Envoyé par Céline. RAPPELS DE NARRATOLOGIE Bibliographie : Genette : Figure I, II et III Bourneuf : L’univers du roman Valette : Le roman, initiation aux méthodes Jouve : La poétique du roman Mitterand : Le discours du roman Qu’est-ce que l’énonciation ? « L’énonciation peut être définie comme la mise en fonction de la langue par un acte individuel d’utilisation » Benveniste Nous allons être amenés à faire une distinction entre le récit, l’histoire et la narration (cf Genette) : Le récit : c’est le texte oral ou écrit qui présente l’intrigue L’histoire : c’est l’objet du récit La narration : c’est l’acte qui produit le récit 1) LA VOIX NARRATIVE (ou instance narrative) : Qui parle ? Attention, il ne faut pas confondre auteur et narrateur / lecteur et narrataire (personne allocutaire). Dans Aurélia et Sylvie, nous avons affaire à un texte à la 1° personne du singulier mais il ne faut pas s’imaginer qu’il s’agit d’un texte autobiographique. Ce n’est pas Nerval qui parle mais le narrateur du roman. Pour la voix narrative, il faut prendre en compte la relation du narrateur avec l’histoire: - quand il est extérieur à l’histoire : le narrateur est hétérodiégétique - quand il fait partie des personnages : le narrateur est homodiégétique - quand il est le personnage principal : le narrateur est autodiégétique (c’est le cas de Sylvie et Aurélia) - quand il est lui-même inclu dans le récit d’un autre narrateur : le narrateur est intradiégétique (cf Les mille et une nuits) - quand il est le même tout au long du récit : le narrateur est extradiégétique (c’est le cas de Sylvie et Aurélia car il n’est pas question d’enchassements). 2) LE MODE NARRATIF : La distance : il s’agit du degré d’implication du narrateur dans l’histoire qu’il raconte. Il peut choisir de donner de nombreux détails sur ce qu’il raconte ou de laisser le lecteur sur sa fin. La scène : l’auteur choisit de rapporter un événement dans son intégralité. C’est le discours rapporté qui est le plus souvent utilisé (au choix : discours direct ou indirect). Le sommaire : l’auteur choisit de faire un résumé de l’action. Le discours direct : le narrateur se contente de rapporter les paroles de quelqu’un d’autre ce qui abolit toute distance. Le discours indirect : les paroles sont filtrées par l’instance narrative. Le discours indirect libre : les paroles sont autonomes et encore plus filtrées par l’instance narrative. Le discours direct libre : les paroles sont sans trace de discours rapporté. A ce sujet, un passage dans Sylvie pose problème (cf § 6) « Oh ! que de richesses !…de diamants d’Irlande » car il peut s’agir : de Sylvie du personnage narrateur enfant du personnage narrateur adulte de pensées de personnages enfants PS : Toujours spécifique, l’imparfait estompe la précision temporelle donc il peut convenir à toutes les époques. Alors que pour Genette, la pensée est une parole silencieuse, Cohn croit à la différence entre pensée silencieuse et parole. Psycho-récit : c’est le récit de la vie d’un personnage Monologue narrativisé : c’est le discours indirect libre Monologue rapporté : c’est le discours direct 3) LA FOCALISATION : Focalisation externe : le narrateur est extérieur au récit, il en sait moins que le personnage. Focalisation interne : le narrateur voit à travers les yeux d’un seul personnage et n’en sait pas plus que lui. Focalisation zéro : le narrateur est omniscient, il sait tout et il s’agit le plus souvent d’un récit à la 3° personne du sg. Dans Sylvie, il y a une segmentation temporelle, le narrateur raconte son histoire mais il y a deux points de vue : - Point de vue d’aujourd’hui : le narrateur reconsidère les choses avec l’expérience qu’il a acquise - Point de vue du passé : la façon dont le narrateur voyait les choses à l’époque Le « je » est donc double, on parle de narration bi-vocale. Il intègre de plus les discours d’autres personnages… Sylvie s’ouvre et se ferme sur une scène de théâtre, ce qui prouve que le « je » est ambigu (cf la scène du déguisement §6). Le « je » est dédoublé sur le plan temporel mais il est en même temps protéiforme car il se « déguise » tout au long du récit, ce qui fait que cette nouvelle n’est peut-être pas aussi simple qu’il y paraît. C’est la voix du narrateur principal qui va dominer et tenir tous les « je » de la polyphonie, faisant ainsi titre d’autorité. 4) LE TEMPS : Les moments de la narration - ultérieure : l’histoire s’est passée avant la narration (c’est le cas de Sylvie et Aurélia) - simultanée : l’histoire se passe en même temps que la narration - antérieure : l’histoire se passe après la narration - intercalée : à la fois présent et passé (cf récit épistolaire, l’autobiographie) L’ordre des événements rapportés Il est possible soit de respecter la chronologie soit de ne pas la respecter. Dans ce cas nous parlons d’anachronie narrative : - analepse : il s’agit d’un retour en arrière, le mouvement est rétrospectif - prolepse : il s’agit d’un événement qui va se produire PS : Il est aussi intéressant d’étudier l’amplitude de l’anachronie qui peut se passer sur un an ou sur un jour etc… La fréquence des événements - récit itératif : l’auteur raconte une fois ce qu’il s’est passé plusieurs fois - récit singulatif : l’auteur raconte n fois ce qu’il s’est passé n fois - récit répétitif : l’auteur raconte plusieurs fois ce qu’il s’est passé une fois La vitesse - l’ellipse } l’histoire est racontée rapidement impression d’accélération - le sommaire - la description } l’histoire est racontée simultanément le temps de l’histoire équivaut au - la scène temps de la scène - la pause : l’histoire est racontée lentement le narrateur prend son temps et la narration ne progresse pas 5) LES FORMES DU DISCOURS RAPPORTE : L’emploi du discours direct Il y a une notion d’hétérogénéité dans ce type de discours (cf J. Authier-Revuz). Le discours direct sépare deux formes, le discours citant et le discours cité. Il n’y a aucune ambiguité entre les deux sources énonciatives. C’est souvent Sylvie qui a le privilège du discours direct. Lorsque le narrateur choisit le style direct pour rapporter ses propres paroles de lui enfant, c’est à ce moment là qu’il s’en distance le plus clairement. On peut parler de « zoom énonciatif » qui rapproche le narrateur du côté enfant. Des fois, le lecteur sent la présence du monologue intérieur repérés grâce à « me dis-je », « que sais-je »… Il n’y a pas de narrateur omniscient, le lecteur voit tout par son regard mais en même temps que lui. Il y a un décalage entre le discours de Sylvie (direct) et le discours du narrateur (indirect). Sylvie dispose toujours du pouvoir de décision car elle utilise souvent des tournures impersonnelles telles « il faut… ». Le lecteur voit une opposition entre un personnage dans le flou et Sylvie, qui est toujours en activité, dans l’action. Le personnage narrateur est toujours en marge, hors de l’action. Là où Sylvie est ferme, claire, le narrateur est maladroit. L’emploi du discours indirect Le discours indirect efface les frontières, le lecteur sent une notion d’homogénéité à tel point qu’il ne sait plus à qui il a affaire. En tant que discours indirect libre, la voix d’Adrienne est toujours narrativisée, elle ne dit jamais « je ». Le personnage même d’Adrienne perd en réalité… Ex. « C’est une image que je poursuis… », les formules que nous notons entourent la jeune fille d’un halo de flou. De même que ses paroles s’éloignent dans le discours narrativisé, elle apparaît distante dans le réel de la description. Sylvie est assimilée au signe du feu, c’est une voix qui est associée à la nature, l’enfance qui se réalise dans le discours direct alors que celle d’Adrienne représente une tentation. Selon Yves Bonnefoy « Sylvie représente l’expérience de l’immédiat, du plein du monde et Adrienne est troublée désormais par le travail des mots sur le monde ». Aurélie est la voix poétique de la nouvelle, elle est en quelque sorte le double poétique du narrateur. Aurélie est protéiforme, elle ne peut pas jouer le rôle d’Adrienne mais c’est une beauté artificielle et double. Elle est la seule à écrire et à envoyer des lettres. Aurélie s’attache à la réactivation du passé enfoui, préservant ainsi la mémoire universelle. Pour Sylvie, chaque souvenir est associé à une fête. La mémoire est assurée par la construction de la même structure. Adrienne pourrait être une allégorie de la poésie qui traite avec mépris le temps référentiel par le silence. Nous ne savons pas si elle existe vraiment ou si elle a été inventée car elle apparaît toujours dans un cadre onirique, flou. Elle devient l’absente de la nouvelle car elle disparaît à la fin (cf. autotélite). Il y a ainsi un hiatus irréductible entre passé et présent car la polyphonie nait de cette irréductibilité. La seule possibilité qu’à le narrateur pour défier le temps est ………. LA MODALISATION C’est l’ensemble des marques données par le sujet à son énoncé, les traces du degré d’adhésion de l’énonciateur à son énoncé. Ex. un manuel de biologie doit être le plus transparent possible, avec le moins de marques énonciatives. Il ne doit pas y avoir de sensibilité ni de marques de l’auteur. Ex. la poésie lyrique est un autre extrême où le « je » est omniprésent. 1) LES MODALITES D’ENONCIATION : La grammaire dite générative considère que les 4 modalités de phrase sont énonciatives et ne peuvent se combiner entre elles : - assertive - injonctive ou jussive - exclamative - interrogative Certaines grammaires partent sur l’énonciation dans sa matérialité, ce qui est un retour sur son propre discours Ex. « en deux mots commençant »… D’autres encore caractérisent l’acte illocutoire accompli, ce qui est un commentaire de l’énonciation elle-même Ex. « franchement », « entre nous »… Chaque phrase correspond à une implication différente du locuteur dans l’énoncé : Assertive : pose l’énoncé comme vrai et le rythme de la phrase est en forme d’accent circonflexe (protase et apodose ). Interrogative : impose une situation d’interlocution entre deux personnages et l’attente d’une réponse. Le rythme est ascendant car la voix est suspendue en bout de phrase. Jussive : implique un ordre qui vise à être suivi d’un acte concret de l’autre (cf pragmatique) et le rythme de la phrase est descendant. Exclamative : manifeste une réaction affective du locuteur. La modalité repose sur une opposition dictum / modus Ex. Pierre viendra / Que Pierre vienne Ici, le dictum (contenu) est le même mais le modus change et traduit l’attitude du locuteur à l’égard du contenu. Ex.2 : Il a répondu naturellement : modifie uniquement le verbe, il s’agit de la manière dont il a répondu/ Naturellement, il a répondu !: modifie non pas l’énoncé mais l’énonciation (ton peut-être péjoratif) 2) LES MODALITES D’ENONCE : Ils affectent la valeur logique de l’énoncé et nous avons coûtume d’en distinguer trois : - nécessité (modalité aléthique) : un forgeron doit savoir forger - obligation (modalité déontique) : Hector doit rendre son argent à Andromaque avant demain Un propriétaire peut expulser son locataire a le droit de… - probabilité (modalité epistémique) forme qui exprime la croyance du locuteur en l’énoncé, certitude ou non… Elle doit avoir oublié son rendez-vous Il se peut qu’Hector vienne… 3) LES MODALITES DE MESSAGE : L’emphase utilise des procédés de focalisation qui sont la dislocation et l’encadrement. La dislocation Procédé qui détache un constituant de la phrase pour le mettre en valeur - l’élément est en prolepse quand il est à gauche (tête de phrase) - l’élément est analepse quand il est à droite (fin de phrase) Le phénomène de dislocation s’accompagne de la reprise d’un élément énoncé par un pronom (soit anaphorique, soit cataphorique). Ex. Et Sylvie que j’aimais tant pourquoi l’ai-je oubliée depuis trois ans ? mise en relief de « Sylvie » et reprise par le pronom élidé « l’ » qui assure le rôle de COD en dislocation gauche. Ex.2 Quant aux lauriers, les a-t-on coupés ? La reprise peut être assurée soit par un pronom personnel soit par un démonstratif. Ex. Dieu, c’est le soleil ( Aurélia) L’encadrement Nous parlons de procédé d’extraction ou de phrase clivée par « c’est…que / c’est…qui ». L’élément encadré qui est mis en valeur s’appelle le propos. Ex. C’est moi qu’ils sont venus chercher : COD encadré Ex.2 C’est à toi qu’il s’adresse : COI encadré Ex.3 C’est avec cela qu’il l’a frappée : CC encadré Attention : C’est un rêve transparent qui couvre le monde ce n’est pas une extraction mais simplement une proposition relative explicative. C’est une fatalité qui m’était réservée d’avoir un frère de lait dans un pays illustré par Rousseau il n’y a pas de phrase clivée mais une dislocation uniquement. LA STRATEGIE DE LA MODALISATION DANS AURELIA : LE DOUTE Les modalisateurs de doute sont tous les mots où s’inscrit la subjectivité de l’énonciation. Dans Aurélia ces modalisateurs peuvent être : - des verbes - des adverbes : probablement… - des interrogatives indirectes : je ne sais si… - des comparaisons hypothétiques : comme si… - des auxiliaires de modalité : sembler, paraître… - des incises : selon moi… SEMBLER ET PARAITRE Ces deux verbes jouent sur le degré de vérité à accorder à l’énoncé. C’est un univers onirique, un monde fait d’apparences où le lecteur est condamné à une suspension de jugement. Il est donc nécessaire de s’attarder sur ces verbes combinés avec des marques de la première personne dans Aurélia : - Une seule occurrence de présent : je lui disais : « il me semble… » L’emploi de la modalisation permet au locuteur de ne pas être pris pour un fou en atténuant la portée de l’énoncé. - Nombreuses occurrences de l’imparfait : « il me semblait… » Ex. « Il me semblait que je rentrais dans une demeure connue » § 4 Ex. « Il me semblait qu’ils étaient les représentants… » § 1 - Nombreuses occurrences du passé simple : « il me sembla » Ex. « Il me sembla reconnaître… » § 2 En ce qui concerne les différences d’ordre aspectuel : L’imparfait, de par son aspect sécant, crée un flou chronologique en estompant les limites d’un événement. Le lecteur est transporté dans un monde d’apparences où rien n’est assuré. Le passé simple, d’aspect perfectif, s’oppose à tout ce qui est fictif, illusoire. Il donne un caractère tangible aux faits et transforme l’hallucination en révélation de vérités supérieures. Les occurrences ne sont pas toujours à la première personne du singulier : Ex. « Il semblait qu’on eût voulu m’empêcher… » Ex. « Il semblait que chacun eût les traits de plusieurs… » La distance énonciative est maximale entre l’énoncé et le narrateur mais le subjonctif n’est pas obligatoire. Alors, dans quel cas utiliser le subjonctif ou l’indicatif ? Lorsque la principale est interrogative ou négative, il faut privilégier le subjonctif dans les compléments sinon dans les autres phrases les deux sont possibles. CROIRE Ce verbe peut marquer : - une certitude absolue, une foi - un fait probable, possible. On retrouve une petite occurrence du verbe croire avec la troisième personne du singulier dans Aurélia où le narrateur sous-entend une erreur d’opinion : « Sans doute, on crut que j’étais… » Avec la première personne du singulier, l’imparfait se charge d’irréel puisque les faits sont encore démentis par la suite. Ex. « Ce que je croyais l’inondation universelle… » crée une ambiguité car il n’y a pas de liens logiques. Le lecteur est incapable de déceler l’opinion du narrateur. Avec la première personne du singulier toujours, le présent marque un engagement plus grand de la part du narrateur qui paraît cautionner les rêves passés. Ces modalisateurs de doute sont présents uniquement dans les récits des événements