Le Pont sur le Rhin.
Au -1er siècle, le continent européen était représenté par trois grandes puissances : Rome, la
Gaule et la Germanie (carte).
César, en deux campagnes (-58 contre la Gaule celtique , -57 contre la Gaule Belgique) venait
d'écraser la Gaule.
Les fréquentes incursions des Germains au-delà du Rhin lui démontraient qu'ils ne se
contentaient plus de leur territoire et qu'ils étaient sur le point de se lancer dans une nouvelle
politique de conquêtes destinée à aboutir à la création d'un empire dont la frontière ne serait
plus le Rhin, mais l'océan Atlantique. Après quoi, il ne resterait à Rome qu'à devenir une
puissance de second rang, en attendant d'être submergée à son tour. Pour pallier à ce danger,
César voulut, pour empêcher toute infiltration des Germains sur la rive gauche du Rhin, créer
une zone de protection sur la rive droite. Il avait un point d'appui chez l'une des peuplades
germanique, les Ubiens, qui comptaient sur son aide pour se préserver des incursions de leurs
puissants voisins, les Suèves.
César décida donc de traverser le Rhin, en -55, mais, peu confiant malgré tout dans la loyauté
des Ubiens qui lui proposaient la fourniture des embarcations nécessaires, soucieux, par
ailleurs, de réaliser une action d'éclat, il résolut, après un avis favorable des techniciens
attachés à son état-major, de construire un pont ralliant les deux rives; l'ouvrage fut réalisé à
la hauteur de Coblence, où le Rhin a environ 500 m de large et 8m de profondeur, ou, selon
certains, dans la région de Cologne, le fleuve n'ayant là-bas que 400 m de large et 3 m de
profondeur. Des dizaines de milliers d'hommes furent réquisitionnés parmi les populations
rhénanes de la rive gauche pour fournir les quantités énormes de matériaux et pour seconder
les légionnaires transformés en pontonniers. En dix jours, le pont fut terminé et les légions
passèrent le fleuve en ordre de marche.
Le récit de César.
[4,17] César, déterminé par les motifs dont j'ai parlé, avait résolu de passer le Rhin; mais le
traverser sur des bateaux ne lui semblait ni assez sûr ni assez convenable à sa dignité et à
celle du peuple romain. Aussi, malgré l'extrême difficulté qu'offrait la construction d'un pont,
à cause de la largeur, de la rapidité et de la profondeur du fleuve, il crut cependant devoir le
tenter; autrement il fallait renoncer à faire passer l'armée. Voici donc sur quel plan il fit
construire le pont: on joignait ensemble, à deux pieds d'intervalle, deux poutres d'un pied et
demi d'équarrissage (1) , un peu aiguisées par le bas, d'une hauteur proportionnée à celle du
fleuve. Introduites dans l'eau à l'aide des machines (1,1 – 1,2) , elles y étaient fichées et
enfoncées à coups de masse, non dans une direction verticale, mais en suivant une ligne
oblique et inclinée selon le fil de l'eau. En face et en descendant, à la distance de quarante
pieds, on en plaçait deux autres (2) , assemblées de la même manière, et tournées contre la
violence et l'effort du courant. Sur ces quatre poutres on en posait une (3) de deux pieds
d'équarrissage, qui s'enclavait dans leur intervalle, et était fixée à chaque bout par deux
chevilles. Ces quatre pilotis, réunis par une traverse; offraient un ouvrage si solide, que plus
la rapidité du courant était grande, plus elle consolidait cette construction. On jeta ensuite
des solives (4) d'une traverse à l'autre, et on couvrit le tout de fascines et de claies (5). De
plus, des pieux (6 – 6,1) obliquement fichés vers la partie inférieure du fleuve s'appuyaient