1
LES PERSONNES DIVORCÉES, LE REMARIAGE ET L’ÉGLISE
1. Fragilité du lien conjugal
Le mariage a longtemps été le socle sur lequel reposait traditionnellement l’institution familiale,
dont il assurait la stabilité et de la pérennité. Il est menacé aujourd’hui de toutes parts sous l’effet
conjugué de transformations rapides et profondes. L’allongement de la durée de vie, l’accès des
femmes à l’autonomie financière, la recherche exacerbée de la satisfaction individuelle et le goût de
l’indépendance, entre autres facteurs, ont pour effet de fragiliser l’engagement dans une vie
commune au long cours. Aussi se marie-t-on moins que par le passé et attend-on bien souvent, pour
le faire, d’avoir atteint un âge de plus en plus avancé. Et lorsqu’on se marie, c’est le plus souvent
sans exclure a priori la possibilité d’une séparation.
Ce qui est vrai du mariage civil l’est également du mariage religieux. Lorsque des couples
demandent à l’Eglise de bénir leur union, bien qu’animés par un désir sincère de vivre une union
forte et durable, ils ne se donnent pas toujours les moyens spirituels qui leur permettraient de faire
fructifier les grâces du sacrement de leur mariage. Aussi cèdent-ils assez facilement à la tentation
de se séparer lorsqu’il leur devient difficile, voire impossible à leurs yeux, de continuer à vivre
ensemble. Et s’ils en viennent effectivement à se séparer de leur conjoint, ils sont nombreux à ne
pas renoncer pour autant à contracter une nouvelle union, qu’elle soit officieuse ou officielle.
L’Eglise ne leur offre pas la possibilité de consacrer leur nouvelle union et elle met des conditions
restrictives à leur pratique sacramentelle. Ils peuvent alors se sentir rejetés.
Le présent document a pour objectif de rappeler l’attachement de l’Eglise à l’indissolubilité du
mariage et de préciser les modalités de l’accueil qu’elle a non moins à cœur d’offrir aux fidèles
divorcés, quel que soit leur choix de vie.
2. Ce que dit le Magistère de l’Eglise
Des divorcés
Le code de Droit Canonique de 1983 met en avant l’indissolubilité du mariage. Aussi ne parle-t-il
pas explicitement du divorce qui n’a, effectivement, pas de sens en regard du lien indissoluble
institué par le sacrement de mariage. Il reconnaît toutefois qu’une séparation est parfois nécessaire
« si l’un des conjoints met en grave danger l’âme ou le corps de l’autre ou des enfants, ou encore si,
d’une autre manière, il rend la vie commune trop dure » selon les termes ( canon 1153-1), ou même
encore s’il lui est infidèle (Cf. canon 1152-1).
L’aspect pastoral des choses est abordé dans l’exhortation apostolique Familiaris Consortio
du pape Jean-Paul II, publiée en 1981 à la suite du synode des évêques sur la famille :
Le § 83 évoque la situation des personnes séparées, et des divorcés non remariés : « La solitude et
d’autres difficultés encore sont souvent le lot du conjoint séparé, surtout s’il est innocent. Dans ce cas, il
revient à la communauté ecclésiale de le soutenir plus que jamais, de lui apporter estime, solidarité,
compréhension et aide concrète afin qu’il puisse rester fidèle même dans la situation difficile qui est la
sienne; de l’aider à cultiver le pardon qu’exige l’amour chrétien et à rester disponible à une éventuelle
reprise de la vie conjugale antérieure. »
2
Des divorcés remariés
Dans le § 84 de Familiaris consortio
1
Jean-Paul II préconise une pastorale de sollicitude à l’égard
des divorcés remariés.
Il demande aux pasteurs et à la communauté des fidèles de faire en sorte que ces derniers ne se
sentent pas séparés de l’Eglise et qu’ils participent comme baptisés à sa vie. « On les invitera,
précise Jean-Paul II, à écouter la Parole de Dieu, à assister au Sacrifice de la messe, à persévérer dans
la prière, à apporter leur contribution aux œuvres de charité et aux initiatives de la communauté en
faveur de la justice, à élever leurs enfants dans la foi chrétienne, à cultiver l’esprit de pénitence et à en
accomplir les actes, afin d’implorer, jour après jour, la grâce de Dieu ».
