Rede Gesamtverband der Aluminiumindustrie Gesamtverband der Deutschen Buntmetallindustrie Gesamtverband Deutscher Metallgießereien L’Europe a besoin d’une politique stratégique sur les matières premières Ulrich Grillo, Président Directeur Général GRILLO WERKE AG, Président de la Fédération allemande de l’industrie des métaux non ferreux (WVM) et Vice Président d’EUROMETAUX, Président du Comité du BDI (Fédération de l‘industrie allemande) sur le sujet des matières premières au Colloque Annuel de la FEDEM 25 Octobre 2007, Paris Durée de l’intervention : 15 minutes Le texte prononcé fait foi. WirtschaftsVereinigung Mertalle Hauptstadtbüro Wallstraße 58/59 · 10179 Berlin · Tel.: 030/72 62 07-100 Fax: 030/72 62 07-198 Büro Brüssel rue du Commerce 31 Haus der Metalle Am Bonneshof 5 1000 Brüssel · Tel.: 0032 (2) 5 02 19 88 Fax: 0032 (2) 5 03 35 74 40474 Düsseldorf Tel: 0211/47 96-0 Fax: 0211/47 96-400 Seite 1 von 8 Cher Monsieur le Président Rambaud, cher Monsieur Vittori, Mesdames et Messieurs, Rupture ou cycle traditionnel ? C’est une question centrale de cette table ronde. En Allemagne, le sujet est vivement débattu. Dans les médias, il se trouve sur les premières pages. Certains commentateurs nous voient déjà au début de la «Deuxième guerre froide – celle de la lutte pour les matières premières ». Les sciences et la politique abordent également ce sujet. La chancelière fédérale Madame Merkel a déclaré que l’approvisionnement en matières premières de l’Allemagne était un question relevant de sa compétence. S’agit-il d’une hystérie, ou sommes-nous confrontés à une question décisive sur l’avenir ? Il est clair que: Le manque d’énergie et la pénurie de matières premières représentent deux côtés de la même médaille. L’approvisionnement de l’Europe en matières premières à des conditions concurrentielles est d’une importance stratégique et correspond aux intérêts nationaux et européens. Il est également clair que: Le monde a changé. Des pays comme la Russie et la Chine exercent une politique économique à orientation géostratégique qui vise clairement à assurer l’accès stratégique vers les matières premières avec un soutien politique massif. Le conflit de gaz russe-ukrainien en 2005 ainsi que les querelles avec la Biélorussie en 2006ont montré clairement la dépendance et la vulnérabilité de notre approvisionnement en matières premières. Ce n’est pas seulement le cas pour le pétrole et le gaz, mais également pour les matières premières non énergétiques : Seite 2 von 8 Fin 2006, les entreprises russes d’aluminium Rusal et Sual ont fusionné avec Glencore pour créer le groupe d’aluminium le plus important au monde. Cela s’est passé avec un soutien politique explicite. Le Conseil de la Concurrence russe a autorisé la fusion en la justifiant par un renforcement de la position de la Russie et une influence grandissante sur les marchés internationaux. La Chine pilote son essor économique par un « contrôle macroéconomique » ciblé sur toute la chaîne de la création de valeur ajoutée. Cela signifie que l’Etat emploie beaucoup d’instruments divers qui ne semblent probablement pas si problématiques si on les considère de manière isolée. Mais s’agissant d’un système flexible et concerté visant à soutenir leurs économies, cela crée des effets de distorsion de la concurrence et il en résulte un déséquilibre stratégique au détriment du marché. De ce déséquilibre stratégique résultent donc des raréfactions, des étranglements d’approvisionnement et des défaillances qui menacent notre compétitivité. Non seulement le pétrole et le gaz, mais également les minerais et métaux nonénergétiques sont importants pour l’industrie de l’Europe sur le plan stratégique. Si nous n'avons plus d’essence, nos voitures ne roulent plus. Mais si nous n’avons plus de métaux, nous ne produisons plus de voitures. Car l’industrie de l’Europe dépend des matières premières en provenance de l’étranger. Pour l’Allemagne, cela signifie concrètement que nous dépendons à 100 % des importations, concernant les métaux. De même, il nous faut couvrir une bonne partie de nos besoins en matières secondaires – donc des ferrailles – par des importations. C’est pour cela que les marchés des matières premières ouverts et qui fonctionnent sont d’une importance décisive pour notre industrie. Les étranglements et les distorsions sur les marchés des matières premières ont provoqué, ces