passés et non dans le discours qui lui, est marqué par la certitude… L’EMPLOI DES JE ET LA STRUCTURE D’AURELIA La structure du texte est autobiographique puisqu’il y a une coïncidence entre le « je » de l’auteur et le « je » du narrateur. Le narrateur est responsable de l’extension narrative du performatif « j’avoue » qui crée une coïncidence entre l’acte et l’énonciation de l’acte. Il évolue en permanence aux frontières du réel, étant le seul témoin. C’est un huit-clos destabilisant qui repose sur un mouvement reflexif de retour sur soi. La modalisation fait constamment osciller le narrateur entre le potentiel et ce qui se passe réellement. L’idéal du narrateur est que le lecteur se retrouve dans ce qui est conté… Il y a un « je » du narrateur et un « je » du personnage narré s’inscrivant dans une structure propre. Il y a un « je » acteur dans le rêve et un « je » qui a vécu ses rêves et un autre « je » qui est le narrateur : il s’agit d’un soliloque à trois voix. Le premier est l’acteur, le second le metteur en scène et le dernier l’auteur ce qui crée un processus de théatralisation. Lorsque la situation est onirique, le narrateur est une instance énonciative de l’auteur. Le pronom « je » est distendu entre trois époques. Comment va s’organiser sa prise sur les rêves ? Par la maîtrise de la temporalité en faisant succéder les rêves de façon chronologique. Les types de manipulation temporelle sont mis en valeur par les phénomènes d’anachronie, les prolepses (§ 9) et les analepses. Il y a aussi une fonction métalinguistique ou textuelle puisque le narrateur revient sur ce qu’il a dit en utilisant des expressions telles : « pour ainsi dire » ou alors « que j’appelerai »… Dans Aurélia, il y a beaucoup d’exemples de phrase où s’entrechoquent les deux points de vue : celui du personnage du passé et celui du narrateur. Tout ceci crée une double structure qui se superpose : point de vue du personnage et rectification du narrateur. Aurélia foisonne de phrases qui assimilent à un verbe de perception, une predication seconde : le « je » est associé au « me ». Ex. « Je me vis dans un parc… » où le « je » narrateur assiste au « je » du personnage acteur. Le procès est en boucle et il y a un retardement du « je » sur lui-même. Ex. « Comme je me vis, errant… » Aurélia est caractérisé par un enchevêtrement : « Je me vis amené à me demander compte de ma vie et des existences antérieures ». Il y a un va-et-vient incessant entre le sujet observateur et l’objet, ce qui crée une obsession Ex. « Je me trouvais tout à coup dans une salle… » Il y a un balancement entre le potentiel et l’irréel avec la comparaison hypothétique « comme si ». Le comparant va comme déteindre sur le comparé et faire chavirer le lecteur dans l’irréel, l’imaginaire. Il y a souvent des indéfinis pour caractériser l’irréel « quelque chose de la religion… », l’utilisation du subjonctif qui fait reculer davantage le « comme si » dans le virtuel. Ex. « Comme si…se fussent… » qui place le procès dans le domaine de l’imaginaire et de l’incertitude. Le lecteur hésite entre le potentiel et l’irréel en particulier à cause de « voir » qui donne un témoignage visuel et réel. Le lecteur est à la frontière du réel car le passage à la vision, au domaine de l’imaginaire est toujours possible. Il faudra relever les nombreuses occurrences des tournures impersonnelles telles « il semble », « on aurait dit », « on eut dit »…qui jouent sur la modalisation de l’acte de parole. Il existe un jeu constant, une oscillation entre le subjectif et l’objectif selon que le pronom « me » est exprimé ou pas. La modalisation est-elle régie par une tournure impersonnelle unique ? Quelle est sa portée ? Par rapport au lecteur, la tournure « il me semble que » est différente de « il semble que » puisqu’elle prévient toute objection. C’est en effet la subjectivité qui prime puisqu’il s’agit de l’opinion propre du narrateur. De même, «il me sembla » gagne en caractère probable alors que « il me semblait » est plus imaginaire. Lorsque le pronom « me » est exprimé, la complétive est à l’indicatif mais lorsqu’il n’est pas exprimé la complétive est au subjonctif. La complétive en « que » est plus intellectuelle « il me semblait que je savais… » alors que l’infinitif insiste sur la perception « il me semblait savoir… ». Quatre actes sont régis par des tournures impersonnelles : savoir, connaître et reconnaître, voir et comprendre comme si l’acte de voir était une reconnaissance, elle-même source de savoir. Ces visions sont probablement à l’origine du savoir et le personnage a peut-être trouvé la clé de la connaissance. Les énoncés sont neutralisés au présent et les certitudes, le savoir sont acquis au prix des rêves que le personnage a vécu dans le passé. C’est le personnage du passé qui a eu un savoir supérieur et qui pourrait assurer le passage du particulier à l’universel : « Je crois que l’imagination humaine n’a rien inventé qui ne soit vrai ». L’homologie est réussie entre le narrateur et le lecteur qui s’identifie facilement à ce « je ». La notion d’être et de paraître se mêlent à tel point que le rêveur a confondu les deux mais le narrateur fait le partage entre ces deux notions pour dire que l’imagination fait accéder à la connaissance et le lecteur devrait par un effet de miroir suivre la même voix. Le narrateur est sur le chemin du secret, révélé aussi au lecteur. Le « je » se donne comme exemple, comme miroir du lecteur et le narrateur se dédouble en acteur onirique qui accapare le premier rôle. C’est un personnage initié car il a eu accès au secret qui se revendique comme vérité. L’être va coïncider avec le paraître mais le personnage a besoin du narrateur pour se réaliser comme initiateur. Le lecteur évolue dans un univers troublant de l’esprit à la lisière du potentiel et de l’irréel. Le domaine de l’hésitation est le principe de découverte de la vérité. LES DISCOURS RAPPORTES Il existe 5 sortes de discours rapporté : Le discours direct Le discours direct libre Le discours indirect Le discours indirect libre Le discours narrativisé C’est une erreur de penser que le discours direct est le plus fidèle et le plus objectif. On ne rapporte pas toutes les altérations possibles du discours oral, tout est donc interprétation. Il ne faut pas penser non plus que le discours indirect est une transposition du discours direct. Ce sont deux modes de rapports complétement différents car ils n’ont pas la même façon de rapporter les paroles. Il ne faut pas non plus imaginer que le discours indirect libre est réservé au domaine littéraire. Il suffit pour mettre en valeur un autre discours de mettre une intonation orale et à l’écrit des procédés typographiques (mise en italique, guillemets…). Il y a une hétérogénéité entre les différents types de discours et les formes marquées sont différentes des formes univoques qui sont elles, sans aucune ambiguité. 1. Les formes marquées univoques a) Le discours direct (équivaut à une citation) Il se caractérise par une hétérogénéité essentielle et contraste fortement avec le discours indirect car les énoncés sont disjoints. Il y a opposition entre le discours cité et le discours citant (par incise). Le discours s’oppose au récit (cf Benveniste) mais il faut faire attention tout de même. Aujourd’hui on dit que tout est discours car tout écrit est fait pour être lu. Avec le discours, on a un texte situé dans la situation d’énonciation alors que le récit se caractérise par « il » et s’accompagne du passé simple. Le discours direct suppose de rapporter à la fois ce qui a été dit et la façon dont ça été dit avec tous les jeux de perversion des journalistes par exemple qui sortent les phrases de leur contexte. Le discours direct cite les paroles d’un autre et implique en même temps un commentaire à faire sur ces mots (statut antonyme). Ex. « chat » est un mot qui comporte quatre lettres : il s’agit là d’un commentaire sur le mot même Ex. Le chat est un animal domestique : il s’agit ici d’un emploi standard b) Le discours indirect C’est une reformulation ou une traduction de qu’un autre dit. Le discours indirect restitue le contenu, le signifié et non pas le signifiant et implique une subordination syntaxique : deux discours liés par une subordonnée complétive formée avec « dire que ». Le lissage des deux discours se fait par la transposition des marques personnelles et temporelles : le discours citant va homogénéiser. On parle d’îlots textuels quand les mots sont en italique car ils sont formellement hétérogènes et ambigus sur le plan énonciatif. Les guillemets sont un commentaire à faire par le lecteur, certains parlent à ce sujet de connotation antonymique. 2. Les formes non marquées (purement interprétatives) a) Le discours direct libre Il n’y a pas de marqueurs identifiant la source énonciative Ex. « je » qui surgit alors que le texte est écrit à la troisième personne b) Le discours indirect libre Il est rendu indécelable car il n’y a aucune indication formelle apparente de la part du narrateur. Le discours citant va être marqué par les propres repères du narrateur. Le discours indirect libre est une forme bivocale car le narrateur et le personnage s’expriment de manière conjointe. Il répond à une superposition de deux niveaux, ce qui fait toute sa richesse. Il y a une discordance implicite à déduire de la part du lecteur. Le narrateur propose une version des propos de l’autre forme qui implique la plus grande distance par rapport au discours de l’énoncé. Le discours narrativisé Ce type de discours fait un résumé de tout ce qui a été dit, il donne le sujet de la conversion uniquement et s’éloigne encore plus des propos de l’autre qui sont traités comme des actes. Ex. Il raconta ses vacances… LES TEMPS DE L’INDICATIF Les cinq paramètres qui permettent d’évaluer : temps La temporalité permet de préciser la situation du procès par rapport au point de repère du temps. On parle plutôt de « tiroirs verbaux » que de temps pour éviter la confusion sémantique avec le temps comme catégorie abstraite. mode Le mode évalue la situation du procès par rapport au mouvement de pensée qui anime le locuteur au moment où il s’exprime. personne La personne touche au verbe, au genre…mais elle est à mettre de côté pour l’étude grammaticale. voix La voix étudie la relation de l’agent du procès par rapport au verbe. L’agent dans une phrase à la voix active coïncide avec le sujet alors que dans une phrase à la voix passive il se retrouve patient. aspect L’aspect étudie la qualité interne du procès et prend en compte son déroulement. 1. Le présent de l’indicatif --------------------------------- PRESENT Le point de repère du présent sur la flèche temporelle est le moment où l’on parle, où l’on écrit. On parle alors de présent d’énonciation ou présent actuel aussi appelé « tiroir verbal intemporel ». Le présent est extensible au delà du présent d’énonciation, c’est un temps non marqué qui n’a pas de désinences spécifiques. Il se présente sous trois formes : - le présent d’énonciation Le présent peut se substituer a des passés ou des futurs car il a une forme économique et peut remplacer de manière utile ces différents passés ou futurs. - le présent gnomique Le présent peut prendre aussi une valeur omnitemporelle ou générique (ou encore gnomique) qui se retrouve dans les ouvrages scientifiques, dans les proverbes… - le présent de narration Le présent de narration est un présent qui lui, remplace les temps du passé de manière souvent insolite. 2. Les temps du passé : imparfait et passé simple ------------------------------------ TENSION PRESENT Ces deux tiroirs verbaux présent et temps du passé se distinguent par leur aspect qui prend en compte leur tension, la perspective temporelle étant insuffisante pour les distinguer. 1) Le passé simple Au passé simple, chaque procès constitue un tout circonscrit et délimité. Par conséquent, ce temps marque des actions successives et se trouve incapable de marquer la simultanéité entre deux procès. Il transcrit des faits de premier plan c’est-à-dire des événements qui se détachent des circonstances au milieu desquelles ils se produisent. Il tissel’histoire et la fait avancer chronologiquement. La valeur aspectuelle associée au passé simple est non sécante, ou globale (ou encore perfective) car il fait abstraction de la durée. On envisage le procès comme un tout délimité mais de manière globale. 2) L’imparfait L’imparfait est un présent dans le passé c’est-à-dire qu’il y a une homologie établie entre le présent et l’imparfait de l’indicatif. Là où le présent établit une coïncidence entre le moment de l’énonciation et le procès, l’imparfait établit une coïncidence entre le procès et un point de repère donné de l’énoncé. L’aspect de l’imparfait est sécant ou encore imperfectif et à la différence du passé simple, il est valable à toutes les époques. Il sera utilisé de trois manières différentes : Il peut exprimé la concomitance dans le passé d’où dérive un emploi narratif ou un emploi descriptif. Il sert à ce moment là à des actions d’arrière-plan ou de toile de fond. Il marque une certaine indécision, un flou chronologique d’où sa valeur durative ou fréquentative (ou encore itérative). Il est le signe de la transposition indirecte car l’imparfait sert à transposer dans un contexte passé le présent du discours direct. Il est aussi apte à exprimer le discours indirect libre en tant que marqueur temporel. L’imparfait peut être investi de nuances modales et devient ainsi connoté par des marques d’éventualité. C’est un tiroir verbal suggéré par l’éventuel et dès que l’auteur emploie cet éventuel il y a une forme de distanciation. Il y a un recul de l’énonciation, une prise de distances, on ne se porte plus garant… L’imparfait est employé après un « si » hypothétique. Ex. « Je voulais vous dire que… » : il s’agit d’un contexte présent sans valeur temporelle qu’on appelle valeur euphémistique. Ex. « Un pas de plus et il tombait dans le vide ». Quelque soit la fonction privilégiée qu’il remplit dans un contexte donné, toutes les valeurs restent présentes même si ce n’est pas à l’état de connotation. Il faut opposer les verbes à sens conclusif aux verbes à sens non-conclusif : - les verbes conclusifs : ils contiennent déjà dans leur sens une idée d’achèvement Ex. naître, mourir… - les verbes non-conclusifs : c’est l’inverse Ex. manger, danser… Pour les différencier sans se tromper, il faut utiliser l’adverbe « longtemps ». Par exemple on ne peut pas dire « il naît longtemps » mais par contre on peut dire « il marche longtemps ». 