Fiche n°1 : Rappel des données structurelles sur les économies ultra-marines Les DCOM : une valeur ajoutée à mieux prendre en compte On sait que les Outre-mer constituent une indéniable source d’enrichissement pour la Nation (80 % de la biodiversité française, 96,6 % des espaces maritimes, 18,3 % de la superficie terrestre). S’agissant plus particulièrement de l’apport démographique des Outre-mer, l’INSEE prend en compte les quatre DOM et, désormais progressivement, Mayotte. Les collectivités du Pacifique (Nouvelle-Calédonie, COM de Polynésie française et de Wallis et Futuna), la COM de Saint-Pierre-etMiquelon et, depuis le 1er janvier 2008, les deux COM de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy n’entrent pas dans le périmètre, privant la population française totale de plus de 600 000 personnes. - On constatera, parallèlement, que le Rapport Economique et Financier du Ministère des Finances, traditionnellement annexé aux projets de lois de finances, ne prend en compte que…la seule métropole dans les séries statistiques relatives à la population (cf. Rapport 2015, p. 23 et suiv.). - Globalement, avec 2,72 millions d’habitants (4,1 % de la population française totale) début 2015 et près de 47 000 naissances (5,6 % du total français) en 2013, les DCOM apportent une véritable valeur ajoutée démographique, d’autant plus que la jeunesse de sa population constitue un atout en terme de dynamisme économique : on rappellera que 5,5 % des jeunes Français de moins de vingt ans (près de 900 000 personnes) résident Outre-mer, et cette proportion devrait être bien supérieure en prenant en compte le million d’originaires des DCOM résidant dans l’hexagone. - Enfin, compte tenu du dynamisme démographique susmentionné, les DCOM représentent une population active cumulée de près de 1,2 million de personnes, et un nombre d’emplois de 800 000. Le nombre de salariés y avoisine les 700 000, dont près de 450 000 salariés travaillant dans le secteur concurrentiel. Parallèlement, on comptabilise 223 000 entreprises dans les DCOM en 2013, soit 5,7 % du total des entreprises françaises ; 26 000 entreprises y ont été créées. S’agissant de l’apport des DCOM en terme de Produit Intérieur Brut (PIB), les quatre DOM « historiques » sont désormais pris en compte par l’INSEE (PIB cumulé de 36,8 Mds. € en 2013). Mais en ajoutant Mayotte et les COM, le PIB cumulé total des Outre-mer devrait approcher, en 2015, les 55 Mds. €, davantage que le PIB du Luxembourg (45,5 Mds. € en 2013). L’insertion dans le PIB national de celui des seules « COM » (env. 14 Mds. € en 2014) aurait des conséquences non négligeables sur le ratio « dette /PIB » (qui diminuerait de près de 0,6 pt) et sur le ratio « déficit / PIB », permettant de dégager de substantielles marges de manœuvre budgétaires, à ratio constant. Enfin, l’Outre-mer, qui regorge par ailleurs de ressources naturelles substantielles, y compris au niveau des sous-sols marins, permet d’améliorer le niveau des exportations « hexagonales » : pour près de 7,2 Mds. € de ventes de la métropole aux DCOM (2013), celle-ci y fait annuellement des achats d’environ 0,6 Md. € (soit un « bénéfice » de 6,6 Mds. € pour l’hexagone, ce qui correspond à près de 100 000 emplois métropolitains). Par ailleurs, les six COM et Mayotte (jusqu’en 2014) continuant, sur le plan statistique, à être traités comme des territoires d’exportation (comme les DOM jusqu’en 1996), le commerce extérieur français bénéficie d’une bonification « optique » d’1 Md. d’€ chaque année. Un rattrapage qui reste à consolider Il convient de rappeler que, dans une logique de solidarité nationale, des écarts par rapport à la situation métropolitaine sont des retards ayant, comme tels, vocation à être comblés : il ne saurait, en l’occurrence, s’agir de « spécificités » devant être tolérées -voire encouragées, au nom d’une vision tiers-mondiste du « droit à la différence » et/ou d’un sacrifice des citoyens ultra-marins sur l’autel de l’austérité budgétaire. Or, les retards sont encore significatifs dans les DCOM, comme a pu le souligner récemment la Cour des Comptes en matière de santé (retard de 23 ans à La Réunion en terme de baisse de la mortalité infantile en 2011 ; retard de 27 ans en Martinique ; de 39 ans à Mayotte !). La situation économique et sociale demeure inquiétante : en 2009-2012, le PIB/habitant dans les DOM représentait, en moyenne, 62 % du niveau de l’hexagone, soit 83,2 % de la région métropolitaine la plus pauvre (Limousin) en 2012. Il s’échelonnait cette année-là, dans les quatre DOM « historiques », entre la moitié (Guyane) et les deux tiers (Martinique : 68,5 %) de la moyenne hexagonale ; il s’établit à seulement 25,7 % de ce niveau à Mayotte (2011). La situation en matière de chômage reste par ailleurs préoccupante : on compte actuellement (Décembre 2014) 331 800 chômeurs dans les quatre DOM « historiques » (+ 100 000 depuis avril 2009), 1 soit 5,3 % du total des 6,29 millions de demandeurs d’emploi recensés en France. En comptant les COM et Mayotte, on