrence, Trade
Castles and Forts in West Africa, London, Cape, 1963. Roger Pasquier, Les traitants des colonies
du Sénégal au milieu du XIXe siècle, Paris, L’Harmattan, 1983. J.M. Gray, A History of Gambia,
Cambridge, 1950. Laurence Marfaing, L’évolution du commerce du Sénégal, 1830-1930, Paris,
L’Harmattan, 1995. Colin Newbury & A. Sydney Kanya-Forstner, « French policy and the origins of
the scramble for West Africa », Journal of African History, 1969, 10.
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