3. Le passé composé C’est un temps qui combine une auxiliaire conjuguée au présent, à une forme de participe passé. Le passé composé est un tiroir verbal entre deux époques car il est en contact à la fois avec le passé et le présent ; il représente ainsi le temps du bilan par excellence. Sa valeur aspectuelle est celle d’un temps à l’aspect accompli (du présent). Le passé composé permet au locuteur de participer à ce qui est dit ou relaté. Il exprime la proximité psychologique des procès passés d’où son emploi prioritaire en discours oral. Le passé composé remplace le passé simple à l’écrit comme à l’oral. Le système des temps s’organise sur une opposition des temps en forme simple et en forme composée. Le conditionnel présent s’oppose au conditionnel passé, le futur au futur antérieur etc… Les formes composées expriment l’antériorité par rapport aux formes simples correspondantes : Ex. « A eut-il mangé qu’il sortit » : passé antérieur / passé simple « A peine avait-il terminé qu’il sortit » : plus que parfait / passé simple « Il est en retard, il aura manqué son train » : présent / futur antérieur (souligne le caractère probable de l’action qui équivaut à il a peut-être manqué son train La valeur aspectuelle des formes composées est l’aspect accompli. [ Ps : Pour parler de l’infinitif passé, on parlera plutôt de forme non composée.] LES EXPANSIONS DU NOM CARACTERISATION & DETERMINATION Le sens du nom commun est composé de constantes virtuelles et la caractérisation ne change rien. caractérisation : c’est la fonction par laquelle un élément ajoute la ou les constantes notionelles de son signifié à celle de son autre élément. actualisation : c’est le passage du substantif de l’état virtuel de la langue à celui actualisé du discours, il attribue au substantif un référent. détermination : c’est lorsque le substantif est déterminé au sens strict du terme et que le référent de ce dernier est identifié. Les caractérisants spécifiques du substantif sont les différents types d’expansion du nom qui sont tous les éléments susceptibles de développer le substantif qur le plan sémantique. Ils ont une fonction de caractérisation simple ou au contraire peuvent contribuer à l’identification du référent du substantif. Si elles apportent une information accessoire : caractérisants Si elles ont une incidence sur l’extension du nom : determination Le classement se fera ainsi : 1) L’adjectif épithète 2) La proposition subordonnée relative adjective 3) Le syntagme nominal complément de nom 1) L’adjectif épithète a) L’adjectif pur Il vient du latin directement et il se définit souvent par la négative car il n’est ni un nom ni un verbe. On peut ensuite les partager selon leur place ou leur valeur référentielle. Ex. « jeunes », « ovale », « vieilles », « joyeuses », « longue », « léger » jeunes : déterminatif, expression lexicalisée ou nom composé (deux éléments autonomes et associés qui forment une nouvelle unité lexicale, on ne peut rajouter d’élément entre les deux). Jeunes est soudé au substantif qui suit pour former une unité. vieilles : il peut être envisagé comme un determinatif mais la relative sert à determiner le substantif. Vieilles peut donc devenir accessoire. joyeuses : l’article indéfini réduit « de » et non pas « des ». Il a une valeur évaluative car il est placé avant. b) L’adjectif dérivé verbal Il peut s’agir : - d’un participe passé devenu adjectif Ex. « ombragée », « pavoisées », « alimentés », perdus : épithète determinative, dans ce cas le déterminant a une valeur cataphorique car il assure l’identification du référent « chateaux ». ombragées et pavoisées : valeur caractérisante alimentés : valeur déterminative, il sert à identifier « étangs » et donne comme indice « alimentés par la Nonette et la Thève ». pavoisées : il n’a pas une valeur déterminative car il y a la présence de l’article indéfini « des ». ombragées : il n’a pas une valeur déterminative car il y a la présence de l’article indéfini « une ». - d’un participe présent appelé adjectif verbal. Ex. « dominant »… prenant : épithète détachée de « je » appartenant : épithète liée de « jeunes gens » ayant une valeur caractérisante c) L’adjectif dérivé nominal ou relationnel attention : fête patronale : adjectif dérivé d’un nom qui équivaut à « la fête du saint-patron » et n’est pas susceptible de recevoir des degrés d’intensité ou de comparaison. Cet adjectif n’est pas non plus antéposable puisque l’on ne peut pas dire « une patronale fête* » et coordonnable à un adjectif pur « une fête patronale et joyeuse* ». Il a une valeur le plus souvent déterminative et tout adjectif relationnel à l’origine peut devenir qualificatif. Ex. C’est la voiture présidentielle : adjectif relationnel seulement Ex. Il a une allure présidentielle : adjectif relationnel devenu adjectif qualificatif car on peut dire très présidentielle. cortège rustique : A t-on affaire à un adjectif relationnel équivalent à « de la campagne » ou à un relationnel ayant basculé dans le qualificatif désignant « l’aspect des gens de la campagne ». 2) La proposition relative adjective Elle peut être déterminative ou explicative (la virgule est souvent un indice pour ce type de proposition). Ex. « où j’avais… » : où est ici un adverbe relatif proposition relative déterminative à cause de la présence de l’article défini « l’ ». Ex. « dont j’avais déjà… » proposition relative déterminative Ex. « qui prenaient place… » : présence de l’article indéfini proposition relative accessoire (ou essentielle) Ex. « qui possèdent encore là…les forêts » proposition déterminative ou explicative ? Difficile de répondre à cause de la présence du qualificatif « vieilles » mais une épithète déterminative suffitelle à déterminer son antécédent ? A t-elle un rôle accessoire ? : vieilles familles qui ont des châteaux Si toutes les familles ont un château, la proposition relative est déterminative : vieilles familles Si certaines familles ont des châteaux, la proposition relative est explicative : familles 3) Compléments nominaux du nom Ex. « du goût d’alors » : un seul adverbe Ex. « souvenir d’enfance » : pas d’article donc décatégorisé Il s’agit d’un complément essentiel qui peut être remplacé par « enfantin »… La commutation théorique est possible même si l’adjectif n’existe pas en langue « temple à colonnes ». Ex. « compagnies de l’arc » : présence de l’article donc il s’agit d’un complément relationnel Ex. « chevaliers de l’arc » : relation d’appartenance entre les deux subtantifs au sens large. Ex. « au moment de la fête patronale » : l’expression « au moment de » constitue une locution lexicalisée et fonctionne comme un ensemble prépositionnel. (même chose pour « de la fin du XVIII° ») Ex. « distribution des prix » : c’est l’acte de distribuer, relation objective de prédicat à sujet. Ex. « l’existence d’un temple ovale » : c’est un état, relation subjective de sujet à prédicat. attention ! cas particuliers : « à travers… » : locution prépositionnelle introduisant un complément de nom mais il y a une nuance sémantique différente. Cette locution équivaut à un complément adverbial de lieu. « à l’église… » LE SUBJONCTIF Le subjonctif renvoie à la notion de mode, il exprime l’attitude du locuteur à l’égard de son énoncé. Pour commenter l’emploi du subjonctif, il faudra parler de l’indicatif. Ce sont les deux modes personnels qui s’opposent aux modes impersonnels à savoir le gérondif, le participe et l’infinitif. L’indicatif est l’image la plus complète du temps alors que le subjonctif ne possède que quatre tiroirs verbaux : 2 formes simples (présent et imparfait) et 2 formes composées (passé et plus que parfait). L’indicatif inscrit le procès dans sa réalité, c’est le mode actuel par excellence alors que le subjonctif inscrit le procès dans sa virtualité. Avec le subjonctif, le point de vue de l’énonciation se superpose à la vision du procès. Quand on emploie un subjonctif, l’actualisation du procès est secondaire par rapport à l’interprétation qui en est donnée. L’actualisation est le procédé qui permet d’insérer le procès dans une des trois époques. Le subjonctif est des fois obligatoire et répond à des contraintes syntaxiques mais lorsqu’il y a choix l’auteur a obligatoirement voulu créer un efet stylistique. Le subjonctif sera alors une façon particulière d’envisager le procès… Comment classer les subjonctifs dans un texte ? Le classement devra prendre en compte les emplois syntaxiques : ce sera soit dans une proposition indépendante soit dans une proposition subordonnée. 1) Le subjonctif dans une proposition indépendante a) subjonctif substitut de l’impératif déficient Ex. Qu’il sorte ! (impossible de faire autrement) Ex. Que je vous entende ! (expression du souhait ou de l’ordre) b) subjonctif plus que parfait équivalant à un irréel du passé Ex. Qui donc eut songé à ternir…. ? ( qui donc aurait songé… ?) Le subjonctif étant commutable avec le conditionnel passé il faudra analyser pourquoi l’auteur a choisi cette forme et pas l’autre…Si le subjonctif est utilisé, il s’agira d’une langue littéraire et soignée. 2) Le subjonctif en parataxe Ex. Fusse t-il 100 contre lui, il ne renoncerait pas à son combat : la subordination est implicite car les deux propositions ne sont pas placées sur le même plan. L’inversion du sujet est un indice de ces constructions là. C’est une proposition concessive qui équivaut à « même si » et qui se rencontre avec des verbes comme « avoir », « devoir » ou « être » conjugués à toutes les personnes sauf la 2ème personne du singulier. 3) Le subjonctif en proposition subordonnée explicite a) Les complétives en tête de phrase Le subjonctif est obligatoire car le procès est évoqué sans être asserté. Il laisse la phrase comme en suspens et l’on ne sait pas si elle est prise en charge par le narrateur. Ex. Qu’il soit en retard ce soir au dîner ne m’étonnerait pas b) Les complétives en complément d’objet Le mode est imposé par le verbe ou le nom qui la régit ou l’adjectif dont elle dépend. Si il s’agit d’un verbe de volonté ou de sentiment : le mode est au subjonctif dans la subordonnée. Quand on exprime un procès on projette sa subjectivité sur ce procès. Ex. « Ma mère, dites au fossoyeux qu’il fasse la fosse pour deux » Ex. « Il serait à désirer que de bons poètes modernes missent à profit l’inspiration naïve de nos pères » Il faut impliquer nécessairement le subjonctif dans les locutions impersonnelles d’obligation : « il fallait qu’elle apparût » (imparfait du subjonctif) Sylvie « Il semble… » peut être suivi du subjonctif mais il sera plutôt utilisé avec l’indicatif. « Il ne me semblait pas que l’on put… » supprime la valeur de vérité de l’énoncé. « Je ne crois pas qu’il est coupable » et « Je ne crois pas qu’il soit coupable » Avec le subjonctif, la négation porte sur l’ensemble du procès alors qu’avec l’indicatif la négation est restreinte à la principale. Avec le subjonctif, il y a un recul de la possibilité vers la virtualité… c) Les conjonctives circonstancielles L’indicatif ou le subjonctif s’imposent selon le sémantisme de la subordonnée ou de la conjonction de la subordonnée qui l’introduit. Il y a différentes conjonctives circonstancielles : - concessive On utilise le subjonctif après « bien que » ou « quoique ». La cause n’aboutit pas à la conséquence attendue et c’est ce que marque le subjonctif. temporelle On utilise l’indicatif mais certaines locutions telles « avant que » exigent le subjonctif (« après que » demande l’indicatif) causale On utilise indicatif après « parce que » car il s’agit du domaine d’un fait avéré, achevé sauf les causes niées qui elles, necessitent le subjonctif « non que ». hypothétique Il peut y avoir différentes possibilités : « si + imparfait / présent » ne demande pas le subjonctif mais dans des emplois littéraires on utilisera le subjonctif plus que parfait. Ex. Ha si vous eussiez été une de ces femmes frivoles ! Mme Bovary Avec « comme si » qui introduit une comparaison hypothétique le choix du mode est libre… - finale On utilise le subjonctif car elle manifeste une intention avec « pour que ». Ex. Pour qu’elle m’offrit… Sylvie consécutive Il s’agit d’un système corrélatif avec un adverbe antécédent inséré dans la principale et annonçant la conjonctive qui suit. Ex. Nous étions trop faibles pour que nous pûmes… comparative Elle demande l’indicatif la plupart du temps. d) Les relatives adjectives Le mode est en principe et le plus souvent à l’indicatif mais on peut trouver le subjonctif dans certaines relatives déterminatives où il dénote la restriction qui affecte l’antécédent. On peut utiliser le subjonctif : - si l’antécédent est indéfini ou indéterminé. Ex. « Je n’ai rien vu là-bas que je puisse regretter ici » Sylvie §8 Ex. « Je n’ai jamais pu trouver quelqu’un qui sût m’aimer » complément de l’antécédent indéfini « quelqu’un ». - si l’antécédent est selectionné parmi un ensemble de possibles (superlatif relatif ou expressions équivalentes telles : le seul, le premier). Ex. « La seule figure qui me rattacha… » Ex. « La seule qu’ils eussent vu… » Ex. « Les plus belles que sans doute elle eut jamais reçu » Ps : On distingue 2 types de superlatif : le superlatif relatif (= par rapport à…) le superlatif absolu : quand le jugement est hors norme et qu’il n’y a pas de comparaison « très belle », « drôlement belle ». - Je cherche une maison qui a les volets bleus : je sais qu’elle existe et je la cherche - Je cherche une maison qui ait les volets bleus : j’émets un souhait Rappel sur la concordance des temps C’est le mécanisme qui vise à réduire le décalage temporel entre deux verbes lorsque l’un s’inscrit dans la dépendance syntaxique de l’autre (Cf Grammaire du Français p :485). Lorsque le subjonctif est utilisé il faut faire l’analyse du mode et du temps. Les temps du subjonctif n’ont pas de valeur proprement temporelle. Il y a une opposition des quatre tiroirs verbaux sur le plan aspectuel. Le subjonctif présent est lié à l’aspect non accompli et le subjonctif passé, lié lui à l’aspect accompli, est capable d’exprimer le caractère antérieur de la proposition subordonnée. temps de la principale présent ou futur passé ou conditionnel temps de la subordonnée antériorité simultanéité subjonctif passé subjonctif présent subjonctif plus que parfait subjonctif imparfait postériorité subjonctif présent subjonctif imparfait THEME ET PREDICAT Le thème est un mot très polysémique, car on peut parler du thème d’un roman (sujet), du thème d’un discours (genre) mais c’est au niveau de la phrase que le problème se pose. Le thème : c’est ce dont parle le locuteur, ce qui est connu (le sujet logique) Le prédicat : c’est ce que l’on dit du thème, il apporte une information nouvelle Ex. La chouette hululait thème prédicat Il y a ici une coïncidence entre le thème et le sujet grammatical ce qui n’est pas toujours le cas, et entre le prédicat verbal et le propos. Deux façons permettent d’identifier le thème dans une phrase : poser une question : Que faisait la chouette ? Elle hululait Par conséquent, le propos est reconnu c’est-à-dire l’apport d’information, donc le thème est « chouette ». par la négation : Elle porte sur le propos et jamais sur le thème, c’est donc le propos qui va être éventuellement nié : Elle n’hululait pas, le thème est donc « chouette ». Ex. Ton ami viendra demain - propos : demain - thème : ton ami Ex. En juillet les touristes commencent à arriver - thème : en juillet - propos : suite de la phrase qui répond à la question « Que se passe t-il en juillet ? » C’est aussi valable pour tous les phénomènes de dislocation : Ex. Il adore le chocolat / Le chocolat, il l’adore - thème : le chocolat attention ! Ex. Etrange, cette histoire : le thème n’est pas toujours en tête de phrase. - thème : histoire - propos : étrange Ex. C’est le café noir qu’il préfère - propos : (ou focus) le café noir Thématisation : C’est le déplacement en tête de phrase d’un élément qui assure une fonction autre que le sujet. 