Mais Jean-Paul II rappelle que l’Eglise « ne peut admettre à la communion eucharistique les divorcés
remariés » et que «la réconciliation par le sacrement de pénitence - qui ouvrirait la voie au sacrement
de l’Eucharistie - ne peut être accordée qu’à ceux qui se sont repentis d’avoir violé le signe de l’Alliance
et de la fidélité au Christ, et sont sincèrement disposés à une forme de vie qui ne soit plus en
contradiction avec l’indissolubilité du mariage. »
En France, le Catéchisme pour adultes paru en 1991 reprend cet enseignement (§ 603) et, de façon
plus développée, un document de 1992 émanant de la Commission Familiale de l’épiscopat,
intitulé « Les divorcés remariés dans la communauté chrétienne ».
Contrairement à une opinion assez répandue, les divorcés remariés ne sont pas exclus de l’Église;
ils ne font pas l’objet d’une excommunication. Mais en même temps, leur état de vie dans un
nouveau lien, en opposition avec le lien conjugal précédent qui n’est pas rompu, ne correspond pas
à l’enseignement de l’Ecriture. Sur ce point précis, une telle situation n’est plus pleinement signe de
l’amour indéfectible du Christ pour son Église signifié par le sacrement de mariage.
L’Église, sans tromper les divorcés remariés sur la vérité de leur situation, ne prétend pas juger
l’intime des consciences Dieu voit et juge, cf. Les divorcés remariés dans la communauté
chrétienne, Editions du Centurion, p.50. « La participation aux sacrements est la voie ordinaire de la
sanctification. Toutefois, ceux qui ne peuvent pas recevoir ces sacrements peuvent accueillir les dons
du Christ dans la prière, dans un souci de conversion permanente, dans la communion spirituelle et
par une vie remplie de charité. » (op . cité pp.52-53) « La grâce de Dieu n’est pas reçue seulement dans
les sacrements.» (ibid. p.66) Chaque baptisé est appelé à vivre sa situation et sa vie humaine comme
un chemin de sainteté, non pas isolément, mais en lien avec la communauté ecclésiale.
Le Catéchisme de l’Église Catholique, publié en 1992 reprend cet enseignement aux §§ 1650 et
1651, tout comme la lettre de la Congrégation pour la Doctrine de la foi aux évêques de
l’Église catholique sur l’accès à la communion eucharistique de la part des fidèles divorcés
remariés (septembre 1994).
En 1996, à Sainte Anne d’Auray, Jean-Paul II a réaffirmé : « L’Eglise a aussi le souci de ceux qui
sont séparés, divorcés et divorcés remariés; ils restent membres de la communauté chrétienne. En
effet, “ils peuvent, et même ils doivent, comme baptisés, participer à sa vie” ».
A Milan, le 2 juin 2012, lors de la Rencontre Mondiale des Familles, en réponse à une question qui
lui était posée sur l’échec des mariages, Benoît XVI a déclaré « Le problème des divorces et des
remariages est l’une des grandes souffrances de l’Eglise d’aujourd’hui. Nous n’avons pas de recettes, la
souffrance est grande et nous ne pouvons qu’aider les paroisses et les personnes en promouvant, c’est
très important, la prévention, en approfondissant la période où ils sont amoureux, de façon à conduire
à une « décision mûre », en aidant les couples et en les « accompagnant pendant le mariage » afin que
les familles « ne soient jamais seules mais soient accompagnées sur le chemin de la vie quotidienne ».
3
3. Diverses attitudes des fidèles divorcés aujourd’hui
Certains fidèles divorcés choisissent de ne pas se remarier et de vivre dans le
respect de leur première union.
Ils peuvent s’approcher des sacrements et prendre des responsabilités comme tout chrétien. Dans
les faits, les choses sont moins simples : ils ressentent souvent des blessures profondes, un
sentiment de culpabilité, le regard accusateur des autres et éprouvent le besoin de se reconstruire.
Aussi est-il bon de leur offrir des lieux et des temps de partage en Eglise.
Telle est la vocation du mouvement « Renaissance » qui accueille des femmes divorcées qui ont
besoin d’être soutenues, encouragées et aidées à revivre.
Telle est également la vocation du mouvement « Communion Notre Dame de l’Alliance » qui
rassemble des épouses et des époux chrétiens, séparés ou divorcés, vivant seuls par choix de
fidélité, découvrant la richesse du pardon, la joie d’une reconstruction personnelle et assumant leur
responsabilité de parents.
Certains fidèles se marient après avoir fait reconnaître la nullité de leur
mariage.
Le droit du mariage des chrétiens prévoit l’éventualité de la nullité de ce sacrement. Si un fidèle a
quelque doute quant à la validité de son sacrement de mariage, il est en droit de demander à l’Eglise
d’examiner son engagement. Cela se fait dans une procédure spéciale appelée « cause en
déclaration de nullité de mariage ».