peut évaluer le nombre de chômeurs outre-mer à près de 410 000 fin 2014. Les taux de chômage des jeunes (enquête emploi 2013) s’échelonnent entre 37,4 % (Mayotte) et 68,2 % (Martinique), contre 24,6 % dans l’hexagone (La Réunion : 60,6 %), alors que l’apprentissage reste insuffisamment développé outre-mer (8 644 apprentis dans les DOM, soit 2,1 % du total national en 2013). Le chômage de longue durée est, en outre, très répandu : il représente 53,9 % des demandeurs d’emploi dans les DOM, contre 42,8 % en métropole ; enfin, les quatre DOM « historiques » concentrent 6,7 % du total des chômeurs inscrits depuis plus d’un an, pour 2,9 % de la population. Parallèlement, les statistiques sociales de l’INSEE, de façon surprenante, ne prennent pas toujours en compte l’Outre-mer où la pauvreté est bien plus répandue que dans l’hexagone (le taux de pauvreté est entre trois et quatre fois plus élevés que dans l’hexagone : il s’établit par exemple à 42 % en 2010 à La Réunion, à comparer avec le taux de pauvreté en Seine-Saint-Denis: 24,8 % en 2011). Dans ce contexte de forte pauvreté résiduelle en dépit de l’alignement social (sauf dans les COM et à Mayotte, notamment au niveau des SMIC1), les cinq DOM représentaient, fin 2012, 8,6 % du total national des allocataires de minima sociaux pour 3,2 % de la population. Fin Décembre 2014, le nombre de foyers bénéficiaires du RSA atteint, Outre-mer, 241 194 (9,9 % du total national)2. Le nombre total de personnes couvertes par des allocations logement atteint 512 274 individus, soit 3,87 % du total national : les personnes couvertes par des aides au logement représentent donc, fin 2014, 23,7 % de la population estimée des DCOM, contre 19,8 % en métropole Un niveau de dépenses publiques à relativiser Les transferts publics en direction des Outre-mer représentent (en exécution) une somme de 14,3 Mds. € en terme de dépenses budgétaires brutes (hors dépense fiscale), soit seulement 0,67 % du PIB français (2013). Ces transferts constituent l’expression privilégiée de la solidarité nationale. Dans cette optique, les Outre-mer bénéficient logiquement du principe de péréquation nationale, à l’instar de toute région métropolitaine3. Parallèlement, on constate, en l’espèce, une double évolution récente : - (i) La dépense publique augmente désormais, dans les collectivités les plus peuplées, moins vite que l’ensemble de l’économie, hors périodes de récession : ayant désormais accompli leur mission de « catalyseurs » d’une croissance plus endogène, les transferts publics voient leur poids moyen diminuer en termes relatifs (dépenses / PIB) voire absolus, comme à La Réunion, le DCOM le plus peuplé. Face à cette évolution progressive, « naturelle », il est donc absurde de prétendre diminuer leurs montants : il en résulterait une substantielle diminution de la consommation des ménages et des carnets de commande des entreprises, puis une récession économique et une chute sévère des niveaux de vie. - (ii) La dépense publique augmente plus vite que les populations de collectivités en pleine transition démographique, comme en Martinique. Il en résulte un rattrapage progressif, vers le haut, des niveaux français de dépenses par habitant. On ne peut que s’en féliciter. Ces montants doivent être, par ailleurs, singulièrement relativisés : (i) les dépenses nettes de l’Etat, en prenant en compte les recettes de l’Etat (un peu plus de 2 Mds. € de recettes fiscales), s’avèrent inférieures à ce montant, et avoisinent plutôt les 12 Mds. € ; (ii) la part de l’Outre-mer dans le total des dépenses brutes du budget général est légèrement inférieure au poids démographique des DCOM susmentionné (3,79 % contre 4,05 % fin 2013) ; (iii) cette légère sous-évaluation est confirmée en comparant les dépenses budgétaires par habitant avec les standards métropolitains : en 2013, le retard atteint 7,7 % dans l’ensemble des outre-mer, avec des situations contrastées : de 22,7 % en moyenne dans les COM, autonomes, il demeure proche de 4 % dans les DOM avec de fortes disparités (dépenses/hab. supérieures de 2 % au niveau métropolitain en Martinique, où la population diminue ; encore inférieures de 38 % à Mayotte) ; (iv) enfin, si les dépenses fiscales en faveur des DCOM (relevant de la mission Outre-mer : 3,9 Mds. €) ont augmenté de 43,3 % entre 2007 et 2015 (France entière : + 34,9 %), avec 4,7 % du total des dépenses fiscales nationales (PLF 2015), elles représentent une proportion in fine comparable à celle correspondant au poids démographique des Outre-mer. Il en est de même pour les exonérations de charges de Sécurité sociale (1,04 Md. € en 2013), avec 3,5 % du total national en moyenne sur la période 2007-2013. 1 2 3 Fév. 2015 : 78,9 % du niveau national en Polynésie et en N-Calédonie ; 75,5 % à Mayotte ; 46,5 % à Wallis et Futuna. Près des 4/5ème des bénéficiaires perçoivent le RSA-socle (ex-RMI) en 2014, contre les 2/3 en moyenne nationale. C’est également le cas depuis 1975 dans les DOM (Mayotte : 2007) en ce qui concerne les tarifs de l’électricité. 2