Bérédougou
KON
E
. «Identification et exploitation d’obstacles
». RADISMA, Num
éro 12 (2016),
http://www.radisma.info/document.php?id=1551. ISSN 1990-3219
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Identification et exploitation d’obstacles pour faire reconstruire et apprendre le
concept d’écosystème chez les élèves professeurs.
Auteur :
Bérédougou KONE, Assistant, DER Biologie
École Normale Supérieure (ENSUP). BP : 241 Bamako-Mali
Email : [email protected] _Tel : (+223) 79 37 22 06
Résumé
Pour tout savoir enseigné, il se présente toujours un certain nombre d’obstacles à
l’apprentissage pour l’apprenant. Il peut s’agir le plus souvent d’obstacles
épistémologiques ou d’obstacles didactiques. La conception et l’élaboration des
activités d’enseignement sont des étapes cruciales de toute activité d’enseignement.
Cependant, pour parvenir à un développement de stratégies efficaces d’enseignement,
il s’avère nécessaire de procéder d’abord à un repérage et une analyse des obstacles à
l’apprentissage qui peuvent être générés par les notions et concepts visés par cet
enseignement.
Le concept d’écosystème est un concept nodal en écologie, mais l’appropriation
de l’essence même de ce concept semble être difficile par les futurs professeurs du fait
de la nature constante d’un obstacle majeure perceptible dans leur pensée. La
conception la plus générale de l’écosystème rencontrée chez les élèves professeurs
(93%) est le type « biotope + biocénose ». Cette conception est sous-tendue par un
obstacle majeure : l’absence d’interactions entres les composantes d’un écosystème.
L’investigation que nous avons menée auprès de ces futurs professeurs a abouti à
la construction d’une grille avec les notions relatives au concept d’écosystème. La
fréquence de citation de ces notions nous a permis de nous rendre compte
effectivement que l’obstacle est constant et se manifeste chez 73% des élèves
professeurs.
Pour espérer garantir le reniement de cet obstacle, il était nécessaire que les
élèves professeurs en soient tout d’abord conscients, puis arrivent à le verbaliser à la
suite de confrontations de leur conception et les connaissances scientifiques avérées ou
avec les conceptions d’autres élèves professeurs dans des débats de groupe. L’ingénierie
qui a abouti à la construction d’une grille de mots en rapport avec le concept
écosystème, a donc permis de faire cet exercice.
Mots clés : conceptions, écosystème, élèves, grille, obstacles.
Introduction et objectif
Le rôle de l’enseignant est de faire apprendre. Cela semble facile à dire, mais
beaucoup plus difficile à mettre en œuvre. C’est en soumettant les élèves professeurs à
une évaluation que nous nous sommes rendu compte combien il était difficile de faire
apprendre ces élèves alors que leurs connaissances en écologie sont limitées par des
obstacles qu’ils ont accumuler au cours de leur cursus scolaire. Nous avons dès lors
compris que faire apprendre n’est pas synonyme de dire et de montrer. Pour faire
apprendre, il faut être en mesure de rer des situations incertaines, cette gestion doit
être basée sur la compréhension de cette situation et des obstacles qui s’y trouvent.
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L’objectif de notre travail est de créer et mettre en œuvre en classe une stratégie
didactique pour franchir des obstacles identifiés chez les élèves. Il s’agit d’abord, pour
nous, d’identifier les obstacles auxquels est confrontée la pensée des élèves professeurs
dans l’appropriation du concept d’écosystème. Ces obstacles serviront d’indicateurs des
processus intellectuels en jeu que nous pourrons exploiter en classe pour améliorer la
maîtrise des socles de connaissances des élèves professeurs. Pour mettre en évidence
ces obstacles, nous avons utilisé :
- la méthode de la libre d’association d’idées,
- la méthode de confrontation des conceptions des élèves professeurs à autres
idées ou conceptions afin de les amener à une véritable réflexion sur leurs
propres conceptions et les verbaliser.
Cette marche que nous initions, à travers ce travail, va permettre d’éclairer un
certain nombre d’obstacles à la construction par les élèves professeurs du concept
écosystème et son appropriation. Elle permet en même temps d’opérer un travail
intellectuel sur ces obstacles afin qu’ils puissent être dépassés.
Contexte
Cet article que nous présentons ici est un prélude à un projet de recherche en
thèse de didactique des sciences et aussi le prolongement de notre travail de mémoire
de master (Koné, 2013). Cette recherche s’inscrit dans le cadre de l’ingénierie
didactique, pour créer des outils et/ ou des stratégies didactiques, pour franchir des
obstacles d’apprentissage. Ce travail se propose d’aborder la question d’obstacles liés à
l’appropriation du concept écosystème par les élèves professeurs.
L’écologie est l’une des unités d’enseignement (UE) dans la filière des professeurs
des Sciences de la Vie et de la Terre (SVT) de l’École Normale Supérieure (ENSUP) de
Bamako. Cette grande école reçoit des étudiants détenteurs d’une licence universitaire.
Le concept central de l’écologie est l’écosystème. Ce concept est enseigné au lycée,
instruit par le programme de SVT en 10
ème
commune (10
ème
CM). Le choix de ce concept
est motivé par deux raisons majeures :
- l’écosystème est l’un des deux objets majeurs d’étude de l’écologie : « l’écologie
est la science des écosystèmes »,
- la notion d’interactions entre éléments de l’écosystème semble disparaître dans
la pensée des élèves professeurs, ce qui génère un obstacle à l’appropriation du
concept d’écosystème,
Il s’agit de faire en sorte que les futurs professeurs se rendent compte qu’ils ont des
obstacles pour s’approprier le concept écosystème et les amener à les renier. La
démarche aboutira à la création d’un outil didactique, la grille des mots associés au
concept écosystème. Cela permettra de rompre avec l’idée d’un enchaînement linéaire
des notions pour aborder ledit concept.
Problématique et cadre théorique
Dans nos pratiques habituelles d’enseignement au cours de la formation initiale
des futurs professeurs, le statut de l’obstacle n’est pas suffisamment valorisé.
L’obstacle se réduit à un manque de connaissances. L’objectif de notre recherche est
d’inverser cette approche ; changer le statut de l’obstacle pour qu’il devienne un moyen
d’apprendre. Il s’agira de mettre en activité les élèves professeurs en passant par une
pratique de recherche individuelle ou de groupe.
Nous supposons qu’après trois enseignements à des niveaux différents de leur
cursus (lycée, université et ENSUP) que des obstacles sont constants chez les élèves
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professeurs par rapport à l’appropriation des savoirs sur le concept d’écosystème, en
particulier l’idée qu’il n’y a pas d’interactions entres les différentes composantes d’un
écosystème. Les notions de système et d’interactions ne sont donc pas prégnantes
1
chez
les futurs professeurs. Nous pensons aussi que les trois phénomènes tels que la
production, la consommation et la décomposition sont faiblement prégnants dans la
pensée des élèves professeurs. Ces pensées ne peuvent évoluer que si l’élève est
vraiment conscient de l’existence d’obstacles. Dans ce cas comment faire alors en sorte
que l’élève puisse être conscient qu’il est buté à un obstacle ? Ou tout simplement
quelle méthodologie mettre en œuvre pour réunir les conditions afin que l’élève, le
futur professeur puisse s’investir, mobiliser ses connaissances, se rendre compte de
l’insuffisance de ces connaissances ou qu’il soit conscient de ses obstacles ? Si l’élève
professeur est soumis à des activités l’amenant à mobiliser ses propres savoirs, à faire
une analyse critique en les confrontant à ceux des autres dans un débat de groupe ou en
les confrontant à des savoirs scientifiques avérés, il peut être conscient de ses
obstacles, de les renier.
La présente recherche a pris comme référent théorique la notion d’obstacles.
