Les Etats-Unis et le monde 1917-1989 (Delphine Calin, Luc Cronier

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Dossier documentaire réalisé par Delphine Calin, Luc Cronier et Nadir Teurki
Les Etats-Unis et le monde, 1917-1989
Eléments bibliographiques
Les Etats-Unis et le monde au XX° siècle, Yves-Henri Nouailhat,
Armand Colin, U, 2000
Les collections de l’Histoire, H.S. n°7 « L’Empire américain »,
février 2000
Les Etats-Unis au XXe siècle, Jacques Portes, Prépas Histoire,
Armand Colin, 1997
Les Américains, André Kaspi, Points Histoire
Histoire des Etats-Unis, Pierre Mélandri, Nathan Université, 2000
Histoire des Etats-Unis, Bernard Vincent, Champs Histoire,
Flammarion
Les relations internationales de 1818 à 1939, Pierre Milza, Cursus
Armand Colin, 2002
Histoire du XXe siècle, le monde entre guerre et paix 1945-1973
(tome2), Milza – Berstein, Hatier
Histoire du XXe siècle, la fin du monde bipolaire Tome 3 (19731990), Milza – Berstein, Hatier
Histoire des Etats-Unis, Jean Michel Lacroix, PUF 4eme édition,
août 2010
L’Europe occidentale à l’heure américaine (1945-1952), Gérard
Bossuat, Edition complexe 1992
Les relations internationales depuis 1945, Maurice Vaïsse,
Collection U (11eme édition) Armand Colin, 2010.
Petit Atlas Historique du XXeme siècle, Marc Nouschi, 5eme
édition Armand Colin, 2010.
Sommaire de la séquence
Séance 1
Les Etats Unis dans les guerres mondiales (2h)
I/ Les Etats Unis dans la 1ère guerre mondiale
a) le rôle des Etats Unis
b) Résultats : Une puissance économique et financière
c) Les 14 points de Wilson et le refus de la SDN
II/ La participation américaine à la Seconde Guerre mondiale et l’acceptation définitive des
responsabilités mondiales.
a) le rôle des Etats Unis
b) un leadership mondial annoncé
Séance 2 - Etude de situation : le Plan Marshall et le début de la guerre froide
I/ le plan Marshall : un enjeu économique
a) Pourquoi un plan d’aide économique ?
b) En quoi consiste-t-il ?
c) Les retombés pour les pays qui l’acceptent
II/ le plan Marshall : un enjeu politique et militaire
a) Marshall et Jdanov : deux idéologies qui divisent l’Europe
b) les systèmes d’alliance OTAN
III/ Plan Marshall et exportation d’un modèle politico-culturel
a) Un laboratoire d’expérimentation (missions de productivité)
b) La séduction de l’American Way of life
Séance 3 : L’hégémonie américaine (1945-1960)
I/ Le leadership américain après 1945
a. Le cumul des signes de puissance
b. Le triomphe des principes américains
II/ Les Etats-Unis, centre du monde libre (1947-1960) – La politique du « containment »
a. Le soutien à l’Europe occidentale
b. L’engagement en Asie.
Séance 4 : un leadership contesté (1960-1989)
I - L’affaiblissement économique et monétaire
II/ Le bourbier vietnamien et la guerre perdue
III/ La détente et leadership américain contesté dans le camp occidental
IV/ Les années Reagan, et la fin de la guerre froide
Séance 1
Les Etats Unis dans les guerres mondiales
2h
Problématique : Pourquoi les Etats Unis sont- ils entrés dans les deux guerres mondiales ?
Démontrer les raisons, montrer la participation et conséquences.
Mettre en évidence le rôle fondamental des Etats Unis.
Rappel oral (hésitations à entrer dans le conflit, opinion américaine doit être préparée (Lusitania,
Télégramme Zimmermann, torpillage du city of Memphis, l’Illinois et le Vigilancia le 18 mars 1917,
déclaration de guerre le 2 avril 1917 « le droit est plus précieux que la Paix » (Wilson)
Voir un compte-rendu de la thèse de Y.-H. Nouailhat sur les Etats-Unis et la France (1914-1917) 3 pages
http://www.erudit.org/revue/ei/1982/v13/n3/701396ar.pdf
I/ Les Etats Unis dans la 1ère guerre mondiale
a) le rôle des Etats Unis dans la guerre (impact sur le conflit)
En avril 1917, les EU ne semblent pas prêts à mener une guerre importante sur des théatres
d’opérations lointaines. Les effectifs de l’armée régulière ne comprennent que 130 000 hommes environ,
auxquels s’ajoutent 180 000 gardes nationaux. Cette armée ne dispose pas d’un véritable état major. Il
n’existe pratiquement pas d’aviation.
Si l’industrie américaine peut fournir sans difficultés tous les fusils et une grandes parties des
munitions nécessaires, il n’en fut pas de même pour le matériel lourd. C’est la France qui fournit au corps
expéditionnaire américain la totalité de ses canons de 75, de ses canons de 155, la totalité de ses chars
81% de ses avions, 57% de ses canons etc…
La force économique et financière des Etats Unis à donc joué un role décisif avant même que leur
force militaire ne se fasse sentir. Afin de renforcer le moral des Alliés, les Américains envoient un
premier contingent en France dès juin 1917. L’arrivée des troupes américaines provoque effectivement un
vif enthousiasme en France. Pourtant de Juin à Octobre 1917, les EU ne peuvent envoyer que 80 000
hommes en France. A partir de mars 1918, l’arrivée des troupes américaines s’accèlère. Le 11 novembre
1918, 2 millions des soldats américains se trouvaient en France , dont 1 million sur le front.
Le corps expéditionnaire a permis de déclencher des contres offensives et de renverser la
situation militaire plus tôt que prévu.
Au total la contribution des Américains à la victoire de 1918 apparaît comme décisive : les dollars, les
bateaux, les vivres, les matières premières, les munitions, les soldats enfin ont permis aux alliés de tenir
puis de renverser la situation militaire à leur avantage.
