Tout droit sortis d'Egypte
Fabienne Bergmann
Si chacun sait que la sortie d'Egypte est une référence constituante pour le peuple juif,
on sait moins que certains mots égyptiens se sont intégrés à l'hébreu et sont encore
employés aujourd'hui dans le langage courant.
A peine sorti d'Egypte, le peuple se plaint et regrette les nourritures du pays
d'esclavage (Nombres, XI : 5), et en particulier le (avatiah), que la Bible du
rabbinat traduit par melon et qui est le melon d'eau, la pastèque, aujourd'hui
délectation estivale israélienne par excellence. Le terme viendrait de l'égyptien baţţich
ou biţţich.
Le Nil, avec ses canaux d'irrigation, était la source de vie de l'Egypte. C'est là, dans ce
que la Bible nomme (yeor), que la fille du Pharaon trouva Moïse parmi les
roseaux − ( (souf, de l'égyptien t-wfj) – (Exode II : 5). C'est elle, nous dit la Bible
qui nomma l'enfant, (Moshé = Moïse en hébreu). "Elle lui donna le nom de
Moïse, disant: "Parce que je l'ai retiré des eaux", . (Exode, II : 10), Le
verbe (macha), notons-le, a toujours le sens de "retirer des eaux". Mais elle
l'appela sans doute ainsi d'après le verbe égyptien msy voulant dire donner naissance,
le nom Moshé devant signifier dans son langage enfant ou fils.
Une autre particularité de l'Egypte sont ses devins, les (hartoumim) dont les
prestiges étaient tels qu'on les appela pour rivaliser avec ceux de Moïse et d'Aron. Ils
furent évidemment confondus, mais leur souvenir persiste dans notre langue et
(ktav hartoumim, l'écriture des hartoumim, les magiciens d'Egypte) est le mot
hébraïque pour hiéroglyphes et, par extension pour toute écriture illisible.
La navigation étant vitale au pays du Nil, on ne s'étonnera pas de l'importation dans
notre langue du mot égyptien t'aj, bateau, devenu en hébreu (tsi), la flotte. De
même, (mézah, la jetée, la digue, le quai) est un emprunt à l'égyptien mdh.
Le mot (téva), qui aujourd'hui désigne la boîte, le coffret, le coffre ou la caisse
vient sans doute du mot égyptien T-b-t, coffre, hautement significatif de cette
civilisation du culte de la mort.
Deux autres termes d'origine égyptienne se rapportent à la végétation. L'un est
(ahou, le pré, la prairie, le pâturage) de l'égyptien acha ou achi, signifiant "était vert";
l'autre est un arbre du désert, (chita, l'acacia), de l'égyptien šndt.