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FICHE-ACTION N°2 : VISER L’EXCELLENCE EN AGRO-ÉCOLOGIE TROPICALE
l’homme et l’animal et ont un impact
direct sur la santé humaine. D’autres
pathologies concernent exclusivement
les troupeaux d’animaux de rente
altérant à des degrés divers les
fonctions de production de systèmes
agricoles insulaires complexes ou
de systèmes d’activité des ménages.
Leur impact est alors essentiellement
social et économique, mais peut
aussi être environnemental. Les
enjeux liés à ces maladies émergentes
sont considérables. Pour les filières
végétales et notamment l’ensemble
de la filière fruits et légumes à la
Réunion les pertes de production
représentent près de 5 millions d’euros
par an soit 4% du chiffre d’affaire des
agriculteurs. L’introduction d’espèces
envahissantes et de bioagresseurs
est un des effets les plus dramatiques
des changements globaux dans les
îles, menaçant l’équilibre fragile
des écosystèmes naturels et cultivés.
La Réunion est particulièrement
concernée puisqu’elle importe
massivement des végétaux et produits
végétaux. Le taux de couverture du
marché réunionnais des producteurs
locaux est de 70% de produits frais et
de 5% sur le transformé.
Cependant, avec plus de 600
maladies et ravageurs agricoles (pour
beaucoup d’introduction récente), la
sécurité alimentaire de La Réunion
et la compétitivité de son agriculture
sont régulièrement menacées. Le
constat est le même pour l’ensemble
des pays de la COI. A La Réunion,
plus de 850t de pesticides sont
toujours importées et l’objectif de
réduction de leur usage de 50% à
l’horizon 2018 semble difficilement
atteignable sans innovations
agroécologiques majeures et surtout
leur transfert rapide et généralisé aux
agriculteurs (objectifs des Réseaux
d’Innovation et de Transfert Agricole
(RITA)). De plus, concernant les fruits
et légumes, La Réunion se trouve
face à un défi majeur pour maintenir
la production endogène et l’auto-
approvisionnement ad minima à son
niveau actuel. Pour répondre à ce défi,
une augmentation de la production
de 40 % (passage de 100 000 T à
140 000 T) sur les 10 prochaines
années est impérative pour garantir
en partie la sécurité alimentaire de
l’île. Les PAPAM (plantes aromatiques
parfumées et médicinales) comme
les autres plantes à haute valeur
ajoutée (café, cacao, poivre) ont un
potentiel qu’il convient de développer
pour conquérir les marchés de niche
puisqu’elles n’occupent que 1% de la
surface cultivée de l’île. La nécessité
de produire plus passe par une
augmentation des rendements, mais
aussi par la réduction des pertes des
productions agricoles qui, au-delà de
La Réunion, préoccupent de plus en
plus la communauté internationale.
La Réunion peut en cela être un
exemple. L’échange des denrées
agro-alimentaires dans l’océan
indien ne représente que 10 % des
produits importés. Il est limité par la
méfiance sur la qualité des produits
frais souvent non conforme aux
exigences sanitaires. L’amélioration
de la qualité des productions agro-
alimentaires de la zone revêt donc
un enjeu fort d’intensification des
échanges régionaux de produits
agroalimentaires. Il faudra concevoir
des systèmes de production agro-
alimentaire plus durables dans
lesquels les qualités des produits et
des modes de production constituent
leur valeur ajoutée.
Le concept de « développement
durable » a d’abord été mobilisé
pour améliorer la production agricole
aux points de vue économique,
environnemental et social. Mais au-
delà de la production proprement
dite, la contribution de l’agriculture à
la durabilité des territoires est un enjeu
majeur pour les acteurs agricoles
et les décideurs publics. La Réunion
doit donc tendre vers une agriculture
écologiquement intensive et œuvrer
au niveau régional pour réduire les
risques sanitaires, assurer sa sécurité
alimentaire et protéger sa biodiversité.
Elle se doit d’évaluer les impacts
positifs et négatifs et les services
écosystémiques de sa production
agricole à l’échelle du territoire par
des démarches agroécologiques et
déboucher sur de nouveaux services
agro-environnementaux des activités
agricoles. La nécessité de produire
mieux passe par une réduction
des impacts environnementaux
des systèmes techniques et par
l’augmentation de l’efficience de
l’utilisation des ressources naturelles.
La stratégie développée a aussi
l’ambition de rendre l’île plus
autonome en énergie et en intrants
agricoles en se basant, notamment,
sur l’abondante production primaire
des agroécosystèmes (550000 T/an
de bagasse, 70000 T/an d’écumes
de jus de canne, 200000 T/an
de vinasses, 1000 T/an de peaux,
pépins et noyaux et 10000 T/an
d’écarts de tri, surproductions et
déclassements issus de la filière
fruit et légumes, 6750 T/an de
carcasses, viscères, graisse et sang).