dernières années, des augmentations massives des prix et de fortes volatilités. Il en résulte bien entendu des conséquences sur l’ensemble de l’économie. Seite 3 von 8 Des études actuelles montrent bien que ces augmentations de prix en Allemagne dans toute la chaîne de la création de valeur ajoutée ont entraîné des coûts supplémentaires à hauteur de presque 100 milliards d’euros et une perte de 148.000 emplois. Une hausse des prix de 50 % des matières premières suffit à faire augmenter les coûts des matériaux en Allemagne de 10 milliards d’euros. Le prix des métaux a augmenté ces dernières années, certains même de plus de 500%. Il en résulte des effets de substitution et, au sein de la chaîne industrielle de création de valeur ajoutée, des tensions sensibles allant jusqu’à la rupture de toute la chaîne. En vue de maîtriser ces défis, l’industrie allemande a fondé en 2005 au sein de sa Fédération de l’industrie allemande (BDI) – le MEDEF allemand – une Task Force qui vise à développer des éléments pour une politique stratégique européenne sur les matières premières, par le biais d’un dialogue entre les entreprises de l’ensemble de la chaîne industrielle de création de valeur ajoutée et le gouvernement fédéral. Bien sûr, la gestion des prix élevés et très volatiles et l’achat des matières premières sont tout d’abord l’affaire des entreprises elles-mêmes. Il nous incombe et incombera en tant qu’entreprises et entrepreneurs d’assurer au mieux notre approvisionnement en matières premières par une orientation stratégique et la perception des marges de manœuvres existantes. Nous sommes prêts à confronter la concurrence du marché. Mais les règles du jeu de l’économie de marché doivent être les mêmes pour tous les acteurs. L’augmentation des prix représente un problème, mais ce qui est décisif, c’est la disponibilité des matières premières ! Même en profitant intégralement de l’enjeu d’optimisation et des marges de manœuvres de l’économie, le problème lui-même ne serait pas résolu. Suite aux distorsions commerciales et concurrentielles provoquées par les organes des Etats ou des entreprises soutenues par l’Etat, il existe un déséquilibre stratégique au détriment du marché et de ses acteurs, donc à notre détriment à nous, les entreprises agissant selon les règles du marché. Ce déséquilibre ne peut être résolu que par la politique ! Elle est la seule à pouvoir créer des conditions concurrentielles. Seite 4 von 8 Il incombe à la politique, de faire respecter les règles convenues sur le plan international et d'imposer des sanctions en cas de violations. Il incombe à la politique de créer des options pour les pays qui ne se sont pas encore soumis aux règles du jeu internationales, mais qui sont actifs sur les marchés. Il incombe à la politique de trouver des réponses aux problèmes les plus urgents qui résultent du fait que les marchés internationaux des matières premières sont marqués de plus en plus par des acteurs ayant des idées différentes sur le rôle de l’Etat et le soutien de son économie et de son approvisionnement en matières premières. Que faire si nos idées libérales et les approches politiques n’aboutissent pas ? Mourir en beauté ? Ou faut-il peut-être consentir à une nouvelle approche vis-à-vis de la politique industrielle ? Le marché essaie de réagir par rapport à ces défis par des processus de concentration et des fusions – par exemple dans le secteur sidérurgique, ou comme le démontre la fusion entre Rio Tinto et Alcan. Le débat politique, lui aussi, porte de plus en plus sur la politique industrielle – en Allemagne comme en France. La création de champions nationaux, les « golden shares », ou encore les fonds de placements nationaux pour les industries stratégiques sont débattus dans ce contexte. Qu’est-ce qu’il en résulte ? Premièrement l’approvisionnement en matières premières ne représente pas une fin en soi, mais il est d’une importance stratégique en vue d’assurer durablement la compétitivité de l’Allemagne, de la France et de l’Europe. Deuxièmement l’Europe a besoin d’un commerce libre, de règles du jeu qui fonctionnent. Une stratégie réussie relative aux matières premières requiert donc un soutien politique efficace en cas de violation des règles. Seule la politique peut faire en sorte que les règles du jeu soient respectées et qu’un joueur qui commet une faute aura un carton jaune ou rouge. Seite 5 von 8 