Vulnérabilité de l`écosystème pastoral face au changement

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Publié par la
En collaboration avec le Ministère
de l’Equipement, de l’Aménagement du
Territoire et du Développement Durable
Vulnérabilité de l’écosystème pastoral face au changement
climatique dans le Gouvernorat de Médenine
Publié par Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) GmbH
Siège de la société : Bonn et Eschborn
Bureau de Tunis
B.P. 753, 1080 Tunis-Cédex, Tunisie
T +216 71 967 220
F +216 71 967 227
www.giz.de/tunisie
Email: [email protected]
Responsables
Anselm Duchrow (GIZ)
Helmi Sabara (GIZ)
Auteurs
Azaiez Ouled Belgacem (IRA, Médenine),
Mongi Sghaier (IRA, Médenine),
Mohamed Ouessar (IRA, Médenine)
Mise à jour Septembre 2011
Photo
Helmi Sabara
Conception couverture
i.Grafik
Le contenu de la présente publication relève de la responsabilité de la GIZ.
Mandaté par Ministère fédéral allemand de la Coopération
économique et du Développement (BMZ)
Institution partenaire
Ministère de l’Equipement, de l’Aménagement du
Territoire et du Développement Durable (Tunisie)
Sommaire
1. Introduction
1
2. Description de l’approche méthodologique
2
2.1. Choix et description générale du modèle
2
2.2. Approche méthodologique globale
33
2.4. Simulation
3
2.5. Restitutions des résultats
4
2.2.4. Evaluation économique des biens et des services
5
3. Potentialités pastorales actuelles
5
3.1. Répartition et production des écosystèmes pastoraux
5
3.1.1. Les parcours à base de Rosmarinus officinalis
6
3.1.2. Parcours à base de Stipa tenacissima
7
3.1.3. Parcours à base d'Artemisia herba-alba
7
7
3.1.4. Parcours à base d’Haloxylon schmittianum (Beguel)
8
3.1.5. Parcours à base d'Anthyllis henoniana (Ghizdir)
3.1.6. Parcours à base de Rhanterium suaveolens (Arfej)
8
3.1.7. Parcours à base de gypsophytes
8
3.1.8. Parcours à base d'halophytes
9
3.1.9. Parcours à base de psammophytes
9
3.2. Facteurs influençant l’état des écosystèmes pastoraux
10
3.2.1. Facteurs biophysiques
10
3.2.1.1. Ressources en sol
10
3.2.1.2. Les associations végétales
10
3.2.2. Facteurs socioéconomiques
12
3.2.2.1. Mode d’exploitation des parcours
12
3.2.2.2. Excès de la charge pastorale
12
3.2.3. Facteurs climatiques
12
3.2.3.1. Précipitations
13
3.2.3.2. Température
13
3.2.3.3. Vent
13
3.2.3.4. Variabilité et changement climatique
14
3.2.3.4.1. Pluviométrie
14
3.2.3.4.2. Température
15
4. Evaluation de la vulnérabilité des écosystèmes pastoraux face au changement climatique
aux horizons 2020 et 2050
15
18
4.1. Les formations végétales peu vulnérables au changement climatiques
18
4.1.1. Formation à base d’Haloxylon schmittianum
4.1.2. Formation à base d’halophytes
19
4.2. Les écosystèmes pastoraux moyennement vulnérables au changement climatique
19
4.2.1. Parcours à base de Rhanterium suaveolens
19
4.2.2. Formation à base de psammophytes
20
4.3. Les écosystèmes pastoraux les plus vulnérables au changement climatique
21
4.3.1. Formation à base de Stipa tenacissima
21
4.3.2. Formation à base de Rosmarinus officinalis
21
4.3.3. Formation à base d’Artemisia herba alba
21
4.3.4. Formation à base d’Anthyllis henoniana
22
4.3.5. Formation à base de gypsophytes
22
5. Analyse de la valeur économique des différents biens et services de l’écosystème
23
5.1. Identification et typologie des biens et services rendus par l’écosystème pastoral dans le
gouvernorat de Médenine
23
5.2. Evaluation économique des biens et services de l’écosystème pastoral dans le
gouvernorat de Médenine
5.3. Evaluation économique des biens et services de l’écosystème pastoral dans le
gouvernorat de Médenine
6. Analyse de la pertinence des stratégies, programmes, projets et pratiques d’aménagement et
de gestion actuelle en rapport avec les risques liés au changement climatique
6.1. Analyse de la pertinence des stratégies, programmes, projets et pratiques
d’aménagement et de gestion actuelle en rapport avec les risques liés au changement
climatique
6.1.1. Analyse de la pertinence des stratégies, programmes, projets et pratiques
d’aménagement et de gestion actuelle en rapport avec les risques liés au changement
climatique
6.1.1. 1. Parcours améliorés par plantation d’arbustes fourragers
26
6.1.1.2. Les mises en repos/défens (Gdel)
33
6.1.2. Le Programme de Développement Rural Intégré (PDRI)
34
6.1.3. Le Projet de Gestion des Ressources naturelles (PGRN)
34
6.1.4. Autres mesures accompagnatrices
34
6.1.5. Mesures ponctuelles de gestion de la sécheresse
35
6.1.6. Modalités actuelles d’exploitation et de gestion des parcours
36
6.2.
37
Analyse de la capacité institutionnelle de l’administration face au changement climatique
27
32
32
32
33
37
6.2.1. Cas de l’Office de l’Elevage et des Pâturages (OEP)
6.2.2. Cas de l’Arrondissement des Forêts (AF)
37
7. Orientations stratégiques et mesures d’adaptation pour augmenter la résilience de
l’écosystème face au changement climatique
7.1. Proposition d’orientations stratégiques en vue d’améliorer l’élaboration des stratégies, des
programmes et projets d’aménagement et de gestion des écosystèmes
7.1.1. Sur le plan politique : Création d’une unité spécifique à la stratégie d’adaptation
39
7.1.2. Sur le plan social et institutionnel
40
7.1.3. Sur le plan recherche scientifique
40
7.1.4. Sur le plan technique
40
39
39
7.2. Proposition de mesures d’adaptation concrètes pour augmenter la résilience de
l’écosystème face au changement climatique
7.2.1. Actions de développement
42
7.2.1.2. Plantations d’arbustes fourragers autochtones
45
7.2.1.3. Resemis
45
7.2.1.4. Mesures d’accompagnement
45
7.2.1.5. Mobilité des troupeaux et pâturage différé
45
42
46
7.2.2. Appui institutionnel et modalités de gestion
46
7.2.2.1. Le renforcement des capacités du CRDA de Médenine et la création d’une Unité
spécifique d’adaptation au changement climatique
46
7.2.2.2. Groupements de Développement Agricole (GDA)
7.2.2.3. Les conseils de gestion
7.2.2.4. Modalités pratiques pour l’exécution des différentes composantes de la stratégie
7.2.2. Développement des compétences et formation
7.2.3.1. Formation du personnel technique du CRDA (Unité chargée de la mise en œuvre de la
stratégie)
47
47
48
48
7.2.3.2. Formation des membres et du personnel des GDAs
49
7.2.4. Recherche scientifique
49
8. Conclusion
49
Remerciements : L’équipe chargée de la réalisation de cette étude tiennent à remercier vivement: - le Professeur Houcine Khatteli, DG de l’IRA pour son appui et ses encouragements et pour l’intérêt particulier qui a accordé à cette étude. - Mr Ammar Zerrim, technicien en télédétection et SIG à l’IRA pour sa contribution active dans la modélisation Maxent et la production des différentes cartes ; - les différents services du CRDA de Médenine et la direction régionale de l’OEP à Médenine pour leur appui, leurs commentaires constructifs lors des ateliers d’information et pour toutes les informations qui ont mis à la disposition de l’équipe pour mener à bien ce travail ; - toute l’équipe du projet « Appui à la mise en œuvre de la Convention des Nations Unies sur le Changement Climatique » CCC/GIZ qui a invité les membres de l’équipe à toutes les manifestations et les ateliers de formation et d’information se rapportant à l’adaptation au changement climatique, ainsi que leurs critiques et commentaires constructifs lors des différentes phases de la présente étude. 1. Introduction
Les parcours du gouvernorat de Médenine sont, plus ou moins, marqués par
l’ampleur de l’impact des diverses activités humaines. Il s’agit surtout du
surpâturage et de l’extension des cultures pluviales qui dénudent le sol pendant les
périodes sèches et accélèrent ainsi son érosion. La sécheresse climatique, qui a
marqué le début de ce siècle (1999-2003), a fortement perturbé l’équilibre des
écosystèmes de cette région. Les effets d'une période de sécheresse dépendent
essentiellement de sa durée se mesurant souvent en nombre d’années sèches
consécutives. Les connaissances relatives à la prédictibilité, l'intensité et les effets
de telles successions d’années sèches demeurent insuffisantes.
Les impacts d’une sécheresse climatique sont d’autant plus néfastes que les
écosystèmes sont plus fragilisés par les perturbations anthropiques. Les parcours du
gouvernorat de Médenine sont plus ou moins dégradés sous l'effet de différents
stress et perturbations. Les conséquences de cette dégradation sont assez visibles
non seulement sur le couvert végétal naturel mais aussi sur le milieu physique. Il est
parfois difficile de faire la part des différents facteurs qui sont à l'origine de la
dégradation quantitative et qualitative de la couverture végétale et dont les effets se
conjuguent ce qui amplifie davantage leur pouvoir dégradant. La situation serait elle
plus grave quant à l'avenir de l'élevage extensif, qui marquait l'économie de la région
depuis plusieurs siècles, particulièrement à la lumière du changement climatique où
les prévisions montrent des sécheresses plus fréquentes, une augmentation des
températures plus nettes et une variabilité saisonnière plus importante.
Compte tenu de l’état de dégradation atteint par certains écosystèmes et de la
sécheresse qualifiée comme ‘sans précédent’ qui a sévi en Tunisie méridionale au
cours des années 1999 à 2003, la projection des températures et des précipitations
sur la Tunisie et particulièrement sur le gouvernorat de Médenine, est très alarmante
pour la résilience des écosystèmes tunisiens. Les conséquences iront de la
dégradation des sols à un déclin des produits traditionnels en passant par un
appauvrissement des services écologiques, par exemple la protection des
ressources en eau et des sols.
L’étude et l’analyse de la vulnérabilité des écosystèmes pastoraux du
gouvernorat de Médenine deviennent par conséquent une nécessité en vue de
développer des stratégies d’adaptation au changement climatique. Une telle
adaptation doit se concentrer sur la construction et le renforcement de la résilience
des écosystèmes.
La présente étude s’intègre dans le cadre du projet CCC/GIZ qui a pour
mission d’appuyer la Tunisie pour la mise en œuvre de la Convention-cadre des
Nations unies sur le changement climatique (UNFCCC) aussi bien au niveau national
que régional. La première étape a consisté en l’élaboration de la stratégie nationale
d'adaptation du secteur agricole au CC. Les étapes suivantes appréhendent
carrément la mise en œuvre de la convention via le passage à des niveaux plus
approfondis et plus détaillés par l'élaboration des plans/stratégies régionaux (au
niveau des gouvernorats) permettant le développement des mesures d'adaptation.
Dans le cadre de sa tache d’appui à l’élaboration et à la mise en œuvre des
stratégies sectorielles, la GIZ lance trois études simultanées se rapportant à
l’analyse de la vulnérabilité des écosystèmes face au changement climatique. Si la
première et la deuxième études concernent la subéraie (Nord du pays) et les nappes
alfatières (Tunisie centrale), la présente étude concerne les écosystèmes pastoraux,
un archétype de grande importance dans le sud de la Tunisie et particulièrement
dans le Gouvernorat de Médenine en vue de fournir une base solide d'information
sur les stimulus du climat, impacts climatiques, les vulnérabilités, et les options de
réponse (adaptation) permettant de répondre aux besoins des groupes cibles
1
(décideurs, institutions, ONGs). Elle vise, par conséquent, l’analyse de la
vulnérabilité de ces écosystèmes face au changement climatique et ce en vue
d’identifier les écosystèmes les plus vulnérables et d’identifier des mesures
adéquates d’adaptation permettant de mettre en œuvre des projets concrets de
préservation de la biodiversité et de la productivité des écosystèmes.
L'étude est conduite en une deux phases qui comportent quatre étapes
complémentaires:
- la première étape est consacrée à la capitalisation et l'analyse des données
disponibles se rapportant aux caractéristiques biophysiques et
socioéconomiques, à l’analyse de l’état actuel des écosystèmes pastoraux et
à l’identification et l’évaluation de la valeur économique des différents biens et
services des écosystèmes pastoraux ;
- la deuxième étape est consacrée à la mise en œuvre de l'approche
méthodologique proprement dite. Cette approche est basée sur la
modélisation des niches écologiques moyennant (Modèle Maxent: «Maximum
Entropy Modeling of Species Geographic Distributions») combinée avec des
analyses des perturbations anthropiques moyen SIG. Les différentes couches
(physiques et socioéconomiques) de la carte agricole (CA) du gouvernorat de
Médenine et de l’inventaire national pastoral et forestier et de l’Atlas de
Médenine servent comme outils de cette analyse ;
- la troisième étape consistera en une analyse des stratégies, programmes,
projets et pratiques d’aménagement et de gestion des parcours en rapport
avec les risques liés au changement climatique ;
- une fois les outputs de la modélisation identifiés, la quatrième étape sera
consacrée au développement des propositions des orientations stratégiques
en vue d’améliorer l’élaboration des programmes et projets pour
l’aménagement et la gestion des parcours et identifier des mesures
d’adaptation pour augmenter la résilience de chaque unité pastorale face au
changement climatique.
