Séance 2
L’ETHIQUE DES RELATIONS
INTERNATIONALES
Les gens sont toujours surpris d’entendre l’existence de cette éthique des relations
internationales : comme si c’était virtuel. Pourtant, cela correspond à une question très
importante des RI (justification/accusation morale de la guerre …). Il y a des comportements
éthiques dans les RI. Quelles prétentions éthiques peut-on avoir ? Que ce soit en médecine ou
en RI, la morale est-elle tjs maximale et implique-t-elle des interdits qu’il faut toujours
respecter sans exception ? La diplomatie suppose un minimum de ruse et implique de
mentir… Ces considérations sceptiques font l’impasse sur d’autres modes de raisonnement :
morale de conséquence par exemple et se mettent complètement en décalage par rapport à la
réalité des RI (la paix n’est qu’une parenthèse dans les conflits).
Comment évaluer les csq d’une décision militaire ? Jusqu’où peut-on aller ? Comment
une guerre peut-elle être plus ou moins morale qu’une autre ?Dans les corps d’armées aux
USA, il y a 5 000 avocats qui travaillent, ce qui montre qu’on prend au sérieux le fait qu’on
puisse être critiqué. Il y a aussi des professeurs de discipline morale, ce qui est un phénomène
de plus en plus récent dans les armées occidentales.
L’éthique des RI, c’est une sous discipline des RI et aussi de la morale. Cela fait six ou
sept ans que les internationalistes se penchent de plus en plus sur une question classique :
famine etc. Il faut avoir une vision explicative (pourquoi soudainement dans les 1990s on se
met à parler des mines antipersonnelles ? Pq mourir asphyxier semble-t-il plus injuste que tué
par balles ?).
I/ L’éthique dans une situation d’inégalité
Comment penser l’éthique dans une relation d’inégalité ? On pense que l’éthique se
développe le mieux lorsque deux personnes sont face à face, se reconnaissent et sont égaux en
droit. Dans les RI, cela n’a pas lieu car il y a plus ou moins une égalité juridique (îles Fidji ne
pèsent rien à côté des USA).
Vision désenchantée : le modèle du réalisme : considère que les Etats ont tjs les
mêmes comportements pour maximiser leur puissance et valoriser leur intérêt national ? TT le
monde agit comme cela sinon on se fait manger par les autres. Tout ne serait donc que
question de pouvoir et d’intérêt ? La morale servirait à habiller les intérêts selon les alistes.
Cette vision considère que toute morale est relative, chaque morale se vaut puisque ttes les
morales se valent, que ce soit celle des nazis ou une autre, elles sont toujours fausses et
présentées pour cacher un but. Ce sont des monstres froids des Etats (interprétation simpliste
de Machiavel : le prince est celui qui ment pour mieux gouverner).
Mais quand même, comment faire lorsque vous constater des faits qui surprennent ?
Que penser des aides au développement par exemple ? Les réalistes diraient, c’est pour faire
leur réputation et mieux faire jouer leurs intérêts. Mais pourquoi y aurait-il une vision
bienveillante à l’égard de ceux qui donnent de l’argent ? Cela veut dire qu’à la base, il y a une
certaine morale. Idem avec l’abolition de l’esclavage au RU au XIXème siècle. Pq avoir pris
une telle décision, coûteuse et difficile par rapport à la position des autres pays ? Y a-t-il une
dynamique de moralisation ?
L’idée de la souffrance à distance et de minimisation de la souffrance inutile fait
aujourd’hui débat. Aujourd’hui le taux de mortalité militaire a diminué car les armes sont plus
précises, mais aussi parce qu’il y a des médecins qui soignent immédiatement les blessés.
L’éthique maximale : selon un certain nb de ppes, on les respecte toujours à 100% (ex.
toujours porter assistance à personnes en danger). Cette morale est difficile à tenir car on est
souvent obligé de déroger à ces ppes.
La morale par conséquence est plus modeste : on essaye de faire qqch dans la mesure de ses
capacités (morale conséquentialiste). C’est le modèle de l’utilitarisme (on minimise le
malheur de plus grand nombre). Cette morale semble plus raisonnable.
Logiques de devoirs : ces obligations sont au moins de deux types : devoir de protection et
de ne pas nuire. L’intervention humanitaire a eu un tournant décisif avec la guerre au
Kosovo (ne pas rester passif face à la misère). Il y a donc bien eu une morale mise en action
(pourtant ce n’était pas stricto sensu légal car on volait sa souveraineté à un Etat). Même dans
les fondements du droit international il y a des fondements qui sont moraux (ppe de la guerre
juste).