Troisièmement une politique réussie sur les matières premières requiert une approche globale avec des démarches d’accompagnement à différents niveaux et dans des différents secteurs politiques. L’approvisionnement en matières premières ne représente pas seulement une mission de la politique économique, mais une mission qui relève tout autant de la politique étrangère et de sécurité, de la politique énergétique et sur l’environnement, de la politique sur les technologies et les innovations, de la politique concurrentielle, de la politique pour les petites et moyennes entreprises, de la politique en matière de développement ainsi que de la politique de l’Europe. Il faut une approche horizontale! Je suis particulièrement heureux que nous n'ayons pas seulement réussi à ancrer ce sujet dans la conscience du gouvernement fédéral, mais qu'entre-temps des premiers pas encourageants dans ce sens aient également été faits à l’échelle européenne. La chancelière fédérale Madame Merkel a déclaré le sujet des matières premières comme une question relevant de sa compétence lors du congrès sur les matières premières du BDI qui a eu lieu en mars de cette année. En juin, le gouvernement fédéral a constitué le « Comité interministériel sur la politique des matières premières » qui, entre-temps, a commencé son travail. Les ministères les plus importants y sont représentés pour aborder et résoudre de manière coordonnée, en tant qu’interlocuteurs de l’industrie, les problèmes concrets de l’approvisionnement en matières premières. Dans le cadre de la présidence allemande du Conseil européen , le Conseil a demandé à la Commission européenne de développer une approche politique cohérente concernant l’approvisionnement en matières premières de l’industrie en tenant compte de tous les secteurs concernés de la politique. Le vice-président Verheugen s’est exprimé à cet égard en juin : „L’industrie européenne a besoin d’un approvisionnement fiable en matières premières et de prix stables pour pouvoir soutenir la concurrence. Nous sommes résolus à améliorer les conditions pour couvrir les besoins en matières premières, que ce soit en Europe même ou en créant des conditions concurrentielles égales lors de l’achat de matières premières provenant de pays tiers. La situation actuelle requiert un concept intégré Seite 6 von 8 en regroupant les démarches politiques respectives et les instruments communautaires en vue d’assurer la disponibilité ainsi que la durabilité lors de l’extraction et l’utilisation des matières premières fondamentales. » Je suis très heureux de cet engagement. Monsieur Falkenberg, le Directeur général adjoint de la Direction générale du commerce, a porté un grand intérêt à cette idée d’établir, également à l’échelle européenne, un « Comité interministériel sur la politique des matières premières ». Monsieur Carvalho nous dira peut-être ensuite si et comment cela devrait être mis en application concrètement au sein de la Commission européenne. Que faire concrètement ? Laissez–moi vous citer deux exemples: 1. Environnement et politique énergétique Le pourcentage de matières recyclées en Allemagne se situe autour de 42 % dans l’industrie sidérurgique et la production de zinc, autour de 53 % pour la production de cuivre et atteint même 58 % pour la production de plomb. Comme vous le savez bien, les métaux dans les matières recycléssont transformés en produits de haute valeur sans perte de qualité. En outre, le recyclage est extrêmement efficace par rapport à la consommation d’énergie. L’Europe dispose d’installations modernes de recyclage qui servent mondialement de modèles et qui correspondent aux exigences environnementales les plus élevées. Voici le problème. Malheureusement, les matières secondaires nécessaires à cela ne sont souvent pas disponibles en quantité suffisante. Par conséquent, le cycle de recyclage existant en Europe est souvent interrompu, les matières secondaires finissent par exemple en Chine, en Inde ou en Russie. Là, elles sont transformées en partie dans des conditions catastrophiques pour l'environnement, la santé et la protection du travail et, à la fin, elles ne retournent plus dans le cycle. Ce faisant, nous détruisons un cycle qui fonctionne! Nous sommes confrontés à plusieurs dégâts : les entreprises investissent des centaines de millions en faveur d’une production écologique, efficace au niveau de l'énergie