UNE OU DES DISCIPLINES EN SCIENCES SOCIALES ? Il existe donc de nombreuses disciplines pour comprendre les sociétés humaines, disciplines qu’on appelle « sciences sociales ». Mais y en-a-t-il une, deux, dix ou plus ? Ces disciplines sont elles vraiment distinctes les unes des autres ou y a-t-il des ponts entre elles ? Certaines disciplines sont si proches qu’il est parfois difficile de les distinguer les unes des autres : on ne parle pratiquement plus de folklore tant les objectifs et la démarche de cette discipline ressemblent à ceux de l’ethnologie. Bon nombre de résultats en psychologie sociale ont été réintégrés en sociologie et on peut dire que les deux disciplines coopèrent intimement. De même, il y a beaucoup de liens possibles entre ethnologie et sociologie, à tel point que de nombreux sociologues ont repris la méthode préférée des ethnologues, l’observation participante. Mais il ya des sociologues, comme Gerald Bronner, qui ne dédaignent pas utiliser les expérimentations chères aux psychologues. La sociolinguistique est un peu plus à part mais on a vu que certains sociologues et ethnologues ne l’ont pas dédaignée. En fait, il ya une seule discipline qui semble faire bande à part, c’est la science économique : on n’y procède pas à des entretiens, des expérimentations ou des observations participantes. Quand elle s’intéresse au données réelles, c’est sous la forme de recherche de corrélations et de causalité entre données macroéconomiques (comme le PIB, la consommation, le revenu national, etc,...). Dans sa version « microéconomie néo-classique », cette discipline ne s’occupe pas de « terrain » et « d’individus réels » mais on travaille sur des « modèles » , des mondes plus ou moins irréels où agissent des homo oeconomicus rationnels et plus ou moins bien informés. Cette deuxième version a d’ailleurs largement dominé la recherche en économie ces dernières décennies. Mais face au caractère parfois peu réaliste de ces analyses, la recherche économique s’est tournée vers d’autres chemins possibles. Certains ont accordé plus de place à l’Histoire et développé une discipline à part entière qui est « l’Histoire économique » (Histoire qui est présente dans les travaux des économistes importants du passé comme Marx ou Schumpeter). D’un autre côté, la « sociologie économique » s’est développée au début du 20ème siècle avec Durkheim, Simmel ou Max Weber avant de disparaitre du paysage de la recherche et de réapparaitre dans les années 1970 (« nouvelle sociologie économique ») avec des auteurs comme Mark Granovetter. D’autres, comme Karl Polanyi, ont même convoqué les données ethnologiques. Face aux limites de l’homo oeconomicus, des économistes ont procédé à des expérimentations empruntées à la psychologie soit en laboratoire (Kahnemann et Tversky), soit sur le terrain (Dan Ariely). Dans une autre tradition, des sociologues comme Florence Weber ont développé « l’ethnographie économique » qui consiste en l’observation des comportements des individus en économie (quels usages ils font de l’argent par exemple). Enfin, certains économistes comme André Orléan pensent que la science économique doit s’ouvrir à toutes les disciplines sociales, l’Histoire (qui en est une), la sociologie, l’ethnologie, la psychologie sociale,... Bref, ils pensent que toutes ces traditions disciplinaires donnent un éclairage pertinent sur le monde social et qu’on doit les utiliser conjointement avec l’économie. Cependant, et malgré la pluralité des ces approches, la recherche en économie reste largement cantonnée dans la construction de modèles très mathématisés. Il est donc bon de savoir qu’un élève qui s’inscrirait en faculté de sciences économiques aurait peu de chances de faire des SES mais ferait beaucoup de microéconomie, de macroéconomie (mathématisée) et de comptabilité. 1