La réalisation de ces différentes étapes est couronnée par l'organisation des
ateliers de concertation et de restitution/validation des résultats de l'étude avec les
acteurs et partenaires concernés par cet archétype à savoir l’Institut des Régions
Arides, le CRDA de Médenine, l’OEP, l’URAP, des GDA en plus de la GIZ.
2. Description de l’approche méthodologique
2.1.
Choix et description générale du modèle
La méthodologie adoptée fait intervenir l’utilisation des couches thématiques
(climatiques et environnementales) vectorielles et raster fournies par différentes
sources (INFP, Cartes agricoles, www.wordclim.org et www.gisweb.ciat.cgiar.org).
La modélisation est réalisée avec les logiciels ARC-GIS et MAXENT. Le premier
logiciel est nécessaire aussi bien en amont de la modélisation (préparation des
couches et conversion des extensions) qu’en aval pour la conversion (ascii en raster
et vecteur), la classification et la valorisation des résultats. Quant au logiciel
MAXENT (méthode d'entropie maximale pour la modélisation des distributions
géographiques des espèces/écosystèmes), le choix a été dicté par les performations
de ce modèle dans l’évaluation et la simulation de la répartition géographique des
espèces/écosystèmes tout en se basant sur la notion de la niche écologique
(besoins environnementaux de l’existence d’une telle espèce). Ce modèle permet de
produire une carte de répartition de l’espèce/écosystème avec différentes classes de
probabilités. Celles-ci reflètent en d’autres termes les classes de sensibilité de
l’espèce/écosystème face aux variations pouvant toucher les paramètres
2
environnementaux (exigences écologiques de l’espèce). Pour aboutir aux classes de
vulnérabilité, une couche vectorielle socioéconomique représentée par une carte de
répartition des coefficients de surpâturage, a été croisée aux cartes de sensibilité
issues de la modélisation des variables environnementales ou biophysiques.
2.2.
Approche méthodologique globale
Le schéma global de l'approche méthodologique permettant d’évaluer la vulnérabilité
des formations végétales au changement climatique, est présenté dans la figure 1.
Figure 1. Schéma général décrivant les différentes phases de l’approche
méthodologique globale adoptée dans l’étude de la vulnérabilité des écosystèmes
pastoraux du gouvernorat de Médenine au changement climatique.
2.2.1 Les bases de données utilisées
Inventaire national forestier et pastoral: La carte des formations végétales du
gouvernorat de Médenine a été extraite à partir de cet inventaire (MARHP, 2005).
La carte agricole: A partir de la carte agricole du gouvernorat de Médenine (MARH,
2002), nous avons utilisé la couche des sols (profondeur, texture et salinité).
Données bioclimatiques: Des 19 variables bioclimatiques disponibles, le choix a
été fait sur les 8 les plus pertinents pour notre cas d'étude à savoir:
Température
- BIO1: Température moyenne annuelle (°C),
- BIO4: Température saisonnière (Ecart type,
%),
- BIO5: Température maximale du mois le plus
chaud (°C),
- BIO6: Température minimale du mois le plus
froid (°C),
Pluviométrie
- BIO12: Précipitation annuelle (mm)
- BIO13:Précipitation du mois le plus pluvieux
(mm),
- BIO14: Précipitation du mois le plus sec
(mm),
- BIO15: Précipitation saisonnière (Coefficient
de variation, mm)
3
Le climat actuel du gouvernorat de Médenine a été décrit en utilisant les 8
variables climatiques de Bioclim sus-indiquées, tirées des strates du climat mondial
de la base de données WORLDCLIM. Cette base de données a également fourni
des informations sur l’aire altitudinale de la répartition des écosystèmes de la région.
Les données (Format ESRI Grid, 2.5 Arc minute) et l'altitude ont été téléchargées à
partir du site Worldclim http://worldclim.org/current
Les projections climatiques ont été réalisées pour les années 2020 et 2050 à
l’aide de la moyenne des prédictions relatives au modèle de circulation globale
largement utilisé (HADCM3), dans le cadre du scénario A2 d’émissions de CO2 le
plus pessimiste. Les données (format Grid, 2.5 min de résolution) ont été
téléchargées
à
partir
du
site:
http://gisweb.ciat.cgiar.org/GCMPage/download_b2.html
Pour la variable socioéconomique ; le coefficient de surpâturage est défini comme
étant :
S (%) = 1-Ce/Cr (avec Ce : Charge d’équilibre et Cr : Charge animale réelle)
La charge d’équilibre ou capacité de charge a été estimée à partir des
potentialités pastorales actuelles alors que la charge réelle a été calculée à partir des
effectifs des animaux répartis dans les délégations (CRDA Médenine, 2010).
2.2.2. Simulation
La simulation nécessite tout d’abord de préparer les différentes couches suivantes :
- la carte de répartition actuelle de chaque espèce/écosystème et qui sera
convertie en fichier *.csv ;
- les cartes thématiques climatiques (les 8 variables de la situation actuelles et
celles des années 2020 et 2050) et leur conversion du type raster en fichiers
ascii ;
- les cartes biophysiques (profondeur, texture et salinité des sols, altitude) et leur
conversion du type vecteur en fichiers ascii.
Une fois toutes les couches sont prêtes, le modèle est lancé pour effectuer les
corrélations.
2.2.3. Restitutions des résultats
Pour chaque formation, les classes de sensibilité suivantes ont été adoptées:
Probabilité
<0.25
0.25-0.5
0.5-0.75
>0.75
Classe
1
2
3
4
Classe
Peu sensible
Moyennement sensible
Sensible
Très sensible
Les classes de vulnérabilité (non vulnérable, peu vulnérable, vulnérable, très
vulnérable) ont été obtenues après croisement des couches de sensibilité avec la
couche des coefficients de surpâturage renfermant à son tour 3 classes (légèrement
surpâturée, surpâturée et très surpâturée). Il est à signaler que seuls les données
climatiques qui ont été projetées aux horizons de 2020 et 2050. La pression animale
a été supposée comme constante.
4
2.2.4. Evaluation économique des biens et des services
Conformément aux objectifs de l’étude, l’évaluation économique des biens et
services de l’écosystème pastoral est déclinée en trois étapes principales :
i. 1ère étape : identification des biens et services de l’écosystème pastoral :
il s’agit d’analyser et d’identifier de façon qualitative les différents biens
et services de l’écosystème pastoral (listes des services écosystémiques) ;
ii. 2ème étape : évaluation économique de l’écosystème pastoral : il s’agit
d’analyser et d’identifier de façon quantitative les valeurs économiques
des différents services de l’écosystème pastoral et de présenter des
directives pour une meilleure évaluation de la valeur économique totale
de l’écosystème.
iii. 3ème étape : évaluation de la valeur économique perdue des différents
biens et services de l’écosystème pastoral sous l’effet du CC : le travail
consiste à évaluer la valeur économique perdue des différents biens et
services de l’écosystème sous l’effet du CC et ce en se basant sur
l’évaluation de la vulnérabilité de l’écosystème face au CC aux
horizons 2030 et 2050.
L’évaluation économique a été basée sur l’application de l’approche TEEB
« les services rendus par les écosystèmes sont les bienfaits que les gens
retirent des écosystèmes. En voici quelques exemples: denrées alimentaires,
eau douce, bois, régulation du climat, protection contre les risques naturels,
contrôle de l’érosion, ingrédients pharmaceutiques et loisirs » (CE, 2008).
L’approche TEEB (Economics of Ecosystems and Biodiversity) ou Economie
des écosystèmes et de la biodiversité (EEB), a été développée dans le cadre
de l’initiative internationale qui a engagé depuis 20071 suite aux idées
développées dans l’Evaluation des Ecosystèmes pour le Millénaire (EEM).
Afin de procéder à l’évaluation économique des biens et services de
l’écosystème pastoral dans le gouvernorat de Médenine, il a été fait recours à
diverses méthodes qui ont été identifiées en fonction de la disponibilité des
données et de la nature du service en question. Ainsi, les principales
méthodes utilisées sont inhérentes aux prix de marché pour les biens et
services marchands, la méthode de coût de déplacement, la méthode des
dépenses de protection, la méthode basée sur les coûts et la méthode
d’évaluation contingente.
3. Potentialités pastorales actuelles (étape 1)
3.3. Répartition et production des écosystèmes pastoraux
La superficie exacte des écosystèmes pastoraux du gouvernorat de Médenine
varie d’une source à l’autre (IFPN, Carte agricole, Atlas de Médenine, …).
S’agissant d’une étude se rapportant exclusivement aux parcours, il a été convenu
1
" À la suite d’une discussion qui s’est tenue lors de la rencontre des ministres de l’environnement du
G8+5, organisée à Potsdam en mai 2007
5
en commun accord entre les différents partenaires impliqués dans ce secteur
(Laboratoire d’Ecologie Pastorale de l’IRA, les services du CRDA, l’OEP, l’URAP et
les experts de la GIZ), d’adopter les résultats de l’inventaire forestier et pastoral
national (IFPN) réalisé conjointement par la Direction Générale des Forêts (DGF) et
le Centre National de la Télédétection (CNT) qui est d’ailleurs le plus récent (2005,
non encore publié). Cet inventaire n’a concerné qu’une superficie de 407535 ha des
parcours du gouvernorat de Médenine qui couvrent d’après d’autres sources
(MEDD et PNUD, 2006) une superficie totale de 626815 ha. La carte des unités
pastorales du gouvernorat a permis d’identifier neuf (9) grands types de parcours si
on exclut les formations ripicoles qui sont très peu représentées, avec seulement
250 ha (tableau 1). La nomination de chaque type, est dans la plupart des cas,
basée sur l'espèce la plus abondante dans l'unité d'échantillonnage ou sur le groupe
d'espèces caractérisant un milieu édaphique spécifique.
Tableau 1. Superficies (ha) des principaux types de parcours du gouvernorat de
Médenine et variation de leurs productions pastorales en fonction de la pluviométrie.
Parcours à base de:
Haloxylon
schmittianum
Rhantherium
suaveolens
Gypsophytes
Halophytes
Psammophytes
Formations ripicoles
Stipa tenacissima
Rosmarinus
officinalis
Anthyllis henoniana
Artemisia herba alba
Total
Superficie
ha
%
Année normale
UF/ha
Total UF
Année sèche
UF/ha
Total UF
Année humide
UF/ha
Total UF
41242,76
10,12
40
1649710,6
15
618641,477
65
2680779,73
63203,63
31548,13
85976,94
87983,90
247,2
18759,83
15,51
7,74
21,10
21,59
0,06
4,60
70
25
60
45
105
55
4424254,6
789070,07
5158616,9
3959275,8
25953,448
1031790,7
30
10
50
25
60
40
1896109,14
315628,03
4298847,42
2199597,66
14830,542
750393,28
110
40
70
65
150
70
6952400,17
1262512,12
6018386,38
5718953,9
37076,355
1313188,24
2540,18
61644,44
14387,65
407534,7
0,62
15,13
3,53
100
125
45
60
317522,86
2774000
863259,5
20993455
100
20
30
254018,29
1232888,99
431629,74
12012584,5
150
70
90
381027,435
4315111,47
1294889,22
29974325
D’après le tableau 1, les parcours à base de psammophytes (Stipagrostis
pungens et/ou Retama raetam) et d’halphytes sont les plus représentées dans le
gouvernorat de Médenine et couvrent ensemble plus de 43% de la superficie
pastorale. Les parcours à base de Rhanterium suaveolens qui couvraient autrefois,
toute la Jeffara et une partie d’El-Ouara, sont devenus de mois en mois représentés
(seulement 15%) en raison de la pression de l’emprise agricole continue. Les
parcours de montagne représentés essentiellement par El-Gueddim (Stipa
tenacissima) et à moindre degré de Chih (Artemisia herba alba) et Klil (Rosmarinus
officinalis) sont les moins représentés en raison de limite de leur répartition
éco_géographique. Les parcours à base de Beguel (Haloxylon schmittianum) et de
Ghezdir (Anthyllis henoniana) qui marquent la physionomie des grands espaces
pastoraux collectifs du Dhahar et El Ouara, sont moyennement représentés (10 et
15% respectivement).
La production pastorale varie d'un type de parcours à l'autre du simple au double et
ce en fonction de la pluviosité de l'année. Ces parcours fournissent, en année à
pluviométrie moyenne (120 à 140 mm), une production fourragère dépassant 20
millions d'UF (tableau 1).
3.3.1. Les parcours à base de Rosmarinus officinalis
Appelés encore groupements de dégradation de la forêt claire de Juniperus
phoenicea, il s'agit de garrigues, résultant de dégradation suite à des coupes, des
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incendies ou du surpâturage de formations forestières à base de génevrier rouge.
