Transit de Vénus. - Sciences physiques et chimiques Académie de

par Thierry Bertout - Professeur de sciences physiques et chimiques
(Collège R. Queneau Montivilliers)
et Roger Marical - Observatoire de Rouen - Professeur Ressource
Académie de Rouen
1) Le transit de Vénus.
Alors que le passage ou "transit" de Mercure devant le Soleil se reproduit 13 à 14
fois par siècle, celui de Vénus possède une périodicité rarissime puisque le dernier
passage date du 6 décembre 1882. Dans les deux cas, il s'agit d'une minuscule
éclipse, où la planète masque une part infime, de la surface du disque solaire.
L'occasion, en France métropolitaine, nous en sera offerte, le mardi 8 juin 2004 entre
7 h 20 et 13 h 24 selon l'heure légale d'été soit TU + 2 h.
Ces horaires (en heures légales) sont :
- Premier contact (1) : 7 h 20 min
- Deuxième contact (2) : 7 h 40 min
- Maximum : 10 h 23 min
- Troisième contact (3) : 13 h 04 min
- Quatrième contact (4) : 13 h 24 min
Vous les trouverez avec la précision de la
seconde sur le site de l'IMCCE (Institut de
Mécanique Céleste et de Calcul des
Éphémérides).
Pour observer ce passage dès le début, il
faudra prévoir un horizon dégagé côté est.

La trajectoire décrite par
Vénus devant le Soleil
pour un observateur
géocentrique
le 8 juin 2004.
2) Pourquoi le phénomène est-il rare ?
D'après les lois de la mécanique céleste ces rencontres se reproduisent tous les 105,5
ans et 8 ans, puis 121,5 ans et 8 ans. Ensuite on reprend cette pseudo périodicité, qui
au total sur 243 ans, conduit à des passages presque similaires, ce qui représente la
vraie périodicité du phénomène. Ce prochain passage, suit celui du 6 décembre 1882 et
précède celui du 6 juin 2012 dont la France ne verra que la fin au petit matin.
"L'étoile du Berger" des
anciens, n'est autre que le
troisième astre dans
l'ordre des éclats après le
Soleil et la Lune.
Comme la Lune, Vénus
présente des phases, mais
avec des diamètres
apparents qui varient
fortement.
Sa trajectoire, quasi-
circulaire en fait la planète
avec la plus petite
excentricité.
Vénus passe tous les 584
jours entre la Terre et le
Soleil lors de ce que l'on
appelle une conjonction
inférieure. Mais le plan de
l'orbite de Vénus est
incliné par rapport à celui
de la Terre de 3,4°.
Pour qu'il y ait un passage possible de Vénus devant le disque solaire il faut que le
Soleil, Vénus et la Terre soient alignés.
C'est à ce moment que le diamètre apparent de l'astre est le plus grand et juste
suffisant pour être perçu par un œil correctement protégé si on regarde la planète
défiler devant le Soleil; ce sera le cas du 8 juin prochain.

3) Vénus, un monde particulier.
a) Un peu de mythologie.
http://www.bdl.fr/ephem/passage/html/venus_presentation_courte.ppt
Par son éclat incomparable, Vénus représente la déesse de la beauté et de l'amour
dans les diverses civilisations du bassin méditerranéen. De la Mésopotamie à Rome
en passant par la Grèce, la déesse de la fécondité se nomme tour à tour, Ishtar,
Aphrodite puis Vénus en connaissant d'innombrables aventures amoureuses, au gré
des cultures. En Amérique centrale, le calendrier rituel des Mayas se réfère aux
révolutions de Vénus.
b) Les caractéristiques de Vénus.
A peine plus petite que la Terre, la deuxième planète accomplit une révolution autour
du Soleil, en 225 jours.
La rotation de la planète sur elle-même se fait très lentement en 243 jours terrestres
mais dans le sens rétrograde, par rapport à celui de sa révolution. Ainsi, le Soleil se
lève à l'Ouest pour se coucher à l'Est. La combinaison de ces deux données, fait que
le jour sur Vénus dure 117 jours. C'est l'intervalle de temps qui sépare deux midis
consécutifs.
Vénus se cache sous une atmosphère très dense de dioxyde de carbone. Un effet de
serre considérable en fait une planète inhospitalière. Au sol la pression vaut 90 à 92
fois la pression atmosphérique. De jour comme de nuit, la température frôle les 470
°C ; il n'y a donc pas les écarts importants que l'on trouve sur Mercure, la Lune ou
Mars. Le sol est désespérément sec. Durant la journée, la luminosité ambiante est
celle d'un ciel d'orage sur Terre.
La haute atmosphère connaît des tourbillons puissants (360 km/h), qui transportent
des gouttelettes d'acide sulfurique qui se décompose avant d'arriver au sol. Les
basses couches de l'atmosphère tournent, lentement, en bloc avec la planète.
c) Quelques valeurs propres au 8 juin 2004.
- Distance Soleil, Terre : 151, 8 millions de km.
- Distance Soleil, Vénus : 108,6 millions de km.
- Distance Terre, Vénus : R = 43,2 millions de km.
On peut alors calculer l'angle ; sous lequel un observateur voit Vénus depuis la
Terre.
Donnée :
Rayon de Vénus : r = 6052 km.
Cet angle voisin de 58'' d'arc est proche
du seuil de l'acuité visuelle, d'un œil dit
normal.
4) Comment observer le passage de Vénus ?

Observer le passage de Mercure ou de Vénus devant le Soleil, c'est d'abord observer
le Soleil, avec toutes les précautions ophtalmiques qui s'imposent, avec ou sans
instrument. L'observation directe du Soleil est dangereuse et peut entraîner des lésions
irréversibles de l'œil.
Se reporter aux textes officiels parus lors de l'éclipse totale de Soleil de 1999 :
http://www.sante.gouv.fr/htm/actu/34_990407.htm
RAPPEL : il faut S'INTERDIRE les minuscules filtres, notés (SUN), qui sont
généralement vendus avec les petits appareils du commerce et que l'on visse
sur les oculaires. Placés tout près de l'image solaire que donne l'objectif, ils
risquent d'éclater subitement en exposant l'œil à de graves brûlures rétiniennes
irréversibles et ceci sans la moindre sensation de douleur !
a) Sans instrument.
Le diamètre apparent de Vénus, le 8 juin prochain sera tel, qu'il se situe juste au seuil
de l'acuité visuelle d'un œil humain qualifié de normal. C'est une occasion de tester
ce critère visuel, dans la matinée du 8 juin, à condition de placer devant ses yeux un
écran filtrant ne laissant passer que 1/100000 de la lumière solaire. Le verre de
soudeur de grade 14 (pas au-dessous) constitue le filtre idéal garanti à vie. C'est le
moment de contacter des spécialistes en soudure industrielle, pour qu'ils vous
procurent ces précieux filtres, portant la norme EN/ 169 : 1992. On déconseille
fortement les lunettes distribuées lors de la dernière éclipse totale de Soleil, car non
garanties dans la durée.
Des écrans filtrants fabriqués à l'occasion de ce passage, sont conformes à la norme
européenne 89/686/CEE, s'ils sont certifiés par le symbole CE ; ils seront diffusés
avec certaines revues d'astronomie.
b) Avec instruments et par projection.
Le Solarscope® et le Vénuscope®
Ces dispositifs simples, en forme de caisse mobile sur socle, constituent un moyen
efficace, pour projeter aisément le phénomène. On peut même photographier, l'image
du Soleil sur l'écran.
Lunettes et télescopes de petits diamètres.
La planète Vénus, de taille et de masse comparables à celles de la Terre, bien que
légèrement inférieures, est un astre assez facile à observer. Galilée en 1610, fut le
premier à voir des phases comme la Lune en présente, même avec les modestes
lunettes de l'époque.
La méthode classique de projection du Soleil sur un écran, avec l'aide d'une lunette
ou d'un télescope, offre une observation collective très appréciée. Cette méthode
simple, demande pour l'occasion, à être optimisée pour avoir une chance de voir
une jolie tache noire défiler devant le Soleil. La planète aura un diamètre angulaire de
58'' d'arc soit environ 1/30ème du diamètre angulaire solaire. Sur une image projetée
du Soleil ayant 90 mm de diamètre, Vénus apparaîtra donc comme un disque de
presque 3 mm de diamètre. Pour améliorer le contraste, on aura pris soin de placer
un grand carton juste percé d'un passage pour l'objectif de la lunette. Ainsi l'image du
Soleil sera dans une zone de pénombre plus confortable pour l'œil.
On opèrera de même avec un télescope de type Newton, en aménageant un espace
assombri autour de l'image projetée, celle-ci étant obligatoirement, d'après la nature
du télescope, renvoyée dans une direction à 90° de celle du Soleil. Ce type de
télescope est le seul qui convienne, car le tube est ouvert : il ne possède pas de lame
de fermeture et permet des échanges thermiques avec l'extérieur. De plus on aura