La déclaration de nullité prend en considération une carence grave qui marque le consentement au
jour du mariage et non un échec seulement post-matrimonial. La procédure judiciaire n’a pas pour
but de « juger » les conjoints et de déterminer qui a tort et qui a raison, mais seulement d’examiner
la qualité de leur consentement le jour où il a été échangé.
Parmi les motifs (appelés « chefs ») de nullité, on trouve notamment :
le défaut de discernement concernant les droits et les devoirs essentiels du mariage ; il peut être
dû à une immaturité grave, un manque de liberté interne, des pathologies diverses…
l’incapacité à assumer les obligations essentielles du mariage : pour des raisons de nature
psychique ou physique (ex. impuissance masculine ou féminine),
l’erreur sur l’identité de la personne qu’on épouse ou sur une qualité centrale de la personne
directement recherchée dans le mariage,
le dol ou tromperie commis en vue d’obtenir le consentement et portant sur qualité de nature à
perturber gravement la communauté de vie,
la simulation par laquelle, tout en simulant le consentement, on exclut de fait le mariage, ou un
de ses éléments essentiels (la communauté de vie, le bien du conjoint, l’éducation des enfants), ou
bien encore une des propriétés essentielles (l’unité, l’indissolubilité, la procréation),
la violence ou la crainte : la pression est alors telle sur l’un des contractants qu’il a été « forcé »
au mariage.
A côté des causes en déclaration de nullité, il y a également les causes de dissolution.
Ainsi, peuvent être dissous :
les mariages sacramentels non consommés,
certains mariages qui ne sont pas considérés comme sacramentels.
Comment s’y prendre ?
En parler à un prêtre, un diacre ou une personne compétente qui mettra en contact avec l’Officialité
(le tribunal ecclésiastique) ; celle-ci orientera la personne vers un avocat ecclésiastique qui
assistera dans ses démarches la partie demanderesse.
4
Ceci peut se faire dans le diocèse a été célébré le mariage, dans le diocèse de domicile de la
partie demanderesse ou de la partie citée, dans le diocèse un plus grand nombre de preuves
pourra être recueilli.
La déclaration de nullité devra être prononcée en première instance dans l’année ; elle devra être
confirmée en deuxième instance dans les six mois qui suivent.
Le coût de la procédure se situe entre 500 et 600€, sans qu’un tel coût puisse constituer un obstacle
à sa mise en œuvre.
Attitudes des fidèles qui s’engagent dans une nouvelle union
Cette nouvelle union peut prendre des formes diverses :
celle du mariage civil,
celle du pacs ou du concubinage reconnu,
celle de l’union dite libre.
Ces unions sont vécues par certains sans référence aux exigences de l’Eglise.
D’autres, par contre, peuvent choisir de vivre en frère et sœur et de bénéficier ainsi de toutes les
grâces sacramentelles.
D’autres, enfin, sans aller jusque là, peuvent choisir néanmoins de vivre leur nouvelle union dans la
vérité. Vérité du lien qui les unit à leur nouveau conjoint, en n’acceptant pas de prendre la place du
premier mari ou de la première épouse auprès de leurs enfants. Vérité de leur relation à l’Eglise,
dont ils respectent, souvent après un long temps de révolte à son égard, les exigences
sacramentelles. Ils les acceptent grâce à la conscience qu’ils ont alors d’être aimés de Dieu,
pleinement bénéficiaires des grâces de leur baptême, au même titre que tout autre disciple du
Christ. S’ils participent aux célébrations eucharistiques, c’est en y vivant la communion de désir, en
se présentant à la table eucharistique les bras croisés et en demandant la bénédiction du célébrant -
comme peuvent le faire les fidèles qui n’ont pas encore fait leur première communion. Il convient
de leur faire découvrir que la communion eucharistique n’est pas la seule forme de communion,
qu’il y aussi la communion à la Parole de Dieu, l’adhésion à la doctrine de l’Eglise et la participation
à la vie de l’Eglise, corps du Christ.
Il existe plusieurs mouvements qui accueillent et entourent les fidèles soucieux de mener
chrétiennement leur nouvelle vie en Eglise. Voici les principaux : « Miséricorde et Vérité »,
« Reliance » et « Cana Samarie ».
Des fidèles attendent de l’Eglise qu’elle assouplisse sa discipline
Tout en étant fidèles dans leur attachement au Christ et à son Eglise, un bon nombre de couples
recomposés après l’échec d’un premier mariage, mais aussi de fidèles qui partagent leur souhait,
attendent de l’Eglise qu’elle assouplisse sa discipline à l’égard des personnes divorcées qui font le
choix de vivre une nouvelle union.