Les fêtes de la Victoire à Paris, le 14 juillet 1919. Le général Pershing, commandant
l'armée américaine, ouvre le défilé des Alliés.
B) Résultats : une puissance économique et financière
Les Etats Unis ont tiré d’énormes profits d’une guerre à laquelle ils n’ont participé que tardivement. Au
cours de la guerre, les Américains ont certes dépensé 22 milliards de dollars, mes les Français en ont
dépensé 26, les Anglais 38 et les Allemands 39.
Les importants achats des Alliés, notamment dans le domaine des matières premières, des produits
alimentaires ou de l’acier, des munitions ou du matériel de guerre, ont abouti à un commerce extérieur
déséquilibré en faveur des Etats Unis : la balance commerciale, faiblement excédentaire à la veille de la
guerre, l’est constamment dans les années qui suivent la guerre Après une courte crise qui dure du milieu
de 1920 à la fin de 1921, les Etats Unis connaissent de 1922 à 1929 une remarquable prospérité.
C) Les 14 points de Wilson et le refus de la SDN
Dès le 18 novembre 1918, Wilson annonce qu’il prendra lui
même la tête de la délégation américaine à la Conférence
de la paix qui se tiendra à Paris. C’était la première fois
qu’un président des Etats Unis décidait de quitter le
territoire américain pendant l’exercice de ses fonctions
pour se rendre en Europe. Wilson est persuadé que lui seul
peut imposer à tous les participants à la Conférence de la
paix le nouvel ordre international.
La décision de Wilson d’assister en personne à la
Conférence de la paix de Versailles en décembre 1918 et
de mars à juin 1919 sans se faire accompagner d’une
délégation sénatoriale va être la source de difficultés
ultérieures puisque c’est
au Congrès qu’il appartient de
ratifier les traités.
Le prestige dont va jouir Wilson à l’étranger ne lui vaudra
aucune considération chez lui. Le résultat ne se fait pas
attendre puisque le républicain Henry Cabot Lodge qui
préside le Sénat pousse la haute assemblée en novembre
1919 et en mars 1920 à ne pas ratifier le traité de
Versailles et à refuser la participation des Etats Unis à la
Ligue des Nations.
De nombreux Américains considèrent en effet que le fait de devenir membre de la ligue reviendrait à
conclure une alliance permanente et à trop s’engager dans les affaires européennes, ce qui va à l’encontre
de l’esprit de la doctrine Monroe
La SDN subit, dès le départ, avec l’absence des Etats Unis, un grave handicap. C’est l’échec de
l’internationalisme wilsonien. Echec également lors de l’élection présidentielle de 1920 (président élu
Harding) . Qui consacre l’échec de l’idéal wilsonien considéré comme utopique et flou et le désir de se
consacrer à nouveau à des préoccupations immédiates.
[1921: Le président Warren G. Harding lance la devise: «America first» (Amérique avant tout): «Sauvegarder l’Amérique d’abord, penser à l’Amérique
d’abord, exalter l’Amérique d’abord». ]
Transition (oral)
Après l’engagement dans la Grande Guerre, les Etats Unis se replient sur une attitude
isolationniste qui caractérise les années 20 (présidence de Harding fermeture surtout dans le
domaine économique, politique pacte Briand-Kellog (août 1928 mettre la guerre hors la loi) .
Cette vieille tradition américaine se perpétue jusque dans les années 1930
L’isolationnisme de cette époque doit être pris au sens de volonté farouche des Américains de ne
pas accepter pour leur pays de conclure d’alliances contraignantes et même de refuser d’adhérer
à quelques organisations politique internationale que ce soit, comme la SDN, afin de conserver
une totale et absolue liberté de manœuvre et n’être à aucun prix entraînés dans un conflit
contre leur gré.
Fin de l’isolationnisme discours prononcé à Chicago par le président Roosevelt en octobre 1937, dit « discours de la quarantaine ». La
guerre y est comparée à une épidémie qui peut être dangereuse même pour ceux qui sont éloignés du théâtre des hostilités. On y
relève aussi la condamnation indignée des dictatures d’Adolf Hitler, de Benito Mussolini, de l’empereur Hirohito et des chefs
militaires japonais.
II/ La participation américaine à la Seconde Guerre mondiale et l’acceptation définitive des
responsabilités mondiales.
-
A) le rôle des Etats Unis dans la guerre (impact sur le conflit)
L’attaque surprise de la base américaine de Pearl Harbor dans les îles Hawaï par les Japonais le 7
décembre 1941 met le feu aux poudres. Le lendemain le 8 décembre, l’Amérique déclare la guerre au
Japon et trois jours plus tard, le 11, les puissances de l’Axe sont en guerre avec les Etats Unis.
L’entrée en guerre des Etats Unis va permettre à la coalition d’être victorieuse en Europe et dans
le Pacifique. Désormais les Etats Unis ont affirmé leur hégémonie mondiale.
La Seconde Guerre mondiale coûta aux Etats Unis environ 300 milliards de dollars, soit à peu près
dix fois plus que la première. Au début de 1944, les forces armées américaines se montent à environ 14,5
millions d’hommes, dont 10 millions pour l’armée de terre.
La prééminence des Etats Unis en Europe et en Extrême Orient découle de leur force militaire
renforcée par le monopole de l’arme atomique.
La période 1939-1945 consacre le déclin de l’Europe. Le monde actuel est mis en place au
lendemain de 1945 et a installé la suprématie de deux super puissances, les Etats Unis et l’URSS.