3 moyens : complément circonstanciel phénomène de dislocation Ex. L’euro, on en parle de plus en plus tournure passive, on thématise le complément d’agent en fonction sujet. (contestée toutefois par certaines grammaires) L’INFINITIF L’infinitif est un mode impersonnel comme le participe car il ne marque ni la personne ni le temps. Il ne peut pas actualiser car il n’a pas de tiroirs verbaux. Il ne peut donc pas placer un procès ou une action dans une des trois époques passé/ présent/ futur. L’infinitif est un mode qui estompe tout ancrage temporel et toute personne. Il peut avoir des formes simples ou composées comme « être trompé ». Il a des traits du nom mais aussi des traits spécifiques du verbe comme la capacité de régir des compléments : des compléments circonstanciels, des COD / COI ou encore des attributs. Sur le plan lexical, il ne diffère pas des autres formes de la conjugaison car il y appartient de par sa morphologie : -il a une forme composée qui peut exprimer la voix - il se décompose en un radical et une désinence (morphème spécifique) qui est variable suivant la personne, le temps, le mode…c’est-à-dire selon des points grammaticaux. - il revêt la forme de l’accompli ou de l’inaccompli (aspect de l’infinitif ou rapport temporel d’antériorité soit les deux) - il admet des compléments spécifiques du verbe qui peuvent être objet ou attribut - il admet des adverbes ou des compléments circonstanciels et notamment la négation (ne…pas) I. L’infinitif, noyau de proposition 1) Proposition infinitive Le sujet de la proposition infinitive est différent du sujet de la principale : « Sylvie que j’avais vu grandir » : l’agent est Sylvie relayé par le « que » qui assure la fonction de sujet de la proposition infinitive. p. 176 Sylvie §2 « permet souvent de voir se presser en quelques minutes » p. 190 « Ce que je vis jouer était comme un mystère… » L’agent n’est pas exprimé quand il est de peu d’intérêt, le fait de savoir par qui n’est pas important ici. Wilmet critique quand l’agent de l’infinitif est un pronom : « Je me sentais vivre en elle » : « me » se place devant le verbe principal et Wilmet parle d’un sentiment d’objet second opposé à l’objet premier. 2) Proposition indépendante Dans le cas d’une proposition indépendante, l’infinitif peut jouer le rôle du seul pivot verbal : p. 118-119 phrase exclamative où l’extension est plus généralisante en utilisant l’infinitif : « aimer une religieuse sous la forme d’une actrice ! » 3) Relative substantive et interrogative indirecte ou directe L’infinitif est le prédicat verbal d’une interrogative indirecte ou d’une relative substantive : Ex. « Il se demande comment lui déclarer sa flamme » : interrogative indirecte Ex. « Mais que lui dire ? » : interrogative directe Ex. « Il y a de quoi devenir fou » : relative substantive II. L’infinitif en fonction nominale 1) Sujet p.172 « peut m’importait d’arrêter mes regards… » : sujet du verbe importer p.179 « il était d’usage de réunir… » : séquence du verbe de l’impersonnel qui est le sujet grammatical de la phrase. Le sujet thématique de la phrase est l’infinitif « réunir ». p.204 « la raison pour moi c’était de conquérir et de fixer mon idéal » : attribut de « raison » (« c’ »). C’est une phrase à constituant emphatique qui fonctionne en tant que sujet (dislocation gauche, « c’ » est anaphorique) 2) complément du nom 3) complément de l’adjectif Ex. « impuissante à calmer… » : complément de l’adjectif « impuissante » 4) complément circonstanciel Ex. « Comme il fallait y vivre pour le bien connaître » : C.C. de but Ex. « Qu’il utilisait à parer des tabatières » : C.C. de but Ex. « Un père qui l’a puni d’avoir aimé » : C.C. de cause 5) complément d’un verbe de mouvement Ex. « …et qui ira la retrouver » : complément de progrédience (il exprime le prolongement d’un fait et s’inscrit dans la continuité du verbe conjugué) Ex. « Une toute autre idée vint traverser mon esprit » : complément de progrédience (le verbe de mouvement « venir » conserve son sens) 6) complément d’objet (COD ou COI) Ex. « On nous dit de nous embrasser » : « dire » a ici une valeur injonctive Ex. « Elle aime tant (à) danser… » : assez ambigu Ex. « Ces femmes qui acceptent d’être trompées » : complément d’objet (COD mais c’est sous-entendu) qui signifie « accepter la tromperie » mais le de disparaît. III. L’infinitif dans une périphrase verbale Dans la périphrase verbale, l’infinitif fait corps avec un autre verbe conjugué qui lui sert de manière occasionnelle d’auxiliaire ou de semi-auxiliaire. Elle est constituée pour palier les manques de la conjugaison des verbes simples. Il existe donc un système de périphrases verbales qui sont là pour compléter ou nuancer. Avec une semi-auxiliaire, le verbe conjugué voit son sens altéré, il est « sublimé » selon Wilmet. Le problème est de délimiter la frontière entre les périphrases verbales et le reste des verbes. La frontière est aussi très floue entre la périphrase verbale et le complément d’objet. Pour Wilmet, « je veux + infinitif » est tantôt une périphrase verbale, tantôt non dépendante si le verbe garde tous ses sèmes ou pas. Comment reconnaître les semi-auxiliaires ? La construction avec une complètive n’est pas attestée par les semi-auxiliaires. Ex. « devoir », « pouvoir », « oser », « savoir » (il sait nager), « avoir » (avoir failli), « paraître », « sembler »… C’est la pure modalité, c’est-à-dire que ce sont les verbes pour lesquels il n’y a pas de dissociation possible entre les deux sujets. Seuls certains verbes acceptent comme sujet un « il » impersonnel. On oppose ainsi « il commence à pleuvoir » à « il persévère à pleuvoir* ». La négation ne peut se trouver avec des semi-auxiliaires…C’est comme si la négation trouvait son forclusif dans le verbe modal même : « il n’ose venir ». Les semi-auxiliaires n’admettent pas la pronominalisation en « le » et la focalisation en « c’est… que ». Tous ces critères ont des limites car on pourrait accepter « il doit marcher » : « il le doit ». Le paradigme des semi-auxiliaires est difficile à établir car il n’y a pas de classes fermées. Toute fonction modale se ramène à un schéma unique : au lieu d’être décrite, l’action se fait subjectivement. 1) périphrase temporelle venir de + infinitif : « un événement venait d’avoir lieu » aller + infinitif : « ils allaient être reconnus » 2) périphrase modale falloir, pouvoir, devoir, savoir, vouloir… Devoir : Ex. « Ils doivent rendre le bouquet à ceux de Loisy » : obligation + futur Ex. « Nous ne devions plus la revoir » : modalité aléthique Ex. « Je ne devais pas attendre un grand succès » : modalité aléthique Ex. « …devais le régénérer » : obligation seule Ex. « …avait dû être dédié à… » : modalité épisthémique Pouvoir : Ex. « Ce qu’elle pouvait être ailleurs » : probabilité de l’action Ex. « On pouvait la passer… » : possibilité « Je peux » est une variante de « je puis » qui est plus recherché. Il y a une distinction stylistique entre les deux car « je puis » s’est spécialisé dans les questions directes. Oser : Ex. « Elle osa rompre… » : notion de sacralité Avoir : Ex. « Avoir le droit de » Vouloir : Ex. « Sylvie ne voulut pas chanter » Ex. « Elle voulut bien me plaindre » : accepter de… Attention !: « Je cherche à retrouver », « je tâche d’oublier » : nous ne savons pas s’il s’agit d’une périphrase ou pas. 3) périphrase aspectuelle Elle est en relation avec la durée du procès et la manière dont il est perçu. Ex. « Il se mit à pleurer » : aspect inchoatif Ex. « Je continuai à réciter », « J’en suis à me demander », « Je ne tardais pas à m’engager » : périphrase aspectuelle ou temporelle pour les deux dernières. Ex. « Il finit de pleurer » : aspect terminatif ou égressif. 4) périphrase actancielle (ou de diathèse) C’est la manière dont le verbe marque le passage d’un agent à un patient. Ex. « Je fais payer l’addition à mon frère » : je cause l’action et mon frère fait l’action (c’est le passage d’un actant à deux). Ex. « Il faut me laisser faire » : Il faut qu’on me laisse faire, l’agent causatif est indéterminé. Ex. « Elle lui fit sceller l’âne » Ex. « Je vais vous faire courir » : périphrase temporelle ou périphrase actancielle. Attention !: « Il se fait piquer par une guêpe » équivaut à « il a été piqué par… ». LES DEMONSTRATIFS I. Les déterminants démonstratifs Le déterminant démonstratif appartient à la catégorie des déterminants spécifiques qui rendent compte à la fois du nombre et de l’identité de l’être qu’ils désignent. Il combine la signification de l’article défini avec une référence expressement désignée et fait partie de la catégorie des quantifiants-caractérisants. Les formes simples et renforcées proviennent toutes d’une forme latine variable « iste » renforcée par la particule ayant valeur de désignation « ecce ». Ils ne peuvent pas lorsqu’ils sont antéposés au nom se combiner avec d’autres déterminants spécifiques mais, entre le démonstratif et le nom, peuvent s’insérer un adjectif qualificatif et / ou un déterminant secondaire (quelques…). Plus généralement le démonstratif sert à référer à une réalité présente dans la situation, y compris dans le contexte proprement linguistique. A la différence de l’article défini, la désignation qu’il opère ne passe pas d’abord par la prise en considération du concept signifié par le reste du groupe nominal. C’est pourquoi il peut être utilisé même quand il y a plusieurs réalités qui répondent au signalement donné par le groupe nominal. Morphologie : ce, cet, cette, ces (formes simples) cet…-ci / là, cette…-ci / là, ce…-ci / là, ces…-ci / là (formes renforcées). Pour les classer : 1. déterminant démonstratif à valeur déictique Dans ses emplois déictiques, il désigne un référent présent dans la situation de discours ou accessible à partir d’elle. Il peut alors être accompagné d’un geste, d’une mimique ou d’un mouvement qui facilitent l’identification : Je vais prendre ces fleurs. 2. déterminant démonstratif à valeur non déictique ou anaphorique Dans ses emplois non déictiques, il identifie anaphoriquement un référent déjà évoqué au moyen d’une description identique ou différente : Je lui ai acheté une voiture bleue pour son anniversaire. Cette voiture / automobile est un modèle très récent. Ps : on parle d’anaphore infidèle quand le substantif désigné est repris avec des changements lexicaux : Stéphane Mallarmé a renouvelé la poésie du XIX° siècle, ce poète a eu de nombreux disciples. On parle d’anaphore fidèle quand le substantif désigné est repris avec un simple changement de déterminant : Je lui ai acheté une rose. Cette rose représente mon amour pour elle… On parle d’anaphore conceptuelle ou résomptive quand elle condense et résume le contenu d’une phrase, d’un paragraphe ou de tout un fragment de texte antérieur : Notre chien est passé sous une voiture. Cet accident a laissé des traces. II. Les pronoms démonstratifs Le pronom démonstratif désigne un élément présent dans le contexte, qu’il s’agisse de la situation d’énonciation elle-même ou de l’enchaînement des mots dans le discours. Les pronoms démonstratifs se répartissent en une série simple et une série composée (élargie par les adverbes de lieu ci et là). Les formes variables en nombre et en genre s’y opposent aux formes neutres ce, ça, ceci et cela qui ne se rencontrent qu’au singulier. Les formes pronominales sont toutes issues du pronom / adjectif démonstratif latin « ille / illa / illud » renforcée par la particule elle-même démonstrative « ecce ». Morphologie : celui, celle, ce, ça, ceux,celles (formes simples) celui-ci / là, celle-ci / là, ceci, cela, ceux-ci / là, celles-ci / là (formes renforcées) Pour les classer : 1. Les formes masculines ou féminines a) Les formes simples (celui, ceux…) Ce sont des « symboles incomplets » qui reprennent le contenu lexical et le genre d’un nom antécédent (ou de la forme lexicale associée à un référent présent dans la situation), mais en modifient le nombre et les déterminations à de nouvelles fins référentielles. Les formes simples ne sont pas autonomes et elles ont forcément un appui à leur droite pour les déterminer : on les appelle pronoms déterminatifs. Aussi sont-elles toujours déterminées par un modificateur qui prend la forme : - d’une proposition relative : j’ai examiné tous les livres, mais je n’ai pas trouvé celui que je cherchais. - d’un complément prépositionnel : voici mon passeport et ceux de mes passagers. - d’un participe avec sa complémentation : les meilleurs de ses livres sont ceux écrits avant 1910 / ceux relatant ses campagnes militaires. b) Les formes renforcées variables (celui-ci, celle-là…) Elles sont toujours employées sans modificateur, véhiculent les mêmes valeurs déictiques et anaphoriques que le déterminant démonstratif. Elles peuvent prélever un ou plusieurs référents sur l’ensemble dénoté par le groupe nominal antécédent : Vos livres ne sont pas chers, je prends celui-ci / ceux-là, ou désigner de nouveaux référents à partir du contenu notionnel d’un nom antécédent : Pour le prix de ce seul livre, je peux acheter tous ceux-là. En emploi déictique, elles désignent un référent accessible dans la situation de discours : Tu as vu celui-là !. En emploi contrastif, les formes en –ci sont censées renvoyer à ce qui est le plus proche dans l’espace référentiel ou dans le texte et la forme en –là à ce qui est le plus éloigné. Mais cette opposition n’est pas toujours respectée dans l’usage contemporain qui n’emploie plus guère les formes en –ci. 2. Les formes neutres a) Les formes simples (ce, c’, ça) La forme neutre atone ce / c’ s’emploie d’une part comme sujet clitique (conjoint au verbe) du verbe être éventuellement modalisé par pouvoir ou devoir : C’est gentil – Ce devrait être facile, mais a été progressivement remplacée par cela, puis par ça (sauf devant le présent de l’indicatif du verbe être : *ça est gentil, mais ça serait gentil). Elle joue également le rôle d’antécédent « support non-animé » d’une relative : Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement, ou d’une subordonnée interrogative portant sur le c.o.d. : Dis-moi ce qu’il a encore fait. b) Les formes renforcées neutres (ceci, cela, ça) Les formes composées neutres servent à désigner déictiquement des référents non catégorisés : C’est quoi ça ?, voire à décatégoriser péjorativement un référent en lui refusant sa dénomination usuelle : Faut-il tout de même qu’un garçon ait été abandonné du bon Dieu pour aller avec ça (= une fille non aimée par la personne prononçant la phrase). Elles anaphorisent aussi les antécédents dépourvus de genre et de nombre que sont les propositions : Tu termineras tes devoirs. Après ça / cela, tu pourras regarder la t.v. – Ceci dit…, ou les segments textuels plus larges (suites de phrases, paragraphes…). Enfin, en alternance avec ce, elles reprennent un antécédent (souvent générique) dont elles neutralisent le genre et le nombre : Les enfants, ça fait du bruit / c’est bruyant. TD Les démonstratifs, Sylvie I « sans trop d’émotion…aux religions nouvelles ». 1. Les formes masculines ou féminines a) formes simples - « celle que la femme aimée… » : pronom démonstratif anaphorique fonctionnant comme représentant, valeur particularisante, pas de fonctionnement autonome. Le terme qu’il reprend peut en effet évoquer un ensemble plus large que l’être qu’il désigne. Il est employé ici dans une proposition subordonnée relative. - « ceux de Loisy… » : idem, pas d’autonomie syntaxique, toujours suivi d’un complément qui le détermine et il s’agit ici d’une construction prépositionnelle (le plus souvent « de »). La valeur est particularisante et anaphorique, le pronom démonstratif reprend le terme « archers ». b) formes renforcées - « celui-là me paraît digne d’avoir été choisi » : le pronom n’a pas besoin d’être complété, il fonctionne de façon autonome et peut assumer toutes les fonctions nominales dans la phrase. Il renvoie à « un » ou « jeune homme » dans le texte. C’est un représentant pouvant reprendre un élément déjà mentionné dans le texte. 