Un texte allant dans ce sens a été voté en 2009 par le Synode diocésain pour suggérer à l’Église
universelle de se prononcer sur l’accès des personnes divorcées et remariées à l’Eucharistie et aux
sacrements.
Voici le texte : « Conscients des dégâts que causent, dans notre société, la fragilité des couples,
considérant comme juste l’insistance de l’Église à tout mettre en œuvre pour défendre l’importance du
mariage, et accompagner les couples, nous pensons qu’il reste beaucoup à inventer, sous la conduite de
l’Esprit, pour rejoindre les couples divorcés et remariés, et leur dire au-delà de leur échec, leur dignité
d’homme et de femme et l’Amour de Dieu. Il demeure que nombre de personnes vivant ces situations, se
sentent à tout jamais jugées et condamnées, parce qu’elles ne peuvent s’approcher de l’Eucharistie et
des autres sacrements. Conscients de leurs faiblesses, elles demeurent dans l’incompréhension de la
rigueur de l’Église. Le synode pense que l’Église a à offrir une démarche positive possible à ces
personnes, soit après une période probatoire suffisamment longue, soit après un rituel de miséricorde
adapté. L’Église ne pourrait-elle pas laisser les divorcés remariés s’approcher à nouveau des
5
sacrements, à commencer par l’Eucharistie ? Le synode a bien conscience qu’il peut mettre en œuvre
des démarches pastorales en ce sens, mais que cela ne suffit pas et dépasse de loin sa compétence.
A
ce titre, il demande à son Évêque, de transmettre ce souhait aux instances de l’Église universelle. »
Mgr Maupu, Évêque de Verdun, a accepté de répondre favorablement à cette demande de
l’assemblée synodale.
Sans pouvoir aller au-delà dans l’immédiat, nous proposons d’offrir aux couples qui se remarient et
qui le désirent de vivre avec eux un temps de prière.
4. Conditions pour une prière à l’occasion d’un « remariage »
Dans un souci pastoral et évangélique la pratique, à l’occasion d’un remariage, de « temps de
prières » - auxquels on veillera à ne pas donner le nom de « célébrations » - mérite d’être
encouragée.
Voici un ensemble de conditions à respecter pour qu’un tel temps de prière puisse avoir lieu :
Que soit précisé, avec toute la délicatesse voulue, qu’il ne s’agit pas de la célébration du sacrement
de mariage.
Que ce temps de prière soit prépaavec les deux « futurs » et le célébrant, voire même avec une
équipe constituée à cette fin.
Que, si faire-part il y a, la formulation ne prête pas à confusion : on parlera de « temps de prière et
non de « célébration ».
Que le temps de prière soit dissocié du mariage civil et de la fête familiale. Il pourra avoir lieu soit
quelques jours avant le mariage civil, soit bien après.
Qu’il ne se fasse pas de préférence à l’église. S’il se fait à l’église, on évitera tout symbolisme
ambigu : pas de sonnerie de cloches, pas de cortège, pas de robe de mariée, pas de félicitations à
l’église.
Qu’au cours de ce temps de prière, il n’y ait pas d’échange de consentement ni de bénédiction
d’alliances, ni d’échange de tout autre objet symbolique, ni de signatures de registres. On n’y
célébrera aucun autre sacrement en même temps (baptême par exemple).
Dans Familiaris Consortio, au § 84, le pape Jean-Paul II explique pourquoi il exclut la célébration
d’une nouvelle union.
5. Proposition de temps de prière
Monition d’accueil
N et N, avec vous, nous nous tournons vers Dieu. Après une première union rompue (pour l’un ou
l’autre ou des deux), vous vous êtes rencontrés et vous avez décidé de vous marier civilement ; vous
avez tenu à marquer cet événement, qui n’est pas le sacrement de mariage, par un geste religieux.
En effet, de par votre baptême, vous êtes appelés à participer à la vie de l’Eglise en toute confiance
et humilité. Nous vous accompagnons dans cette démarche pour vous confier à Dieu. Recueillons-
nous maintenant dans le silence du cœur pour invoquer le Père de miséricorde.
ou bien
N et N, dans quelques jours, vous vous marierez civilement devant les responsables de la cité.
Aujourd’hui, nous sommes rassemblés dans la foi de l’Eglise pour prier avec vous Dieu, le Père de
toute miséricorde, son fils unique Jésus-Christ et l’Esprit d’amour et de vérité.
1 / 7 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !