COMPTE RENDU DE STAGE DU GROUPE
LAÏCITE
05/11/2015
Formation de sensibilisation à la radicalisation
Quels processus de radicalisation ? Quelles formes de radicalités ?
Pourquoi de jeunes Français, qui ne sont pourtant pas de culture
musulmane, veulent-ils se convertir à l'Islam et se radicalisent ils parfois
ensuite? Quelles sont les techniques de propagande utilisées par les
djihadistes ? Lobjet de cette journée de stage est dapporter des
réponses et dexpliquer le processus de radicalisation chez certains
jeunes et de reconnaître les indicateurs de basculement, le passage à la
radicalisation chez certains musulmans et convertis. Alain Ruffion,
psychanalyste et directeur dUnismed, fait le point sur les méthodes des
dérives sectaires et Karim Bouda, universitaire et membre actif de
lassociation niçoise « Entrautres », spécialiste de lIslam, présente
dabord un tableau sémantique, étymologique et historique du rapport
de la laïcité et de lIslam, puis un rappel sur les différentes courants de
pensée de « lislam classique aux réformistes islamistes ».
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Radicalisation et Laïcité
F O R M A T I O N D E S E N S I B I L I S A T I O N À L A R A D I C A L I S A T I O N
PRESENTATION :
Une journée de stage fut organisée au lycée Apollinaire de 9h à 16h30, jeudi 5
novembre. Une vingtaine de participants ont été invités (Madame la Déléguée du
Préfet, les collègues du lycée du groupe laïcité du lycée Guillaume Apollinaire, des
membres dassociations locales, un représentant de la PJJ, des représentants de
laction sociale de la Mairie de Nice et du Conseil Général).
LES CONFERENCIERS :
Alain Ruffion, psychanalyste, administrateur de France Médiation, directeur dIEF et
directeur dUnismed spécialiste de la question des sectes et de la radicalisation des
jeunes, fait le point sur les méthodes de prévention des dérives sectaires. Un travail
pointu et délicat, face à des jeunes minés par les injustices et la non-reconnaissance
de leur culture.
Karim Bouda, universitaire, spécialiste de lIslam, membre actif de lassociation
EntrAutres créée depuis 2005 est un acteur de terrain.
THEMES DEVELOPPES AU COURS DE CETTE JOURNEE :
1. Définition et processus de la radicalisation
2. Les différentes étapes de la radicalisation
3. Des exemples de jeunes radicalisés
4. Analyse des situations et des réponses à apporter
5. Tableau de tous les critères de la radicalisation
1 Définition et processus de la radicalisation :
(Intervenant Alain Ruffion)
Définition du la radicalisation
La radicalisation cest laction de se rendre radical, dêtre intransigeant, de devenir
extrême. Ce vocable est pluri sémantique, il renvoie à des connotations religieuses,
nationalistes, séparatistes, anarchistes et affecte des groupes comme des individus
isolés, "des loups solitaires" selon la terminologie en usage.
Le mot radicalisation renvoie à lidée de revenir à la racine des choses. Il change de
connotation avec le sens anglo-saxon, plus politique, de vouloir changer les choses
en utilisant la violence. Le terme de radicalisation a été associé dès lorigine au vecteur
politique, courant XIXè siècle, pour désigner les actions violentes et radicales contre le
pouvoir en place.
Marginale jusqu'aux attentats du 11 septembre 2001, la notion de radicalisation, se
focalise sur les acteurs et leur motivation. Elle est employée pour expliquer la genèse des
groupes embrassant l'action violente et associée à un islam « radical » en opposition à
un Islam classique ou dit traditionnel.
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La radicalisation désigne le processus par lequel "un individu un groupe adopte
une forme violente d'action, directement liée à une idéologie extrémiste à
contenu politique, social ou religieux qui conteste l'ordre établi sur le plan
politique, social ou culturel"(cf. : Farhad Khosrokhavar, « Radicalisation, Paris, Éd. de
la Maison des Sciences de l'Homme, 2014, 192 p.».
Le radicalisme islamique
La première question concernant le radicalisme islamique est de savoir dans
quelle mesure celui-ci est une conséquence de la doctrine religieuse elle-même,
et donc intrinsèque à lislam, ou bien s'il s'agit d'un phénomène avant tout
politique, lié à des conflits contemporains. En fait, on ne peut parler de radicalisme
islamique que lorsque l'usage de la violence est explicitement mis au service de
la réalisation d'un État ou d'une société islamique.
Sous l'étiquette de « radicalisme islamique », on classe donc des mouvements
complexes et souvent très différents, allant d'un parti politique légaliste et ayant eu des
responsabilités gouvernementales dans une démocratie (le Refah/Fazilet en Turquie) à
des groupuscules terroristes (comme Al-Qaida et le Jaysh-e Mohammed au
Pakistan), ce qui suffit à montrer combien la notion reste floue.
Le sens du mot est bien plus large (l'« effort ») ; le prophète Muhammad fut aussi
un chef de guerre. Mais tenter de définir le radicalisme islamique à partir du Coran ne va
pas très loin, pour deux raisons. Tout d'abord le Coran lui-même, tout comme la tradition
du Prophète, insiste sur le contexte propre à chaque décision de recourir à la violence, et
n'a jamais fait du djihad un des piliers de la foi (pas plus d'ailleurs que du
prosélytisme) : par exemple, tantôt il est recommandé de faire un accord avec les juifs
ou les chrétiens, tantôt de s'en méfier. Conséquence logique, toute une activité de
codification et d'interprétation s'est développée parmi les légistes musulmans, donnant
naissance à une tradition centriste (le djihad ne peut être proclamé que dans des
conditions très strictes, généralement défensives), et à une tendance plus
radicale (qui en particulier n'hésite pas à proclamer le djihad contre d'autres
musulmans, jugés « mauvais »). D l'instrumentalisation du Coran et de la
Tradition par les acteurs politiques du monde musulman contemporain.
La plupart des formes contemporaines de radicalisme islamique (la révolution
iranienne ou bien les attentats d'Al-Qaida) n'ont aucun équivalent dans l'histoire du
monde musulman et doivent donc être compris comme profondément nouveaux. Le
concept de prise du pouvoir d'État par une révolution populaire, entérinée par une
nouvelle Constitution (lIran en février 1979), n'a aucun équivalent, de même que l'usage
systématique des attentats-suicides (apparu d'abord dans le Hezbollah libanais au cours
des années 1980 et adopté plus tardivement par les Palestiniens et Al-Qaida, alors qu'il
avait été développé par des mouvements non musulmans comme les Tigres tamouls au
Sri Lanka).
Du radicalisme au terrorisme : un processus long et réversible
Ensuite est évoqué les difrentes étapes de radicalisation chez les jeunes musulmans
ou convertis. Loin dêtre un état d’esprit figé dans le temps, la radicalisation est le
fruit dun processus long, complexe et graduel qui peut se crire en trois étapes :
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La radicalisation (première phase), trouve essentiellement sa source dans le
contexte social. Sentiment d’injustice, d’inutilité, stigmatisation ou crise
identitaire, l’individu s’éloigne peu à peu de la socté. Il peut également sentir
son identité personnelle ou sociale menae suite à certains événements (attentats,
crise économique, etc.). La principale cause serait le manque dattention ressenti
ou le sentiment d’être marginalisé. Une crise de confiance seveloppe
progressivement lors de laquelle les oppositions se renforcent entre lindividu et la
socié.
Lextrémisme est la seconde phase, celle où les discours radicaux
sintensifient et l’usage de la violence commence à se profiler comme un
moyen légitime sans pour cela devenir effectif : lauteur recherche des alternatives
culturelles, politiques ou idéologiques. C’est l’étape où la dynamique de groupe
est importante et les contacts radicaux s’accroissent : l’acceptation de l’identi
du groupe et de lidéologie ainsi que la reconnaissance deviennent des facteurs
terminants. Lisolement par rapport à la socté et la création de liens, radicaux,
solides (leader charismatique, personne de confiance, etc.) renforcent ladhésion aux
valeurs extrémistes.
Le terrorisme est létape ultime où lusage de la violence est reconnu, accepté
et légiti comme seule et unique possibilité d’agir.