-
b) Un leadership mondiale annoncé
Les Etats Unis sortent non seulement victorieux de la Deuxième Guerre Mondiale, mais aussi plus
riches et plus puissants qu’avant. Déjà première puissance économique du monde depuis la fin du XIX eme
siècle, ils accèdent au rang de première puissance politique grâce au rôle qu’ils ont joué dans le conflit,
La puissance financière est considérable, les Etats Unis possèdant les deux tiers des réserves d’or
du monde. Le dollar est la seule monnaie des pays belligérants à conserver en 1945 la même valeur qu’avant
la guerre
Les Etats Unis sont maîtres de la guerre comme de la paix. Ils dominent désormais les Nations Unies et
imposent leurs concepts dans le domaine financier et monétaire à la conférence de Bretton Woods, près
de New York, en juillet 1944. L’accord a consolidé le dollar dans son rôle prééminent de valeur de réserve
au niveau mondial, remplaçant dans ce rôle la livre sterling. Le dollar est reconnu monnaie des échanges
internationaux.
La décision est prise de créer un Fonds Monétaire international installée à New York et qui aura
la main haute sur les questions financières et enfin on met en place une Banque internationale pour la
reconstruction et le développement (BIRD).
Sur le plan international, la rupture avec l’Union Soviétique en 1947, fait des Américains les chefs
de file du « monde libre ».
Séance 2
Etude de situation : le Plan Marshall et le début de la guerre froide
C’est le secrétaire d’Etat George Marshall qui annonce le programme de reconstruction
européenne (European Recovery Program) dans un discours à l’université d’Harvard le 5 juin 1947.
I/ le plan Marshall : un enjeu économique
c) Pourquoi un plan d’aide économique ?
Le temps est le facteur clé. L’URSS a intérêt à voir l’état de l’Europe empirer économiquement.
En 1947, les EU exportent 7 fois plus qu’ils n’importent. Avant la fin de l’année, nombre de leurs clients
auraient épuisé les derniers dollars dont ils disposaient et ne pourraient plus payer ni les produits de
premières nécessité ni les biens d’équipement que les Américains pouvaient seuls leur livrer.
Cette pénurie de dollar (dollar gap) peut entrainer les pires effets : les Etats Unis risquent de se
retrouver isolés dans leur prospérité au milieu d’un monde appauvri et désespéré. D’où des dangers de
subversion communiste en Europe et de retour d’une dépression aux Etats-Unis par suite des arrêts
d’exportations.
Les Américains devraient aider les pays ouest-européens à se remettre sur pied en leur accordant
l’assistance économique qui seule leur permettrait de devenir un jour les partenaires prospères que
souhaitait l’Amérique.
B) En quoi consiste-t-il ?
L’aide américaine consiste principalement en dons de produits et de matériaux américains aux
gouvernements européens qui utilisent la contrevaleur de la vente de ces produits à leurs producteurs
nationaux pour des investissements.
C) Les retombés pour les pays qui l’acceptent
Seize pays européens (Autriche, Belgique, Danemark, France, Grèce, Irlande, Islande, Italie,
Luxembourg, Norvège, Pays Bas, Portugal, Royaume Uni, Suède, Suisse, Turquie) acceptent l’offre
américaine
Après deux mois de travail, celui ci adresse un rapport au gouvernement américain le 22
septembre, établissant un inventaire des besoins globaux des pays participants en produits et en devises
pour parvenir, au terme d’un effort de quatre ans de relèvement et de développement, à un niveau
économique leur permettant de se passer de toute aide extérieure exceptionnelle.
Le 16 avril 1948, les ministres des seize pays concernés ainsi que les commandants en chef des
zones occupées de l’Allemagne occidentale paraphent le document qui donne officiellement naissance à
l’Organisation européenne de coopération économique (OECE) mais qui devient OCDE en 1961 à survécu à
la fin du plan Marshall.
Au total, les Etats Unis ont fourni 13 812 millions de dollars aux pays de l’OECE en aide
économique de 1948 à 1952.
Etalée sur plus de trois ans, les principaux bénéficiaires étant la GB (26%), la France (20%), l’Allemagne
de l’Ouest (11%) et l’Italie (10%).
II/ le plan Marshall : un enjeu politique et militaire
En dépit de ce que les dirigeants américains semblent avoir espéré, l’endiguement glisse assez vite
du terrain financier vers celui de la sécurité ou l’Europe est encore plus en situation d’infériorité.
a) Marshall et Jdanov : deux idéologies qui divisent l’Europe
Staline de son coté pense que le plan Marshall constitue une manœuvre pour saper son emprise sur son
glacis de sécurité. Et croit même distinguer, derrière les mesures américaines en faveur d’un relèvement
économique allemand, les préparatifs d’un réarmement de l’Allemagne. L’URSS signe immédiatement des
traités de commerce avec les pays de l’Est pour les lier à elle économiquement. Le Kominform est crée en
octobre 1947.
Désormais deux « doctrines » s’opposent. Elles annoncent que le monde est irrémédiablement
partagé en deux camps aux valeurs incompatibles : celle du président américain Harry Truman, énoncée le
12 mars, et celle de l’idéologue soviétique Andrei Jdanov, formulée à la fin du mois de septembre lors de
la réunion fondatrice du Kominform
Le plan Marshall dans la logique de l’endiguement, consacre la rupture en deux du continent européen et le
leadership des Etats Unis sur l’Europe occidentale.
B) les systèmes d’alliance OTAN
La crainte d’une agression soviétique identique « au coup de Prague » de février 1948, pousse par
ailleurs les Européens à réclamer l’aide militaire des EU.
C’est en réponse à cette demande qu’est signé, en avril 1949, le pacte Atlantique, première alliance
militaire signée par les Etats Unis avec des pays étrangers hors du continent américain, en temps de paix.
Il marque la fin de l’isolationnisme traditionnel.
III/ Plan Marshall et exportation d’un modèle politico-culturel
Il est impossible d’affirmer que le Plan Marshall, à lui seul, a modifié les comportements des
Européens .A défaut d’une volonté, le modèle américain de société ne s’est il pas imposé par la force des
choses ?
