LES ACCIDENTS VASCULAIRES CEREBRAUX Définition : Les AVC constituent un groupe de maladies du système nerveux central (S.N.C.) caractérisées par une perturbation brutale de sa vascularisation. L’intérêt à ces pathologies pour une infirmière ou une aide soignante est la prise en charge, dans le cadre des soins infirmiers, à apporter aux patients souffrant de ces pathologies. Sur le plan épidémiologique, la morbidité et la mortalité de ces pathologies n’est pas négligeables. Elles constituent dans tous les pays du monde un grand problème de santé publique. La prise en charge des patients qui présentent des séquelles des AVC absorbe une grosse partie du budget réservé aux soins de santé. Vascularisation du S.N.C. : on distingue deux grands territoires de vascularisation artérielle du parenchyme cérébrale. Le territoire carotidien, antérieur et le territoire vertébro-basilaire, postérieur. Territoire Carotidien : La carotide primitive gauche se détache de la crosse aortique La carotide interne se détache de la carotide primitive à la hauteur de l’angle mandibulaire et pénètre dans le crâne. Elle traverse le sinus caverneux et forme à ce niveau le siphon carotidien. A sa sortie du sinus caverneux, elle se divise en ces trois branches terminales à la hauteur de la selle turcique, qui sont : l’artère cérébrale antérieure, l’artère cérébrale moyenne ou artère sylvienne, l’artère ophtalmique et l’artère communicante postérieure. La carotide primitive droite se détache du tronc brachio-céphalique qui provient lui-même de la crosse aortique. Il suit le même cheminement que la carotide primitive gauche et donne naissance à la carotide interne droite qui se comporte comme la carotide interne gauche. Territoire Vertébro-Basilaire : Les deux artères vertébrales gauche et droite se détachent des artères sous-clavière gauche et droite. Elles passent, ensuite dans le canal constitué par les trous des apophyses transverses des vertèbres cervicales jusqu’à la jonction bulbo médullaire. L’artère basilaire est constituée par l’unification des artères vertébrales droite et gauche sur la ligne médiane, à la hauteur de la jonction bulbo médullaire et sur la face ventrale du bulbe rachidien. A la hauteur de jonction diencéphalo-mésencéphalique, l’artère basilaire donne ses branches terminales qui sont les artères cérébrales postérieures gauche et droite qui se dirigent vers les pôles occipitaux des hémisphères cérébraux. Le territoire carotidien communique avec le territoire vertébro-Basilaire par les artères communicantes postérieures situées entre la carotide interne et l’artère cérébrale postérieure de chaque côté. A ce niveau, les deux territoires artériels cérébraux forment un système de communication inter artériel appelé polygone de Willis. Vers l’avant, les deux artères cérébrales antérieures communique entre elles par la communicante antérieure. Vers l’arrière, les carotides communiquent avec les artères cérébrales postérieures pas les deux communicantes postérieures. Si par hasard la pression sanguine chute dans une des artères du territoire antérieur, une compensation se crée automatiquement à partir du territoire postérieur et vice versa. Illustration de la Vascularisation Cérébrale. Carotide Interne (1) et l’une de ses branches terminales l’artère cérébrale antérieure (3) qui donne à son tour trois branches terminales qui sont l’artère frontopolaire (4), l’artère péri calleuse (9) et l’artère callosomarginale (5). Vascularisation des deux tiers antérieures de la face interne des hémisphères cérébraux, des pôles frontaux et de la base des deux lobes frontaux. La carotide interne (1) et l’artère cérébrale moyenne (artère temporaux et une partie du diencéphale. sylvienne) (2) qui donne deux ou trois branches terminales selon les individus. Vascularisation des deux tiers antérieurs de la convexité des hémisphères cérébraux y compris les deux lobules supérieurs des lobes L’artère vertébrale (1), l’artère basilaire (4) et les différentes branches de l’artère basilaire : l’artère cébélleuse postéro inférieure (3), l’artère cérébelleuse antero-inférieure (5) et l’artère cérébelleuse supérieure (6). Vascularisation du tronc cérébral et du cervelet. L’artère cérébrale postérieure (6), branche terminale de l’artère basilaire pour la vascularisation