2. Les formes neutres a) formes simples - « c’était un jeune homme correctement vêtu » : forme indifférenciée sans autonomie syntaxique qui fonctionne comme pronom clitique. Il est à l’appui du verbe être et il est le support d’une proposition relative ou d’une complétive. Ici, c’ a une valeur de tour présentatif (mise en relief) car il réfère à un objet présent dans la situation d’énonciation. - « c’était un souvenir de la Province » : tour présentatif, reprise d’un élément et valeur anaphorique. - « c’est une image que je poursuis » : construction d’extraction qui permet d’isoler du reste de la phrase un élément qui en devient l’information essentielle. Ici, c’est le c.o.d. qui est mis en relief. - « ce n’est pas à mon âge que l’on tue l’amour avec de l’or » : idem - « c’était, je crois, pour y voir le cours de la Bourse » : Reprise d’un élément présent dans la phrase à laquelle il donne alors une dimension emphatique. Il a une valeur anaphorique et présente le complément circonstanciel de but. - « ce qui venait d’avoir lieu »: idem, locution pronominale relative et valeur anaphorique. - « n’était-ce pas une illusion encore… ? »: élément de la locution interrogative sous-entendue (est-ce que) qui permet une inversion sujet-verbe. b) formes renforcées - « ceci est une idée d’un autre temps » : emploi anaphorique. Il s’agit d’un être ou d’une chose spécifiquement délimité. Le pronom est sujet du verbe être, il reprend et annonce un élément. LES PRONOMS Les pronoms constituent une catégorie syntaxique relativement homogène, mais présentent des propriétés sémantiques et des fonctionnements référentiels très diversifiés. Le terme même de pronom (étymologiquement à la place d’un nom), traditionnellement défini comme un « mot qui remplace un nom », est doublement malheureux. D’abord, les pronoms fonctionnent assez rarement comme l’équivalent d’un nom isolé. Dans la deuxième phrase de la séquence : Cette pêche est mûre. Elle doit être mangée maintenant, le pronom elle est fonctionnellement, équivalent non pas au nom pêche, mais au groupe nominal cette pêche. D’autre part, beaucoup de pronoms (par ex. les pronoms personnels je et tu) ne remplacent strictement rien, mais désignent directement leurs référents en vertu de leur sens codé (le pronom je désigne la personne qui dit « je » et quelqu’un peut renvoyer à une personne non autrement déterminée). Souvent équivalents à un groupe nominal, les pronoms peuvent néanmoins se comporter comme les équivalents fonctionnels d’autres catégories grammaticales. Ils peuvent donc avoir des fonctions différentes : sujet, complément d’objet direct ou indirect, attribut, complément du nom ou de l’adjectif, complément d’agent et compléments circonstanciels. Sémantiquement, un pronom se caractérise par la manière dont il réfère à ce qu’il désigne dans le discours. Il existe trois modes différents de référence : - la référence déictique : c’est lorsque le référent du pronom est identifié à partir de l’énonciation elle-même de cette forme. - la référence anaphorique : c’est lorsque l’identification du référent du pronom nécessite le recours à l’environnement contextuel. Le pronom peut dans ce cas reprendre intégralement les valeurs référentielles du segment qu’il représente (l’antécédent), on parle alors de coréférent. Mais il peut aussi ne reprendre qu’une partie des déterminations de l’antécédent et lui en assigner de nouvelles. - la référence par défaut : c’est lorsque ni le contexte linguistique ni la situation d’énonciation immédiate n’offrent la moindre information pertinente susceptible de substituer une constante référentielle à la variable contenue dans le sens pronominal. En général c’est l’interprétation générique qui s’impose, réduisant la valeur référentielle du pronom à ses seuls traits définitoires stables, sans autre limitation situationnelle ni textuelle. Pour les classer : I. Les nominaux Ils ne représentent pas un être ou une notion déjà évoqués, mais font immédiatement référence à l’être qu’ils désignent (en cela ils équivalent à des noms). 1. Les référents déterminés a) Les pronoms personnels de la 1ère et de la 2ème personne Morphologie : - formes conjointes : je, tu, nous, vous, (sujet) me, te, nous, vous, (complément direct et indirect) - formes disjointes : moi, toi, nous, vous. Je et tu : ils désignent directement leurs référents dans la situation d’énonciation. Je est en effet le nom que se donne celui qui parle (personne locutive); tu est le nom qu’il donne à celui à qui il s’adresse (personne allocutive). Aussi, dans une situation de dialogue et alternativement, tout locuteur s’autodésigne par je et est désigné par tu lorsqu’il devient destinataire. Je et tu peuvent avoir une fonction d’objet ou de sujet de la phrase. Nous (je + tu) et vous : Il s’agit en fait d’un ensemble indéterminé de personnes : nous comporte obligatoirement je, auquel s’ajoutent soit tu, soit ils, soit l’un ou l’autre.Vous est fait obligatoirement de tu, auquel s’ajoutent éventuellement il ou ils. On peut cependant imaginer aussi que parfois vous est véritablement l’addition de plusieurs tu : c’est notamment le cas lorsqu’on s’adresse à un auditoire. b) Les pronoms possessifs Les emplois comme nominaux sont relativements rares ; aussi sont-ils lexicalisés : on emploie les miens pour désigner ses proches, et on a pu, dans la langue classique, dire le mien, le sien, pour dire mon / son argent, mes / ses richesses. Les pronoms possessifs appartiennent au système des nominaux chaque fois qu’ils font référence à la première ou à la deuxième personne. 2. Les référents indéterminés a) Les pronoms indéfinis On distinguera ceux qui sont toujours nominaux : on, autrui, personne, quelqu’un, quiconque, les uns les autres, certains, aucun (surtout dans les tours comme aucun de vous, aucun d’entre nous, d’aucuns), nul, personne, chacun, plusieurs, tel, rien, quelque chose, tout. b) Les pronoms démonstratifs Ce sont les formes dépourvues des marques de la proximité et de l’éloignement et que l’on nomme « pronoms déterminatifs », parce qu’ils ne peuvent être employés sans complément subséquent (celui qui… ; celui de…) qui jouent ce rôle. En revanche, tous les neutres, marqués ou non (ceci, cela, ça, ce) ont naturellement tendance à être employées comme nominaux. Ex. ceux qui pensent ainsi ont tort (= les personnes qui) Ex. comment ça va ? (= votre situation actuelle) c) Les pronoms interrogatifs On a vu que qui pouvait s’employer comme nominal indéterminé de l’animé ; il en va de même, pour le non animé, de que, quoi : Ex. Quoi de plus simple que cette remarque Ex. Que ne dit-il pas ? d) Les pronoms relatifs Bien qu’ils entrent également dans une autre problématique, il est possible de faire remarquer que les relatifs sans antécédent sont capables de porter en même temps la désignation référentielle qui en fait des nominaux. Ainsi le qui des proverbes par exemple : Qui dort dîne, se fait-il porteur de la désignation d’un référent animé, indéterminé. On peut dire la même chose de où dans le domaine du non animé : Je sais où la trouver (= à quel endroit) Il ne semble pas en revanche que le pronom complément que soit susceptible de jouer ce rôle. II. Les représentants Ils représentent un élément (être, chose, notion) présent dans le contexte, que celui-ci soit déjà évoqué (le pronom est dit alors anaphorique, il sert de reprise) ou qu’il le soit par la suite (le pronom est dit cataphorique ou proleptique, il annonce) 1. Les pronoms relatifs Leur fonctionnement est exemplaire du mécanisme anaphorique. Outre leur fonction de représentation, ils jouent un rôle grammatical dans la proposition relative. A cet égard, l’opposition entre qui et que est cette fois une opposition fonctionnelle puisque qui est utilisé comme sujet, qu’il représente l’animé ou le non animé, et que pour les autres fonctions. Cette loi est cependant battue en brèche par des considérations sémantiques : il arrive, quand l’antécédent est un animé, que ce soit qui qu’on utilise, même en fonction de complément : L’homme à qui j’ai parlé (au lieu de *auquel). A ces fonctions vient s’en ajouter une troisième : le pronom relatif est un subordonnant qui introduit une proposition complément de l’antécédent. Aux pronoms relatifs simples s’ajoutent les relatifs composés (préposition + lequel). A cet égard, où et dont occupent une position particulière. Leur origine adverbiale leur permet de marquer la valeur circonstancielle de provenance pour dont et celle de destination pour où. Noter aussi duquel, de laquelle…auquel, à laquelle…ce qui, ce que, ce dont, ce à quoi… 2. Les pronoms démonstratifs (les formes simples et presque toutes les formes renforcées) Cette classe est, nous l’avons vu, à cheval sur le fonctionnement de nominal et celui de représentant. La fonction de représentation offre quelques particularités : A côté des formes authentiques et pleines, on trouve des formes incomplètes, dépourvues des marques de proximité et d’éloignement, et qui sont nécessairement suivis d’une détermination apportée par un complément ou par une proposition subordonnée relative. Ce sont ces pronoms démonstratifs qui, souvent, jouent un rôle de nominal indéterminé, mais peuvent néanmoins servir également de représentants : Connaissez vous ce roman ? C’est celui de mon voisin. Les pronoms démonstratifs représentants sont susceptiblesde fonctionner comme anaphoriques ou cataphoriques : -ci est cataphorique et marqueur de proximité, -là est anaphorique et marqueur de l’éloignement. Ces valeurs sont interprétables psychologiquement, comme emphatiques ou péjoratives. Le paradigme des pronoms démonstratifs comprend un neutre, marqué (ceci, cela, ça) et non marqué (ce). Ce est incapable d’autonomie et on ne le rencontre jamais que conjoint aux relatifs, au pronom interrogatif que, à la conjonction que lorsque celle-ci devrait suivre immédiatement une préposition : Je m’attends à ce qu’il vienne, et au verbe être. Avec ce dernier cas, il est nécessaire de distinguer quatre emplois différents : - locution présentative inanalysable et destinée exclusivement à isoler un terme ou un syntagme, ainsi mis en relief : c’est…qui, c’est…que, c’est…à quoi, c’est…dont - embrayeur indéterminé, nominal du du non animé. Ainsi, je peux m’écrier devant un tableau de l’exposition que je visite : c’est une merveille ! Seule la situation de communication me renseigne sur le référent réel de ce. - représentant, mais dont la faible valeur représentative autorise le pléonasme avec le représenté : Ce tableau, c’est une merveille ! - quelques cas figés, on peut le tenir pour un simple indice de construction impersonnelle, prenant la place du il : il est vrai que / c’est vrai que - Il est la demie / c’est la demie. 3. Les pronoms possessifs Ils ne sont que rarement nominaux. Leur valeur de représentants est double puisqu’ils symbolisent aussi bien l’objet possédé que le possesseur : aussi empiètent-ils sur le domaine des pronoms personnels par leur marquage en personne. Leur structure est digne d’attention : leur forme (le mien, la mienne, les miennes…) est révélatrice d’une ancienne substantivation de la forme tonique de l’adjectif possessif. La seule difficulté des pronoms posssessifs tient à la surabondance des marques portées, qui rend difficile la décomposition des représentés : Voici sa maison et la mienne, peut vouloir dire qu’il existe deux maisons, une à lui et une à moi ; mais aussi qu’il en existe une appartenant à tous les deux. 4. Les pronoms indéfinis La catégorie est là encore composite ; comme nous l’avons vu, de nombreux pronoms indéfinis peuvent être employés aussi bien comme nominaux que comme représentants. Dans ce dernier cas, l’indétermination portée par la classe perturbe souvent le jeu de la représentation, qui se trouve alors compensée : - soit par un fonctionnement proche de l’embrayeur qui nous renvoie à la réalité de la situation de communication : j’ai un stylo ; l’autre ne m’appartient pas - soit par une utilisation comme pronom déterminatif : dans ce cas, un complément qui contient soit un autre pronom renvoyant au même référent, soit le représenté lui-même, vient parachever le fonctionnement : j’ai deux stylos ; l’un d’entre eux / l’un de ces stylos ne m’appartient pas. 5. Les pronoms de la 3ème personne (il, elle, lui, le, la, se) Ils sont donc spécifiquement représentants au milieu d’une classe surtout faite de nominaux : leur fonctionnement est anaphorique. On peut noter ça et là une tendance, à travers l’indétermination de la référence, à rejoindre les nominaux : elle est surtout sensible dans ils, nommant des personnes indéterminées et dans la forme tonique du pronom réfléchi soi, qui ne renvoie qu’à l’indéterminé : que chacun rentre chez soi, par opposition au déterminé, marqué par lui : que Pierre rentre chez lui. Le trait spécifique est l’inclusion dans cette classe des pronoms adverbiaux en et y, ainsi nommés en raison de leur origine adverbiale. En (qui vient de inde) marque le complément d’origine, y (qui vient de ibi) celui de destination. Ce sont des pronoms neutres et, comme tels, ils sont aptes à représenter des éléments sans genre ni nombre et notamment des syntagmes, des énoncés entiers, voire simplement des idées contenues dans un énoncé. Cependant, bien que les pronoms adverbiaux ne puissent pas servir à la représentation d’un animé, en est constamment employé pour représenter des personnes : Cette petite fille, il en est le père. 6. Les pronoms numéraux Il convient d’ajouter cette classe de représentants aux précédentes. Ordinaux et cardinaux, avec ou sans déterminant, ils assurent en effet un fonctionnement anaphorique. Voici des stylos : deux sont à moi, le troisième à mon voisin ; je peux te prêter les trois. LES MODES IMPERSONNELS Contrairement aux autres formes verbales, les modes impersonnels ne comportent pas cet élément indispensable qu’est le sujet. Aussi leur capacité à servir de noyau fondateur d’une proposition a-t-elle dû être sévèrement et conventionnellement réglementée. Pour les classer I. L’infinitif 1) L’infinitif, noyau de proposition Pour l’infinitif, il ne subsiste que trois cas où il doit être décrit comme noyau de proposition : - Lorsqu’il est la seule forme verbale d’une proposition indépendante. - Lorsque dans une proposition subordonnée interrogative indirecte, le verbe est à l’infinitif, il ne gêne en rien le fonctionnement de la subordination qui reste le même qu’avec une forme personnelle : Il se demande à qui s’adresser = il se demande à qui il va s’adresser. - Lorsque, après un verbe de perception, on rencontre deux compléments d’objets directs, dont l’un est un infinitif et l’autre « le sujet » de cet infinitif, la pratique analytique imposée est de réunir ces deux objets en un seul, appelé proposition subordonnée infinitive : Il entend les enfants jouer. Il les entend jouer. - cf aussi la relative substantive 2) L’infinitif en fonction nominale En dehors de ces cas, l’infinitif est réputé incapable de servir de noyau de proposition : il est alors analysé comme un nom dont il prend les principales fonctions : - sujet : Jouer est un plaisir - complément du nom : Le plaisir de jouer - complément circonstanciel : il est venu pour jouer, sans tarder. - complément d’objet (direct ou indirect) : il aime jouer… - complément de l’adjectif : soucieux de bien faire etc… 3) L’infinitif en périphrase verbale En dernier cas, il fait corps avec un autre verbe conjugué qui lui sert occasionnellement d’auxiliaire (on dit semi-auxiliaire) et ils forment ensemble une périphrase verbale, équivalente à un verbe simple : Il vient de sortir = il sort à l’instant, il se met à chanter = il chante. La périphrase peut être temporelle, modale, aspectuelle, actancielle. II. Les formes en –ant Les formes en –ant sont des formes non-personnelles du verbe, qui ne marquent ni le temps, ni le mode, et qui n’actualisent pas. Elles se trouvent à la limite entre un fonctionnement adjectival et un fonctionnement verbal. 