et des matériaux, pour constater ensuite que les matières premières dont nous avons un besoin urgent disparaissent vers des pays lointains. C’est absurde, autant sur le plan économique que sur le plan écologique! Le développement durable fonctionne différemment. Seite 7 von 8 2. Politique commerciale Les démarches qui faussent le commerce dans le secteur des matières premières peuvent avoir des conséquences graves sur la compétitivité d’un pays. Les contre-mesures sont difficiles. Mais cela ne peut et ne doit pas signifier que nous nous résignons. Au niveau multilatéral, il convient de supprimer les lacunes juridiques, d’améliorer les règles existantes et de sanctionner des pratiques illégales par rapport à l’OMC. Mais les processus de l’OMC sont longs. C’est ainsi que tous les Etats membres et la Commission européenne doivent entreprendre le maximum afin de faire valoir nos intérêts relatifs aux matières premières lors des négociations bilatérales. Je suis convaincu que, si nous avions mené plus tôt des négociations bilatérales, également du point de vue des matières premières, il n’y aurait pas eu ce grand nombre d’exceptions à la règle relatives aux matières premières lors des négociations sinoeuropéennes concernant l’adhésion de la Chine à l’OMC ! Aujourd’hui, c’est un fait qui risque malheureusement de perdurer. Un autre exemple négatif du point de vue du secteur métallurgique a été tiré des négociations sur l’adhésion de l’Ukraine à l’OMC. A l’origine, il y a eu une interdiction d’exportations pour les ferrailles. Comme une telle interdiction est incompatible avec les règles de l’OMC, cette interdiction a d’abord pu être transformée en droits de douane sur les exportations à hauteur de 50 %, un taux qui devrait se réduire les prochaines années pour atteindre un seuil de 15% à long terme. Mais ce résultat ne signifie aucune amélioration pour les entreprises européennes concernées. Cela résulte par exemple du fait que les usines métallurgiques employant les ferrailles réalisent leurs profits à base de la rémunération issue de la transformation. Celle-ci s’élève à une infime partie du prix des matières premières – environ 10 % -, c’està-dire qu'un droit de douane de 15% a le même effet qu’une interdiction d’exportations car il est supérieur à la rémunération réalisable par la transformation. Mesdames et Messieurs, En vue d’approvisionner nos pays et industries, nous dépendons des matières premières d’autres pays, que nous voulons acheter à des tarifs concurrentiels dans le Seite 8 von 8 cadre d'un commerce mondial libre sans distorsions commerciales. Nous voulons jouer « Fair Play »! Pour cela, il nous faut d’urgence le soutien et l’aide de la politique. Elle est la seule à pouvoir lutter contre les distorsions sur les marchés et assurer les mêmes règles du jeu pour tous. En Allemagne, nous avons tiré la conclusion que le regroupement de nos forces et la formation d’alliances fortes représentent la réponse à donner par un pays comme l’Allemagne. Cela signifie que l’économie et la politique et tous les ressorts respectifs de la politique doivent tirer dans le même sens, quand il s’agit d’assurer notre approvisionnement en matières premières. C’est un très grand plaisir pour moi de voir qu’en France aussi on mène cette discu ssion. Je suis convaincu qu’un échange approfondi d’expériences entre nos deux pays pourrait être intéressant et utile pour les deux côtés – et non seulement au sein de l’industrie métallurgique, mais dans toute la chaîne de création de valeurs industrielles – afin d’engager un dialogue commun avec nos gouvernements et la Commission européenne. Peut-être sera-t-il possible de profiter des initiatives prises dans le secteur des matières premières durant la présidence allemande au Conseil dans le cadre de la présidence française du Conseil en 2008 et de les faire avancer grâce à de nouveaux efforts. Je serais heureux si nous pouvions aujourd'hui faire le premier pas dans ce sens. Konrad Adenauer, le premier chancelier fédéral allemand, a dit : « A notre époque, la roue de l’histoire tourne à vive allure. Si nous voulons que l’influence politique des pays européens perdure, il nous faut agir. Si nous n'arrivons pas à trouver immédiatement la meilleure solution, alors il faut prendre la deuxième ou la troisième. Le principal, c'est d'agir et de se lancer. » Merci beaucoup pour votre attention.