Ces groupements sont cantonnés dans les jbels de Béni Khédache et occupent des
étendues restreintes (2540 ha, soit 0.62 % de la superficie pastorale du
gouvernorat). Avec un taux de recouvrement allant de 25 à 50%, le cortège
floristique de ces parcours est représenté essentiellement par: Rosmarinus
officinalis, Helianthemum hirtum, Stipa tenacissima, Globularia alypum, Thymus
hirtus, Periploca laevigata, Ballota hirsuta, Rhus tripartitum, Pituranthos scoparius,
Ruta chalepensis, Ferula tunetana, Phagnalon rupestre, Genista monocephala. La
contribution globale à l’offre fourragère est de l’ordre de 317522 UF en année
moyenne et de 254018 et 381027 UF en année sèche et humide respectivement.
L'intérêt médicinal et aromatique de la plupart des espèces de ce type de
parcours constitue parfois le plus important service rendu par cet écosystème. En
terme de biodiversité végétale, cet écosystème se caractérise par la présence d'un
certain nombre d'espèces endémiques comme Rosmarinus officinalis var.
troglodytorum et Genista monocephala.
3.3.2. Parcours à base de Stipa tenacissima
Les parcours à base de Stipa tenacissima couvrent environ 18897 ha (près de 5
% de la surface totale pastorale du gouvernorat. Ils se rencontrent dans les reliefs
(montagne) de Béni Khédache. Dans la région des Dahars, ce type de parcours
colonise les montagnes, glacis, plateaux et oueds. Ils sont très faiblement
représentés dans la région de Jeffara-Ouara. Le recouvrement total de la végétation
varie de 22 à 54%. La composition floristique de ce type de parcours est la suivante :
Stipa tenacissima ; Lygeum spartum; Linaria aegyptica; Anthyllis sericea ; Artemisia
herba-alba; Gymnocarps decander ; Reaumuria vermiculata…L’offre fourragère de
ce type de parcours est donc de 1039337 UF en année normale, 755882 et 1322793
UF en année sèche et humide respectivement.
3.3.3. Parcours à base d'Artemisia herba-alba
Ces pâturages couvrent une superficie de l’ordre de 14387 ha, soit seulement
3.5% de la superficie totale des parcours du gouvernorat. Ils se développent dans
les zones à texture fine et colonisent les montagnes, les plateaux, les glacis et
rarement les dépressions. La couverture végétale, peut en fonction de la
pluviométrie de l’année osciller entre 5 et 40 %. Les principales espèces qui
caractérisent ce parcours sont : Artemisia herba-alba, Hamada scoparia, Ajuga iva,
Herniaria fontanesii, Salvia aegyptiaca, Aristida ciliata, Asteriscus pygmaeus. Dans
les situations les plus dégradées, la plupart des faciès, qui le forment, sont dominés
par Hamada scoparia et correspondent à des stades plus ou moins avancés de
dégradation avec un taux de recouvrement qui varie entre 7.2 à 16.9 % (dont 10.3
% la part du Rmeth). L’offre fourragère de ce type de parcours est alors de 863259
UF en année normale, 431629 et 1294889 UF en année sèche et humide
respectivement.
En plus de son rôle fourrager et environnemental, il y a lieu de signaler le rôle
aromatique et médicinal du chih et industriel du Remeth "fabrication du neffa").
3.3.4. Parcours à base de Haloxylon schmittianum (Baguel)
Les parcours à base de Haloxylon schmittianum (Hammada shmittiana) ou
Beguel couvrent environ 41242 ha (plus de 1o % de la surface totale pastorale du
gouvernorat). Ces parcours colonisent essentiellement les plateaux et les glacis et
forment une végétation steppique claire à clairsemée. Dans la région de JeffaraQuara et les Dhahars, Haloxylon schmittianum s'associe à Gymnocarpos decander
et la composition floristique peut être également marquée surtout par Rhantherium
suaveolens et Koeleria pubescens. A El Ouara, le beguel s'associe à Stipa lagascae
et Traganum nudatum découlant du parcours d'Anthyllis henoniana, Helianthemum
kahiricum et Gymnocarpos decander par dégradation. Toutefois, la dominance
semble concerner les milieux les plus xérophytiques à sols sablonneux grossiers
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pauvres en matière organique. La composition du cortège floristique varie beaucoup
d’un endroit à l’autre. S'agissant d'une zone de transition entre l’aride et le saharien,
Hammada schmittiana s’associe avec Gymnocarpos decander, Atractylis
serratuloides et Helianthemum kahiricum. Au niveau des oueds, ce type de parcours
est aussi rencontré en association avec Laegos reatam, Stipagrostis pungens et
Anthyllis sericea. La couverture végétale est généralement faible et varie de 10 à 30
%. La production globale de ce type de parcours est donc de l’ordre de 1649710 UF
en année moyenne, 618641 en année sèche et 2680779 en année humide.
3.3.5. Parcours à base d'Anthyllis henoniana (Ghizdir)
Ces parcours couvrent environ 61644 ha, soit plus de 15% de la superficie
pastorale du gouvernorat. Ils sont couramment considérés comme des parcours
sahariens du fait qu’ils peuplent les sites les plus défavorables du point de vue
hydrique et édaphique avec des sols squelettiques à croûte souvent recouverte d’un
voile de sable. Il s'agit d'un parcours médiocre mais qui peut donner une bonne
production à base d’annuelles après des automnes ou des printemps pluvieux. Ils
sont plus particulièrement rencontrés au niveau d’El Ouara et Dhahar. Le
recouvrement est en général faible et oscille entre 10 et 30%. La valeur pastorale
varie en fonction de la composition floristique des faciès de dégradation et elle
dépend beaucoup de la présence des herbacées pérennes comme Stipa parviflora,
Aristida plumosa, etc (qui contribuent dans certains cas pour près de 70% à la
biomasse totale produite), des ligneux bas à haute valeur pastorale comme
Gymnocarpos decander et Helianthemum kahiricum et des annuelles dans les
milieux couverts d’un voile éolien.
La production globale de ces parcours est d’environ 1232889 UF en année
sèche, 2774000 en année moyenne et 4315111,5 en année humide. Plus de 60%
de l’offre fourragère reste disponible le long de l’année.
3.3.6. Parcours à base de Rhanterium suaveolens (Arfej)
Couvrant une superficie de 63203 ha, ces parcours se développent sur les sols
alluviaux sableux profonds et sur les sables grossiers subéoliens plus ou moins
profonds de la Jeffara (Médenine, Zarzis, Ben Gardane) et du Dhahar. D'ailleurs, la
principale caractéristique de ce type de parcours est l’extrême vulnérabilité des sols
qu’il occupe à l’érosion éolienne. Selon l’état de dégradation, la couverture végétale
est comprise entre 15 et 60%. Sur le plan physionomique, ces parcours qui
constituent un bon pâturage sont dominés par Rantherium suavolens qui couvre
jusqu’à 60% du sol. Lorsqu'il n'est pas dégradé, cet écosystème pastoral présente
les meilleurs indices de biodiversité végétale. Les principales espèces
caractéristiques de ces parcours sont : Rhanterium suaveolens, Artemisia
campestris, Stipa lagascae, Atractylis flava, Salsola brevifolia, Paronychia arabica,
Polygonum equisetiforme, Retama raetam, Stipagrostis pungens, Nolletia
chrysocomoides, Helianthemum lippii, Plantago albicans, Argyrolobium uniflorum,
Echiochilon fruticosum
La production totale de ce type de parcours est de l’ordre de 4424254 UF en
année moyenne, 1896109 et 6952400 UF respectivement en année sèche et
humide.
3.3.7. Parcours à base de gypsophytes
Ces parcours sont généralement à base d'Anarrhinum brevifoluim, Atracylis
serratuloides et Lygeum spartum. Ces parcours qui occupent une superficie de
31410 ha, soit 8% de la superficie totale des écosystèmes pastoraux du gouvernorat.
Ils se développent sur les sols présentant une croûte gypseuse ou un encroûtement
calcarogypseux.
Au niveau de la composition floristique, ce groupement se caractérise par la
dominance d' Atractylis serratuloides, Gymnocarpos decander, Helianthemum
kahiricum, Herniaria fontanesii, Zygophyllum album, Lygeum spartum, Anarrhinum
brevifoluim, Erodium glaucophyllum, Launaea angustifolia, Anabasis oropediorum.
La couverture végétale est généralement faible (10 à 30%). La contribution globale à
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l’offre fourragère est de l’ordre de 785272 UF en année moyenne et de 314109 et
1256436 UF en année sèche et humide respectivement.
3.3.8. Parcours à base d'halophytes
Colonisant les dépressions salées et les sebkhas, les parcours à halophytes
couvrent une importante superficie du gouvernorat (85977 ha, soit 22% de la
superficie pastorale). La composition floristique est généralement dominée par
Nitraria retusa, Salsola sieberi, Zygophyllum album, Suaeda mollis, Lygeum spartum,
Limoniastrum guyonianum, Traganum nudatum et Suaeda fruticosa. Cette végétation
est exploitée comme parcours par les dromadaires. Dans les lieux de forte salinité on
rencontre Salicornia arabica, Arthrocnemum indicum, Halocnemum strobilaceum
Halopeplis Amplexicaulis. Dans la plupart des cas les parcours à base d'halophytes
ont un taux de recouvrement important qui peut dépasser 50 à 60 %. Dans les lieux
où la salure des sols est de moindre degré (bords des sebkhas et dépressions
périodiques), les petits ruminants pâturent également. Les dromadaires peuvent
pâturer dès le début de l’automne jusqu’à la fin de l’hiver. La période de pâturage
des petits ruminants se limite à la période automnale, ce qui réduit l’utilisation de ces
parcours. La contribution globale à l’offre fourragère est de l’ordre de 5158617 UF en
année moyenne et de 4298847 et 6018386 UF en année sèche et humide
respectivement.
3.3.9. Parcours à base de psammophytes
Couvrant près de 87983 ha, soit 22% de la superficie pastorale du gouvernorat,
ce parcours est concentré dans sa majorité dans les lits d’oueds, les dépressions,
sur les accumulations sableuses récentes, mais il n’est pas exclu de les rencontrer
sur des sols à surface battante après la déflation du sable qui s’était accumulé dans
ces sites. Ces parcours sont généralement dominés par Retama raetam et/ou
Stipagrostis pungens avec un taux de recouvrement généralement inférieur à 20%.
La composition floristique est relativement riche et variée lorsque la formation
végétale évolue sur des sols sableux fixés et profonds. Cutandia dichotoma, Lolium
rigidum, Koelerea pubescens et Schismus barbatus sont les principales graminées
annuelles rencontrées, mais elles sont souvent accompagnées par des herbacées
pérennes comme Aristida plumosa et par des ligneuses basses comme
Helianthemum lippii sessiliflorum, Echiochilon fruticosum, Argyrolobium uniflorum,
etc. L’ensemble constitue un pâturage d’hiver et de printemps. L’offre fourragère de
ce type de parcours est donc de 3959275 UF en année normale, 2199597 et
5718954 UF en année sèche et humide respectivement.
3.4. Facteurs influençant l’état des écosystèmes pastoraux
3.4.1. Facteurs biophysiques
3.2.1.1. Ressources en sol
Dominés par les sols d’apport, cette ressource se montre très fragile et vulnérable à
toutes formes de perturbations. Quatre grandes classes peuvent y être
distinguées (MARH, 2006):
Les sols minéraux bruts et les sols peu évolués Il s’agit de sols non évolués
sur matériau minéral érodé ou récemment mis en place. Dans cette catégorie de sol
qui occupent une superficie d’environ 554 057 ha (60,44 %), constitués soit de :
- des lithosols et des régosols qui sont des sols squelettiques peu profonds
occupant essentiellement les zones de Beni Khedache, Sidi Makhlouf, Koutine
etc. S’agissant de roches géologiques affleurantes, généralement à accès difficile,
ces sols ne pourront servir que pour le pâturage ou des impluviums pour les
aménagements de CES.
- des sols d’érosion sur croûte calcaire démantelée qui occupent une superficie
relativement importante du Gouvernorat et sont répartis principalement dans la
zone de Jeffara, Hamada et la partie nord de l’Ouara de Médenine.
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- des sols minéraux bruts d’apport qui d’origine éolienne et se présente soit sous
forme des dunes mobiles et des nebkhas dans la zone de Jeffara et de l’Ouara de
Médenine, soit sous forme de cordons dunaires au niveau des côtes Est de l’île
de Jerba.
- des sols peu évolués d’apport colluvial ou alluvial qui se localisent au niveau des
lits d’oueds, des zones d’épandage et derrière les ouvrages de CES (les Jessour).
Sous cette classe, on peut ajouter les loess de Matmata qui sont des sols limoneux
très profonds de couleur beige et rouge selon le secteur (Mtimet,1994).
- Les sols isohumiques à pédo-climat frais Dans cette classe, qui occupent une
surface de 234 980 ha (25,63 %), on rencontre essentiellement des sols bruns
jeunes (Siérozems). Cette classe de sols, bien représentée dans le Gouvernorat, se
rencontre dans l’île de Jerba, la Jeffara, et une partie de l’Ouara de Médenine.
