Economie en Asie du Sud

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Introduction à l’économie des pays de l’Asie du Sud Est
Mme M-S de Vienne
Comment les pays du sud-est asiatique perçoivent l’économie ?
Pour aborder la conception de l’économie de la part de ces pays, il faut reprendre les fondements
philosophiques de ces sociétés : une lecture dualiste de la société (la réalité sociale s’ordonne par
des systèmes d’opposition symboliques liés à des cultes totémiques). S’opposent symboliquement
l’oiseau (air) et le serpent (terre) ; le sucré et le salé… En Indonésie, Patrie se dit [Tana-air] soit Terreeau.
Les relations sociales n’échappent pas à cette interprétation : relations sociales intérieures (famille,
maison) et extérieures (tout le reste, non contrôlé). On parle de jeux d’opposition binaires.
Ce qui relève de l’économique pour les occidentaux, relève pour les asiatiques du sud est de deux
sphères :
- l’activité du monde rural (exploitation forestière, agriculture, pèche…). Il y a
prépondérance de l’action productive liée à la survie immédiate, surtout alimentaire (gestion
du terroir ; hydraulique…). Il s’agit alors d’une forme d’échange ritualisée entre le maître du
sol (via l’hôtel au génie) et le paysan. On retrouve dans cette première sphère le troc
alimentaire et l’artisanat utile (ex : les paniers – à noter que le panier reste l’unité de mesure
privilégié dans la statistique nationale). Cette sphère est dominée par l’espace fermé et limitée
dans l’espace, le temps (certaines saisons…)
- Ce qui à ressort à l’extérieur : ce qui est lié à une transformation de la première sphère et
peut aussi comprendre ce qui est lié à certaines formes de commerce sophistiquées (transport
de marchandise etc…). On trouve ici le commerce avec l’extérieur qui implique des agents
spécialisés (langues, ..), des techniques (comptables etc…) et des lieux (entrepôts etc…). Cette
sphère est dominée par la notion de réseau. A partir du 16 ème, 17ème siècle, cette sphère va
correspondre au développement urbain (on retrouve des quartiers spécialisés dans les villes
modernes, comme à Mandalay ou Hanoi). A noter que les agents spécialisés peuvent frapper
monnaie (au 16/17ème ce sont plutôt des personnes d’origine chinoise, inventeurs de la
monnaie).
Ce dualisme existe dans la plupart des sociétés. Ce qui est spécifique à l’Asie du Sud Est, c’est que ce
dualisme est géré spécifiquement et très différemment du traitement accordé par les sociétés
occidentales.
Cela a donc deux conséquences :
- Du coté fonctionnel, on note le peu de création d’instruments économiques (la balance est
d’origine chinoise, les mots pour la désigner aussi).
- Du coté conceptuel, la sphère économique est un sous produit de la sphère politico-féodalereligieuse. Les relations économiques ne sont qu’un des différents types de relation existant
dans la société.
On distingue deux niveaux :
1. L’espace (le terroir) :
Ils sont découpés en communautés rurales autonomes coordonnées de manière hiérarchique
jusqu’au sommet (le Roi). La gestion du territoire est gérée par des vassaux régionaux qui
agissent sur ordre du Roi (ils collectent le tribut et en reversent une petite partie au Roi). C’est
donc une gestion peu centralisée appuyée à un dispositif symbolique.
2. Les réseaux :
Le Roi se trouve être le seul en capacité de se trouver en relation avec l’autre (les états voisins,
…). Il peut concéder ce droit par un mandat à des marchands (d’où le fait que les quartiers
proches des palais…soient des quartiers marchands. Les alliances matrimoniales font l’objet
de stratégies visant à acquérir ces droits). Les marchands peuvent exploiter des monopoles
royaux. On note, dans ce cas, un système de participation du Roi dans les affaires de ses
mandatés et un système de fiscalité indirecte – via les cadeaux offerts aux souverains.
L’équilibre repose sur le souverain (via le système de don/contre don) et sur son réseau, lorsqu’il
dispense ses exploitations. Il fait le lien entre l’espace et le réseau, la production et l’échange. A cette
époque, les relations avec l’étranger ne pose pas de problème particulier. Les occidentaux arrivent
dans ce contexte via leurs compagnies de commerce : ces dernières vont intégrer les réseaux existants.
Les premiers impacts sont secondaires sur les deux sphères (le premier impact est l’arme à feu).
Avec les siècles, les occidentaux vont jouer sur ces deux sphères :
- introduction des produits occidentaux
- influence sur les monnaies (le rial, le peso…)
- développement de leur propres pratiques et théories (libre échange…) et en cas de refus de ces
pratiques, les occidentaux font usage de la force (la différence de technologie est en faveur des
occidentaux)
- Dynamique d’expansion de l’occident vont modifier les stratégies économiques des états (les
politiques économiques) : les systèmes coloniaux vont viser à prendre en main la
fonction production qui induit la prise de contrôle des espaces territoriaux (donc
priver la fonction royale de ses bases économiques et confisquer son pouvoir politique). Les
pouvoirs coloniaux vont remplacer la fonction royale par l’économie administrative
régie par un cadre réglementaire géré par des fonctionnaires. Conséquences :
o au niveau de la production, apparaît un droit foncier qui va à l’encontre des traditions
o Taxation de la production
o Fiscalisation de l’économie
o Monétarisation du dispositif d’échange (les impôts sont payés en monétaire)
L’ensemble du système socio-économique est modifié par la colonisation :
- elle ôte la légitimité royale
- l’échange était ritualisé, il devient technique et impersonnel
- le crédit se développe (dont le crédit usuraire, par rapport à la terre)
- Les relations sont dépersonnalisées, plus de cérémoniel (cadeaux), les relations sont
monétarisées
- Le négoce va être compartimenté sur des bases territoriales (création de frontières)
On voit naître de nouvelles économies en Asie du Sud Est, réglementées, mesurées. Ce type
d’économie devient la norme en Asie du Sud Est. Cependant, des comportements traditionnels
subsistent et les sociétés de l’Asie du Sud Est ont réagi et réussi à contourner l’économie
administrative :
- basculement d’une partie de l’activité en dehors des règles administratives (économie
informelle, contrefaçons, économie parallèle…)
- rétablissement de partenariats personnalisés avec système de don/contre-don
(combine, corruption)
L’économie parallèle traduit des logiques traditionnelles de fonctionnement de l’économie. Les
informations ne sont pas enregistrées dans les statistiques officielles (environ 30% de la production
des entreprises vont vers l’économie parallèle (source : parti communiste vietnamien))
Les choses sont très difficiles (ex : l’armée indonésienne qui dépense trois fois sont budget : les
militaires font donc du business)
Ce « hiatus fonctionnel » est admis à un niveau culturel assez élevé (voir Economic Institue of
Cambodia). Il est difficile à percevoir, l’économie immergée et émergée fonctionnent conjointement
(les meilleurs contrebandiers sont les douaniers).
Les mêmes opérateurs fonctionnent selon deux logiques. Tant que les alliances sont stables, le système
fonctionne. Si les relations sont bousculées, on se trouve en situation de crise entre deux groupes
d’intérêts (ex : situation politique en Thaïlande aujourd’hui).
La réalité économique de la zone doit être vue sous cet aspect.
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