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de mieux en mieux la façon dont les failles dans l’adaptation à l’environnement ont pu précipiter
l’effondrement des civilisations anciennes (Diamond, 2007). Selon ce dernier, ce sont les sociétés les moins
préparées à un choc climatique ou les plus vulnérables qui ont le moins bien résisté. « La disparition des
Vikings ou des Mayas, consécutive à la surexploitation des écosystèmes dans un contexte de changement
climatique, n’était pas une fatalité. Elle aurait pu être évitée si ces sociétés avaient accepté de remettre en
cause leur mode de vie et leurs valeurs… Si nous ne prenons pas les bonnes décisions, dans quelques
décennies, l’effondrement risque d’être global »
.
Les vagues de chaleur et spécialement celle de 2003 ont permis la mise en place de systèmes de
vigilance qui se sont imposés en raison du changement climatique qui insistait sur l’augmentation de la
fréquence de ce type d’événement. Selon les enquêtes de l’Institut national de prévention et d’éducation
pour la santé (INPES), 63 % des Français ont, en 2006, adopté des mesures de prévention pour se protéger
de la chaleur, et 73 % de ceux qui connaissaient dans leur entourage une personne âgée, isolée ou
vulnérable ont pris au moins une mesure d’aide ou d’accompagnement à son égard. Ces mesures de
protection ayant néanmoins été assez inégalement mises en œuvre selon les endroits, on comprend qu’il n’y
ait pas eu en 2006 de relation directe, d’une région à l’autre, entre l’intensité de canicule et la surmortalité
observée. Le cas de Marseille est à cet égard particulièrement flagrant, avec une vague de chaleur de 35
jours, soit la plus longue des grandes villes françaises, et pourtant une légère sous-mortalité (-0,5 %). Cette
« anomalie » s’explique par les dispositions prises, dès 1985, au moment d’une canicule particulièrement
meurtrière dans le sud de la France.
Enfin, on se doit au moins d’envisager un phénomène d’adaptation naturelle et culturelle, efficace
face à la chaleur et sans doute aussi face au froid. Une telle adaptation est d’ores et déjà favorisée par les
plans de vigilance et d’alerte mis en place, et chaque fois accompagnés de conseils de comportements
fortement médiatisés. Or, comme pour tous les dispositifs de prévention, l’organisation de l’information
représente un point nodal de la réussite de la prévention mais bien difficile à établir de manière efficace. Le
parti adopté par le plan de vigilance français est intéressant à cet égard puisqu’il s’appuie sur les réseaux
locaux de solidarité sociale. Ce dispositif très humain est sûrement plus efficace que la distribution de tracts
ou l’insertion d’encarts publicitaires. Effectivement, si on ne peut pas éviter l’irruption de la chaleur, de
nombreuses mesures d’accompagnement peuvent être conseillées grâce à une politique d’information
pertinente pour éviter la multiplication des climatiseurs. Cet élément de confort intervient à contre temps
par rapport à la crise énergétique. L’augmentation des appareils de réfrigération et de climatisation pèse sur
l’approvisionnement énergétique de la France car en été le niveau des retenues hydroélectriques est au plus
bas.
Il convient de distinguer les actions qui permettent de mieux affronter les vagues de chaleur en
minimisant leur influence néfaste de celles qui auraient pour objectif d’agir sur le changement climatique en
essayant de le modérer. Parmi ces actions de prévention, la décarbonisation est essentielle mais d’autres
mesures d’urbanisme peuvent réduire l’îlot de chaleur urbain et limiter ainsi les conséquences sanitaires de
l’urbanisation galopante du monde contemporain. Ainsi mitigation et adaptation, loin de s’exclure peuvent
se renforcer l’une l’autre.
L’exemple de la canicule montre combien la recherche de l’adaptation ne passe pas nécessairement
par des solutions coûteuses et techniques. Néanmoins, c’est en anticipant les situations qu’il est possible de
dégager des solutions qui, au lieu de creuser les inégalités, peuvent s’appuyer sur des solidarités plus fortes.
Cependant, avant d’anticiper sur les solidarités, il est nécessaire de ne pas considérer la société
comme uniforme vis-à-vis du changement climatique et du positionnement des individus vis-à-vis de ce
phénomène.
Les expériences menées au sein de l’APPA, en collaboration avec l’UNAF, sur les représentations du
changement climatique, de la qualité de l’air intérieur, etc. des populations, à travers des entretiens et des
focus groups montrent combien les catégories d’âge, que l’on parle de la jeunesse ou des personnes à la
retraite notamment, se différencient
dans la société, et ce au niveau de leurs centres d’intérêt, de leur
Le Monde, 9 janvier 2009.
GALLAND O., Sociologie de la jeunesse, Paris, Armand Colin, 2001.