- Les sols calcimagnésiques : Il s’agit principalement des sols à un seul horizon
(les rendzines) de profondeur faible ( 20 cm) surmontant une croûte ou un
encroûtement calcaire ou gypseux. Ces types de sols, qui s’étendent sur une
superficie de 49.220 ha (5,37%), se rencontrent particulièrement dans le piedmont
de la chaîne de Matmata (versant Est : zone de Béni Khédache et de Médenine) et
parfois associé à des sols bruns jeunes de la Jeffara.
- Les sols halomorphes Cette unité de sols est rencontrée essentiellement au
niveau des sebkhas (El Malah, Bou Jemel, M’habeul etc.) où elle occupe une
superficie de 78 450 ha (8,56 ). La vocation essentielle de cette catégorie de sol est
le pâturage de camelins.
3.2.1.2. Les associations végétales :
Vu la diversité des paysages écologiques entre et au niveau des grandes régions
naturelles caractérisants le gouvernorat de Médénine, nous présentons dans ce qui
suit les principales associations végétales (ou faciès ou groupement écologiques)
par région naturelle.
Au niveau des Monts de Béni Kédache
– Un matorral bas à Rosmarinus officinalis au niveau des hauts sommets des jebels
Matmata. Cette unité est une variante endémique de l’association à Genista
microcephala var. tripolitana et Teucrium alopecurus,
– Une pseudo-steppe à Genista microcephala, Thymus algeriensis et Rosmarinus
officinalis représentée par l’association portant le même nom et dominée par Genista
microcephala var. tripolitana, Thymus algeriensis, Stipa tenacissima, Rosmarinus
officinalis var. troglodytarum,
– Une steppe graminéenne à Stipa tenacissima représentant un stade de transition
entre la garrigue méditerranéenne et la steppe à chamaephytes dans laquelle
subsiste encore un faciès de graminées à Stipa tenacissima en bon état faisant
partie de l’association à Artemisia herba-alba et Hammada scoparia. Elle marque
aussi le passage sensible de l’étage bioclimatique méditerranéen aride supérieur à
celui inférieur signalé notamment par la disparition de Rosmarinus officinalis var.
troglodytarum et Genista microcephala var. tripolitana du paysage.
– Une steppe à Artemisia herba-alba, Hammada scoparia et Helianthemum
kahiricum représentée par le faciès typique de l’association à Artemisia et Hammada
scoparia et résulte de la dégradation de la steppe graminéenne à Stipa tenacissima,
– Une steppe dégradée à Gymnocarpos decander et Atractylis serratuloides
représentée par la sous-association Gymnocarpos decander de l’association à
Artemisia herba-alba et Hammada scoparia.
Au niveau de la Jeffara
Les groupements qui caractérisent les plaines sablo-limoneuses et gypseuses. Il
s’agit de :
– Une steppe à Rhanterium suaveolens représentée par la variante typique de
l’association à Rhanterium suaveolens et Artemisia campestris et qui subit une
10
grande pression agropastorale et est toujours menacée par l’ensablement de ses
terres.
– Une pseudo-steppe dégradée à Calycotome villosa et Astragalus armatus se
localisant au niveau du village d’Arram et s’étendant sur environ 1 200 ha. Elle
constitue un faciès dégradé de l’association steppique à Rhanterium suaveolens et
Artemisia campestris mais qui est dominé par Calycotome villosa rappelant la
garrigue méditerranéenne.
– Une unité dégradée à Astragalus armatus et Lygeum spartum représentée par la
sous-association à Atractylis serratuloides, la sous-association à Lygeum spartum et
le faciès à Astragalus armatus ssp. tragacanthoides. Elle est souvent dégradée,
dominée par des espèces de faible valeur pastorale avec un cortège floristique assez
pauvre.
– Unité post-culturale à Deverra tortuosa et Artemisia campestris représentée par la
sous-association à Retama raetam de l’association à Rhanterium suaveolens et
Artemisia campestris, l’association à Deverra tortuosa et Haplophyllum vermiculare
(Le Houérou, 1959) et sa sousassociation à Atractylis serratuloides, Lygeum spartum
et Retama raetam
(Boukhris et Lossaint, 1972). Elle est composée essentiellement par une strate
herbacée dominée par Deverra tortuosa, Artemisia campestris.
Les groupements qui caractérisent les plaines à encrûtements gypseux, il y a lieu
de signaler :
– Une steppe à Zygophyllum album et Anarrhinum brevifolium représentée par la
variante typique de l’association à Zygophyllum album et Anarrhinum brevifolium (Le
Houérou, 1959). Elle est totalement exploitée en tant que parcours.
– Une unité dégradée à Ononis natrix et Helianthemum lippii var. intricatum
représentée par la sous-association à Ononis natrix ssp. falcata et le faciès à
Lygeum spartum de l’association à Zygophyllum album et Anarrhinum brevifolium
accompagnés par la sous-association à Atractylis serratuloides, Lygeum spartum et
Retama raetam (Boukhris et Lossaint, 1972) de l’association à Deverra tortuosa et
Haplophyllum vermiculare (Le Houérou, 1959). Elle diffère sensiblement de la
précédente par l’existence de quelques centimètres de sable grossier plus ou moins
éolien sur l’encroûtement gypseux.
Au niveau du Dhahar et El-Ouara
Le couvert végétal y est caractérisé par la dominance de deux types de
formations steppiques à savoir les steppes à chaméphytes et les steppes à
graminées (hémicryptophytes). La composition floristique est très diversifiée et est
répartie d’une manière hétérogène. En effet les sols sableux fixes montrent la
dominance de Hammada schmittiana tandis que ceux des milieux sableux dégradés
ou d´origine éolienne sont envahis par Stipagrostis pungens. Les steppes à sols
squelettiques (rencontrées à l’est de la région) sont dominées par Anthyllis sericea et
Gymnocarpos decander. Quant aux dépressions, on y remarque l’abondance de
Retama raetam.
De point de vue phytosociologie, Le Houérou (1959, 1969) a pu identifier les
associations suivantes :
- Association à H. schmittiana, Calligonum comosum et R. raetam ;
- association à Rhanterium suaveolens et Asphodelus refractus ;
- association à C. comosum et Anthyllis sericea ;
- sous association à Stipa lagascae de l’association à A. sericea et Gymnocarpos
decander ;
- sous association à Helianthemum lippii var intricatum de l’association à A. sericea
et G. decander ;
- groupement à Stipagrostis pungens et Scrofularia saharae ;
- groupements à espèces moyennement ou fortement halophiles : Salicornia sp.,
Arthrocnemum indicum, Halocnemum strobilaceum, Halopeplis amplexicaulis ;
11
3.2.2. Facteurs socioéconomiques
Outre leur rôle environnemental, les parcours naturels jouent un rôle primordial dans
l’amélioration de la productivité du cheptel qui, à son tour, permet de satisfaire les
besoins des populations locales en viande, en lait, en cuir et en laine. En plus ils
permettent une augmentation des revenus des populations rurales et une
amélioration de leur niveau de vie. Il en résulte une diminution du taux de chômage,
de pauvreté et de l’exode rural. Il a été démontré que dans les mêmes conditions, le
pastoralisme est 2 à 10 fois plus productif que l'élevage commercial des fermes.
Toutefois la valeur de la production pastorale peut être souvent fortement sous
estimée dans la mesure où un fort pourcentage du commerce passe en-dehors des
circuits officiels. Le développement économique et social d’une région est
subordonné à une gestion tant raisonnée que rationnelle de son environnement
physique, biologique et socio-économique.
3.2.2.1. Mode d’exploitation des parcours
Si les parcours privés sont connus par leurs superficies très réduites et
généralement soumis à un pâturage continu et libre, le schéma général de
l’exploitation des parcours collectifs (Dhahar et El-Ouara) est dicté par différents
facteurs dont principalement la pluviométrie, l’état du couvert végétal, l’accessibilité
et la présence de points d’eau équipés. L’existence des troupeaux sur parcours ne
reflète pas souvent l’abondance des ressources pastorales puisqu’en année sèche
les éleveurs font recours aux complémentations pour entretenir leurs troupeaux.
Compte tenu de la faiblesse généralisée des ressources dans le même parcours, la
transhumance reste possible pour quelques grands troupeaux d’un parcours vers un
autre (de Dhahar vers l’Ouara et vice-versa).
Il faudrait signaler qu’aussi bien pour les parcours privatisés, collectifs soumis ou non
au régime forestier, la gestion des parcours est restée anarchique et n’obéit à
aucune règle épargnant les ressources. Pour les parcours collectifs soumis au
régime forestier, les plans d’aménagement élaborés par les services forestiers n’ont
pu être mis en application que sur une faible portion et ce pour des contraintes
purement sociales. L’augmentation du nombre de petits troupeaux et l’extinction des
formes d’association des petits éleveurs sont des facteurs qui font augmenter la
pression animale sur ces parcours.
3.2.2.2. Excès de la charge pastorale
La dégradation des écosystèmes pastoraux s’est visiblement accélérée au cours des
dernières décennies en raison d’un déséquilibre flagrant entre les besoins
alimentaires du cheptel et les potentialités productives des parcours. Au niveau des
écosystèmes pastoraux du gouvernorat de Médenine, la charge animale varie de
0.77 à 4.49 UO/ha/an. Elle est très excessive et dépasse de loin la capacité de
charge réellement permise par la production de la végétation pastorale qui varie de
0.01 à 0.2 UO/ha/an. Ce déficit engendre une dégradation de la plupart des espaces
pastoraux du gouvernorat puisque ces parcours sont tous surpâturés même si c’est à
des degrés variables.
3.2.3. Facteurs climatiques
Le gouvernorat de Médenine, qui se trouve dans le sud-est du pays, se trouve
ainsi imprégné par le Golfe du Gabès au nord et au nord-est et la présence de la
chaîne montagneuse et du Grand Erg Oriental au sud au sud-ouest: l’été chaud et
sec dure 4 à 5 mois, l'hiver frais et irrégulièrement pluvieux, l’automne et le
printemps y sont très variables.
Exception faite à l’été, qui est une saison stable et calme, le climat de la région est
caractérisée par une extrême irrégularité dont les traits essentiels sont les
suivant (Floret et Pontanier (1982):
- des pluies peu abondantes mais très variables tombant pendant la période froide
et une sécheresse quasi absolue entre mai et septembre,
12
- un régime thermique très contrasté avec des hivers tempérés à doux et des étés
chauds à très chauds,
- une forte évaporation,
- des vents dominants de secteurs O, NO et SO (novembre à avril ; très violents
secs et froids) ; de mai à octobre, les vents du secteur marin (E, NE, SE) ; et
durant la période estivale, se sont les vents secs et chauds du secteur SO
(sirocco) qui prédominent.
Selon Le Houérou (1969) a distingué les variantes climatiques suivantes:
- Climat aride inférieur à hivers doux qui intéresse la totalité de la plaine de la
Jeffara et où la pluviométrie moyenne annuelle varie de 100 à 200 mm,
- Climat aride inférieur à hivers tempéré qui intéresse principalement la chaîne
montagneuse des Matmatas et se caractérisent par des précipitations plus
importantes (150 à 250 mm),
- Climat aride supérieur à hiver doux intéresse une partie de la Jeffara côtière
(Jerba-Zarzis) (200 à 250 mm).
3.2.3.1. Précipitations
C’est le courant méditerranéen du nord-est qui fournit à la région l’essentiel des
précipitations qu’elle reçoit à cause de la large ouverture du golf du Gabès qui
expose la bande littorale et une partie de la zone continentale aux grandes
perturbations régénérées par le vaste plan d’eau peu profond du golfe (Mzabi, 1988).
Toutefois, les perturbations sahariennes du sud-ouest et de l’ouest sont également
responsables de quelques pluies dans la région (Bousnina, 1977).
- Pluviométrie annuelle
Ouessar et al. (2006) ont rapporté ce qui suit:
- la pluviométrie décroît du nord vers le sud et de la côte vers le continent,
- il y a un surcroît de la pluviométrie sur les reliefs des Matmatas dû à l’effet
d’altitude connu par l’effet de Foehn,
- le maximum de la pluviométrie est observé le long du littoral et sur les zones
montagneuses.
- Pluviométrie mensuelle et saisonnière
Généralement, le mois le plus arrosé de la région est décembre. Les mois de
janvier, octobre et novembre viennent en deuxième position Par contre, les mois de
mai, juin, juillet et août sont presque secs.
3.2.3.2. Température
La moyenne thermique annuelle au niveau de la région de Zeuss-Koutine est de
20°C. Les mois de Décembre, Janvier et Février sont les plus froids avec des gelées
occasionnelles. La période Juillet, Août et Septembre est la plus chaude de l’année.
La température dépend de la proximité de la mer et de l’altitude.
3.2.3.3. Vent
Le gouvernorat est assez venté. En effet pus de 60% et 40% des vents sont forts à
assez forts à Djerba et Médenine respectivement. Généralement, les vents
soufflants du N, NE, SE sont plus fréquents que ceux du S, O, et SO. (Chahbani,
1992; Khatteli, 1996). Les printemps est considéré la saison la plus ventée de
l’année suivie par l’hiver et puis l’automne (Khatteli, 1996). En été, les vents chauds
soufflant du Sahara (sirocco), localement connus par chili, sont dominants. A
Médenine, une moyenne de 54 jours de sirocco a été enregistrée.