du tiers postérieur de la convexité et de la face interne des hémisphères cérébraux y compris le lobule inférieur des lobes temporaux et une partie du diencéphale par ses branches lenticulo-striées (7). On remarque nettement l’artère communicante postérieure (14) entre la carotide interne en avant (15) et l’artère cérébrale postérieure en arrière (6). Polygone de Willis : Carrefour entre le territoire carotidien et le territoire vertébro-basilaire. Différents types D’AVC On distingue deux grands groupes d’AVC : Les AVC ischémiques causés par une interruption brutale de la circulation encéphalique par un caillot de sang (AVC emboliques), ou par obstruction d’un tronc artériel par une thrombose (AVC thrombotiques). Les AVC hémorragiques causés par une hémorragie pouvant survenir soit dans le parenchyme cérébral (Hémorragie intra parenchymateuse), soit dans les espaces sous-arachnoïdiens (Hémorragie sous-arachnoïdienne ou Hémorragie méningée). Les AVC ISCHEMIQUES On en distingue deux sortes : Les AVC constitués ou AVC tout court, caractérisés par un déficit neurologique permanent avec séquelles de longue durée, avec ou sans récupération. Les Accidents Ischémiques Transitoires (AIT), caractérisés par un déficit neurologique n’excédant pas 48 à 72 heures. Il y a récupération totale sans séquelles. Le ct scan est en ordre général négatif pendant et après. Les AVC ischémiques constituent à eux seuls 70% des accidents vasculaires cérébraux. 80% d’AVC ischémiques surviennent dans le territoire carotidien et 20% dans le territoire vertébro-basilaire. Dans les AVC ischémiques emboliques, le caillot peut provenir soit du cœur (AVC ischémique d’origine cardiaque), soit de la paroi vasculaire à partir d’une plaque d’athérome. Le caillot ainsi lâché dans, la circulation sanguine, va obstruer, selon le territoire, un vaisseau de moyen ou de petit calibre selon sa dimension. Dans les AIT, le caillot est vite délité avant que l’ischémie ne devienne irréversible d’où le caractère transitoire de l’AIT. Dans les AVC thrombotiques, le processus thrombotique se constitue à partir d’une plaque d’athérome composée de substances de nature lipidique et plus particulièrement de cholestérol. La plaque grossit progressivement et provoque ainsi une diminution de la lumière vasculaire suivie d’une chute du débit sanguin en aval de la plaque d’athérome. Deux événements peuvent se produire à ce niveau : soit que la plaque s’ulcère ; il s’en suit une adhésion des plaquettes et des globules rouges avec formation d’un thrombus qui peut se détacher et aller obstruer un vaisseau de moyen ou de petit calibre. Ceci nous ramène à l’AVC ischémique d’origine vasculaire ; soit que le processus thrombotique évolue très rapidement et augmente de volume jusqu’à l’occlusion totale ou quasi totale du tronc artériel et provoque ainsi une ischémie dans le territoire encéphalique irrigué par ce tronc artériel. Ce phénomène se remarque souvent au niveau des artères cérébrales. Causes d’AVC ischémiques selon les Groupes d’âges. Chez des personnes âgées de plus de 45 ans : AVC Cardioemboliques : 19% Gros vaisseaux : 9% Petits vaisseaux : 26% Pathologies propres aux vaisseaux : 5% Cryptogénétiques et Idiopathiques : 40% Chez des personnes de moins de 45 ans : AVC cardioemboliques : 17,6% Gros vaisseaux : 7,9% Petits vaisseaux : 7,9% Autres causes (Hématologiques, Dissections Artérielles, Maladies du tissu conjonctif, Moya-Moya etc..) : 30,4% Cryptogénétiques et Idiopathiques : 34,3% Les causes cardioemboliques sont dominées par la fibrillation auriculaire qui représente 70% des AVC d’origine cardiaque. Les autres arythmies cardiaques, les thrombi intracardiaques et les tumeurs endocardiaques représentent un faible pourcentage. Au niveau de petits vaisseaux, les emboles constituent la cause essentielle d’occlusion responsable d’AVC qui sont le plus souvent lacunaires. Au niveau de gros vaisseaux, deux phénomènes peuvent se produire, soit une occlusion par emboles, soit une thrombose. L’embole se détache généralement d’une plaque athéromateuse et va occlure une artère en aval. Ce phénomène peut-être responsable soit d’un AIT, soit d’un AVC constitué. La thrombose se constitue sur une plaque d’athérome d’une manière lentement progressive et peut rester asymptomatique (Cas des