pris soin de travailler en ouverture réduite, avec un oculaire de focale 1 à 2 cm avec
intérieur métallique.
Afin d'obtenir une image très agrandie du Soleil, allant jusqu'à 70 cm de diamètre,
voire 100 cm, on peut utiliser une méthode encore plus intéressante. Elle consiste à
ne faire sortir d'une fenêtre, d'un local fortement assombri par rideaux ou système de
volets, que l'objectif d'une lunette. Chacune de ces techniques aura été testée bien à
l'avance pour être fin prêt. Il en est de même pour les autres recommandations qui
suivent. Dans tous les cas on choisira un oculaire d'initiation de type "Huyghens"
avec intérieur en laiton et non en matière plastique.
c) Avec un filtre au 1 / 100 000 en transmission, bien fixé devant l'objectif.
Observation classique individuelle avec une lunette astronomique ou un
télescope
Si on dispose d'un tel filtre pleine ouverture, et en pratiquant un grossissement
raisonnable proche du grossissement résolvant, on profitera d'une image bien
contrastée, révélant tous les fins détails accessibles à l'œil. Ces filtres visuels sont
disponibles pour chaque type d'instrument, chez les revendeurs de matériel
astronomique. Cet investissement assure la sécurité pour l'œil et la qualité des
images pour des années. De plus, cette disposition évite tout risque d'échauffement à
l'intérieur de l'instrument. On opère ainsi avec l'esprit tranquille.
Imagerie vidéo collective avec une lunette astronomique ou un télescope
- Avec un caméscope on filmera, de très près, derrière un oculaire de grande focale,
en disposant un raccord opaque entre les deux instruments. Le caméscope permet
de filmer et d'envoyer une image sur un écran géant via un vidéo projecteur par
exemple.
- Pour la webcam, il faut disposer d'un modèle avec raccord spécifique se vissant à
la place de son objectif. L'ensemble est placé au foyer de l'instrument équipé, bien
évidemment, de son filtre pleine ouverture en entrée. Le tout sera relié à un
ordinateur pour l'acquisition et le relais des images sur écran. Compte-tenu de la
taille du capteur, cette nouvelle technique ne restituera qu'une partie du Soleil avec la
planète Vénus qui défilera lentement. L'idéal est de travailler avec une focale courte
de 30 à 50 cm. Pour des questions de visée, il est presque indispensable dans ce
cas, d'avoir une monture équatoriale motorisée offrant des réglages fins.
5) Quelles activités proposer aux élèves ?
Dès 1691, E. Halley, décrit une méthode nouvelle, de mesure de la distance de la
Terre au Soleil. Elle s'appuie sur le chronométrage de la durée totale du passage de
Vénus devant notre étoile, pour des observateurs aussi éloignés que possible, sur le
globe terrestre. La distance Terre-Soleil étant connue, celle des autres planètes l'est
aussi grâce à la troisième loi de Képler.
http://www.ac-nice.fr/clea/MercureVenus/venus1.htm
Ainsi les passages de 1761 et 1769 puis 1874 et 1882, ont conduit des astronomes de
par le monde, au service de cette méthode.