On distingue 5 degrés de radicalisation chez un jeune musulman ou converti
1er degré : revendiquer des pratiques communautaristes (manger halal,
lire le Coran plusieurs fois par jour etc)
2ème degré : revendiquer des pratiques « identitaristes » (je suis d’abord
musulman, arabe) Il s'agit en premier lieu d'une quête de visibilité : de l'« islam
des catacombes », dans l'intimité du foyer, les jeunes veulent passer à une
reconnaissance de dignité égale à celle de tous les autres citoyens, à l'instar
d'autres minorités en quête de visibilité, comme peut l'illustrer le phénomène de
la gay pride. Le droit à la pratique religieuse dans un espace réservé (la mosquée),
un « carré musulman » dans les cimetières, un espace pour d'autres rituels festifs
(Aïd al Kebir, Ramadān), des facilités pour accéder au pèlerinage à La Mecque font
partie de ces revendications et pratiques identitaires.
3ème degré : exprimer une radicalité cultuelle (pratiquer la religion de
façon très rigoriste, comme porte le voile, la burqa, se laisser pousser la
barbe). Se pose ici le probme de la lcité. La question scolaire constitue
un autre symptôme. Le port du foulard ne sert pas uniquement à marquer sa
différence revendiquée, il se place aussi en une réfutation de l'enseignement laïc,
en certaines matières du moins : la biologie (Darwin et l'évolutionnisme), la
musique (interdite aux filles en islam), l'éducation physique cause du
« dévêtu » que cela implique) et lhistoire.
4ème degré : tenir des propos radico-théologico politiques. Le passage au
politique constitue l'une des voies de structuration et d'expression du mal-vivre
réactif des jeunes musulmans. Le relais est pris par les mouvements et les
groupes activistes islamiques-islamistes, adossés à quelques grands courants du
fondamentalisme et de l'intégrisme islamique planétaire, transnational. tendance
« rigoriste » de l'école néo-hanbalite, originaire de l'Arabie Saoudite et qu'on évoque
souvent abusivement sous l'appellation « wahhabisme » (XVIIIe siècle),
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5ème degré : faire de la propagande sur la haine de la mocratie et la
rejeter (Les jeunes musulmans ou convertis prônent le djihad).
2 Processus historique de la radicalisation islamique : Les différentes
étapes
(Intervenant Karim Bouda)
(Notes complétées à partir de la lecture du livre d’Antoine Sfeir (dir.), Dictionnaire du
Moyen-Orient, Bayard Éditions, 2011, 964 p.)
Présentation rapide des différentes branches de l’Islam : Sunnites, Chiites,
Kharidjites
Cest très tôt dans lhistoire de lIslam, en lan 657, seulement 25 ans après la mort de
Mahomet, que lislam se divisa. La source du conflit était politique: la désignation du
calife ou imam, successeur du Prophète à la tête de la communauté. Or Mahomet
a eu des filles mais pas de fils.
Qui donc allait diriger la communauté après sa mort? Il navait pas donné dinstruction à
cet égard.
(Pour info : http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2014/06/20/au-fait-quelle-
difference-entre-sunnites-et-chiites_4442319_4355770.html)
Les Sunnites
Lislam sunnite ou sunnisme est le principal courant religieux de lIslam. Il
concerne 85 à 90 % des musulmans. Le sunnisme est dérivé du mot « sunna » qui
représente la ligne de conduite de Mahomet. Qualifiés de musulmans orthodoxes,
ils prônent un monothéisme épuré dont la base demeure le Coran, livre sacré sur lequel
doit reposer lorganisation sociale et la vie spirituelle de tout musulman. Contrairement
aux Chiites, les Sunnites combattent lidée selon laquelle le successeur de Mahomet doit
obligatoirement appartenir à sa famille.
Les Chiites
Les Chiites dont le nom dérive de Chîat a Ali ceux qui suivent Ali ») représentent
aujourdhui un dixième seulement de lensemble des musulmans (environ 100
millions de fidèles). Ils sont cependant majoritaires en Irak et en Iran et forment une
communauté très influente au Liban. Les musulmans chiites attribuent une importance
cruciale au culte de limam. Cet imam chiite se distingue de limam qui, chez les Sunnites,
préside simplement à la prière dans les mosquées. Il est le descendant dAli, le gendre
du Prophète.
Les Kharidjites
Ils furent ainsi nommés par Ali, cousin et gendre de Mahomet, pour désigner tout
mouvement musulman contestataire, qu'importent leurs revendications et leurs
méthodes, pourtant radicalement opposées.
Les principales différences entre les deux courants sunnites et chiites
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