Les Européens avaient été sensibles après la 1ère guerre mondiale, au jazz, popularisé par l’armée
américaine présente sur le sol Européen, puis au cinéma américain. On peut supposer une influence
nouvelle et bien plus profonde des Etats Unis après la 2 nd Guerre Mondiale. La réussite matérielle et
l’abondance de la société américaine s’expriment pleinement au travers du plan Marshall ou encore au
travers de produits emblématiques chewing-gum, le Coca Cola, le Hamburger, le lait et les vitamines pour
les enfants
Quelques faits aident à comprendre comment certaines valeurs « américaines » ont pu marquer
durablement les Européens.
c) Un laboratoire d’expérimentation (missions de productivité)
Pour les pays bénéficiaires, l’ERP (european recovery program) accélère le relèvement économique
et l’apprentissage de solidarités. Pour les entrepreneurs, le plan Marshall facilite l’apprentissage du
système américain de fabrication. Pour les Etats Unis la coopération technique était une sorte de
transfusion a l’Europe des méthodes et des idées qui avaient fait des Etats Unis la plus grande puissance
économique du monde. Il y avait une vraie volonté de l’ERP d’offrir un modèle américain de développement.
Ce travail d’influence se fit par l’intermédiaire de voyages aux Etats Unis de producteurs,
d’ouvriers et cadres, d’ingénieurs, agriculteurs, commerçants groupés en équipe de productivité.
Le commissariat général au plan français organise ainsi des missions de productivité aux Etats Unis
pour initier des patrons aux méthodes en vigueur dans les grandes entreprises d’Outre Atlantique.
En France, l’organisation des missions de productivité entre 1948 et 1952 aboutit au départ de
267 missions dont 211 missions aux Etats Unis. Au total entre 1949 et 1956 3000 stagiaires français se
déplacèrent aux Etats Unis à l’initiative de l’AFAP (Association Française pour l’accroissement de la
productivité) (voir Gérard Bossuat p 291)
La productivité, c’était un plus haut niveau de vie et de revenu qui limitait les tensions sociales
génératrices de communisme
d)
La séduction de l’American Way of life
S’exerce surtout dans le domaine des cultures de masse : cinéma, jazz, bande dessinée, roman « noir », de
la science-fiction, des arts plastiques…
Celle ci doit en effet beaucoup à l’action concertée d’hommes d’affaires et de gouvernants, pour qui
l’ouverture des marchés extérieurs aux produits de la culture de masse américaine présente à la fois un
intérêt politique (en véhiculant une « bonne image » de l’Amérique) et économique (le film objet
d’exportation créateur de besoins nouveaux ).
La diffusion des modes et des modèles en provenance des Etats Unis se heurte toutefois à la résistance
des formes traditionnelles de la culture. Par exemple la bande dessinée ne s’est pas américanisée (Tintin
et Spirou)
En 1949, sur fond de guerre froide et de difficultés
La France est coca colonisée.
économiques, les États-Unis lançaient un défi aux traditions
L’Humanité du 8 novembre 1949
françaises : la Coca-Cola Company, symbole de l'« impérialisme
américain », orchestrait une entrée triomphale en France. Récit
pétillant des hostilités par un historien américain.
Le cadre : l'Assemblée nationale, le 28 février 1950. Un député
communiste : « Monsieur le ministre, sur les grands boulevards
de Paris, on vend une boisson qui s'appelle Coca-Cola. » Le
ministre de la Santé publique : « Je le sais. » Député : « Ce qui
est grave, c'est que vous le sachiez et que vous ne fassiez rien.
» Ministre : « Je n'ai actuellement aucun texte pour agir. »
Les conquérants qui ont tenté d’assimiler des peuples allogènes se
sont en général attaqués à leurs langues, à leurs écoles, à leurs
religions. Ils avaient tort : le point vulnérable, c’est la boisson
nationale. Le vin est la plus antique constante de la France. Il est
antérieur à la religion et à la langue ; il a survécu à tous les
régimes. Il a fait l’unité de la nation.
Robert Escarpit, le Monde 23 novembre 1949.
La consommation habituelle de Coca Cola mettrait en question la
survivance même de l’art dramatique : l’altération du goût serait
irrémédiable et mortelle. Faits aux vins de Bourgogne et de
Bordeaux, nos estomacs devraient s’accoutumer au Coca Cola.
Cela reviendrait, en somme, à proprement abdiquer sa qualité de
Français.
Député : « Cette question n'est pas simplement une question
économique, ni même simplement une question sanitaire. C'est
Louis Jouvet.
aussi une question politique. Il faut donc savoir si, pour une
Il faut appeler un chat un chat et tenir le Coca Cola pour ce qu’il est
: l’avant garde d’une entreprise de colonisation contre laquelle nous
nous sentons le devoir de lutter ici.
question politique, vous allez permettre qu'on empoisonne les
Français et les Françaises. » Le jour même, l'Assemblée
Témoignage Chrétien.
nationale vota afin de donner au gouvernement autorité pour
interdire le Coca-Cola s'il s'avérait que cette boisson était
nocive. L'affaire Coca-Cola éclata comme une tempête dans ces
Ce que les Français critiquent, c’est moins le Coca Cola que son
orchestration, moins le breuvage lui-même que la civilisation - ils
aiment à dire le style de vie - dont il est la marque et en quelque
manière le symbole.
années 1949-1950 : subite, bruyante, chargée d'électricité mais
rapidement dissipée. Pourquoi cette polémique ? Pour l'historien,
l'affaire
illustre
deux
phénomènes
:
la
guerre
froide
s'intensifiait et la résistance à l'« américanisation » se faisait
jour. « L'essence du capitalisme » De tous les produits, le CocaCola est sans doute celui qui s'identifie le plus parfaitement
avec l'Amérique.
Le Monde 30 décembre 1949.