1) L’adjectif verbal L’adjectif verbal se comporte comme un véritable adjectif. Sur le plan syntaxique, il peut exercer toutes les fonctions de l’adjectif qualificatif : épithète (liée ou détachée), apposé, attribut du complément d’objet direct mais il peut être aussi attribut du sujet : Ce livre est intéressant. L’adjectif verbal, au contraire, ne peut pas recevoir de complément verbaux, mais seulement des compléments de l’adjectif ; il peut être modifié par les mêmes adverbes que celui-ci, en particulier pour exprimer les degrés de comparaison et d’intensité (Un livre plus / très intéressant à lire). L’adjectif verbal s’accorde en genre et en nombre avec le nom auquel il se rapporte. En outre, l’adjectif verbal présente des particularités orthographiques qui le différencient, pour certains verbes en –quer et -guer, du participe présent : communiquant < communicant ; naviguant < navigant…De même une vingtaine d’adjectifs verbaux peuvent se terminer par –ent : adhérent, convergent, excellent, différent, équivalent… L’adjectif verbal comme tout adjectif qualificatif, exprime un état (chaussée glissante) ou une propriété (un ton cassant). Il peut avoir un sens passif (une couleur voyante, une place payante). Il n’équivaut pas toujours strictement à la relative correspondante car il peut avoir le sens du verbe pronominal correspondant (une personne méfiante = une personne qui se méfie) ou une signification spécifique (une rue passante, une soirée dansante). La coupure avec le verbe correspondant est accentuée dans les emplois figurés de l’adjectif verbal (une beauté éclatante, un style flamboyant). L’antéposition de l’adjectif verbal épithète parachève l’adjectivation : il y avait dans ce temps là de grands hivers, de brûlants étés. 2) Le participe présent Il se forme sur le radical verbal suivi de la désinence –ant, dans les conditions normales de la conjugaison et il est toujours invariable..Le participe présent garde l’essentiel des propriétés du verbe. Il peut exercer tout comme l’adjectif verbal les fonctions de l’adjectif qualificatif (épithète, apposé, attribut du cod). Le participe présent exprime un procès en cours de déroulement (aspect non accompli) et l’action est observée de l’intérieur, sans que l’on puisse en distinguer le début ou la fin (aspect sécant). Il reçoit sa valeur temporelle du verbe à un mode personnel de la phrase où il figure, et il marque une relation de simultanéité avec le procès principal, quelle que soit l’époque. Le participe présent est reconnu comme noyau d’une proposition subordonnée participiale chaque fois qu’il a un sujet propre : Le train arrivant, les voyageurs montèrent sur le quai. Dans son environnement immédiat, le participe présent garde des propriétés verbales : il peut être suivi d’un adverbe lié au verbe, d’un complément d’objet (un pronom clitique peut lui être antéposé) ou d’un complément circonstanciel ; il peut aussi prendre la forme passive ou la forme pronominale. Le participe présent épithète équivaut à une subordonnée relative le verbe conjugué : une porte communiquant avec la sortie qui communique avec la sortie. 3) Le gérondif Comme l’infinitif et le participe, le gérondif est un des modes non personnels et non temporels du verbe : il ne connaît en effet dans sa morphologie aucune variation en personne, ne possède pas d’opposition temporelle et est inapte à dater le procès dans la chronologie. Le gérondif est invariable, se termine toujours par –ant et peut recevoir les compléments du verbe (c.d’objet, c. d’agent, c. circonstanciel intégré). Il subit la même contrainte syntaxique que le participe présent : lorsqu’il est placé en tête de phrase, le sujet doit être le même que celui du verbe principal. Il a les mêmes valeurs aspectuelle (non accompli) et temporelle que le participe présent : il indique un procès en cours de réalisation, simultané par rapport au procès exprimé par le verbe principal (il travaille en chantant). Le gérondif se différencie du participe présent par l’emploi obligatoire, en français moderne, de la préposition –en qui convient le mieux à l’expression de la simultanéité temporelle. Il s’emploie aussi précédé de –en, après le verbe aller, mais ce dernier garde en partie son sens de verbe plein (un mal qui va en augmentant), il s’agit alors d’une périphrase aspectuelle. Sur le plan syntaxique, le gérondif est la forme adverbiale du verbe. Il équivaut donc à un adverbe et assume la fonction d’un complément circonstanciel de manière, de moyen, de temps, de cause, de condition ou d’opposition, selon sa relation avec le reste de la phrase : C’est en travaillant (par le travail) que tu réussiras… III. Le participe passé Comme forme adjective du verbe, le participe passé possède des valeurs spécifiques, verbales et adjectivales. A la différence du participe présent, il est variable en genre et en nombre ; les règles qui gouvernent son accord avec le nom sont particulièrement complexes lorsqu’il est employé avec l’auxiliaire avoir. Il possède une forme simple (chanté) et une forme composée (ayant chanté). Le participe passé sert à former avec les auxiliaires avoir ou être, les temps composés des verbes. Le temps composé ainsi formé exprime l’aspect accompli ou marque une antériorité. Comme le participe présent, il peut constituer le centre du groupe verbal d’une proposition subordonnée participiale s’il a un sujet propre, c’est-à-dire si son sujet n’a pas d’autre fonction que celle-là dans la proposition : le spectacle terminé, les comédiens saluent le public. En dehors de ce cas spécifique, le participe ne forme pas proposition et doit être analysé comme un adjectif qualificatif et peut être modifié par un adverbe marquant le degré : un joueur confirmé disputera ce match (épithète liée) ; ennuyé, il ne put me répondre (épithète détachée, ou apposé) ; je le trouve très énervé (attribut du cod), la pelouse était couverte de fleurs (attribut du sujet). Néanmoins, il est impossible de lui assigner une valeur adjectivale quand il exprime un procès au passif avec un complément d’agent ou quand il constitue la forme composée d’un verbe actif. LES PROPOSITIONS SUBORDONNEES Par opposition à la coordination qui implique l’égalité fonctionnelle des termes qu’elle associe, et qui maintient l’autonomie de chaque constituant du groupe, la subordination établit un lien de dépendance entre mots et groupes de mots. L’élément subordonné ne peut constituer à lui seul une phrase : il n’a aucune autonomie syntaxique. C’est précisément ce point qui permet d’opposer coordination et subordination. Une proposition est donc dite subordonnée quand sa mélodie, ou l’ordre de ses termes, sujet et verbe, l’empêchent de fonctionner d’une manière autonome, et marquent sa dépendance à l’égard d’un support fourni par une autre proposition. La subordination entretient une relation disymétrique entre deux phrases dont l’une reçoit sa fonction de l’autre sans réciprocité. Pour les classer morphologiquement I. Les propositions subordonnées substantives ou complétives Les complétives sont des propositions qui se substituent, à des groupes nominaux, constituants du groupe verbal, ou plus rarement au GN sujet, voire à des GN compléments de noms et d’adjectifs. Selon le mécanisme syntaxique mis en jeu pour leur formation, on distingue les complétives introduites par que, les constructions infinitives, les relatives substantives et enfin les constructions interrogatives. Toutes ces propositions ont les fonctions essentielles du nom dans la phrase et la fonction dominante est celle de complément d’objet, qui a donné son nom à cette classe de propositions. Elle est même la fonction exclusive des interrogatives indirectes et des infinitives. Mais d’autres fonctions sont possibles : celle de terme complétif, d’attribut, de complément du nom. La seule différence avec les subordonnées relatives est que le que n’a pas de fonction dans la subordonnée et ne représente pas (pas d’antécédent). La conjonction de subordination peut donc être supprimée. 1) Les complétives par « que » Elles peuvent souvent être remplacées par un groupe nominal de même valeur et de même statut. La conjonction nominalise en effet la proposition qu’elle introduit et la rend apte à assumer une fonction nominale dans la phrase ; je souhaite que tu viennes = je souhaite ta venue. Les complétives introduites par ce que sont d’un emploi beaucoup moins large que les conjonctives par que : elles ne peuvent en effet assumer que deux fonctions : coi (le plus souvent) ou complément de l’adjectif. L’emploi des conjonctives introduites par que est plus large : sujet, attribut, cod et coi, terme complétif après une tournure impersonnelle ou un présentatif, apposition ou position détachée, complément du nom ou de l’adjectif. Les verbes dont elles dépendent ce réfèrent à des actes psychologiques et ont donc pour sujets des êtres animés, généralement humains. Il peut s’agir de déclarations, de jugements, de sentiments, ou encore de volontés. 2) Les interrogatives indirectes partielles ou totales On réunit sous cette dénomination des subordonnées complétives à contenu sémantique d’interrogation mais ayant perdu la modalité interrogative pour devenir des propositions subordonnées. Ainsi, une interrogative indirecte résulte du passage d’une phrase à modalité interrogative à une proposition subordonnée dépourvue de toutes les marques de cette modalité : Viens-tu ? > je t’ai demandé si tu venais. De ce fait, une question directe perd dans le mécanisme de subordination qui en fait une interrogative indirecte toute autonomie prosodique et syntaxique. Pour l’interrogation totale, la subordonnée est toujours introduite par la conjonction si. En ce qui concerne l’interrogation partielle, elle est introduite par un outil interrogatif : quel, où, quand, comment, combien, pourquoi, qui, que (ou qu’est-ce que, ce que), quoi, lequel : je me demande à quoi tu penses. La fonction de ce type de complétives est presque toujours complément d’objet direct. 3) Les infinitives Ce type est d’un emploi beaucoup plus restreint que les précédents. Il se caractérise par une structure formelle particulière, puisque la proposition infinitive est constituée d’un noyau verbal à l’infinitif, dont l’agent est obligatoirement exprimé : j’entends siffler le train, à moins qu’il ne s’agisse d’un agent indéterminé : j’entends dire des choses étranges. L’infinitif possède en général son propre agent exprimé, thème de la proposition logique : celui-ci se présente sous la forme du groupe nominal déterminé : je sens monter la fièvre, ou du pronom (personnel ou relatif) : je la sens monter, la fièvre que je sens monter. L’ordre des mots n’est pas déterminé puisque le groupe nominal peut la plupart du temps suivre ou précéder l’infinitif.. Ce genre de proposition se trouve souvent en français moderne, derrière des verbes de perception (voir, entendre, sentir, regarder…) et occupe toujours la fonction de cod. 4) Les relatives substantives Les relatives substantives n’ont pas d’antécédent, aussi peuvent-elles occuper toutes les fonctions que celui-ci aurait assumées dans la proposition. Les mots relatifs qui l’introduisent se limitent aux seuls qui, quoi, où, quiconque auxquels on ajoutera le que de la locution n’avoir que faire. Elles peuvent être : sujet, attribut, cod et coi, complément d’agent, complément circonstanciel, complément du nom ou de l’adjectif. Qui m’aime me suive ! (sujet) II. Les propositions subordonnées adjectives ou relatives Les relatives sont des propositions introduites par un pronom relatif qui peut être simple : qui, que, quoi, dont, où ; ou composé : lequel, auquel, duquel et qui varie en genre et en nombre contrairement au relatif simple. Le pronom relatif cumule deux rôles : il introduit la relative et est coréférent à son antécédent. Il constitue à ce titre un substitut du GN tout en assumant une fonction syntaxique dans la relative. Dans les subordonnées adjectives, le pronom est toujours doté d’un antécédent : la proposition à laquelle il appartient constitue une expansion du nom, à la manière d’un adjectif. Elles peuvent avoir deux fonctions, c’est-à-dire celles de l’adjectif, épithète liée ou épithète détachée. 1) Les déterminatives ou restrictives Si l’antécédent est une expression définie (nom propre ou nom commun précédé d’un déterminant défini) la relative est déterminative. Elle est en effet nécessaire à l’identification référentielle de l’antécédent, qu’il s’agisse d’un individu ou d’une classe, d’êtres réels ou virtuels. Autrement dit, elle restreint l’extension de ce GN, et son effacement aurait pour conséquence de modifier complétement le sens de la phrase en étendant son champ d’application à un ensemble référentiel plus important, voire à la totalité des êtres qui peuvent être désignés par le nom : Le roman que je viens de lire me plaît beaucoup (sens spécifique) / le roman me plaît beaucoup (sens générique). Elles sont donc essentielles à la détermination du référent et donc à la compréhension de la phrase, on ne peut les supprimer sans nuire à son sens global. 2) Les explicatives ou appositives Lorsqu’elle ne joue aucun rôle dans l’identification référentielle de l’antécédent, la relative est dite explicative. Elle peut alors, sans dommage pour cette identification être supprimée. Elle peut aussi être remplacée par une proposition coordonnée ou être reprise par le pronom cela sans qu’il y ait un changement notable de sens. La relative explicative peut aussi faire l’objet d’un commentaire particulier, ce qui montre son indépendance vis-àvis du reste de l’énoncé : La démocratie, qui est fragile (cela n’est pas douteux), doit être défendue. Ces relatives sont marquées sur le plan prosodique par une mélodie spécifique, celle de la parenthèse ; et sur celui de la ponctuation, elles sont encadrées par deux virgules. N’ayant pas de rôle référentiel, elles sont disponibles pour exprimer toutes sortes de nuances circonstancielles : cause, condition, concession etc… III. Les propositions subordonnées adverbiales ou circonstancielles Loin de constituer un type homogène, la proposition subordonnée circonstancielle réunit des propositions aux fonctionnements et aux outils souvent très divers. Il existe deux catégories morphologiques : les participiales et les conjonctives non complétives. Syntaxiquement, la circonstancielle est une proposition à l’expression facultative : elle pourrait donc être supprimée sans rendre la phrase agrammaticale, et occuperait une place mobile dans la phrase. Cette définition est juste dans un certain nombre de cas : (Quand tu auras terminé) nous irons au cinéma, mais elle ne rend pas compte de nombreuses occurrences où la circonstancielle occupe une place fixe et est appelée nécessairement par la proposition rectrice : Tout alla de façon qu’il ne vit plus aucun poisson. Sémantiquement, c’est une proposition située dans la dépendance d’une autre proposition dont elle énonce une circonstance qui rend possible ou accompagne l’action principale mais ce n’est pas toujours valable (cf. subordonnée comparative) 1) Les circonstancielles Les temporelles Il s’agit toujours de faits qui se succèdent rapidement (dès que, aussitôt que). La première proposition est ou de type négatif (ne…pas, ne…pas encore, ne…pas plutôt) ou au moins d’orientation négative argumentative avec à peine. Mais c’est en réalité l’expression d’une circonstance. La seconde, qui contient le fait principal, est introduite par que. - antériorité : Il est arrivé après que je sois sorti (1. je sors / 2. Il arrive) - simultanéité : Il est arrivé quand (lorsque) je sortais (1. et 2. ensemble) - postériorité : Il est arrivé avant que je ne sorte (1. Il