ISESCO Atelier régional sur : « La création de réseautage et son application pour des fins scientifiques en Afrique » Lieu : Lomé, Togo Période : 21 au 24 juin 2010 « Le changement climatique : quelles opportunités pour les pays africains en matière d’atténuation et d’adaptation après la Conférence de Copenhague ?» Préparé par Dr Ismaïla DIALLO Juin 2010 1. Contexte Le changement climatique peut se définir comme une variation statistiquement significative de l'état moyen du climat ou de sa variabilité, persistant pendant une période prolongée de plusieurs décennies. Ce changement du climat est le résultat à la fois de la variabilité interne à l’intérieur du système climatique et des facteurs externes naturels et anthropiques. D’ailleurs, dans la Convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique, ce terme désigne uniquement les changements dus aux activités humaines ; et le terme "variabilité climatique" est utilisé pour désigner les changements climatiques d'origine naturelle De toute évidence, le changement climatique et ses corollaires peuvent compromettre sérieusement l’atteinte des objectifs de développement durable, d’autant plus que les perturbations diverses d’origine anthropique ou naturel suscitent beaucoup d’interrogations sur le devenir de la planète. Ce qui justifie l’intérêt que doivent accorder les organisations internationales (système des Nations-Unies notamment à travers la Convention-cadre sur les changements climatiques) les gouvernements, les partenaires au développement, les chercheurs et la société à cette problématique. Cet intérêt se justifie encore plus pour les pays africains qui sont les plus exposés aux contre coups du changement climatique, d’autant plus que la rencontre de Copenhague n’a malheureusement pas permis d’arriver à des engagements politiques forts en termes de réduction des émissions, mais aussi d’approches méthodologiques intégrant les préoccupations des différents partenaires. C’est dans le but de pallier les faiblesses de cette conférence que l’atelier de Paris a été convoqué les 11 et 12 mais 2010. Cette réunion, qui a réuni les négociateurs africains et des représentants de différentes organisations internationales et de bailleurs de fonds, avait pour but de réfléchir et d’échanger sur l’élaboration d’une méthodologie d’approche concrète pour la mise en place de projets d’adaptation et/ou d’atténuation par les pays africains (NAMAs). L’atténuation consiste à diminuer l’ampleur du changement climatique, en réduisant les émissions de Gaz à Effets de Serres (DES) ou en augmentant leur séquestration ; tandis que l’adaptation implique l’amélioration de notre capacité à faire face ou à éviter les effets nuisibles du changement climatique ou en profitant de conditions nouvelles favorables. Dans cette compréhension, l’atténuation nécessite une analyse globale et une action collective mondiale ; alors que l’adaptation doit être analysée au niveau local avec des interventions bien ciblées et localisées. En réalité, les pays en développement ont besoin de mesures d'adaptation de manière plus urgente, car, au-delà des enjeux environnementaux, elle est surtout d’une grande importance sociale tant les bouleversements climatiques menacent les populations surtout rurales. C’est sur la base de ces considérations, que l’Accord de Copenhague prévoit un financement pour le démarrage rapide des actions, la mise en place de mécanismes financiers à long terme, ainsi qu’un cadre pour les transferts de technologies et le mécanisme de Réduction des Emissions dues à la Déforestation et à la Dégradation des forêts (REDD+). Ceci implique de la part des pays africains l’élaboration de projets et/ou programmes en matière d’atténuation et d’adaptation pour saisir les opportunités financières existantes ou à créer. 2. Principaux enseignements de la rencontre de Paris La montée en puissance financière des transferts Nord-Sud, qui se traduit par l’ouverture d’une nouvelle voie de développement, constitue, pour les pays africains, une opportunité à explorer et exploiter L’année 2010 constitue pour les pays africains une année charnière qui doit se caractériser par une dynamique d’ensemble de montage de projets, collaboratifs surtout, pour tracer une nouvelle voie de développement en mobilisant le plus possible de crédits dès la phase fast start (principe de financement précoce) Les partenaires au développement présents à savoir : l’AFD, les représentants de plusieurs pays du Nord (France, Belgique, Canada, Monaco), des organisations internationales (PNUD, PNUE, UNITAR, ISESCO), des organismes techniques compétents (Agence Européenne de