Nous avions accepté en silence le chewin gum et Cécil B. De Mille,
le Reader’s Digest et le be bop. C’est à propos de limonade
qu’éclate le conflit. Le Coca Cola semble être le Dantzig de la
culture européenne. Après le Coca Cola, holà !
Le Monde 29 mars 1950.
Et la force symbolique du produit ne perdra rien de sa vigueur avec
les ans :
Les collections de l’Histoire n°7 02/2001
Plus il y aura de Coca-Cola, plus il y aura d’ayatollahs.
Séance 3 : L’hégémonie américaine (1945-1960)
Problématique : Sur quels éléments se fonde l’hégémonie américaine d’après 1945 ?
En 1945, la puissance des Etats-Unis est à son apogée. Elle repose à la fois sur leur supériorité
technique et économique, sur le monopole de l’arme nucléaire et sur l’immense prestige issu de leur
rôle décisif dans l’écrasement des dictatures. Dans l’immédiat après-guerre « l’ordre américain »
s’incarne dans la Charte de l’ONU, le nouveau système monétaire international, les règles du GATT.
Protecteurs du monde libre face aux ambitions de Moscou, les Etats-Unis renforce leur leadership dans
les années cinquante grâce aux systèmes d’alliances qu’ils organisent, au rayonnement de leurs firmes,
à l’extension de leur modèle économique et sociale.
I/ Le leadership américain après 1945
a. Le cumul des signes de puissance
Champion de la modernité, les Etats-Unis disposent en 1945 d’une supériorité technologique
qui s’est renforcée pendant le conflit. L’arrivée de savant du monde entier et les crédits de recherche
ont accéléré l’innovation et assurent au pays un monopole des produits nouveaux comme l’ordinateur,
les textiles synthétiques, les plastiques, les antibiotiques. La qualité des équipements et la
généralisation du taylorisme expliquent le niveau exceptionnel de la productivité. La guerre a aussi
favorisée une amélioration spectaculaire de la gestion des entreprises désormais aux mains de
spécialistes formés par les universités et les « business schools », les « managers ».
Grenier et arsenal des démocraties pendant la guerre, les Etats-Unis apparaissent comme un
géant économique. Face aux ruines accumulées ailleurs, ils symbolisent l’abondance et assurent avec
64 millions d’actifs la moitié de la production mondiale. Leur production est aussi très diversifiée. Ils
disposent d’un large excédent énergétique, fournissent plus de la moitié de l’acier mondial et 90% de
la construction automobile et aéronautique. Modèle technique, leur agriculture dépasse largement les
besoins nationaux. La puissance des grandes firmes est accentuée au lendemain du conflit par la
privatisation des installations financées sur fonds publics depuis 1940.
Disposant d’un monopole de vente pour de nombreux produits, les Etats-Unis dominent les
échanges internationaux. Ils assurent en 1946 25% des exportations mondiales. L’absence de
concurrence favorise alors un substantiel excédent commercial et les nécessités de la reconstruction
offrent des perspectives prometteuses.
Le prestige des Américains dans le monde est à son apogée. Champions de la démocratie et
combattants de la liberté face aux régimes totalitaires, ils ont fait basculer le sort de la guerre. A la
reconnaissance pour les libérateurs s’ajoute la découverte d’un mode de vie et d’une richesse qui
contraste avec les privations subies par les populations européennes pendant cinq ans. Les GI qui
distribuent chocolat, chewing-gum et bas nylon semblent venir d’une autre planète.
b. Le triomphe des principes américains
Les énormes créances détenues au titre du « prêt-bail » et la possession des deux tiers de l’or
mondial permettent dès 1944 à Bretton Woods de faire triompher un ordre monétaire conforme à leurs
intérêts. La stabilité des taux de change retenu comme première règle internationale protège leurs
exportations et les met à l’abri de dévaluations sauvages qui pourraient affaiblir leur économie. La
convertibilité du dollar en or lui vaut d’être placé au centre du système. Les Etats-Unis deviennent
aussi les maîtres des liquidités mondiales et bénéficient du privilège de pouvoir régler le déficit de leur
balance des paiements dans leur propre monnaie. Le FMI créé pour garder le nouvel ordre monétaire
est sous leur contrôle. La répartition des droits de vote en fonction de la puissance économique leur
assure une minorité de blocage.
Leur puissance militaire appuyé sur un arsenal impressionnant et renforcé par le monopole de
l’arme nucléaire leur donne un rôle politique éminent. Ils assument la tutelle du Japon et
entreprennent, sous le contrôle de MacArthur, la transformation démocratique du vaincu. Inspirateurs
du procès de Nuremberg, ils partagent avec leurs alliés (URSS comprise) l’occupation et la
dénazification de l’Allemagne. Adoptée à San Francisco en 1945 pour gérer la paix, la Charte de
l’ONU est due pour l’essentiel aux initiatives de Roosevelt. Le Conseil de sécurité est largement
ouvert à l’influence des Etats-Unis qui peuvent compter sur la collaboration du Royaume-Uni, de la
France et de la Chine de Tchang Kaï-chek dont ils sont les créanciers et les protecteurs.
Les principes de libre-échange vantés par Washington sont également adoptés par la
communauté internationale dès 1947 avec la signature du GATT, accord général sur les tarifs et le
commerce. L’engagement des pays signataires à ne pas recourir à des discriminations commerciales
dessert les puissances coloniales européennes mais favorise l’ouverture des marchés nécessaires à
l’écoulement des surplus américains. La disparition des contingents et l’abaissement progressif des
droits de douane sont aussi conformes à leurs intérêts. Le rejet des règles du SMI et du GATT par
l’URSS et ses satellites supprime toute contestation de leur leadership dans ces nouveaux cadres taillés
sur mesure.