arrive / 2. Je sors) Les causales Avec comme dès lors qu’elles précèdent leur régissante dans la phrase : Comme il faisait beau, nous sortîmes. Cf parce que, puisque. Les causales sont annoncées dans la principale par d’autant, d’autant plus…que. Elles expriment une idée de proportionnalité appliquée à une cause : Elle est d’autant plus méritante qu’elle est fatiguée. Pragmatiquement, elles ajoutent un argument additionnel et ont la même valeur que des coordonnées où figure du reste, d’ailleurs : Je n’aurais pas pris sa maison, d’autant plus qu’elle est mauvaise. Les conditionnelles (ou hypothétiques) Il s’agit d’une variante de la cause puisqu’elles indiquent que lorsque telle cause se produit, elle entraîne telle conséquence : S’il fait beau, nous sortirons. La première proposition peut avoir la forme d’une phrase interrogative totale (avec inversion) ; la seconde contient le fait principal et commence facultativement par que : Un événement grave surviendrait-il (que) je n’en serais pas autrement étonné. Les finales Elles marquent le but, qui fait l’objet d’une visée et d’une intention du sujet, si bien qu’elles sont modalisées au subjonctif, porteur de valeurs potentielles : Je l’ai fait pour qu’on le sache mais la première proposition peut être à l’impératif : Lève la tête, que je puisse voir tes yeux. Les concessives Ces propositions de type causal sont toujours modalisées au subjonctif sauf celles qui sont introduites par la corrélation tant…que. Elles développent un fait réel, fonctionnant comme une cause. Mais cette cause n’entraîne pas les conséquences qu’à notre sens elle devrait avoir, aussi est-elle dévalorisée à nos yeux, ce que l’on marque par le subjonctif : Bien qu’il soit très grand, il a peur de tout. Cf aussi si…que, aussi…que, quelque…que, qui que, quoi que… Les comparatives Classées dans l’ordre de la simultanéité, ces propositions usent très souvent de l’ellipse des éléments répétables dans toute opération comparative. Elle met en relation deux propositions par le biais de l’analogie ou de la proportion. Là encore les formes du subordonnant sont variables, de la conjonction ou de la locution conjonctive (comme, ainsi que) à la corrélation (aussi…que, plus…que, moins…que) en passant par des formes corrélatives plus troubles comme celles qui greffent une comparaison sur les indéfinis autre, tel ou même : On lui a donné le même remède qu’à son frère. Les adversatives Ces propositions marquent l’opposition, trop souvent confondue avec la concession ; elles n’ont pas de moyens conjonctionnels propres, ce qui fait parfois hésiter sur la nécessité d’en faire une classe de subordonnées. Elles utilisent d’autres conjonctions, généralement temporelles et marqueuses de la simultanéité, et fonctionnent grâce à un réseau de répétitions lexicales qui soulignent l’antithèse : Quand (alors que, tandis que) je dis blanc, il dit noir. Les consécutives A la différence des finales, elles marquent l’enchaînement mécanique des effets, sans intervention de la subjectivité du sujet, si bien qu’elles ne sont pas marquées par la modalisation du subjonctif. On peut alors trouver deux propositions subordonnées semblablement introduites, mais dont l’une est modalisée et l’autre non : la première est finale, la deuxième consécutive : Il l’a placé de sorte qu’il puisse l’atteindre (finale) Il l’a placé de sorte qu’il peut l’atteindre (consécutive) Les consécutives usent fréquemment de la subordination par la corrélation, propre à souligner l’engendrement mécanique des effets : Il a tant plu que nous restons ; il fait un tel temps que nous restons. 2) Les participiales Les participiales répondent à deux critères : le noyau verbal est un participe (présent ou passé) et le sujet de la subordonnée n’est pas le même que celui de la principale : L’hiver étant venu, les troupes se retirèrent. Elles peuvent avoir toutes les valeurs temporelles, causales ou conditionnelles évoquées : Sa nièce arrivant, c’était le feu dans la maison. Le père mort, les fils vous retournent le champ. La proposition participiale attributive ou dont le verbe est une forme composée peut subir l’ellipse du verbe être : le café (étant / ayant été) bu…La valeur temporelle de ces propositions peut être soulignée par dès, aussitôt, une fois, à peine… : aussitôt le repas fini, les convives quittèrent la table. LE SUBJONCTIF On appelle subjonctif l’un des modes personnels du verbe, à côté de l’indicatif auquel on l’oppose traditionnellement et de l’impératif. Le subjonctif présente deux formes fondamentales, présent (qu’il chante) et imparfait (qu’il chantât), doublées chacune par les formes composées correspondantes : passé (qu’il ait chanté) et plus que parfait (qu’il eût chanté). A la différence de l’indicatif, il ne comporte pas de futur ; l’époque future est dénotée par le présent du subjonctif. Les deux formes composées très usitées à l’époque classique ne sont employées aujourd’hui plus que dans un registre soutenu ou littéraire. Il marque la personne, le mode et l’aspect mais jamais le temps. Comme le subjonctif est inapte à situer le procès dans une des trois époques (passé, présent, futur) comme l’indicatif, il ne peut pas saisir l’idée verbale dans sa complète actualisation, mais envisage celle-ci à un stade antérieur, en cours de génération. On l’emploie donc chaque fois que l’interprétation l’emporte sur la prise en compte de l’actualisation du procès, lorsque s’interpose entre le procès et sa verbalisation l’écran d’un acte psychique (sentiment, volonté, jugement) qui empêche le procès d’aboutir à son actualisation totale. Le subjonctif rend compte de la visée de l’énonciateur qui insère le fait décrit dans des « mondes possibles » pour reprendre l’expression de R. Martin et non dans le monde de ce qui est vrai pour lui. Pour les classer I. Le subjonctif dans une proposition indépendante Le subjonctif, situant le procès dans le champ des possibles, apparaît dans le cadre des modalités de la phrase. Dans tous ces emplois en phrase indépendante, le subjonctif met l’accent sur l’interprétation du procès, qui est perçu subjectivement. La plupart situent le procès dans l’avenir, où sa valeur de vérité est suspendue. Hormis les phrases injonctives, le subjonctif se recontre dans des expressions figées ou dans des types de discours particuliers. 1) Le subjonctif, substitut de l’impératif En français moderne, le subjonctif apparaît principalement dans des phrases indépendantes de type injonctif. Il exprime un ordre, une défense, une exhortation. Il y est normalement annoncé en tête de phrase par que, qui permet de l’opposer à l’indicatif, ce qui est nécessaire quand la forme du verbe est identique au présent des deux modes.Il supplée l’impératif aux personnes que ce dernier ne possède pas, essentiellement à la troisième personne du singulier et du pluriel : Qu’il sorte ! Restant dans le cadre de l’expression du désir, il peut encore traduire toutes les nuances du souhait (vœu, prière…) : Que le ciel vous protège ! Diverses expressions figées sans que présentent aussi ces valeurs : Vive le roi !. 2) Le subjonctif, substitut de l’infinitif Evoquant un procès que l’on refuse d’ancrer dans le monde de ce qui est, il exprime l’indignation : Moi, que je fasse une chose pareille ! Le subjonctif précédé de que est ici concurrencé par l’infinitif : Moi, faire une chose pareille ! qui donne plus de force à l’idée verbale. 3) Le subjonctif, substitut du conditionnel passé On rappellera que le subjonctif plus-que-parfait évoque un procès ayant été possible dans le passé mais que la réalité a démenti, on parle alors d’irréel du passé : Une petite aventure eût arrangé les choses. L’irréel du passé est contrefactuel par excellence car l’énoncé contredit le monde possible du locuteur. II. Le subjonctif en parataxe Dans la parataxe, où se traduit le rapport de subordination implicite, le subjonctif, employé dans la proposition dépendante, exprime l’insertion des faits dans un monde possible, dont on sait qu’il n’a pas de réalité immédiate ou qu’il n’a pas eu de réalité passée. Les trois formes présent, imparfait, plus-que-parfait marquent les différentes nuances de l’éventualité. Dans tous ces emplois, le subjonctif traduit bien que l’énonciateur situe le fait qu’il évoque dans un univers qui n’est pas le sien au moment de l’énonciation. 1) L’éventualité supposée : le subjonctif présent Le présent du subjonctif marque une éventualité vue du présent : le fait n’est pas inscrit dans l’univers de ce qui est pour l’énonciateur : Qu’on me permette de lui parler, et je serai heureuse. 2) L’éventualité concédée : le subjonctif imparfait L’éventualité concédée (hypothèse restrictive dont le marqueur de subordination serait même si) peut se traduire par l’imparfait du subjonctif qui, en parataxe, n’est resté courant, dans la langue littéraire, qu’avec les verbes pouvoir, devoir, être : Le symptôme est commun à toutes les formes de maladie, fussent-elles les plus rares. 3) L’éventualité dépassée : le subjonctif plus-que-parfait Le fait s’inscrit dans un univers des possibles cette fois dépassés, annihilés par le réel : monde des possibles dont on sait qu’ils n’ont pu avoir lieu. Il s’agit là encore de la valeur irréel du passé : Qu’elle se fût appelée Jeanne ou Marie, il n’y aurait pas pensé. III. Le subjonctif en proposition subordonnée explicite Quand le subjonctif s’emploie dans une subordonnée, il y est conditionné par un élément de la principale, qui varie selon le type de subordonnée. 1) Le subjonctif en subordonnée complétive Lorsque le verbe de la complétive est au mode subjonctif, le support de la subordonnée rend compte explicitement de la manière dont est envisagé le fait subordonné : il marque toujours l’inscription de ce fait dans le monde des possibles, et non dans le monde de ce qui est. L’emploi du subjonctif dans les complétives introduites par que est imposé par la place de la complétive et la classe sémantique du verbe, du nom ou de l’adjectif dont elle dépend. en tête de phrase Le subjonctif est obligatoire dans les complétives placées en tête de phrase, quel que soit le sens de leur support : Qu’il soit venu, cela est étonnant / certain / impossible…En pareille position rien ne permet de déterminer si le fait évoqué va être pris en charge ou refusé par l’énonciateur. Le subjonctif traduit cette expectative, laissant en suspens l’ancrage du procès dans le monde de ce qui est ou dans le monde du possible. en complément d’objet Le subjonctif s’emploie obligatoirement dans une subordonnée complément d’objet d’un verbe exprimant une volonté ou un sentiment : je veux, ordonne, souhaite, désire, regrette, crains, doute qu’il vienne. Je tiens à ce qu’il vienne. Je m’étonne de ce qu’il vienne. Il peut aussi apparaître après des verbes d’opinion comme croire, penser, sembler, ignorer accompagné d’un complément d’objet indirect dès lors que ceux-ci sont à la forme négative ou interrogative : Je ne crois pas qu’il vienne / Crois-tu qu’il vienne ? 2) Le subjonctif en subordonnée circonstancielle Le choix du mode n’est pas possible dans les circonstancielles : le subjonctif ou l’indicatif s’imposent selon le sémantisme de la subordonnée ou de la conjonction de subordination.C’est l’outil subordonnant qui matérialise le lien logique unissant la principale à sa subordonnée. De fait, c’est cette valeur logique du lien qui est déterminante dans le choix du mode en proposition subordonnée circonstancielle. Les subordonnées temporelles Elles sont au subjonctif quand elles sont introduites par avant que, jusqu’à ce que, en attendant que : Il part avant que le soleil se soit levé. Ces trois conjonctions introduisent des propositions exprimant une action située à une époque postérieure à celle de la principale ; le procès subordonné est envisagé comme possible. Les subordonnées causales Elles sont au subjonctif quand la cause est rejetée (exclue du réel par le locuteur) avec non que (plutôt rare et littéraire) : Il m’a téléphoné, non qu’il fût inquiet de ma santé, mais parce qu’il avait besoin d’argent. En cas d’explication alternative, soit que répété introduit deux possibles qui s’excluent mutuellement : Le chat revient à la maison, soit qu’il ait faim, soit qu’il ait envie de dormir tranquille. Les subordonnées de conséquence Elles sont au subjonctif quand la principale est négative ou interrogative, empêchant alors l’actualisation du procès subordonné : Il n’a pas travaillé au point que cela l’ait épuisé. Dans cette phrase c’est le lien consécutif qui est nié. De même, une subordonnée introduite par pour que, envisage le procès comme possible : Il est trop compétent pour qu’on puisse le remplacer. Les subordonnées de but Elles sont logiquement au subjonctif, puisqu’elles manifestent une intention : Orphée chante pour que (afin que) le soleil paraisse. Les subordonnées concessives Elles sont au subjonctif quand, introduites par quoique, bien que…, elles expriment un procès envisagé comme une cause possible, mais inopérante : Annie reste à Los Angeles, bien que Drew lui ait demandé de rentrer à New-York. Il en est de même des subordonnées d’opposition introduites par sans que : La chatte est sortie sans que je m’en aperçoive. Les subordonnées conditionnelles Elles sont au subjonctif quand elles sont introduites par des locutions à moins que, pourvu que, pour peu que : Pour peu qu’il travaille son examen, il réussira son entrée à l’université. Le subjonctif est également employé dans une subordonnée coordonnée par que à une proposition introduite par si : S’il réussit son examen et qu’il obtienne une mention, il sera admis dans une classe préparatoire. 