Selon le ppe de devoir de ne pas nuire, il faut s’empêcher de nuire à quelque quand on
est sur le point de le faire. On fait preuve de retenue (bombe d’une tonne ou bombe de 200
kilos ?). On s’est dit par exemple que le recours aux armes chimiques ou aux gaz asphyxiant a
été jugé inutile (souffrances supplémentaires + culturellement, on a une aversion au poison,
qui est l’arme du fourbe et des sorcières). Son développement se concrétise par la signature
d’un traité. Clinton faisait la différence entre la morale et le droit : en Corée du Nord on laisse
les mines antipersonnelles à la frontière pour empêcher les gens de s’en approcher, mais on
n’en rajoute pas d’autres.
II/ Y a-t-il une éthique de l’usage de la force ?
La cruauté et l’éthique, pourquoi ? Il y a énormément d’ouvrages sur l’éthique de la
guerre : le premier classique moderne à ce sujet est le livre de Michael Waltzer, qui a publié
en 1977 en réaction à la guerre du Vietnam, Just and Injust wars.
Les critères de la guerre juste : il y a deux principaux registres de cette évaluation morale :
le droit de déclarer la guerre et le droit dans la guerre (avant et pendant). Cela remonte à la
tradition chrétienne (St-Augustin puis St-Thomas d’Aquin), puis au protestantisme (ce n’est
pas un hasard si on trouve bcp de théologiens protestants aux USA, en Allemagne, en
Angleterre, qui réfléchissent à ce sujet).
Premier ppe, le jux ad bellum : la guerre légitime est déclarée par les autorités
compétentes : ce serait l’ONU aujourd’hui ou une coalition d’états si on est
moins exigent.
La guerre doit être guidée par une intention droite (conquérir pour spolier un
pays n’est pas droit ; mais sauver un pays qui a fait l’objet d’une attaque
injuste, cest droit).
En outre, la guerre juste doit être la guerre du dernier recours (il faut avoir
user toutes les ressources diplomatiques avant).
Elle considère qu’elle est juste lorsqu’on se défend (ppe de légitime défense).
Quand on attaque, c’est plus compliqué. Mais les guerres justes ne sont pas
uniquement des guerres défensives, elles peuvent être offensives. C’est tt le pb
de la prévention (danger non imminent, dans six mois, un ou deux ans) et de la
préemption (attaque face à un danger imminent). L’exemple classique de
frappe préventive : Israël détruit en 1981 la centrale irakienne vendue par les
Français) ; la guerre envisagée contre l’Iran le serait aussi. La guerre contre
l’Irak n°2 était offensive (pr des raisons juridiques, la prévention est illégale,
donc au lieu d’utiliser la raison de guerre préventive, les USA l’ont présentée
comme une guerre préemptive).
Et est-ce que la détention d’armes nucléaires est contraire au droit ? Non, on peut
considérer que ce n’est pas prendre de civils en otage. Pr une morale des csq, à partir du
moment on ne l’utilise pas, pas de problème et c’est acceptable moralement (valable pr la
guerre froide où finalement, on n’a pas utilisé l’arme nucléaire).
The more, the better, plus on a d’armes, mieux c’est, dans l’esprit américain.
Critère pr discuter de la souffrance inutile : y a-t-il une évolution dans l’usage de la force ?
The Ethics of destrcution, l’auteur constate qu’auparavant (WW2, Vietnam) il y avait des
bombardements de la terreur (carpet bombings), et ajd cela n’a plus lieu de manière
systématique.
Il y a une diminution radicale du nb de civils tués (il y avait eu 60 000 en quelque
jours en quelque jours ex. Dresde, on avait tué des civils allemands en quelque jours ; 1
millions de morts au Vietnam). Au contraire ajd on se dit que tuer les civils va donner encore
plus de rage aux combattants (avant on croyait que ça allait moraliser les troupes). Cela est
aussi lié aux évolutions technologiques : les armes occidentales sont potentiellement bcp plus
létales, mais en même temps, elles sont aussi bcp plus ciblées (armes laser ou, c’est moins
cher, guidée par GPS, précises au cm).
Le dommage collatéral revient tjs dans le débat sur la guerre juste : ce sont les morts
civils qui n’ont pas été tués intentionnellement par les combattants (qui ont respecté la cible
légitime : pendant la guerre, on tue ceux qui portent l’uniforme –même si c’est le cuisto de
l’armée).
