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Même si quasiment tous les éléments chimiques plus lourds que l’hélium sont fabriqués par
les étoiles2, le détail de cette « nucléosynthèse » nous est à priori inaccessible, puisqu’elle
se produit au cœur des étoiles, alors que seules les couches externes (les atmosphères) des
étoiles sont observables.
Plus précisément, la moitié des éléments chimiques plus lourds que le fer est fabriquée par
des étoiles ressemblant au Soleil, mais dans une phase avancée de leur évolution : elles
sont alors des étoiles géantes rouges. Le Soleil passera par cette phase dans environ 4
milliards d’années.
Au cœur de telles étoiles, des neutrons sont capturés par les noyaux de fer présents dans
l’étoile depuis sa formation, pour former des éléments de plus en plus lourds, jusqu’au plomb
et au bismuth, les plus lourds éléments stables.
La température à laquelle se produisent ces réactions conditionne la réaction nucléaire qui
produit les neutrons à l’origine de la nucléosynthèse : si la température est supérieure à 300
millions de degrés, les neutrons sont produits par une réaction impliquant 22Ne, dans le cas
contraire, ils proviennent de 13C. Mais cela nous ramène au problème d’Eddington : comment
mesurer la température au cœur d’une étoile ?
La mesure de la fraction de l’élément Zr existant sous la forme de son isotope 93Zr est très
sensible à la température. Malheureusement, il est impossible de mesurer l’abondance de
93Zr dans les étoiles. Par chance, le 93Zr est instable et se désintègre en 1.5 millions
d’années en 93Nb, le seul isotope stable de l’élément Nb. Trouver des étoiles qui ont fabriqué
des éléments lourds il y a plus de 1.5 millions d’années n’est pas chose aisée, car ces
étoiles continuent leur évolution : elles ont pu éjecter leur enveloppe et finir leur vie sous
forme d’une naine blanche difficilement détectable et sans trace visible de leur
nucléosynthèse passée.
Les astrophysiciens ont alors eu l’idée de mesurer les abondances dans des étoiles
appartenant à un systèmes binaire, dont une composante a été, dans un passé lointain, une
étoile géante rouge fabriquant des éléments lourds. En éjectant son enveloppe, elle a pollué
l’étoile voisine en éléments lourds : ce compagnon garde ainsi la trace d’une nucléosynthèse
passée, à quelques modifications près : tout le 93Zr est devenu du Nb. La mesure du rapport
Nb/Zr donne accès à la température à laquelle le 93Zr a été produit.
En pratique, la détermination des abondances à la surface des étoiles est réalisée par la
spectroscopie, en analysant les raies spectrales, véritables empreintes digitales que les
atomes impriment à la lumière avec laquelle ils interagissent. Ces signatures sont donc
présentes dans la lumière qui nous parvient de ces étoiles. On peut ainsi déterminer les
abondances des différents éléments chimiques présents à la surface des étoiles. Ces
abondances ont été ensuites comparées aux prédictions des modèles d’évolution des
étoiles, et aux modèles décrivant leur nucléosynthèse.