3) Le subjonctif en relative adjective Dans les relatives déterminatives, le subjonctif s’accorde avec la restriction qui affecte l’antécédent : Je cherche pour les vacances un livre qui me plaise. Le subjonctif exprime une sélection dans un ensemble de référents possibles. Le subjonctif définit un type de livre, dont on n’est pas sûr qu’il existe effectivement une occurrence, à la différence de l’indicatif qui en présupposerait l’existence. Le subjonctif met l’accent sur le jeu des possibles et la sélection ou la restriction qui s’opère. Il s’emploie : - quand l’antécédent est indéfini ou indéterminé, l’existence du référent est seulement envisagée comme possible ou voulue, il n’est évoqué que par ses propriétés : Je cherche un guide qui connaisse le français et le grec. Il en va de même dans une phrase interrogative : Connaissez-vous un courtisan qui soit sincère ? ou dans une phrase négative où l’indétermination découle de la négation de l’existence du référent : Elle n’a trouvé personne qui la comprenne. - quand il est sélectionné parmi un ensemble de possibles, que parcourt la subordonnée, notamment après un superlatif relatif ou une expression équivalente (le premier, le dernier, le seul) : C’est la seule chambre qui soit libre / C’est la plus grande chambre que j’aie à vous proposer. LES EXPANSIONS DU NOM L’adjectif épithète, le groupe prépositionnel complément du nom, la subordonnée relative et – beaucoup plus rarement – la subordonnée complétive sont des éléments facultatifs, cumulables dans certaines limites et agrégés autour du nom. Tous ces modificateurs fonctionnent comme de véritables compléments du nom, une étiquette que la terminologie traditionnelle réserve pourtant aux seuls groupes prépositionnels. Ils entretiennent avec le nom deux types de relations définissables en termes d’opérations notionnelles ou référentielles : - Le rapport est déterminatif lorsque, restreignant l’extension du nom, les modificateurs sont nécessaires à l’identification du référent du GN. La suppression de ces caractéristiques identifiantes modifie l’interprétation globale du GN et en général sa valeur référentielle. - Le rapport est explicatif, lorsque les modificateurs ne restreignent pas l’extension du nom. Leur effacement ne modifie pas la valeur référentielle du GN, mais s’interprète comme la suppression d’informations accessoires à propos d’un référent déjà suffisamment déterminé par les autres éléments du GN ou par le contexte. Pour les classer I. Les épithètes En syntaxe, l’épithète désigne une fonction adjectivale : c’est un complément, de nature essentiellement adjectivale, se rapportant exclusivement au nom ou au pronom et situé dans la proximité immédiate de ces derniers (antéposé ou postposé), sans qu’aucune pause ne l’en sépare. L’adjectif indique une propriété constante du référent visé par le nom. 1) L’adjectif pur ou qualificatif Il vient du latin directement et il se définit souvent par la négative car il n’est ni un nom ni un verbe. Comme son nom l’indique, il sert à préciser une qualité, une caractéristique d’un être animé ou d’une chose inanimée : beau, laid, blanc, gentil…Lorsqu’il est en fonction d’épithète, il apporte au nom une qualité particulière sans avoir besoin de l’intermédiaire d’un élément verbal. Il est donc directement lié au nom qu’il qualifie et cette caractéristique le distingue de la fonction attribut. L’adjectif qualificatif appartenant au GN peut être soit épithète liée (valeur restrictive) : les élèves attentifs ont compris ; soit épithète détachée (valeur non restrictive) : Attentifs, les élèves ont compris. Il fait donc partie intégrante du GN, dont il ne constitue pas un élément obligatoire puisqu’il peut être supprimé sans rendre la phrase inacceptable. Néanmoins, son absence ne restreint le sens de substantif qu’il qualifie 2) Les adjectifs dérivés verbaux Les adjectifs verbaux sont des participes présents qui ont acquis toutes les propriétés de l’adjectif qualificatif : ils sont variables en genre et en nombre, s’accordent avec le nom, sont affectés par les degrés d’intensité et de comparaison et s’emploient comme attributs. Complétement adjectivés, ils ont par rapport au nom le fonctionnement d’un adjectif épithète ordinaire : la dame a acheté des plantes grimpantes. Les participes présents lorsqu’ils sont employés comme épithètes, restent invariables, n’admettent pas de marque de degré, sont obligatoirement postposés au nom, conservent leurs possibilités de complémentation et se paraphrasent systématiquement par une relative déterminative : les citoyennes françaises vivant à l’étranger = qui vivent à l’étranger. En emploi détaché le participe présent fonctionne comme une apposition au GN ; apposé au sujet il acquiert le statut, analogue à celui d’un complément circonstanciel, d’une proposition participiale sans sujet. Les participes passés de forme simples employés comme épithètes, qu’ils soient assimilés à des adjectifs ou qu’ils conservent leur statut de participes, s’accordent en genre et en nombre avec le nom. Ils conservent leurs possibilités de complémentation et se paraphrasent généralement par des relatives déterminatives : Les étudiants nés en 1979 = qui sont nés en 1979. 3) Les adjectifs relationnels (qui a rapport à) Les adjectifs de relation, ont la particularité de ne pas pouvoir répondre à toutes les propriétés habituellement reconnues aux adjectifs qualificatifs. L’adjectif relationnel entre en effet dans la catégorie des classifiants. Il possède enfin la particularité se souder avec le nom pour former une nouvelle appellation, à la limite du mot composé. Tandis que l’adjectif qualificatif exprime une propriété intrinsèque du nom qu’il précise, l’adjectif relationnel met en rapport deux notions distinctes, aussi peut-on le paraphraser par un groupe nominal prépositionnel : un arrêté ministériel (= du Ministre)/ les transports aériens (= qui s’effectuent par les airs). Il s’oppose aux autres adjectifs par quelques propriétés syntaxiques : il ne peut être ni attribut ni épithète détachée (*cette étoile est polaire / *cette étoile, polaire, se voit de loin), il ne peut être que postposé au nom avec lequel il constitue un ensemble soudé et aucun adjectif ne peut venir s’y intercaler (*un ministériel arrêté / *un ministériel important arrêté), il n’est pas modifiable en degré ( *un arrêté très ministériel) et n’étant pas sur le même plan logique que l’adjectif qualificatif il ne peut lui être coordonné ( *un arrêté ministériel et important). II. Les propositions relatives adjectives Le nom peut être suivi d’une subordonnée relative introduite par un terme relatif (pronom, adjectif ou adverbe) et fonctionnellement équivalente à un adjectif épithète. Le relatif assure une triple fonction : introduire une proposition pour la subordonner à un nom, représenter un groupe nominal (dit antécédent) de la proposition principale, remplir une fonction syntaxique (sujet, complément d’objet ou attribut) dans la subordonnée relative. Ainsi dans la phrase : je te recommande ce livre qui vient de sortir, la relative qui vient de sortir est introduite par le pronom sujet qui et fonctionne comme modificateur déterminatif de l’antécédent livre, noyau nominal du complément d’objet de la principale. 1) La relative déterminative Si l’antécédent est une expression définie (nom propre ou nom commun précédé d’un déterminant défini) la relative est déterminative. Elle est en effet nécessaire à l’identification référentielle de l’antécédent, qu’il s’agisse d’un individu ou d’une classe, d’êtres réels ou virtuels. Autrement dit, elle restreint l’extension de ce GN, et son effacement aurait pour conséquence de modifier complétement le sens de la phrase en étendant son champ d’application à un ensemble référentiel plus important, voire à la totalité des êtres qui peuvent être désignés par le nom : Le roman que je viens de lire me plaît beaucoup (sens spécifique) / le roman me plaît beaucoup (sens générique). Elles sont donc essentielles à la détermination du référent et donc à la compréhension de la phrase, on ne peut les supprimer sans nuire à son sens global. 2) La relative explicative Lorsqu’elle ne joue aucun rôle dans l’identification référentielle de l’antécédent, la relative est dite explicative. Elle peut alors, sans dommage pour cette identification être supprimée. Elle peut aussi être remplacée par une proposition coordonnée ou être reprise par le pronom cela sans qu’il y ait un changement notable de sens. La relative explicative peut aussi faire l’objet d’un commentaire particulier, ce qui montre son indépendance vis-àvis du reste de l’énoncé : La démocratie, qui est fragile (cela n’est pas douteux), doit être défendue. Ces relatives sont marquées sur le plan prosodique par une mélodie spécifique, celle de la parenthèse ; et sur celui de la ponctuation, elles sont encadrées par deux virgules. N’ayant pas de rôle référentiel, elles sont disponibles pour exprimer toutes sortes de nuances circonstancielles : cause, condition, concession etc…Elles informent souvent sur la cause de l’événement exprimé par la principale. III. Les compléments nominaux A la différence de certains compléments de verbe, les compléments du nom sont facultatifs, même si leur suppression entraîne parfois de notables changements de sens dans l’énoncé. Leur rôle est de modifier le nom, en délimitant son extension, c’est-à-dire en spécifiant son domaine d’application. Le complément du nom constitue donc un sous-ensemble des expansions nominales, et doit de ce fait être rapproché de la fonction épithète. 1) Les compléments essentiels Le complément du nom essentiel n’introduit pas d’article, le second substantif est donc décatégorisé. Un souvenir d’enfance peut être remplacé par un souvenir enfantin…Une idée de génie (= une idée géniale) Une nuit sans étoiles (=sombre). 2) Les compléments relationnels Le complément du nom relationnel introduit entre les deux substantifs un article qui va instituer une relation d’appartenance entre les deux termes au sens large. Les chevaliers de l’arc / Un moteur à essence… L’INFINITIF L’infinitif est un mode dont la forme ne marque ni le temps, ni la personne, ni le nombre. On distingue une forme simple, l’infinitif présent (chanté) et une forme composée, l’infinitif passé (avoir chanté), qui ne s’opposent pas sur le plan temporel, mais sur le plan aspectuel : le premier exprime l’inaccompli et le seconde marque l’accompli. Par ailleurs, l’infinitif peut prendre la forme passive (être chassé, avoir été chassé). Malgré ces caractéristiques verbales, il ne présente que l’idée du procès, et son indétermination temporelle et personnelle doit être levée par le contexte ou par la situation. L’infinitif est considéré comme la forme nominale du verbe. Comme il assume des fonctions verbales ou nominales, on peut réportorier ses emplois en se fondant sur ce double statut : les valeurs de l’infinitif connaissent une série de degrés, depuis l’emploi à part entière jusqu’au statut de nom véritable. Pour les classer I. L’infinitif en noyau de proposition Quand l’infinitif a un rôle verbal, il constitue le nœud verbal d’une phrase indépendante, principale ou subordonnée ; comme verbe, il est le mot-tête du groupe verbal. Il détermine la structure des compléments et il peut prendre une forme active, passive ou pronominale ; c’est lui qui est en relation de sélection avec le sujet et les compléments. 1) L’infinitif, centre d’une proposition indépendante Quatre type de phrases peuvent comporter un groupe verbal constitué autour d’un verbe à l’infinitif présent : - la phrase déclarative où l’on rencontre l’infinitif de narration : Et grenouilles de se sauter dans l’eau… - la phrase interrogative sans sujet exprimé où l’on rencontre l’infinitif délibératif : A quoi bon travailler ? - la phrase exclamative qui sert à exprimer un sentiment vif (colère, étonnement…) : Moi, trahir mes propres enfants ! / Quoi ! ne pas lutter pour notre liberté ! - la phrase jussive où l’on rencontre l’infinitif à la place de l’impératif pour exprimer un ordre ou un conseil : Appuyer sur le bouton en cas d’urgence. 2) L’infinitif dans une proposition infinitive Elle est privilégiée par la tradition grammaticale, sur le modèle latin, où elle est d’un emploi plus étendu qu’en français. D’un point de vue traditionnel, deux conditions doivent être remplies pour parler de « subordonnée infinitive » : la proposition doit être complément d’un verbe appartenant à une série limitée : faire, laisser…des verbes de perception comme entendre, voir, sentir et des verbes causatifs de mouvement comme emmener, envoyer, conduire : Je sens s’agiter en moi les futures fautes que je n’ai pas commises. elle doit avoir un sujet propre, différent de celui du verbe principal, ce qui lui donne la structure d’une phrase compléte dont cependant deux termes sont permutables GN sujet + GV : j’entends les oiseaux chanter / J’entends chanter les oiseaux. 3) L’interrogative indirecte ou directe Le sujet de l’infinitif non exprimé est coréférent au sujet du verbe principal, ou générique. L’infinitif est affecté d’une nuance d’éventualité : Elle ne sait plus quoi inventer / Je ne sais où aller. Cet emploi n’est possible qu’en interrogation partielle, c’est-à-dire avec des outils interrogatifs. L’interrogative indirecte est toujours complément d’objet direct du verbe de la principale. 4) La relative substantive Dans cet emploi, on remarquera que l’infinitif est dépourvu de support exprimé. Le procès est envisagé dans sa plus grande virtualité : je cherche un endroit où travailler (= je cherche un endroit où je puisse travailler). Dans la relative, l’infinitif peut être introduit par pouvoir, qui est toujours sous-jacent. II. L’infinitif en fonction nominale L’infinitif dans ses emplois, assume les diverses fonctions syntaxiques du nom, tout en conservant ses prérogatives de verbe : il continue donc notamment à pouvoir lui-même régir des compléments. A la différence de l’emploi verbal, il n’est plus prédicatif et peut donc être repris par un pronom. Fonctions : Autour du groupe sujet-verbe - Sujet : Lire est agréable - Attribut du sujet : L’essentiel est de participer - Régime de l’impersonnel ou du présentatif : Il me tarde de lire / c’est me faire trop d’honneur - Cod : J’aime lire - Coi : Je songe à me marier - Cos : Je l’ai accusé d’avoir menti - C. circonstanciels : temps, cause, but, conséquence (avec des tours corrélatifs) : Il est trop fatigué pour pouvoir venir ce soir, concession, manière niée : Il travaille sans se fatiguer. - Complément dit « de progrédience » : toujours en construction directe après des verbes de mouvement. Il n’est jamais prépositionnel, peut se pronominaliser par y et ne peut être nié : Je cours te chercher ce livre / J’ai emmené les enfants voir les marionnettes. Autour du groupe nominal - Complément du nom : Le plaisir de lire, celui de comprendre / Une histoire à dormir debout - Complément de l’adjectif : Désireux de lire III. L’infinitif centre de périphrase La notion de périphrase suppose en effet une forme verbale complexe avec un semi-auxiliaire, conjugué à un mode personnel et une forme verbale impersonnelle (le plus souvent l’infinitif) qui apporte l’information. Chacun des deux éléments de la périphrase est incapable de fonctionner à lui seul comme pivot de la proposition : c’est l’ensemble soudé de la périphrase qui assumera cette fonction. L’infinitif porte l’information principale de la phrase et n’est donc jamais pronominalisable : je vais vous répondre > *j’y vais (mais je vais le faire). 1) La périphrase temporelle Elle permet de situer le procès par rapport à l’énonciation. Elle se conjugue uniquement au présent et à l’imparfait : - « aller + infinitif » : futur proche J’allais lui répondre lorsque le téléphone sonna - « devoir + infinitif » : futur proche dans un contexte passé C’est là qu’elle rencontra celui qui devait devenir son mari - « venir de + infinitif » : passé récent Je viens de vous le dire ! 2) La périphrase aspectuelle Elle envisage le procès dans l’un ou l’autre des différents moments de sa durée interne. - « commencer, se mettre à / être sur le point de + infinitif » : phase initiale d’entrée dans l’action aspect inchoatif - « être en train de + infinitif » : le procès est vu sous l’angle de son déroulement, dans sa durée aspect duratif ou progressif - « finir de + infinitif » : aspect terminatif 3) La périphrase modale Elle précise le point de vue de l’énonciateur sur le contenu invoqué. - « sembler + infinitif » : mise à distance, l’énonciateur relativise la proposition en marquant la possible discordance entre apparence et réalité. - « devoir + infinitif » : l’énoncé traduit la probabilité, devoir ne marque plus l’obligation. - « pouvoir + infinitif » : l’énoncé traduit ici l’éventualité et non la probabilité (chances de vérification plus faibles). - « valoir + infinitive » : l’énoncé marque une tonalité jussive : Il vaut mieux partir de suite. 4) La périphrase actancielle Elle permet de modifier le nombre des participants au procès (les actants) et d’en préciser le rôle logique. - « faire + infinitif » : actancielle factitive aussi appelée causative puisqu’un actant supplémentaire, donné pour cause du procès, est introduit grâce à la périphrase. - « laisser + infinitif » : actancielle tolérative car le sujet de la périphrase est présenté comme actant passif du procès, dont il n’empêche pas la réalisation. - « (se) voir + infinitif (+ groupe nominal) » : le sujet est simplément considéré comme spectateur passif du procès : Il s’est vu signifier son congé (par lettre recommandée)