Suite à une réflexion sur la formation de l’esprit scientifique, Gaston Bachelard introduit
en 1938 la notion d’obstacles épistémologiques. « Les didacticiens des disciplines se sont
emparés de cette notion pour travailler sur les questions d’enseignement et
d’apprentissage » (Cohen-Azaria et al, 2013, p.147). A la notion d’obstacle d’autres
qualificatifs ont été ajoutés : psychologiques, affectifs, conceptuels ou encore
didactiques. « Les obstacles peuvent être définis comme des structures et des modes de
pensée qui font résistance dans l’enseignement et dans l’apprentissage. » (Ibid. P. 148).
C’est en termes d'obstacles qu'il faut penser l'apprentissage, selon Bachelard. «...on
connaît contre une connaissance antérieure, en détruisant les connaissances mal faites,
en surmontant ce qui dans l'esprit même, fait obstacle... »
2
. Selon une telle approche,
l’obstacle est considéré comme une fonction positive et centrale dans le processus
d'apprentissage et de compréhension de l'apprenant. La notion d’obstacle didactique a
été introduite par Brousseau (1998), selon qui, si les choix pédagogiques de l’enseignant
ou du système éducatif sont erronés, alors ils vont fonctionner comme obstacles à
l’apprentissage des nouvelles connaissances et induisent l’élève en erreur. Les
recherches en didactique sur la notion d’obstacles s’appuient sur celles portant sur les
conceptions des élèves (Astolfi, 1992 ; Astolfi & Peterfalvi, 1997 ; Giordan, 1996 ;
Giordan & De Vecchi, 2000, 2002). Les didacticiens proposent de rechercher les
obstacles pour comprendre certaines formes de raisonnement chez l’apprenant, car ce
sont des objets incontournables dans l’enseignement.
Martinand (1986) a introduit la notion d’objectif-obstacle, montrant la nécessité de
choisir parmi des obstacles à l’apprentissage, ceux qui paraissent pédagogiquement
intéressants qui peuvent faire l’objet de dépassement. L’obstacle devient donc un
objectif d’enseignement. Cette vision est partagée par Astolfi (1992) ; Astolfi &
Peterfalvi (1993, 1997).
Les obstacle peuvent avoir plusieurs origines : ontogénique, didactique, épistémologique
(Brousseau ,1998). Certains auteurs ont identifié d’autres origines en plus des trois
citées : le langage, les manuels scolaires et les livres, la simplification du savoir pour
des fins d’enseignement, le style d’apprentissage de l’apprenant, etc. (Madrane et al,
2007).
1
Prégnant : qui prédomine, qui s'impose à l'esprit, qui est particulièrement expressif par rapport au reste.
2
Bernard Dantier (2004). Textes de méthodologie en sciences sociales. Extrait de : Gaston Bachelard, La formation de l’esprit
scientifique. Paris : Vrin, 1999, chapitre 1
er
. http://dx.doi.org/doi:10.1522/cla.bag.obs
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Au sens écologique du terme, l’écosystème est un réseau d’interactions, qui
s’établissent entre diverses espèces, entre ces espèces et divers éléments du biotope, et
les interactions indirectes entre espèces passant par une modification du biotope. Le
terme « système » peut être symbolisé par de document 1, ci-dessous. Il s’agit d’un
ensemble d’éléments interactifs dans lequel les lettres en majuscules représentent des
compartiments ou parties matérielles identifiées ; les flèches représentent des
interactions directes ou indirectes, pouvant être soit des transferts de matière et/ou
d’énergie, soit des déterminations purement causales, comme des transferts
d’information.
Docoment 1 : Organisation d’un système d’interactions (Réf. Frontier, Viale, 2008 p.6)
Concernant l’information entre deux compartiments, l’action peut être soit à sens
unique (causalité classique), soit à double sens (action réciproque, causalité circulaire).