thromboses carotidiennes) ou d’une manière très rapidement progressive, dans les AVC progressifs (progerssive stroke), Dans les dissections artérielles, l’hématome formé dans l’espace de séparation des feuillets artériels obstrue la lumière artérielle soit partiellement, soit complètement entraînant ainsi la chute brutale du débit sanguin en aval dans le territoire irrigué par cette artère. Dans certains cas, il peut y avoir ulcération de l’intima vasculaire qui peut favoriser la formation d’un thrombus, point de départ de caillots sanguins, pouvant provoquer soit un AIT, soit un AVC. Moya-Moya est une maladie thrombotique des vaisseaux du polygone de Willis responsable de lâchage des emboles dans le territoire carotidien. Cette maladie est fréquente au Japon. ILLUSTRATIONS DES AVC ISCHEMIQUES AVC ischémique étendu dans le territoire de l’artère sylvienne gauche (AVC sylvien). Cet aspect étendu de l’ischémie est lié à une thrombose totale du tronc principal de l’artère sylvienne . Image IRM. Angiographie IRM de la carotide montrant la portion terminale de la carotide primitive et sa bifurcation en carotide interne à gauche et en carotide externe à droite. On distingue nettement la thrombose de la carotide interne peu après sa bifurcation avec effacement total da sa lumière. Image angiographique IRM LES AVC HEMORRAGIQUES On en distigue deux sortes : Les hémorragies intraparenchymateuses : elles surviennent dans le parenchyme cérébral et peuvent être causées par une malformation vasculaire, une fragilisation de la paroi artérielle dans certaines maladies entre autre une hypertension artérielles (50 à 60% des cas), angiopathie amyloïde cérébrale, troubles de la coagulation, traitement anticoagulant, agents fibrinolytiques, au cours d’AVC ischémiques à la suite d’une reperfusion de la zone ischémie ou à la suite d’une élévation brusque de la tension artérielle (transformation hémorragique d’un AVC ischémique). Au cours d’une hémorragie intraparenchymateuse, il y a formation d’un hématome dont les conséquences sont fonction de sa dimension. Un gros hématome entraîne un refoulement et une compression des structures saines et augmente la pression intracrânienne et la souffrance des structures vitales. Lorsque l’hématome est juxta ventriculaire, il peut se rompre dans la cavité ventriculaire et inonder ainsi tous les ventricules jusqu’au 4ème ventricule (hémorragie intra ventriculaire). ILLUSTRATION DE L’HEMORRAGIE INTRAPARENCHYMATEUSE Gros hématome intra parenchymateux diencéphalique (région thalamo-capsulolenticulaire) Hémorragie intraventriclaire inondant les deux ventricules latéraux (sang dans les cornes occipitales) et le troisième ventricule. On remarque nettement l’hématome responsable dans la région thalamo-striée droite. L’hémorragie sous-arachnoïdienne : survient dans les espaces sousarachnoïdiens. Elle est généralement causée par la rupture d’un anévrysme artériel. Le croquis ci-dessous montre les différents emplacements des anévrysmes artériels intracrâniens responsables des hémorragies sous-arachnoïdiennes. ACA= Artère cérébrale antérieure à la bifurcation entre l’artère péricaleuse et l’artère callosomarginale. ACOM= Artère communicante antérieure. MCA= Artère cérébrale moyenne. ICA= Carotide interne. PCA= Artère cérébrale postérieure. BA= Artère basilaire. Vertebral= Artère vertébrale PICA= Artère cérébelleuse postéroinférieure, variante vertébrale. SEMIOLOGIE DES AVC LE TERRITOIRE ATTEINT. 1° Territoire Carotidien : Amaurose monoculaire ipsilatérale (perte de la vue du même côté que la lésion) Hémianopsie homonyme controlatérale (amputation des champs visuels du côté opposé à la lésion). Hémiplégie ou hémiparasite controlatérale. Perte de la sensibilité ou maladresse de la main, du bras, de la face ou de la jambe. Aphasie et/ou dysphasie (Troubles du langage). 2° Territoire Vertébro-Basilaire : Amaurose bilatérale Vertiges Ataxie Parésie ou anesthésie bilatérale, Unilatérale ou alternante Dysarthrie Dysphagie Diplopie Ou Combinaison de tous ces signes CONDUITE à TENIR et PRISE en CHARGE. Dans les AVC Ischémiques. 