Le traitement ou la valorisation des
déchets, notamment par le recyclage
agricole de produits résiduaires
organiques d’origine urbaine,
agricole ou industrielle, est un enjeu
majeur dans ce contexte insulaire.
L’efficience globale de l’île doit être
recherchée à travers la réduction des
importations d’engrais et d’énergie :
cette recherche d’efficience sur un
territoire bien délimité peut constituer
une spécialisation de la Réunion pour
un développement économique et
social durable en contexte insulaire.
La finalité est de contribuer à la
réflexion des différents acteurs du
développement concernant trois
préoccupations sociétales majeures :
1 - l’augmentation de la production
et de la valorisation de la
biomasse à des fins alimentaire
(produits végétaux et animaux)
et non alimentaire, en particulier
la production d’énergie à partir
des différentes biomasses afin
d’accompagner l’indépendance
énergétique de la Réunion ;
2 - le recyclage des nutriments
(déchets urbains et agro-
industriels, effluents d’élevage)
visant une forte réduction
des engrais importés gros
consommateurs d’énergie et
source d’émissions de GES, avec
la maîtrise concomitante des flux
de contaminants vers les différents
compartiments de l’écosystème
(eau, plante, sol, atmosphère) ;
l’agroécologie est comprise ici à
travers le bouclage des grands
cycles biogéochimiques ;
3 - l’optimisation de la gestion
intégrée des ressources (biomasse,
foncier, intrants …) pour garantir
la viabilité des différentes activités
à l’œuvre au sein du territoire.
b) Description des actions :
Les actions cherchent à :
# Favoriser l’excellence de la pro-
duction agricole agroécologique
et accompagner l’installation et
la conversion des agriculteurs à
l’agriculture biologique ;
# Favoriser l’excellence en Recherche
et Innovation et à développer les
partenariats internationaux ;
# Structurer les filières de production
agricole agroécologique ;
# Soutenir des centres de compé-
tences et l’établissement d’inter-
connexions intelligentes entre les
agriculteurs, les entreprises, les
centres de recherche et l’enseigne-
ment supérieur
# Mobiliser les acteurs locaux et
régionaux
# Favoriser l’apprentissage mutuel et
l’action conjointe
L’agroécologie étant une approche
intégrée du milieu qui nécessite des
filières professionnelles mobilisées
et innovantes, accompagnées d’une
recherche sur la compréhension des
mécanismes et d’une ingénierie de
nouveaux systèmes, l’action portera
sur des thématiques transversales
telles que :
La préservation de la ressource
tropicale et endémique grâce à :
la collecte et la conservation de
semences, la mise en place d’ar-
boretum et un centre de ressources
biologiques dédiés, la gestion
agroécologique des ravageurs des
cultures et la lutte contre les plantes
invasives ; la surveillance épidémio-
logique animale et végétale pour
la prévention et la lutte contre les
maladies, une stratégie de planta-
tion de matériel végétal sain dans le
cadre de la maîtrise technologique et
opérationnelle de création de variétés
adaptées pour une meilleure valori-
sation des ressources génétiques
végétales ; l’identification des canaux
et risques majeurs d’introduction des
maladies et les facteurs de diffusion
et de persistance de ces maladies ; la
mise au point des outils de diagnos-
tic et de contrôle qui permettent de
confirmer des suspicions et de lutter
de manière plus efficace contre ces
maladies.
La biodiversité comme moteur de
création de richesses grâce à :
la promotion et le développe-
ment de produits de haute qualité
(produits issus de l’agriculture biolo-
gique raisonnée) ; la recherche de
nouvelles filières agroécologiques
de production alimentaire sur terre
comme en milieu aquatique (algues),
la recherche médicale, la valorisation
cosmétique, l’expertise technique en
préservation des milieux naturels,
l’expertise en restauration écolo-
gique, la valorisation et le dévelop-
pement de la biodiversité urbaine/
agro-urbanisme;
L’accompagnement technique des
producteurs réunionnais grâce à :
des recherches en agroforesterie
et agronomie tropicale ; des pro-
grammes de restauration écologique
couplés à la production agricole ; la
valorisation des savoir-faire locaux ;
l’adaptation variétale ; l’établisse-
ment d’un réseau de conservateurs
in-situ de sélections variétales et tra-
ditionnelles à préserver ; des cultures
expérimentales sous couvert végétal,
des recherches sur les engrais verts
en milieu tropical, le développe-
ment d’une apiculture de qualité
(miel spéciaux et produits dérivés)
et des services de pollinisation par
l’abeille et les pollinisateurs vibreurs
indigènes, le contrôle des zoonoses
alimentaires ;