II/ Les Etats-Unis, centre du monde libre (1947-1960) – La politique du « containment »
(endiguement)
L’Histoire, H.S. n°7, février 2000
c. Le soutien à l’Europe occidentale
Dès 1947, les Etats-Unis s’engagent dans une aide massive au profit de l’Europe de l’Ouest. La
supériorité économique américaine provoque en effet le déficit commercial des pays européens et
épuise leurs dernières réserves d’or. En freinant les achats de matériel américain, ce « dollar gap »
retard la reconstruction et fragilise les monnaies européennes. Pour lutter contre la misère, la meilleure
alliée de Staline selon le président Truman, l’Amérique doit accepter de fournir une aide substantielle
au vieux continent. C’est le plan Marshall.
Dès 1949, la signature du traité de l’Atlantique Nord renforce les liens entre les Etats-Unis et l’Europe
en créant une alliance défensive sous l’égide de Washington. Cette garantie stratégique et le
redressement rapide des économies d’Europe occidentale au cours des années cinquante attirent un
flux croissant d’investissements venus des grandes entreprises américaines, en particulier dans les
industries de consommation et les secteurs de pointe. La pluie de dollars apportés par l’aide publique
des Etats-Unis et les investissements privés assure le redressement des monnaies européennes qui
redeviennent convertibles en 1959.
d. L’engagement en Asie.
MacArthur, commandant des forces d’occupation, entreprend la transformation du Japon. La
constitution de 1946 enlève tout pouvoir à l’empereur, limite à 1% du PNB le budget militaire et crée
une démocratie parlementaire. La réforme agraire et la décartellisation de l’industrie visent à extirper
les bases du militarisme.
Dès 1948 cependant, le succès croissants des communistes chinois inquiètent Washington. Les
sanctions frappant le Japon sont abandonnées. L’offensive nord-coréenne soutenue par l’URSS
renforce la volonté américaine d’englober le Japon dans la défense du monde libre (Traité de San
Francisco, septembre 1951).
Malgré la victoire maoïste en Chine, la sphère d’influence américaine en Asie se renforce. Elle
englobe la Corée du Sud, Taïwan, les Philippines, la Thaïlande et le Vietnam du Sud. En 1954, une
alliance défensive regroupe dans l’OTASE, Organisation du traité de l’Asie du Sud-Est, les Etats-Unis,
le Royaume-Uni, la France, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, la Thaïlande, les Philippines et le
Pakistan.
La richesse pétrolière du Moyen-Orient et la défense de l’Etat d’Israël expliquent la vigilance de
Washington dans une région instable où l’influence britannique décline. En Iran, les Etats-Unis
rétablissent le pouvoir du Shah qui devient leur protégé. En 1955, ils approuvent la création par le
Royaume-Uni du pacte de Bagdad qui englobe la Turquie, l’Iran, l’Irak et le Pakistan ; cette
« pactomanie » inspirée par le secrétaire d’Etat Foster Dulles vise ici comme ailleurs à consolider le
containment sur les points chauds de la planète.
Séance construite principalement avec Histoire Terminale, J. Marseille, Nathan 1995
Séance 4 : Un leadership contesté (1960-1989)
A partir des années soixante, la supériorité américaine commence à s’éroder. Les Etats-Unis sont
confrontés à l’affaiblissement du dollar, à la réduction de l’avance technologique dont ils disposaient,
à la concurrence accru du Japon et des pays européens. L’embourbement de leurs troupes au Vietnam
affaiblit leur image dans le monde. La protestation des minorités de couleur débouche sur des flambées
de violence urbaine. Au début des années soixante-dix, le doute semble s’emparer d’une Amérique
contrainte à des reculs et confrontée au spectre du déclin.
I - L’affaiblissement économique et monétaire
Au moment où se termine en 1960 la deuxième présidence d’Eisenhower, les Etats-Unis sont
confrontés à des défis nouveaux qui nécessitent des réponses urgentes. La supériorité économique
américaine semble en effet s’effriter. Ralentie par trois récessions en 1953, en 1957 et en 1960, la
croissance annuelle est très inférieur à celle des économies européennes ou du Japon. La multiplication
des investissements extérieurs transforme les entreprises américaines en firmes multinationales géantes
mais réduit le « gap » technologique entre les Etats-Unis et les autres pays développés. L’excédent
commercial tend donc à s’amenuiser.
Nathan Terminale
Le déficit de la balance des paiements se creuse fortement à partir de 1958 sous le poids cumulé des
dépenses militaires, de l’aide publique distribuée par Washington et des investissements à l’étranger.
Dès 1958, les économistes analysent les dangers d’une hémorragie maintenue de dollars : une
croissance excessive de liquidités mondiales, une perte de confiance dans la valeur de la monnaie
américaine et des risques de conversion massive en or menaçant les réserves métalliques de Fort Knox.
Nathan Terminale - 1995
La guerre du Vietnam aggrave le déficit de la balance des paiements et nourrit à partir de 1965 une
dérive inflationniste qui affaiblit l’économie des Etats-Unis face à ses concurrents. Les plans lancés
par Kennedy puis Johnson pour tenter de rééquilibrer les balances américaines n’ont qu’une portée
éphémère et la crise de confiance subit par le dollar s’accélère. Les conversions de dollars en or
réduisent de moitié le stock de métal précieux détenu par les Etats-Unis. En 1968, le président Johnson
doit limiter la convertibilité du billet vert en or aux seules banques centrales.
Nixon annonce l’inconvertibilité du dollar
Il y a eu, au cours des sept dernières années, une moyenne d’une crise internationale tous les ans. Qui bénéficie de ces crises ?
Ce n’est pas le travailleur, l’épargnant ou les véritables producteurs de la richesse. Les bénéficiaires sont les spéculateurs internationaux.