1° Mesures Générales. Avant toute chose, il faut déterminer le niveau de conscience et libérer les voies respiratoires selon le niveau de conscience et mesurer la tension artérielle. On ne peut la baisser que si elle dépasse 20 cm de maxima. Ne pas la descendre en dessous de 18 cm de maxima au risque de baisser la perfusion cérébrale. Ensuite, faire un ct scan cérébrale à blanc d’urgence pour faire le diagnostic entre une ischémie et une hémorragie. En cas d’ischémie, le ct scan semble normal au tout début. Faire un examen cardiaque et un ECG pour rechercher une étiologie cardio-embolique. Le reste du bilan cardiaque peut-être poursuivi en hospitalisation. L’examen neurologique servira à déterminer le dégré de déficit neurologique et sa topographie. Si le déficit neurologique est important dans un contexte d’installation brutale de l’AVC, il faut penser en priorité à une cause cardio-embolique. Si l’AVC est d’installation rapidement progressive, il faut penser en priorité à une thrombose des gros vaisseaux intracrâniens. Si le déficit neurologique est important et s’il est accompagné de troubles de la conscience, il faut craindre une ischémie massive. Dans ce cas il faut éviter de donner des anti-coagulants et les différer de 72 à 96 heures. Sinon il y a risque de transformation hémorragique du foyer ischémique. Si l’état neurologique du patient se détériore au cours de deux jours qui suivent, il faut penser à une augmentation de la pression intracrânienne (suite à un œdème). Il faut alors rechercher les signes d’engagement temporal sur le bord interne de la tente du cervelet (mydriase ispsilatérale) ou d’engagement des amygdales cérébelleuses entre le tronc cérébral et le bord du trou occipital (risque de compression des centres vitaux). Si la détérioration survient au delà de deux jours, il faut penser à une transformation hémorragique du foyer ischémique et songer à demander un ct scan cérébral à blanc. 2° Traitement Médicamenteux. Traitement anti-oedémateux : Corticoïdes en IV (ce traitement est actuellement controversé). Couverture anti-épileptique (La dépakine est habituellement utilisée en IV parce que c’est un produit polyvalent, ayant peu d’effets secondaires immédiats et quasi le seul à avoir une forme IV, à part la diphantoïne dont la solution a un ph trop basique avec des effets néfastes sur le cœur). Lutter contre l’hyperglycémie : faire baisser toute glycémie supérieure à 200 mg%. Lutter contre l’hypoglycémie : remonter toute glycémie inférieure à 60 mg%. Si preuve évidente d’une cause cardio-embolique : Faire un traitement anti coagulant à l’héparine IV. Le différer si foyer ischémique étendu avec trouble de la conscience. Le mettre d’emblée si petit foyer sans trouble de la conscience. Si occlusion des gros vaisseaux intracrâniens : discuter traitement par thrombolyse (non applicable au-delà de trois heures après l’apparition des symptômes). Traitement anti coagulant si signes évidents d’une thrombose progressive (progressive stroke). Si on n’a pas d’étiologie évidente : Mettre un traitement anti agrégant plaquettaire (Acide acétyl-salicylique, Ticlopidine, Clopidogrel), Traitement aux héparines à faibles poids moléculaires pour prévenir une thrombose veineuse profonde aux membres inférieurs pour les patients à risque ou les patients qui bougent peu ou pas du tout. Mesures neuroprotectrices : Anti-occidents, Bloqueurs des récepteurs glutamatergiques, Anti NO etc… Prévention des facteurs de risque : Hypertension Artérielle, Diabète, Tabagisme, Obésité, Hypercholéstérolémie, Alcoolisme. Essai de stabilisation de la fibrillation auriculaire et d’autres affections cardiaques emboliques (valvulopathies, coronaropathies, cardiomyopathies congestives et hypertrophie ventriculaire gauche) Soins de nursing appropriés selon l’état de chaque patient. Dans les AVC Hémorragiques ; Le traitement d’une hémorragie méningée est une urgence neurochirurgicale absolue. Cure de l’anévrysme quelque soit l’endroit où il se trouve. On peut administrer un anticalcique pour éviter un spasme artériel diffus pouvant compliquer le tableau. Le traitement de l’hématome intra parenchymateux est symptomatique et attentiste si l’hématome est de petite taille. Un gros hématome s’accompagnant d’une hypertension intracrânienne peut-être drainé chirurgicalement selon son accessibilité. Une hémorragie intra ventriculaire est quasi fatale. Il n’y a pas de mesures thérapeutiques particulières. On recherche beaucoup plus le confort du patient.