13
3.2.3.4. Variabilité et changement climatique
3.2.3.4.1. Pluviométrie
Dhaou (2003) et Taamallah et Dhaou (2004) ont adopté plusieurs méthodes et
indices pour caractériser et estimer l’ampleur de la sécheresse au niveau de ces
différentes stations, à savoir :
- Indice de l’écart à la moyenne (Em)
- Indice de pluviosité (Ip)
- Analyse fréquentielle
- Indice du nombre d’écarts type
- Persistance de la sécheresse
Tous ces indices ont été appliqués à la série pluviométrique de la station de
Médenine (Dhaou, 2003) qui a la série la plus longue au niveau de la zone d’étude et
comptant 96 années d’observation complètes.
Indice de l’écart à la moyenne
Le calcul de l’indice de l’écart à la moyenne de la série pluviométrique de la station
de Médenine sud permettent de montrer que :
• Durant cette longue période d’observation, il a été enregistré 40 % d’années
excédentaires et 60 % d’années déficitaires.
• Le déficit le plus important retenu de cette série pluviométrique est de l’ordre de –
111,95 mm en 1935-1936 (soit 75,2 % de déficit).
• 16 séquences sèches de plus d’une année dont les plus longues s’étendent
respectivement sur 9 années et 7 années consécutives de 1904-1905 à 1913-1914
et de 1960-1961 à 1966-1967,
• La tendance globale, durant la période 1903-1967, est à la sécheresse mais celle
ci est entrecoupée de courte période à tendance humide. De 1967-1968 jusqu’à
1995-1996, la tendance est humide. Par contre, de 1996-1997 à 2001-2002, il s’agit
d’une tendance à la sécheresse.
Tendances pluviométriques
L ’analyse de la sécheresse par la méthode de l’indice de pluviosité et des cumuls
des écarts fait apparaître une alternance de séquences à tendance globale sèche et
des séquences à tendance globale humide. Ainsi nous constatons que :
• de 1903-1904 à 1966-1967, la tendance globale est à la sécheresse. Mais elle est
entrecoupée des courtes périodes à tendance humide dont les plus importantes
s’étalent sur trois années consécutives (1926-1928 et 1957-1959).
• de 1967-1968 jusqu’à 1989-1990, la tendance est humide. Par contre, de 19901991 à 2001-2002, il s’agit d’une tendance à la sécheresse. Ce qui confirme les
constatations dégagées en se basant sur les observations de l’écart par rapport à la
moyenne.
Analyse fréquentielle
L’application de l’analyse fréquentielle à la série pluviométrique de la station de
Médenine permet de donner une meilleure précision des années normales par
rapport aux années déficitaires et excédentaires. Sur les 96 années d’observation on
distingue:
14 années très sèches et déficitaires de 48,2 % à 75,2 %,
19 années sèches et déficitaires de 21,7 % à 47,5 %,
29 années normales comprises entre 20,8 % de déficit et 4,6 % d’excédent,
19 années humides et excédentaires de 5,54 % à 34,3 %,
15 années très humides et excédentaires de 38,1 % à 269 %.
L’analyse de ces données permet de montrer que contrairement à ce qui été
dégagé par l’indice de l’écart à la moyenne, 34% des années d’observations ont été
sèches à très sèches et que 30% ont été des années normales. Cependant, cette
14
analyse ne permet pas de dégager les tendances globales de la pluviométrie au
niveau de la station étudiée.
Persistance de la sécheresse
Suite à l’analyse des années sèches déterminée par la méthode de l’analyse
fréquentielle à la station de Médenine, nous constatons :
• 16 séquences d’une seule année sèche ;
• 4 séquences de deux années sèches successives (1910-1911 à 1911-1912,
1915-1916 à 1916-1917, 1935-1936 à 1936-1937 et 1996-1997 à 1997-1998)
• 3 séquences de trois années sèches successives (1904-1905 à 1906-1907, 19631964 à 1965-1966 et 1999-2000 à 2001-2002).
L’apparition des séquences de trois années consécutives a des répercussions
catastrophiques sur tous les secteurs économiques. Alors qu’une sécheresse isolée
d’une année même très sévère, affecte moins fortement la région. Nous remarquons
que les sécheresses isolées prédominent (48,5 % des cas) alors que les séquences
de deux années consécutives sont moins importantes (24,2 % des cas).
Indice du nombre d’écart type
Afin d’estimer la sévérité de la sécheresse vécue dans la région de Médenine, nous
avons utilisé le critère de comparaison à la moyenne et à la moyenne moins un ou
deux écarts types. Parmi les années déficitaires, 39,7 % d’années de sécheresse
modérée, 27,6 % d’années de sécheresse forte et 32,8 % d’années de sécheresse
très sévère.
3.2.3.4.2. Température
L’analyse des séries de températures issues des deux stations météorologiques de
Médenine (1978-2009) et Mellita (1973-2009) montre une légère tendance générale
d’augmentation de la température plus visible à Mellita (presque 6%) qu’à Médenine
(presque 5%). En effet, Tmax et Tmin se trouvent augmenter de 6.4% et 4.82%, et
5.88% et 4.88% à Mellita et Médenine respectivement. Les saisons les plus
concernées sont en premier lieu l’automne suivi du printemps et de l’été. L’hiver est
la saison la moins affectée.
7. Evaluation de la vulnérabilité des écosystèmes pastoraux face au
changement climatique aux horizons 2020 et 2050 (Etape 2)
Les résultats relatifs à la prédiction de la dynamique et de l’évolution de la
vulnérabilité des écosystèmes pastoraux aux horizons 2020 et 2050, viennent
confirmer les craintes et les cris d’alarme des instances nationales et régionales du
fait que la situation actuelle des écosystèmes pastoraux est déjà catastrophique et
qu’elle va t’être aggravée par le changement climatique du moins si le degré de la
présente perturbation anthropique (pression animale) ne fera pas l’objet d’une
intervention pour son allègement.
Les résultats obtenus (tableau 2) permettent de classer les unités pastorales (ou
formations végétales) du gouvernorat de Médenine en trois grandes classes quant à
leur vulnérabilité au changement climatique. La classification s’est basée sur les
évolutions des superficies des classes de vulnérabilité retenues (Non vulnérables,
peu vulnérable, vulnérable et très vulnérable) de ces unités depuis la situation de
référence (2005, année de réalisation de la carte INFP) jusqu’à l’horizon 2050 tout
en passant par celui 2020.
15
Tableau 2. Variation de quelques indicateurs quantitatifs en fonction du degré de
vulnérabilité des écosystèmes pastoraux du gouvernorat de Médenine en 2005 et
aux horizons de 2020 et 2050.
Ecosystème
pastoral
Haloxylon
schmittianum
Halophytes
Rhanterium
suaveolens
Superficie Biomasse
(ha)
(Kg MS/ha)
Année Classe de vulnérabilité
1
2
2005
3
4
Total
1
2
2020
3
4
Total
1
2
2050
3
4
Total
1
2
2005
3
4
Total
1
2
2020
3
4
Total
1
2
2050
3
4
Total
1
2
2005
3
4
Total
1
2
2020
3
4
Total
1
2
3
2050
4
Total
1
2
3
4
2005
Total
1
2
4801,67
24817,05
8417,22
2888,47
40924,41
19759,82
10071,88
728,11
10416,67
40976,48
24557,63
2365,51
2068,2
11922,05
40913,39
5407,07
47796,75
16145,57
11034,82
80384,21
50780,02
13651,79
9156,14
3467,1
77055,05
55142,57
14955,23
5373,59
1576,2
77047,59
1908,44
39613,38
13125,91
7959,4
62607,13
0
5379,55
21152,12
35917,28
62448,95
0
529,21
12802,99
49158,09
62490,29
30,61
60332
15959,53
11443,56
87765,7
1960,42
65937,23
1560542,75
4963410
631291,5
144423,5
7299668
6421941,5
2014376
54608,25
520833,5
9011759
7981229,75
473102
155115
596102,5
9205549
1892474,5
14339025
4036392,5
1103482
21371374
17773007
4095537
2289035
346710
24504289
19299899,5
4486569
1343397,5
157620
25287486
1049642
13864683
1968886
397970
17281181
0
1882842
3172819
1795865
6851526
0
185223
1920448
2457905
4563576
9948,25
13574700
1994941,25
572178
16151768
632261,5
14813219,3
Production
pastorale
(UF)
312108,55
992682
126258,3
28884,7
1459934
1284388,3
402875,2
10921,65
104166,7
1802352
1596245,95
94620,4
31023
119220,5
1841110
378494,9
2867805
807278,5
220696,4
4274275
3554601,4
819107,4
457807
69342
4900858
3859979,9
897313,8
268679,5
31524
5057497
209928
2772936
393777
79594
3456235
0
376568
634564
359173
1370305
0
37045
384090
491581
875671
1989,65
2714940
398988,25
114435,6
3230354
126452,3
2962643,85
16
Psammophytes
2020
2050
2005
Stipa
tenacissima
2020
2050
2005
Rosmarinus
officinalis
2020
2050
2005
2020
Artemisia
herba-alba
2050
2005
3
4
Total
1
2
3
4
Total
1
2
3
4
Total
7158,5
12709,55
87765,7
6266,15
56639,52
4959,81
19900,22
87765,7
620,52
9238,43
7227,36
1473,11
894812,5
635475,5
16975769
2036498,75
12743892
620101,25
995416,5
16395909
217182
2540568
1445472
73655
178962,5
127095,1
3395154
407299,75
2548778,4
124020,25
199083,3
3279182
43436
508114
289094
14731
1
18559,42
0
4276877
0
855375
0
2
3
4
Total
1
2
3
4
Total
1
2
3
4
Total
1
2
3
4
Total
1
2
3
4
Total
1
2
3
4
Total
1
2
3
4
Total
1
2
3
4
Total
1
2
3
4
0
0
18559,42
18559,42
0
0
0
18559,42
18559,42
494,47
1075,56
788,06
182,09
2540,18
0
60,4
1016,41
1463,37
2540,18
0
0
537,27
2002,91
2540,18
425.62
8996.77
3639.57
1076.96
14138.92
0
0
0
14138.92
14138.92
0
0
0
14138.92
14138.92
331.85
35071.35
15679.24
4269.08
0
0
922215
922215
0
0
0
922215
922215
370852,5
672225
394030
54627
1491734,5
0
37750
508205
439011
984966
0
0
268635
600873
869508
191529.45
2699031.3
545935.5
53848.1
3490344.35
0
0
0
706945
706945
0
0
0
706945
706945
116147
7890933
1567924
211877
0
0
184443
184443
0
0
0
184443
184443
74170,5
134445
78806
10925,4
298346,9
0
7550
101641
87802,2
196993,2
0
0
53727
74170,5
127897,5
38305.89
539806.26
109187.1
10769.62
698068.87
0
0
0
141389
141389
0
0
0
141389
141389
23229
1578187
313585
42375
17
2020
Anthyllis
henoniana
2050
2005
2020
Gypsophytes
2050
Total
1
2
3
4
Total
1
2
3
4
Total
1
2
3
4
Total
1
2
3
4
Total
1
2
3
4
Total
55351.52
0
60.45
11331.96
43959.12
55351.52
0
0
5119.76
50231.76
55351.52
7.69
8599.18
15561.93
4949.31
29118.11
0
269.13
344.25
28504.72
29118.11
0
0
0
29118.11
29118.11
9786881
0
13600
1133195
2181718
3328513
0
0
511976
2493033
3005009
1535
1074895
778096.3
123730
1978260
0
33640
17210
712615
763470
0
0
0
727953
727953
1957376
0
2720
226639
436344
665703
0
0
102395
498607
601002
307
214979
155619.26
24746
395652
0
6728
3442
142523
152694
0
0
0
145590
145590
*1: Non vulnérable, 2: Peu vulnérable, 3: Vulnérable, 4 : Très vulnérable
4.1. Les formations végétales peu vulnérables au changement climatiques
Il s’agit des parcours à base d’Haloxylon schmittianum et d’halophytes qui
semblent les plus adaptés voire les plus favorisés par le changement climatique
attendu et également les plus résistants à la pression animale. Ces écosystèmes
pastoraux comportent en effet des espèces pérennes xérophiles connues par leur
adaptation à la sécheresse et à l’augmentation des températures en plus de leur
large amplitude édaphique d’une part et d’autre part par leur faible palatabilité
réduisant ainsi les effets néfastes de la surcharge animale. Tous ces atouts
permettent d’expliquer la faible vulnérabilité de ces parcours particulièrement aux
horizons de 2020 et 2050.