Mais comment peut-on utiliser ce terme aussi froid pour désigner des milliers de tués ?
Exemple de l’usine de munitions : imagine que t’es une armée qui conduit une guerre juste,
tactique de destruction de l’usine de munitions. Oui mais autour il y a des habitants et des
badauds, je sais que qd je vais détruire cette usine, mon arme va exploser sur l’usine mais va
aussi faire des blessés et des morts parmi les personnes autour. Comment prendre une telle
décision ?
Doctrine du double effet : en prenant cette décision, j’aurai un effet positif
(destruction de l’usine de mon ennemi) et gatif (civils innocents tués). Pour le justifier il
faut que l’action soit proportionnelle et que les dommages occasionnés ne doivent pas être
supérieurs aux objectifs à atteindre (1 tank pour 4000 tués, cela ne vaut pas ! Mais une usine,
100 personnes, mon calcul est valable….). De plus, les csq gatives de l’action ne doivent
pas être la cause de ma csq positive : il ne faut pas que ce soit parce qu’ j’ai tué les civils que
cela détruise l’usine d’armement).
Prévoir n’est pas vouloir : exemple du médecin qui doit opérer une femme enceinte pr la
sauver mais qui, s’il l’opère, risque de tuer le fœtus.
La tradition de la guerre juste a donné lieu à deux pb :
Les combattants sans uniforme (la guerre juste ne prend en compte que les guerres
entre Etats). Que faire en effet des combattants armés, terroristes etc. sans uniforme ?
Ensuite, préemption et prévention : comment justifier la guerre en fonction de ses
intentions ? La préemption est à peu près tolérée ds le droit international (mais pb de
la définition du « danger imminent »). Forcing des USA pour faire reconnaître ds le
droit international la guerre préventive. Mais on joue avec le feu en s’acheminant sur
cette pente, car cela conduit à une multiplication des guerres (les Etats menaçants sont
nombreux, la guerre contre l’Iran à ce moment là, c’est pour demain !). Est-ce que
c’est plus csq ou inconséquent de frapper ou pas ? Mais en même temps, la guerre
préventive n’est pas absurde : il aurait bien évidemment fallu intervenir contre les
nazis à Munich au lieu de faire l’autruche. Idem avec les guerres humanitaires
préventives (il aurait fallu intervenir au Rwanda quand on savait que des massacres se
préparaient).
III/ Eléments de question sur le dialogue interculturel : l’éthique
internationale ?
Est-ce une chimère ? Peut-on y apporter des réponses ? La guerre juste est une
tradition occidentale, voire même chrétienne (développement par le catholicisme et le
protestantisme puis laïcisation par les Etats). Ce tropisme occidental est problématique : on ne
peut imposer une vision si culturellement orientée. Ce n’est pas universel. Pourtant le rapport
à la souffrance est lui bien universel ! Cette question fait partie de l’universalide l’homme.
Force est de constater que ces mêmes règles ont force de loi dans d’autres cultures : tradition
islamique, la guerre doit être déclarée par les institutions compétentes et les civils ne doivent
pas être visés (dans le droit canon musulman, après, ceux qui disent qu’il faut tuer les enfants
etc. ont été chercher leurs normes on ne sait pas trop où….).
La logique de l’universalisme peut se heurter à la critique du relativisme (selon
lequel on ne devrait pas critiquer une morale, une tradition, qui n’est pas la sienne). La propre
règle du relativisme peut elle-même être relativisée et on n’en tient plus compte ! ! Par
ailleurs, il faut qu’il y ait un accord sur les ppes minimaux universels (ne pas tuer
intentionnellement les civils etc.) et ensuite faire preuve de plus de souplesse pour le reste.
Ce qui est en jeu, c’est la manière dont les Etats occidentaux vont mettre en place un
dialogue. Les années 1990 ont porté l’espoir que la diffusion de la démocratie dans le monde
allait régler plein de pb. Mais pour certains, c’est une chimère que de vouloir exporter la
démocratie dans le monde. Ce sont les démocraties émergentes qui sont les plus dangereuses
en fait, il y aura des guerres à l’intérieur et avec l’extérieur ! (ex. Irak !). Universalisme
soft : on promeut la démocratie et on donne de l’argent, et la hard : on l’impose par la force.
 L’acceptation de règles communes modestes et efficaces devrait être un enjeu
majeur, pour éviter l’impasse entre l’universalisme discriminateur et le relativisme
paranoïaque du complot contre les pays du Sud.
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