l’Environnement, ADEME, CILSS) et de partenaires bancaires comme la BNP et la Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD) ont tous marqué leur volonté d’accompagner nos pays dans les efforts d’élaboration et de contribuer à la mobilisation des ressources financières nécessaires L’approche filière apparaît comme la condition sine qua none pour impulser un développement durable dans nos pays ; d’où la nécessité de regrouper les projets « en grappe » afin d’avoir des effets de masse pour les financements et surtout la capacité à stabiliser les filières industrielles et professionnelles L’amélioration de l’accès à l’électricité des populations péri-urbaines et rurales par la mise en place de projets d’accès aux énergies et générateurs de revenus économiques, ce qui facilitera le financement du projet NECTAR par la France avec un intérêt particulier affiché par l’ISESCO pour apporter sa contribution Nécessité de structurer des groupes de travail de façon pérenne pour chacun des grands secteurs. Les modalités n’en ont pas été précisément définies. Mais cela traduit le passage d’un processus ponctuel à un processus réellement continu qui facilite l’élaboration de projets et de plans de NAMAs par les pays africains Les projets qui ont été présentés à la réunion de Paris souffrent d’une immaturité technique et financière ; d’où urgence de renforcer les capacités en élaboration de projets bancables 3. Points de vue des partenaires présents à la réunion de Paris a. AFD La Conférence de Copenhague a été importante en ce qu’elle a remis au cœur du débat le lien entre développement et changement climatique. L’écologie fait partie intégrante du développement durable et la préservation de l’environnement, désormais, n’apparaît plus comme en opposition aux stratégies traditionnelles de l’Aide Publique au Développement, mais comme une opportunité de les revisiter, tant au Nord qu’au Sud. Pour ce faire, il faudra notamment mettre l’accent sur la synergie entre secteur privé et secteur public, trop souvent présentés comme antagonistes Promouvoir les dispositifs les plus efficaces de financement adaptés, diversifiés, basés sur un système de coopération entre les différents acteurs. Pour ce faire, et afin de fédérer les parties prenantes, il faut donner une place centrale aux institutions financières dans les pays, et favoriser la collaboration entre les différentes banques de développement. Faire correspondre la nature des financements et les objets financés. Cet aspect est politique avant d’être technique : l’argent public est rare, il faut trouver la bonne combinaison entre les différentes sources de financements afin de subventionner les actions en ayant le plus besoin. Rechercher une complémentarité entre les différents acteurs des financements Engagement dans la mesure des réductions des émissions de CO2 de ses projets en faisant des bilans carbone L’AFD, afin d’avancer sur ces questions s’est déjà dotée d’une panoplie financière (2 milliards de financements climat l’année dernière, dont la moitié vers l’Afrique) et est en train d’élaborer un plan stratégique pour les cinq ans à venir. b. ISESCO Agi principalement dans deux domaines : la recherche d’une meilleure connaissance des vulnérabilités des pays et la recherche des impacts des changements climatiques et des besoins d’adaptation qui en découlent. Œuvre pleinement dans le renforcement des efforts de coopération internationale pour faire face aux problèmes qui ne connaissent plus de frontière ou de limite administrative, comme notamment la dégradation de l'environnement, les changements climatiques, la gestion de ressources naturelles de plus en plus limitées , la prévention et la gestion de catastrophes naturelles. En comblant les lacunes dans les connaissances, on pourrait mieux évaluer les risques et les avantages des changements climatiques afin de prendre des décisions éclairées au sujet des mesures d'adaptation il serait aussi intéressant aussi d’évaluer le rôle éventuel du savoir écologique local dans l'adaptation aux changements qui affectent les ressources naturelles dans le continent Africain. c. OIF /IEPF La lutte contre le changement climatique prend deux formes : d’une part l’accompagnement des PED/PMA vulnérables et le renforcement de capacités (notamment au moyen de guides ou de notes de décryptage) et d’autre part l’intégration de la donne climatique dans les politiques sectorielles. Il faut profiter des avancées offertes par la conférence de Copenhague concernant les promesses de financement en élaborant le plus rapidement possible des projets d’adaptation et ou d’atténuation L’IEPF entend aider à la mise en place de