Proposition infinitive :
(on voit) le glaneur / Cheminant pas à pas recueillir les reliques
L’ensemble de la proposition occupe la fonction de COD d’un verbe de perception, le
procès du verbe à l’infinitif a un support actant distinct du sujet de la régissante : le GN « le
glaneur », qui a la même fonction que l’ensemble de la prop. Le vb à l’inf reçoit lui aussi un
COD.
Nous n’analyserons pas « cheminant » comme centre d’une proposition participiale
puisque son support («le glaneur ») a déjà une fonction dans une autre proposition ; la
fonction du participe est ici celle d’un adjectif épithète. Cependant on voit qu’il reçoit un
adverbe et qu’il évoque un procès spatialisé, aspectualisé et temporalisé (participe « présent »
= aspect sécant, inachevé et simultané / régissante) , comme d’ailleurs les très nombreuses
autres formes d’origine participiale : verdissant, florissant, blondissant, jaunissant qui même
s’ils sont épithètes et non noyaux de propositions, donc ne rentrent pas au sens strict dans le
cadre de notre étude, participent encore suffisamment de la catégorie du verbe pour animer le
texte, lui imprimer un mouvement permanent.
Conclusion : Construction parfaite, horlogerie minutieuse, dans laquelle aucune pièce n’est
véritablement autonome, même pas la principale. Système hiérarchique complexe et ramifié,
tout se tient, des « branches » de la macrostructure aux « extrémités » les plus dépendantes
(les participes) en passant par les branchettes intermédiaires (sub enchâssées).
2b. Que chacun va pillant : comme on voit le glaneur
- relative centrée sur une périphrase verbale à valeur aspectuelle (inachevé marqué par le
participe dit « présent »), notons qu’en français contemporain cet emploi n’est plus usité sauf
tour très littéraire, la périphrase aller + inf au contraire est fréquente, valeur temporelle. Le
verbe conjugué est au présent , dans cette sub qui évoque une strate temporelle où se situe
l’énonciateur (cf déictique « ces » du GN support).
- conjonctive comparative et début de l’infinitive qu’elle introduit (support actant « le
glaneur ».
- entre les deux une ponctuation forte, déjà évoquée, mais alors que dans les autres cas la
ponctuation coïncidait avec la fin d’un vers et même d’une strophe, ici on peut noter une
rupture très forte de la chaîne mélodique à la césure, de par la non coïncidence entre métrique
et prosodie. Se produit dans un vers qui est traditionnellement le pivot du sonnet, rien n’est
donc laissé au hasard. On peut considérer que cette rupture prosodique met en relief par son
caractère spectaculaire l’entrée dans l’apodose de la période, au-delà de l’acmé représentée
par le comparé enfin dévoilé. Renforcé encore par la sonorité [ã] qui était celle de la rime B et
que l’on retrouve sous l’accent de coupe au v.13 et à la césure du v.14.
- notons enfin la présence des deux sujets indéfinis : le pronom chacun, forme renforcée du
déterminant indéfini chaque, variable en genre, qui vient du latin (unum cata unum, un à un),
qui fonctionne comme un singulier (quantité égale à un) mais sémantiquement est collectif
(chaque membre d’un tout). Le pronom indéfini « on », étymologiquement substantif, dans
son extension maximale : tous, n’importe qui, de portée comparable donc. Moment de
transition entre l’histoire particulière de Rome et scène à valeur générale à laquelle on la
compare : ces pronoms jouent peut-être un rôle. Rome dispersée aux quatre vents, dégradation
sensible dans les termes à connotation péjorative (pillant, glaneur), s’oppose aux connotations
triomphantes des premières images. Apodose sémantique aussi.