4.1.1. Formation à base d’Haloxylon schmittianum
L’évolution de la répartition des classes de vulnérabilité du parcours d’H.
schmittianum à entre 2005 et 2020 et 2050 montre une tendance à l’augmentation de
la classe « non vulnérable » au dépens des autres classes et ce au niveau des
différentes régions du gouvernorat de Médenine à l’exception de la région naturelle
du Dhahar où les prédictions de la présente étude montrent que ce type de parcours
sera très vulnérable aux horizons de 202O et 2050. La part de la superficie des
endroits où le parcours à « beguel » est qualifié non vulnérable gagne de superficies
par rapport aux autres classes. Ceci engendrera une augmentation de la production
pastorale allant de 23.5 à 26% respectivement en 2020 et 2050. L’augmentation de
la superficie « non vulnérable » sera également par une élévation du taux de
recouvrement de la végétation (classe 30-40%). Le faible taux de recouvrement
(inférieur à 10%) est particulièrement enregistré dans les zones les plus vulnérables
à l’instar du Dhahar de Béni Khedache.
18
Sur le plan qualitatif ou physionomique, les parcours à base de beguel sont
connus par leur faible diversité floristique et ce malgré la diversité des paysages
édaphiques et géomorphologiques qu’ils peuvent occuper. En effet, ils se rencontrent
dans les plaines, sur les glacis et plateaux, sur les dunes continentales et parfois
même sur certaines collines et montagnes. Toutefois, la dominance semble
concerner les milieux les plus xérophytiques à sols sablonneux grossiers pauvres en
matière organique.
La composition du cortège floristique varie beaucoup d’un endroit à l’autre.
Ainsi, dans certains endroits d’El-Hmada/Djeffara, l’espèce clef de voûte (H.
schmittianum) est essentiellement accompagnée par Rhantherium suaveolens et
Koeleria pubescens, alors que dans les Matmata, c’est Thymelea microphylla qui codomine. Sur les plateaux du Dhahar et les glacis du versant ouest de la chaîne des
Matmatas, qui correspondent à une zone de transition entre l’aride et le saharien, le
beguel s’associe avec Gymnocarpos decander, Atractylis serratuloides et
Helianthemum kahiricum. Ce type de parcours est aussi rencontré dans les oueds du
Dhahar et à El Ouara en association avec Retama reatam, Stipagrostis pungens et
Anthyllis sericea. La plupart des espèces formant le cortège floristique de cette
formation végétale est de très faible palatabilité et les animaux cherchent plutôt les
espèces annuelles dominant au cours des années pluvieuses. D’ailleurs H.
shmittianum n’est broutée que dans une période limitée de l’année qui coïncide avec
le stade de floraison-fructification. Ceci justifie en grande partie la faible vulnérabilité
de cette formation végétale.
4.1.2. Formation à base d’halophytes
Du fait que ces parcours sont localisés dans des dépressions et en raison du
facteur salure, la production et la dynamique sont quasiment stables et ne réagissent
que peu à la nature de l’année. Les plantes halophiles ont, en effet, la particularité de
pouvoir supporter les conditions salines imposées par leur milieu et de développer
des facteurs d’adaptation pour survivre dans des conditions extrêmes comme les
sécheresses (par régulation de l’ouverture des stomates). Aussi, même si les petits
ruminants les visitent, ces parcours sont surtout préférés par les dromadaires qui les
fréquentent en hiver pour la cure salée. Toutes ces caractéristiques justifient et
confirment la très faible sensibilité et vulnérabilité de cette formation végétale face au
changement climatique.
Ces parcours ne demandent pas plus qu’une bonne gestion pour les
préserver et il faudra surtout éviter toute perturbation du milieu par des plantations ou
des semis. Leur mise en repos n’amènera pas d’importantes améliorations.
4.2. Les écosystèmes pastoraux moyennement vulnérables au changement
climatique :
4.2.1. Parcours à base de Rhanterium suaveolens
Considérée comme étant la steppe la plus sujette à la perturbation, la plus
recherchée pour la mise en culture et la plus importante des zones arides en matière
de diversité de son cortège floristique, cet écosystème pastoral peut être qualifiée, à
travers cette étude, comme étant vulnérable à très vulnérable particulièrement aux
horizons 2020 et 2050.
Le tableau 2 montre des changements quantitatifs aussi bien au niveau des
superficies qu’au niveau de la production de biomasse et des unités fourragères. Ce
tableau montre également une disparition de la classe « non vulnérable » et une
importante chute des paramètres de la classe « peu vulnérable » au profit des
classes « vulnérables » et surtout « très vulnérable » en 2020 et 2050. Cette
tendance vers des classes plus vulnérables sera accompagnée par une réduction du
19
taux de recouvrement de cette formation végétale. Les données montrent qu’il existe
une proportionnalité entre le taux de recouvrement de la végétation et son taux de
recul vers des classes plus "dégradées", désignant un recouvrement moins
important. En effet, plus le taux de recouvrement est faible, plus la végétation sera
sujette aux méfaits de la pression anthropozoïque (piétinement par les troupeaux,
broutage, éradication, défrichement,…) et être, par conséquent, exposée aux
différents processus de l’érosion hydro-éolienne (déssouchage des plantes et mise à
nu de leurs racines,…) puisqu'elle ne peut pas assurer son "auto-protection" ; ce qui
diminue sa capacité, dans un premier temps de se protéger, mais aussi sa capacité
de se régénérer.
Les changements quantitatifs induits par l’augmentation du degré de vulnérabilité
des parcours de Rhanterium suaveolens seront accompagnés par des changements
qualitatifs touchant leur physionomie. Ceci se traduit par une régression en nombre
de certaines espèces pastorales qui étaient dominantes en l’occurrence Rhanterium
suaveolens, Stipa lagascae, Plantago albicans et Helianthemum lippii var.
sessiliflorum. Ces différentes espèces de haute palatabilité, vont devenir de moins en
moins présentes dans le milieu. D’autres espèces de faible valeur pastorale et
connues par leur meilleure adaptation à la sécheresse (changement climatique) et
aux perturbations anthropiques (particulièrement le surpâturage) deviennent de plus
en plus abondantes face à l’augmentation des effets des facteurs de stress et de
perturbations. Parmi ces espèces, il y a lieu de citer Astragalus armatus, Atractylis
serratuloides, et au stade ultime Stipagrostis pungens.
4.2.2. Formation à base de psammophytes
Il est bien connu que ce type de parcours se développent essentiellement sur
les accumulations sableuses ressentes, mais il n’est pas exclu de les rencontrer sur
des sols à surface battante après la déflation du sable qui s’était accumulé dans ces
sites. Ces parcours sont généralement dominés par Laegos (Retama) raetam et
Stipagrostis (Aristida) pungens soit en association soit par une des deux espèces.
Les conditions écologiques caractérisant les aires de répartition de cette formation
végétale attestent de la grande adaptation du cortège floristique de ce type de
parcours aux conditions climatiques et édaphiques très difficiles. Le tableau 2 montre
que les espaces où la végétation appartient à la classe peu vulnérable occupent plus
de 65% de la superficie totale de l’unité pastorale et ce aussi bien pour l’année de
référence (2005) que pour les années 2020 et 2050. En second lieu vient la classe
« très vulnérable » qui touche un espace occupant de 13 à 22% de la superficie
totale de l’unité. Cette classe se situe en grande partie dans la Jeffara. Les classes
« non vulnérables » et « vulnérable » occupent des places intermédiaires. Du fait des
faibles potentialités pastorales de cette formation végétale, cette variation de la
vulnérabilité a engendré une légère augmentation des productions qui ne dépassera
pas 1.5% à l’horizon de 2050.
Stipagrostis pungens, Retama raetam et leur cortège floristique sont très bien
connus par leur rusticité du moins à la sécheresse grâce au phénomène de
xérophytisme. La vulnérabilité même faible de cet écosystème pastoral pourrait être
expliquée par conséquent par le surpâturage grâce à la surcharge animale
particulièrement au niveau de la région de la Jeffara, où la superficie relativement
faible, qui fait l’objet d’un pâturage par un nombre élevé d’animaux.
20
4.3. Les écosystèmes pastoraux les plus vulnérables au changement
climatique :
4.3.1. Formation à base de Stipa tenacissima
Le tableau 2 montre qu’actuellement, les espaces comportant la végétation
vulnérable à très vulnérable représentent près de 47% de la superficie totale de
l’unité pastorale. Tout cet espace est prévu de passer au stade très vulnérable et ce
depuis l’année 2020. Les productions en biomasse aérienne et en unités fourragères
feront l’objet par conséquent d’une chute dépassant 75% ce qui va augmenter
davantage le déficit du bilan fourrager déjà marquant la région.
Cette grande vulnérabilité se traduira par des changements qualitatifs et
physionomiques se traduisant par la raréfaction de l’espèce clef de voûte Stipa
tenacissima dans tous les endroits de sa répartition actuelle à l’exception de ceux qui
sont plus favorables et pouvant bénéficier d’un supplément d’eau par ruissellement.
D’autres espèces non appétées par les animaux et plus adaptées aux stress
thermique et hydrique comme Haloxylon scoparium et Reaumuria vermiculata auront
les potentialités pour dominer.
L’alfa (Stipa tenacissima L.) est une graminée vivace considérée par plusieurs
auteurs comme étant l’un des remparts face à l’avancée du désert, et ce, grâce à
son système racinaire très développé qui assure la fixation et la protection du sol.
Cette espèce a perdu sa capacité de régénération naturelle à cause de pratiques
humaines irrationnelles (défrichement abusif, surpâturage, surcollecte de l’alfa) et
surtout d’un bioclimat contraignant avec des conditions souvent défavorables à la
germination et à l’installation de cette espèce et de l’ensemble des espèces de cette
formation végétale.
4.3.2. Formation à base de Rosmarinus officinalis
Les résultats de l’étude montrent, même si à un degré moindre par rapport à
l’alfa, la fragilité de cette formation aussi bien par sa sensibilité aux scénarios
climatiques développés pour la région que par sa faible résistance aux différents
types de perturbation (pâturage, coupe, …). Le tableau 2 montre la disparition de la
classe non vulnérable depuis l’horizon de 2020, suivie de la classe peu vulnérable à
l’horizon de 2050 et une tendance presque quasi-totale de tout l’espace pastoral vers
la classe « très vulnérable ». C’est ainsi qu’il est prévu que les potentialités
pastorales connaitront une chute évaluée à 34 et 42% respectivement en 2020 et
2050.
Etant donnée sa superficie limitée et l’existence d’une variété endémique
tunisienne (var. troglodotyrum) menacée dont la perte ne peut en aucun cas être
évaluée, sa protection et/ou la mise en plan d’un plan de gestion rationnel s’impose.
4.3.3. Formation à base d’Artemisia herba alba
Il semble que l’impact des effets néfastes de l’emprise humaine et du changement
climatique semble plus consenti au niveau des Monts des Matmatas du fait toutes les
formations végétales colonisant le jbel, les piedmonts et les glacis semblent être les
plus vulnérables. Ce résultat reste valable également pour la formation à chih
(Artemisia herba alba) où la situation sera plus alarmante aux horizons de 2020 et
2050. Le tableau 2 montre que cette formation végétale passera d’un état
relativement peu vulnérable à un état très vulnérable et ce depuis même l’année
2020. Il est prévu que cette tendance va engendrer une perte de l’ordre de 80% de la
production pastorale de ce type de parcours. Ces espaces pastoraux seront de plus
en plus gagnés par des espèces envahissantes, agressives et à faible valeur
21
pastorale comme Haloxylon scoparium, Atractylis serratuloides, Astragalus armatus,
etc. Ces faciès voient aussi la surface des sols qu’ils occupent se colmater (pellicule
de battance), ce qui conduit à un blocage généralisé des activités biologiques dont la
conséquence immédiate est la raréfaction de l’armoise blanche et des espèces
pastorales accompagnatrices à l’instar de Gymnocarpos decander, et l’espace sera
de plus en dominé par Haloxylon scoparium et/ou Atractylis serratuloides avec des
annuelles essentiellement Stipa retorta et Diplotaxis harra qui ne prospèrent qu’en
années pluvieuses.
4.3.4. Formation à base d’Anthyllis henoniana
Il est bien connu que ces parcours peuplent les sites sahariens les plus
défavorables du point de vue hydrique et édaphique. Les sols sont souvent maigres,
caillouteux, à surface endurée et parfois gypseux, l’effet variation des pluies est
moins important que dans le cas précédent. Cependant malgré ces atouts et
contrairement à ce qui est attendu, les prédictions montrent que la formation à
Anthyllis henoniana (espèce xérophile), de faible vulnérabilité actuellement, tend
selon les prévisions à être plus vulnérable en 2020 à très vulnérable en 2050.
Les prévisions de cette étude montre que la superficie des unités vulnérables
à très vulnérables qui représentent seulement 36% en 2005, pourraient toucher la
totalité de l’espace pastoral du ghizdir aux horizons de 2020 et 2050. Cette
vulnérabilité commence à s’accentuer beaucoup plus dans les espaces pastoraux
d’El-Ouara que dans ceux du Dhahar. Ces scénarios engendreront par voie de
conséquence, une chute de la production pastorale de cet écosystème évaluée à
environ 70%.