Du fait qu’ils profitent des crises, ils font tout pour les créer. (…) A la fin de la Deuxième guerre mondiale, les économies des
principales nations industrielles d’Europe et d’Asie étaient saccagées. Pour les aider à se remettre sur pied et à protéger leur liberté, les
Etats-Unis leur ont fourni 143 milliards de dollars au titre de l’aide à l’étranger. Il nous appartenait de la faire. Aujourd’hui, en grande
partie grâce à notre aide, elles ont retrouvé leur dynamisme et sont devenues de fortes concurrentes. A présent qu’elles sont
économiquement puissantes, le moment est venu pour elles de porter une part équitable du fardeau pour la défense de la liberté dans le
monde. Le moment est arrivé pour que les taux de change soient rectifiés et pour que les principales nations se fassent concurrence sur
un pied d’égalité. Il n’y a plus de raison que les Etats-Unis luttent avec une main attachée derrière le dos.
Allocution télévisée du 15 août 1971.
L’annonce en 1971 du premier déficit commercial des Etats-Unis au XXe siècle déclenche une fuite
massive des capitaux. Le 15 août, Nixon déclare le dollar totalement inconvertible, boque les prix et
les salaires et exige des concessions commerciales et monétaires de ses principaux partenaire.
L’accord signé en décembre 1971 marque l’abandon des principes de Bretton Woods. Les taux de
change des monnaies occidentales sont modifiés, le dollar est dévalué et les marges de fluctuations
sont élargies. Ces mesures ne suffisent pas à redresser la situation. L’économie américaine s’enfonce
dans la stagflation et, au printemps 1973, la spéculation internationale impose un flottement monétaire
général. L’affaiblissement du dollar précipite aussi en octobre 1973, la révolte de l’OPEP et le premier
choc pétrolier qui ouvre la dépression contemporaine.
II/ Le bourbier vietnamien et la guerre perdue
Le bourbier vietnamien
Je ne vois aucun moyen raisonnable d’en finir rapidement avec la guerre. En apparence le moral de
l’ennemi n’est pas entamé, il s’est adapté à la situation nouvelle dans laquelle l’ont placé les efforts couronnées
de succès que nous avons déployés en vue de l’empêcher de gagner la guerre et à adopter une stratégie de
harcèlement et d’attente (une stratégie qui lui permet de s’opposer à notre volonté nationale). Il sait que nous
n’avons pas été et ne serons sans doute pas capables de transformer nos succès militaires en « produits finis » de briser le moral de l’ennemi et d’entraver les réalisations politiques du GVN (Gouvernement du SudVietnam). (…)
La pacification a reculé. Comparées à ce qu’elles étaient il y a deux ou quatre ans, les forces ennemies
régionales à plein temps et les forces de guérilla à temps partiel sont plus importantes ; les attaques, le
terrorisme et le sabotage se sont développés et intensifiés ; un nombre accru de voies ferrées et de grandes
routes sont coupées ; la récolte de riz attendue sur le marché est en diminution. Nous ne contrôlons plus qu’une
fraction réduite de la population, si tant est même que nous en contrôlions une fraction.
MacNamara, secrétaire d’Etat. Mémorandum adressé au président Johnson le 14 octobre 1966.
La guerre du Vietnam (1964-1975) Nathan Term
Depuis la fin des années cinquante, le régime sud-vietnamien, qui a refusé le référendum sur la
réunification du pays prévu par les accords de Genève, se trouve confronté à la résistance du FLN,
Front national de libération, qui réunit communistes et bouddhistes. La guérilla menée par le Viêt-cong
bénéficie du soutien du Vietnam du Nord, dirigé par Hô Chi Minh, et de l’aide soviétique et chinoise.
Face à ce nouveau péril communiste, le président Johnson engage en 1965 un effort militaire massif.
Le corps expéditionnaire américain dépasse 500 000 hommes en 1968 et des raids de bombardiers
venus des bases américaines des Philippines et de Thaïlande pilonnent le Nord-Vietnam pour le
contraindre à cesser son aide au Viêt-cong. Dès 1968 cependant, la première grande offensive du FLN
contre les positions américaines montre l’inefficacité des moyens modernes contre une guerre
révolutionnaire qui bénéficie d’un large soutien des populations.
La photographie de cette fillette nue, hurlant sous les brûlures du napalm, prise au Sud-Vietnam en juin 1972, a fait le tour du monde
Les images télévisées traumatisent l’opinion américaine et suscitent un rejet croissant de cette « sale
guerre » où l’Amérique ne peut plus prétendre défendre la liberté. L’effet dans l’opinion mondiale est
encore plus dévastateur. Pour sortir d’un enlisement sans issue, le président Nixon tente de rapatrier
les soldats américains par la « vietnamisation » de l’armée du Sud. En 1970, il étend le conflit au
Cambodge en essayant de fermer la « piste Hô Chi Minh » qui sert à acheminer le matériel fourni par
Hanoi. En janvier 1973, il se résigne à signer les accords de Paris. Les Etats-Unis subissent leur
première défaite. En 1975, la chute de Saigon marque la réunification du Vietnam au profit des
communistes.
III/ La détente et leadership américain contesté dans le camp occidental
De plus en plus conscients du risque nucléaire, les deux « géants » s’engagent, dès le
lendemain de la crise de Cuba, dans une politique de détente que symbolise en juin 1963
l’établissement d’un télétype – « le téléphone rouge » - permettant des relations directes entre les deux
chefs d’Etat.
La détente ne signifie pas le désarmement, bien au contraire. La période se caractérise par une course
où chacun engloutit des milliards de dollars pur maintenir la parité avec l’autre, notamment dans le
domaine des missiles à longue portée puis des missiles antibalistiques (capables d’arrêter en plein vol
des missiles ennemis).
Mais en même temps des accords sont conclus pour éviter une escalade fatale et tenter d’empêcher que
les armes atomiques ne tombent dans n’importe quelles mains. Les accords SALT (Strategic Arms
Limitation Talks : pourparlers sur la limitation des armes stratégiques), signés en 1972 à Moscou par
Brejnev et Nixon, limitent pour la première fois les armements nucléaires existants et ont pour but
d’empêcher que l’un des deux Grands dispose d’une capacité offensive de « première frappe »
capable d’anéantir la capacité de riposte de l’autre. En juin 1973, le voyage de Brejnev aux Etats-Unis
semble marquer l’apogée du dialogue soviéto-américain avec la signature, le 22 juin, de l’accord sur la
prévention de la guerre nucléaire.