programmes opérationnels d’adaptation et d’atténuation, afin que ces derniers soient éligibles aux financements internationaux Création d’une « liste » des différents projets d’adaptation et d’atténuation éligibles aux financements existants. Les projets pilotes seront réalisés durant la phase 2010-2012, permettront à la fois de développer des partenariats et d’envisager la manière dont les PED pourront participer à la mise en place de politique sectorielle de développement durable. d. PNUE Existence d’un un programme sur les changements climatiques, centré sur les conséquences de ce phénomène pour les pays. Afin d’être au plus proche des réalités, des réseaux globaux et quatre réseaux régionaux ont été identifiés, permettant ainsi une meilleure connaissance des besoins d’adaptation Ce programme donne une place majeure au renforcement des capacités et de la restauration des écosystèmes, mais insiste également sur l’analyse économique des coûts et bénéfices des différentes options e. UNITAR Développement d’un programme sur les changements climatiques, basé sur le renforcement et le développement de capacités et centré sur trois axes : l’échelon global, l’échelon régional, l’échelon national Œuvre pour le développement des ACCA (Advancing capacity to support Climate Change Adaptation) et la mise en place effective des huit premières étapes des PANAs. L’important dans ces processus de garder (ou créer) un lien entre préparation et mise en œuvre f. PNB Paris Bas Afin que les projets africains aient la plus grande chance d’accès aux financements, il est indispensable de connaître la vision d’un investisseur privé comme BNP sur la mise en place de financements carbone les mécanismes de financements décidés aujourd’hui doivent être adaptés à l’investissement privé, notamment parce que la plus grande partie des 100 milliards de dollars viendront du secteur privé g. ADEME Un triple défi se pose à l’Afrique : l’accès à l’énergie, l’accès au développement et la lutte contre le changement climatique. Pour avancer sur cette problématique, l’ADEME a développé des programmes d’accompagnement des pays dans la mise en place de politiques de lutte contre les pollutions et de maîtrise de l’énergie, en mettant l’accent sur la mise en commun de connaissances, le retour d’expériences, apportant une expertise en vue de renforcer les compétences locales et cherchant à développer les partenariats et la mise en réseau d’acteurs publics et privés Axes développés: o la mise en place de concepts s’inscrivant dans la durée (10/15 ans) ; o la mise en place de programmes de renforcement de capacités ; o la mise en place de réseaux Nord/Sud pour les échanges de bonnes pratiques. 4. Quelques conclusions A la lumière des enseignements tirés de la réunion de Paris, d’une part et des dynamiques dans lesquelles les différents partenaires au développement se sont engagés d’autre part et des réalités de nos pays africains, on peut tirer les conclusions : Les pays africains ne sont pas souvent au courant des opportunités de financement existantes Il faut améliorer l’accès des pays africains aux fonds existants Le partenariat entre les différents acteurs souffre souvent d’un manque d’équité qui compromet le respect des engagements Les pays africains ont un besoin réel de renforcement des capacités en élaboration de projets de recherche bancables La dimension adaptation est plus cruciale pour les pays africains car s’inscrivant dans une approche locale et intégrée Le marché du carbone ne profite pas assez aux pays africains malgré les efforts déployés Les PANAs doivent adopter une approche filière globalisante pour être plus efficace et avoir plus d’impacts Les banques de développement au niveau national et international doivent s’impliquer dans le financement des projets et/ou programmes prioritaires Il y a lieu d’intégrer plus fortement les aspects relatifs à la gestion de l’eau, à l’assainissement, à l’énergie et à l’urbanisation (notamment les constructions) dans les projets/programmes d’adaptation Mise en place d’une commission de suivi et de polissage des projets par secteur dans lequel tous les pays seront représentés 5. Exemple de critères de bancabilité d’un projet définis par l’AFD L’AFD met l’accent sur les critères suivants pour juger de l’aspect bancable des projets soumis : Importance des problématiques concernées, voire du caractère novateur des approches Caractère pluridisciplinaire des projets Pérennité financière Identification claire d’un « emprunteur », à qui l’AFD va pouvoir prêter de l’argent, par exemple une banque qui rétrocèdera ensuite les prêts bonifiés à des PME, Caractère concret du projet.