4.3.5. Formation à base de gypsophytes
Dans le gouvernorat de Médenine, les parcours gypseux constituent des ilots
éparpillés entre les champs des cultures et sont généralement soumis à un pâturage
libre et continu durant toute l’année par les petits troupeaux des agropasteurs
sédentaires. Ce fait atteste de la vulnérabilité de ce type de parcours même dans la
situation actuelle et qui sera aggravée aux horizons de 2020 et 2050.
Bien que la plupart des espèces (Lygeum spartum, Atractylis serratuloides,
Anarrhinum brevifolium, Nitraria retusa, …) formant le cortège floristique de cette
formation soient considérées comme étant des xérophytes très adaptées à la
sécheresse, elle s’est avérée très vulnérable au changement climatique du fait que
sa répartition régresse à l’horizon de 2020 pour disparaître à l’horizon de 2050.
D’après le tableau 2, les endroits où cet écosystème pastoral est qualifie comme
étant vulnérable à très vulnérable représentent 70% de la superficie totale en 2005. Il
est prévu que la quasi-totalité (99%) de cet espace pastoral soit très vulnérable et ce
depuis l’an 2020. Ceci engendrera par voie de conséquence une baisse de la
production pastorale évaluée à plus de 60%. Cette forte vulnérabilité sera
accompagnée par des changements au niveau de la physionomie de la végétation et
la dominance-abondance des espèces. C’est ainsi que les espèces de bonne valeur
pastorale indicatrices du bon état du parcours comme Anarrhinum brevifolium,
(endémique tunisienne), Lygeum spartum et Helianthemum kahiricum seront
menacées par la raréfaction voire la disparition pour être dominées voire même
remplacées par des espèces indicatrices de la dégradation et moins vulnérables a
l’instar de Zygophyllum album, Erodium glocophyllum, Pithuranthos chlorantus et
Peganum harmala.
22
8. Analyse de la valeur économique des différents biens et services de
l’écosystème (5 à 7 pages)
8.1.
Identification et typologie des biens et services rendus par
l’écosystème pastoral dans le gouvernorat de Médenine
En se basant sur plusieurs travaux réalisés2 dans le sud tunisien et en
particulier dans le gouvernorat de Médenine, l’élaboration d’une typologie
suivant l’approche TEEB des biens et services rendus par l’écosystème
pastoral dans le gouvernorat de Médenine est tentée. Le tableau 3 synthétise
cette typologie qui d’une part décrit les types des services écosystémiques,
selon les types d’usage (suivant l’approche VET) et d’autre part identifie les
bénéficiaires et spécifie les types de bénéfices enregistrés.
Tableau 3: Liste des biens et services rendus par l’écosystème pastoral dans
le gouvernorat de Médenine
Type de services
(Ref. approche
TEEB)
Biens et
services
Type
d’usage
Bénéficiaires/
Type de bénéfices
usagers
(Ref . VET)
(1) Production
pastorale
(ressources
fourragères
naturelles)
Usage
Direct
Usagers des
parcours
Revenu des éleveurs
Revenus des acteurs de la
filière
Revenu des usagers locaux
(femmes, familles pauvres,
etc.)
(2) Plantes
Aromatiques
et Médicinales
Usage
Direct
Usagers des
parcours
Population locale
Services
d’approvisionnement
(ou de prélèvement)
(3) Feuilles de
Gueddim
Usage
Direct
Artisans locaux
Revenus des acteurs de la
filière
Protection des savoirs faire
locaux
Santé humaine
Revenu des artisans locaux
(nattes, couffins, etc.)
Revenus des acteurs de la
filière
Protection des savoirs faire
locaux
(4) Bois de feu
des ligneux
Usage
Direct
Usagers des
parcours
Source d’énergie pour la
cuisson
Population locale
(5) Miel
Usage
Direct
Producteurs du
miel
Population locale
Revenu des éleveurs
Revenus des acteurs de la
filière
2
Principalement les travaux de recherche de l’IRA, études CNEA, 1991, 2003, études des parcours
d’EL Ouara, 2001, 2004 et 2009, étude des parcours du Dhahar, IRA 2000, Atlas du gouvernorat de
Médenine 1999, PARLCD du gouvernorat de Médenine, 1996, Inventaires forestiers, 1995 et 2006, etc.
23
(6) Chasse
(7) Lutte
contre la
désertification
(ensablement)
Usage
Direct
Chasseurs
Usage
indirect
Population locale
Bien-être des chasseurs
Animation culturelle
Société nationale
Protection des
aménagements et de
l’infrastructure
Communauté
internationale
Lutte contre l’érosion
éolienne
Protection des terres et des
sols
Services
régulation
de
(8) Protection
des bassins
versants (CES
et mobilisation
des
ressources en
eau pluviales)
Usage
indirect
Population locale
Société nationale
Communauté
internationale
Protection de la production
agricole
Lutte contre l’érosion
hydrique
Protection des terres et des
sols
Récolte et mobilisation des
ressources en eau
pluviales
(capacité à moduler
dans
un
sens
favorable à l’homme
des
phénomènes
comme le climat par
exemple)
Amélioration des revenus
des agriculteurs locaux
Protection des
écosystèmes et de la
biodiversité
(9)
Séquestration
du carbone
Usage
indirect
Société nationale
(10) Qualité du
paysage
Usage
d’option
Population locale
Communauté
internationale
Acteurs
touristiques
Atténuation des effets du
CC
Conservation du patrimoine
naturel
Société nationale
Communauté
internationale
(11)
Récréation
(Parc Sidi
Toui)
Services culturels
Usage
Direct
Services
forestiers
Acteurs
touristiques
(12)
Valorisation
touristique du
paysage
(tourisme
écologique et
culturels)
Usage
d’option
(13)
Valorisation
culturelle
Usage
d’option
Recettes
Revenus des acteurs
touristiques
Société
Diversification des produits
touristiques
Acteurs
touristiques
Revenus des acteurs
touristiques
Société nationale
Revenus des acteurs
locaux
Communauté
internationale
Société nationale
Animation culturelle
Communauté
Conservation des savoirs
24
Services de soutien
(Festivals,
éducation et
recherche
scientifique)
et
d’héritage
(14)
Conservation
de la
biodiversité,
connue et
inconnue
Usage
d’option
et
d’héritage
internationale
Générations
futures
Société nationale
Communauté
internationale
locaux pour les générations
futures
Valorisation scientifique et
éducationnelles
Protection des
écosystèmes et de la
biodiversité
Générations
futures
8.2.
Evaluation économique des biens et services de l’écosystème
pastoral dans le gouvernorat de Médenine
L’évaluation économique des biens et services de l’écosystème pastoral dans
le gouvernorat de Médenine dont les détails sont données par le tableau 4,
révèle une valeur économique totale (VET) estimée à 32 606 000 DT/an, qui
sont réparties come suit : 45% (14 662 000 DT/an) pour les services
d’approvisionnement, 40 % (12 663 000 DT/an) pour les services de
régulation, 12% (3 832 000 DT/an) pour les services culturels et 4% (1 449
000 DT/an) pour les services de soutien. La répartition des bénéfices montre
que la population locale et la société profitent le plus avec respectivement
55,24% (18 012 000 DT/an) et 44,75% (14 590 000 DT/an), le reste 0,01%
(4 000 DT/an) est au profit de l’administration (Figures 2 et 3).
Figure 2. Evaluation économique des biens et services de l’écosystème pastoral
dans le gouvernorat de Médenine par nature de service (1000 DT/an)
25
Tableau 4 : Evaluation économique des biens et services de l’écosystème pastoral dans le gouvernorat de Médenine
Unité
1.
Services d’approvisionnement
(1) Production pastorale (ressources fourragères naturelles)
UF
(2) Plantes Aromatiques et Médicinales
(3) Feuilles de Gueddim
Quantité
Prix
(DT)
0,3
Kg
16327270
2383297
Kg
2934731
0,5
(4) Remeth
Kg
1245636
(5) Miel
Kg
25000
Tonne
99754
(1000 DT) %
Local
Gouvernement
Société
4898
15,02
4898
5180
15,89
5180
1467
4,50
1467
2
2491
7,64
2491
25
625
1,92
625
14662
44,97
14662
10568
32,41
10568
2095
6,42
2095
12663
38,84
12663
Sous Total 1
2.
Services de régulation
(6) Gestion des ressources naturelles et lutte contre la
désertification
(7) Séquestration du carbone
Distribution des bénéfices (1000
DT)
Valeur
21
Sous Total 2
3. Services culturels
(8) Récréation (Parc Sidi Toui)
Visite
87
50
4
0,01
(9) Valorisation touristique (tourisme écologique et culturels)
Visite
239273
14
3350
9,20
(10) Valorisation culturelle (Festivals)
Visite
9555
50
478
1,47
3832
11,75
1449
4,45
1449
32606
(100%)
4,45
Sous Total 3
4
3350
478
3350
4
478
4. Services de soutien
(11) Conservation de la biodiversité
Ha
Sous Total 4
Total
21315
68
100,0
1449
18012
(55,24%)
4
(0,01)
1449
14590
(44,75%)
26
Figure 3. Evaluation économique des biens et services de l’écosystème pastoral
dans le gouvernorat de Médenine par type (1000 DT/an)
8.3. Evaluation de la valeur économique perdue
Selon les figures 4 et 5, les productions des principaux biens et services
(approvisionnement et séquestration de Carbonne) du système pastoral dans
le gouvernorat de Médenine seront réduites sous l’effet des scénarios de CC
aux horizons 2020 et 2050. En effet, la réduction la plus importante
concernera les PAM avec 78% et 81% respectivement aux horizons 2020 et
2050. La production pastorale et la séquestration de Carbonne ne seront
cependant réduites que de 23% et 26% respectivement aux horizons 2020 et
2050.
Figure 4. Impact du CC sur la production des principaux
biens et services du système pastoral (Quantité)
Figure 5. Impact du CC sur la production des principaux
biens et services du système pastoral (%)
27
En ce qui concerne l’évaluation monétaire de la VET correspondante aux
services approvisionnement et de régulation (séquestration de Carbonne)
considérée, les figures 5 et 6 montrent une réduction de la VET actualisée de
59% et 83% respectivement aux horizons 2020 (7 381 000 DT/an) et 2050 (3
048 000 DT/an) par rapport à la situation de référence (18 002 000 DT/an)
(année de base : 2005). Sans actualisation (si on considère que les
préférences futures resteront les mêmes que celles du présent), la VET verra
sa valeur chuter d’environ 45% aux horizons 2020 et 2050 (9 940 000 DT/an).
Les services d’approvisionnement et de régulation (séquestration de
Carbonne) considérés suivront les mêmes tendances comme la montre les
figures 6, 7, 8 et 9.
Figure 6. Impact du CC sur la VET par type de services
(Sans Actualisation)
Figure 7. Impact du CC sur la VET par type de services
(Avec Actualisation)
Figure 8. Impact du CC sur la VET par service
Figure 9. Impact du CC sur la VET par service
(Sans Actualisation)
(Avec Actualisation)
28
9. Analyse de la pertinence des stratégies, programmes, projets et pratiques
d’aménagement et de gestion actuelle en rapport avec les risques liés au
changement climatique
La Tunisie et plus particulièrement le gouvernorat de Médenine a connu durant son
histoire plusieurs sécheresses à ampleur variable. Certaines ont eu des répercussions
négatives, parfois dramatique sur l’économie et les conditions socio-économiques de la
population notamment rurale. La sécheresse de 1977 - 1979 avait été vécue comme un
événement exceptionnel. Les sécheresses plus récentes, celles de 1988 - 1989 et surtout
celles de 1999-2003, ont été davantage perçues comme une des manifestations possibles
du changement climatique annonçant un retour plus fréquent de ces "anomalies" qui, de
statut de catastrophes, pourraient passer au statut de "normes". Dans l’esprit du grand
public, et en accord avec la tendance annoncée par les modélisateurs du climat, le
changement climatique associe à l’augmentation prévue de température une plus grande
fréquence d’événements extrêmes comme les cyclones tropicaux, les tempêtes et les
précipitations intenses qui leur sont liées et, à l’opposé, le fort déficit pluviométrique
conduisant à des situations de sécheresse. Au niveau du gouvernorat de Médenine, plus
particulièrement, les dernières sécheresses erratiques ayant sévi durant la période 19992003 ont pu montrer jusqu'à quel point l’économie de la région est tributaire des hauteurs
des pluies et de leur distribution.
Quoiqu’il soit conscient de l’aggravement de ce phénomène, l’intervention de l’Etat
tunisien peut être jugée faible dans une région, qui à côté de Tataouine et Kébili, abrite tout
ce qui reste comme grands espaces pastoraux collectifs en Tunisie et où la sécheresse n’est
plus considérée comme un phénomène conjoncturel mais bien structurel qu’il faut
impérativement intégrer dans les stratégies de développement de ces régions. . Cette
intervention s’est limitée à la stratégie nationale de lutte contre l’ensablement et de CES en
vue de combattre la désertification, les processus de dégradation et les effets néfastes de la
sécheresse, et à quelques mesures accompagnatrices et/ou ponctuelles comme celles
relatives à la gestion des crises, en particulier de la sécheresse qui semblent autant plus
d’ordre politique que structurel.