Accord sur la prévention de la guerre nucléaire, 22 juin 1973
Article 1 – L’Union soviétique et les Etats-Unis s’accordent à reconnaître que leur politique a pour objectif d’écarter le danger
d’une guerre nucléaire et l’utilisation d’armes nucléaires.
En conséquence, les parties sont convenues d’agir de manière à prévenir le développement de situations susceptibles de
provoquer une tension dangereuse dans leurs relations, à éviter les affrontements militaires et à empêcher le déclenchement d’une guerre
nucléaire entre elles ou entre l’une ou l’autre des parties et d’autres pays. (…)
Article 4 – Si à un moment quelconque, les relations entre les parties ou entre l’une d’entre-elle et d’autres pays paraissent
comporter un risque de conflit nucléaire, ou si les relations entre les pays non signataires de cet accord semblent comporter des risque de
guerre nucléaire entre l’URSS et les Etats-Unis, ou entre l’une des parties et d’autres pays, l’Union soviétique et les Etats-Unis, agissant
conformément aux dispositions du présent accord, entameront immédiatement des consultations urgentes entre eux et déploieront tous
leurs efforts pour conjurer ce risque.
Dans cette affirmation de la détente, c’est bien la période 1969-1973 qui apparaît comme la plus
féconde. Elle correspond à l’arrivée au pouvoir à Washington de l’équipe formée par le président
Richard Nixon et son conseiller spécial, Henry Kissinger.
Henry Kissinger. Conseiller spécial de Richard Nixon, il devient l’architecte
d’une politique étrangère réaliste marquée par l’affirmation de la détente avec
l’URSS et le rétablissement des relations diplomatique avec la Chine. En 1973, il
obtient le prix Noble de la paix.
Conscient de l’affaiblissement relatif de la puissance américaine, prenant en compte la diversité des
centres de décision dans un monde multipolaire, espérant aussi établir une diplomatie « triangulaire »
en jouant sur les divergences entre l’URSS et la Chine populaire officiellement reconnue en 1971,
Henry Kissinger considère que tous les problèmes doivent être négociés, toute concession de l’un
devant trouver sa compensation dans la concession équivalente de l’autre. C’est le retour à une
politique réaliste marquée par la préoccupation des Etats-Unis de défendre d’abord leurs propres
intérêts.
Parallèlement à l’affirmation de sa détente, les Etats-Unis voient leur leadership contesté dans leur
propre camp. En effet, c’est la volonté française d’indépendance nationale qui ébranle la cohésion de
l’Alliance atlantique. En juillet 1962, le président Kennedy avait proposé à ses alliés européens un
« grand dessein » qui visait à substituer au leadership américain un partenariat atlantique reposant sur
deux piliers théoriquement égaux, les Etats-Unis d’Amérique et les « Etats-Unis d’Europe ». Les
Etats-Unis devaient toutefois garder le monopole de la décision nucléaire, les « forces de frappe »
britannique et française étant intégrées dans une force multilatérale, soumise à Washington dans la
mesure où, selon Kennedy, il ne pouvait y avoir « qu’un seul doigt sur la gâchette ». Ce projet qui
reçoit l’adhésion des Britanniques, est refusé tout net par le Général de Gaulle. Cette volonté
d’indépendance de la France bouleverse en grande partie les habitudes héritées de la guerre froide. Elle
se poursuit par le retrait de la France, en juillet 1966, des organismes de l’OTAN. Sur le plan
diplomatique enfin, le Général de Gaulle affiche par des gestes spectaculaires sa volonté de recouvrer
sa « vocation mondiale » : condamnation en 1966 de l’intervention américain au Vietnam, son vibrant
« vive le Québec libre ! » en 1967, reconnaissance de la Chine populaire en 1964 et rapprochement
franco-soviétique. Autant de coups d’épingles qui irritent les Etats-Unis mais ne remettent pas en
cause l’Alliance atlantique dont la France reste un membre fidèle lors des crise graves.
IV/ Les années Reagan, et la fin de la guerre froide
L'élection à la présidence du républicain Ronald Reagan, personnalité plus charismatique que
Ford et Carter, change le cap de la politique intérieure comme de l'étrangère. «America is back»,
proclame le président, qui durcit le ton face à l'expansionnisme de l'URSS, apportant notamment une
aide logistique aux Afghans en lutte contre les troupes soviétiques. Partisan d'un Etat minimal, sauf
dans le champ de la Défense, Reagan entraîne l'URSS dans une course aux armements effrénée («la
guerre des étoiles») et l'oblige à déclarer forfait, ce qui lui permet de déclarer avoir «gagné la guerre
froide». À l'intérieur, des secteurs entiers de l'économie sont dérégulés, le déficit fédéral se creuse et la
balance commerciale se détériore mais la croissance repart et le chômage et l'inflation diminuent.
« Change your world ».
Le Président Reagan prononce
son célèbre discours sur
l’Empire du mal (l’URSS,
« Evil empire ») pendant la
campagne électorale pour sa
réélection lors du congrès
annuel de l’association
américaine des évangélistes à
Orlando (Floride) le 8 mars
1983
(source : bibliothèque présidentielle Ronald
Reagan)
Jérôme Canny
Après un second mandat de Reagan, son vice-président, George Herbert Walker Bush, est élu
président au moment où l'effondrement de l'URSS peut faire croire en «la fin de l'Histoire» et la mise
en place d'un monde unipolaire, dominé par la seule puissance américaine. Une puissance qui s'incarne
tant dans Hollywood et Microsoft que dans le Pentagone et le bureau ovale.
Delphine Calin, Luc Cronier, Nadir Teurki- 2010
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