On peut également faire figurer l’action d’un élément sur lui-même (auto-contrôle,
auto-assemblage). Le sens que nous voulons donner au concept d’écosystème, et que
nous estimons, qui peut être aisément compris, est le système défini par Frontier, Viale
et al., (2008). Ce système a les propriétés suivantes :
- un ensemble coordonné, issu d’un développement historique, reliant par des
interactions réciproques les différentes composantes, vivantes et physico-chimiques ;
- un ensemble dont émergent des propriétés globales, conséquence d’une organisation
de ces interactions entre elles ;
- un ensemble insécable, en ce sens qu’en dissocier les pièces, le dénature.
Selon Frontier et al. (2008), tout système est doté d’une organisation
hiérarchique, base d’une certaine régularité dans les sous-systèmes. Cela permet au
système de se maintenir, de persister. Ce qui conforte l’idée qu’un écosystème n’est
jamais figé, au contraire il est toujours en mouvement et en évolution. Celle-ci est la
conséquence de sa propre dynamique et des perturbations qu’il subit. Ces auteurs
donnent un exemple qui convient parfaitement à ces conceptions : « le milieu physico-
chimique correspond dans sa plus grande généralité aux enveloppes externes des
planètes, de l’atmosphère aux grands fonds océaniques et aux roches calcaires
profondes, enveloppes dont les compositions, configurations et l’évolutions seraient
nettement différentes sur une planète dépourvue de vie » (Frontier et al., 2008, p.529).
Méthodologie et recueil de données
La méthodologie utilisée est fortement inspirée du travail de Gerhard Schaeter
dans le cadre de l’exploration d’un champ conceptuel, et qu’Alstolfi et al. (1997) ont
adapté pour les concepts de respiration, et d’évolution. Nous avons adapté cette
méthodologie à notre concept choisi (écosystème). Elle nous permet de nous faire une
idée des connaissances acquises par les élèves professeurs, des obstacles persistants sur
le concept. Rappelons qu’ils ont pris des cours sur ce concept à plusieurs reprises
pendant leur cursus scalaire. Le travail se déroule en séquences, avec une alternance de
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travaux de groupe de dix (10) élèves professeurs et une présentation des résultats de
chaque groupe pour un débat de classe.
Dans ces différentes séquences, nous amenons chaque élève à réfléchir sur ses
conceptions, à les verbaliser, à les confronter à celles des autres ou à d’autres
connaissances. La méthodologie consiste à faire une analyse de la matière (le concept
d’écosystème) en faisant référence aux différents champs disciplinaires qui peuvent
aider à cette analyse ou la reconstruction du concept. Nous adhérons à l’idée de Astolfi
et al, selon laquelle, cette méthodologie « consiste à faire éclater une vision figée,
linéaire des concepts telle qu’elle est trop souvent perçue à travers les activités
scolaires » (Astolfi et al, 1997, p.64). Le travail se déroule suivant quatre (4) phases
avec des consignes précises.
Phase 1 : la récolte des mots
Consigne : écrivez dans l'ordre qui vous vient à l'esprit, les 10 premiers mots qu'évoque
pour vous le concept d'écosystème.
Phase 2 : le classement des mots
[Chaque groupe dispose de la totalité des mots recueillis et utilise le document outil :
grille de classement des mots (Document 2)]
Consigne : regroupez les mots recueillis par champs disciplinaires avec la distinction de
différents niveaux marqués par les cercles.
Document 2 : document outil
Légende : PPN : production primaire nette ; PPB : production primaire brute ; PS : production secondaire
; R. intra : relations intra spécifiques ; R. inter : relations interspécifiques ; R. trophiques : relations
trophiques ; Cycles BGC : cycles biogéochimiques ; E. vivants : êtres vivants.
Phase 3 : la confrontation et discussion
Consigne : A partir de la confrontation des trois grilles obtenues précédemment,
construire une seule grille de synthèse qui sera présentée au tableau et analysée.
Phase 4 : l’approfondissement du concept
Consigne : classez par ordre d’importance décroissante dix (10) mots représentant au
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