6.3. Analyse de la pertinence des stratégies, programmes, projets et pratiques
d’aménagement et de gestion actuelle en rapport avec les risques liés au CC
6.1.1. Stratégie nationale d’aménagement et de gestion des parcours naturels
Toutes les interventions menées dans les parcours du gouvernorat de Médenine et
notamment dans les régions de Dahar, d’El Ouara et dans la Jeffara ont porté sur des
superficies très limitées comparativement aux potentialités pastorales existantes qui
nécessitent un effort considérable d'aménagement et de gestion. Les parcours collectifs non
soumis au régime forestier occupant des superficies importantes (212130 ha) n'ont bénéficié
d'aucun effort de réhabilitation. Les efforts d'amélioration pastorale tels que ceux analysés
dans le document d'évaluation de la stratégie nationale pastorale 1990-2000 et les rapports
des différents intervenants dans ce secteur, démontrent que le Sud d'une manière générale
et le gouvernorat de Médenine en particulier n'ont bénéficié que d'une faible part de
l'investissement consacré au développement pastoral.
A titre indicatif, la superficie totale améliorée par plantations arbustives durant les
deux dernières décennies 1993- 2010 au niveau de tout le gouvernorat de Médenine n’a pas
atteint les 2000 ha (1710 ha et 265 ha dans les parcours collectifs et privés respectivement).
Celles améliorées par simple mise en défens pour la même période ont touché environ 61
000 ha (46 431 ha et 14 434 ha dans les parcours collectifs et privés respectivement).
32
6.3.1. 1. Parcours améliorés par plantation d’arbustes fourragers
Les plantations fourragères sont réalisées par l’Arrondissement des Forêts, au niveau
des terres domaniales et collectives, et par l’Office de l’Elevage et des Pâturages, sur les
terres privées. En fonction des conditions climatiques, les superficies plantées en arbustes
fourragers varient annuellement de 14 à 400 ha, au niveau des terres collectives et de 0 à
100 ha dans les terres privées. Depuis l’indépendance, une dizaine de périmètres pastoraux,
totalisant 641 ont été créés au niveau des terres domaniales et collectives. De même, l’OEP
est intervenu chez 161 exploitants sur une superficie de 273 ha dont 165 ha réussie. Le taux
d’échec chez les privés a été très important chez les privés disposant d’un terrain de
parcours de superficie très réduite.
L’évaluation des plantations pastorales dans la Gouvernorat de Médenine, réalisée par
Abdelkébir et Fechichi (1999) et Ouled Belgacem et Genin (2003) a montré que :
• les taux de réussite des plantations varient de 40 à 70% du moins au cours des premières
trois années lorsqu’elles sont encore contrôlées par les services de développement;
• les plantations arbustives et notamment les espèces exotiques (Acacia sp, Prosopis sp,
Atriplex sp.) ayant des limites d’adaptation aux conditions arides, ont montré des
performances modestes voire très faibles pour inadaptation aux conditions du milieu. Leurs
coûts d’entretien sont très élevés.
• si la plupart des anciennes plantations d’arbustes fourragers a disparu des parcours
privés suite au surpâturage, sécheresse ou changement de vocation de la terre (mise en
culture), les plantations réalisées dans les parcours collectifs soumis au régime forestier
semblent très âgées et souffrent d’un vieillissement et d’une forte lignification. Celles-ci
exigent une exploitation de régénération pour permettre une production de la biomasse
verte plus tendre et plus appréciable par le cheptel
6.1.1.2. Les mises en repos/défens (Gdel)
Dans le cadre de la stratégie nationale, les mises en défens réalisées dans les parcours
collectifs soumis au régime forestier couvrent une superficie de 46 431 dont 16000 ha dans
les parcours du Dhahar. Chez les privés, cette action a concerné 14434 ha au profit de 414
exploitants mais seulement une superficie de 10243 a été respectée et réussie.
L'analyse des différents programmes mis en œuvre en termes d'impact et de durabilité
montre bien que les mises en repos simples ou associées au scarifiage sont les plus
bénéfiques pour la régénération des parcours. L’efficacité de la technique des mises en
repos pratiquée à grande échelle est confirmée par des expériences réalisées sous des
conditions très similaires à celles dominant dans les parcours de Médenine (parcours de
Tataouine). Lorsqu’elle est bien respectée, elle permet de doubler l’offre fourragère à la fin
de la deuxième année; si elle est ensuite correctement gérée, elle permet de garder un
niveau de production (en UF utiles) au moins égal à 1,5 fois de la production à la situation de
départ, sous les conditions d’une année normale (Ouled Belgacem et al., 2008).
L’échec dans plusieurs cas de cette technique observé particulièrement dans les
parcours privés du gouvernorat de Médenine est du soit à la pratique de cette technique au
niveau des milieux très dégradés qui ont atteint un seuil d’irréversibilité soit au non respect
des règles de la mise en repos par l’agropasteur lui même. En tout cas la durabilité de cette
technique est mise en question du fait que les parcours aménagés font l’objet d’une
surexploitation intense avec l’arrêt des subventions accordées par l’OEP. Au contraire, au
niveau des parcours collectifs, la prolongation de la durée de mise en défens parfois en
raison de l’évitement des conflits sociaux entre les utilisateurs ayants droit et autres et avec
l’administration elle-même, engendre un vieillissement des plantes et un blocage de la
dynamique végétale et une perte de la production pastorale pouvant égaliser celle perdue
par une surexploitation.
Aussi bien au niveau des parcours privés que collectifs, le choix des sites pour la mise
en repos où la végétation a atteint un niveau de dégradation très avancée avec un blocage
de la dynamique végétale est une autre raison de l’échec de cette opération.
33
6.3.2. Le Programme de Développement Rural Intégré (PDRI)
Ce programme, avec ses deux générations (1984-1993, 1994-1999), a visé la mise en
valeur les zones rurales du Gouvernorat et particulièrement, celles à vocation agricole. Il a
été basé sur une approche d’intervention classique n’impliquant la population qu’en phase
d’exécution des composantes du projets qui sont elles mêmes inspirées des conceptions
habituelles des projets de développement à savoir les activités agricoles, les actions non
agricoles, l’infrastructure et l’amélioration du niveau de vie. La part des parcours a été
négligeable dans la mesure où le programme n’est intervenu que dans l’aménagement d’une
superficie réduite d’environ 270 ha au total. Bien qu’il ait accentué la pression animale sur les
parcours par la donation d’une quantité de 2250 têtes d’ovins et de caprins aux
agropasteurs.
6.3.3. Le Projet de Gestion des Ressources naturelles (PGRN)
Ce projet (1998 – 2004) s’est fixé comme objectifs la gestion durable des ressources
naturelles, et plus particulièrement des terres agricoles et des parcours dans les zones
fortement dégradées, avec une amélioration de leur productivité à travers une plus grande
participation des usagers dans les programmes de développement. L’approche participative
est introduite comme instrument pour une gestion durable de ces ressources.
• Les différentes activités du projet ont été principalement réalisées à travers les UST
(Unités Socio-Territoriales) et sous forme de Plans de Développement Participatif (PDP). Les
interventions directes du projet en matière d’amélioration pastorales sont également très
limitées et ne dépassant pas 5 ha de plantation d’arbustes fourragers. Selon le coordinateur
du projet, ces plantations ont été soumises à l’échec par inadaptation des espèces utilisées,
le coût élevé de ces plantations en plus du découragement des paysans pour son adoption.
Il voit que d’autres techniques comme la mise en repos et la pratique d’une rotation des
pâturages semblent plus efficaces. Par contre l’instauration par le projet des unités socioterritoriales (UST) et l’organisation des utilisateurs par la création des groupements de
développement agricole (GDA) et l’application d’une approche participative pourraient dans
l’avenir appréhender les problèmes de gestion des parcours collectifs dans le gouvernorat de
Médenine à l’issu de ce qui a été développé dans les parcours collectifs de Tataouine et
dans le Dhahar de Douz dans le cadre du projet PRODESUD. Un autre point positif qui
revient également à ce projet c’est l’élaboration d’une étude « Projet de développement
intégré et participatif (PDIP) des parcours d'El Ouara de Ben Guerdane » réalisée par une
équipe pluridisciplinaire d’experts qui a aboutit à l’élaboration d’un plan d’aménagement et de
gestion participatif des parcours collectifs d’El Ouara. L’exécution de ce PAGP est tributaire
de la disponibilité d’une source de financement ;
Des mesures accompagnatrices ont été réalisées par le PGRN dans les parcours d’El
Ouara et qui peuvent énormément influencer la gestion des parcours et la répartition et la
mobilité des troupeaux et qui se résument par :
• la création de deux forages équipés pour l’abreuvement ;
• la création de deux préaux d’ombrage.
6.3.4. Autres mesures accompagnatrices
L’Etat a entrepris un ensemble de mesures pour palier aux diverses insuffisances et
faciliter les opérations d’aménagement et de gestion des parcours conformément aux
orientations de la stratégie de développement pastoral 2002-2011. Parmi ces mesures, il y’a
lieu de mentionner :
Ø élaboration d’une étude « Projet de développement intégré et participatif (PDIP) des
parcours du Dhahar de Béni Khédache » ;
Ø à l’issu de tout le pays, élaboration de la carte agricole régionale qui servira d’outil pour
délimiter les terrains à vocation exclusivement pastorale et ceux à vocation agricole ;
34
Ø renforcement des capacités de production des pépinières forestières pour produire
suffisamment et aux moments opportuns les plants des espèces recommandées (pastorales
/ à usage multiple) plus adaptées aux conditions écologiques en particuliers climatique de la
région;
Ø consolidation du programme de l’infrastructure d’hydraulique pastorale (PISEAU) ;
Ø mise en œuvre d’un plan de sauvegarde du cheptel pour atténuer les effets de
sécheresse et réalisation d’une étude de gestion de la sécheresse.
6.3.5. Mesures ponctuelles de gestion de la sécheresse
Malgré l’absence d’une stratégie claire d’atténuation de la sécheresse, l’Etat tunisien a
entrepris des mesures ponctuelles chaque fois où une sécheresse prolongée apparaît. Ces
«stratégies» temporaires ont été lancées depuis la sécheresse de 1977 – 1979, lorsque la
production pastorale, déjà faible, a atteint des niveaux très bas et les performances animales
ont été sévèrement touchées. Les décisions prises à cet égard concernent les principaux
aspects suivants:
- mise à disposition de quantités suffisantes d'aliments pour animaux (autorisation de
l'accès des animaux aux parcours mis en défens, augmentation des superficies des les
cultures fourragères irriguées, importation d’aliments concentrés comme l’orge, le son de blé
et les bouchons de luzerne) ;
- contrôle et organisation de la des ressources alimentaires (orge et son) et le transport
des fourrages grossiers (exemples : foin d'avoine, les pailles) ;
- subvention des prix des semences de sorgho et d'orge ;
- subvention du transport des fourrages grossiers ;
- exonération des fourrages et des semences importées de taxes douanières et sur la
valeur ajoutée ;
- distribution gratuite des quantités d'orge pour les petits éleveurs ;
- contrôle de la santé animale (vaccination subventionnés, la fourniture de médicaments
vétérinaires exonéré, etc.) ;
- des décisions complémentaires (comme l’autorisation de l'abattage des femelles et les
animaux de faible productivité, l'augmentation du taux de réforme des animaux).
A côté des décisions ci-dessus indiquées d’autres mesures ponctuelles pour atténuer les
impacts négatifs de la sécheresse sur les moyens de subsistance des agriculteurs, ont été
prise par le gouvernement. Il s’agit de à titre d’exemple:
- Intensification des cultures fourragères en subventionnant les semences surtout pendant
les périodes difficiles,
- valorisation des différents sous-produits agro-industriels dans la production des blocks
alimentaires ;
- amélioration de la valeur nutritive des pailles par leur traitement à l’urée ;
- mise en œuvre de la stratégie nationale de reboisement, de la conservation eaux et des
sols et d’amélioration pastorale.
Lors des sécheresses de 1999 – 2002 et 2007 (qui coïncident avec la pénurie et
l’augmentation sans précédent des prix du pétrole et des céréales dont celles destinées à
l’alimentation animale), ces mesures ont été renforcées par des décisions dites
« présidentielles ».
Cependant cette politique basée sur les subventions et l’importation de concentrés durant
les périodes de sécheresse pour conserver en entier le cheptel a entraîné dans pas mal
d’endroits y compris dans le gouvernorat de Médenine, le surpâturage et la dégradation des
terres. La stratégie des anciens respecte l’équilibre imposé par la nature. Durant les années
sèches les agneaux sont sacrifiés ou écoulés à bas prix pour éviter le gonflement du cheptel,
atténuer la pression sur les parcours et ne conserver que le capital nécessaire de brebis et
35
moutons en attendant des jours meilleurs. La conservation d’un cheptel gonflé empêche la
reconstitution des parcours.
Cette politique a gravement perturbé voire détruit le savoir faire des éleveurs en matière
d’adaptation et de gestion des sécheresses. En effet, les éleveurs adoptaient autrefois, des
stratégies anti-risques par des pratiques et des expédients de type curatif comme les
transhumances exceptionnelles et utilisation de terroirs complémentaires, constitution de
stocks (gestion d’une sèche à partir d’une année humide), vente régulière des animaux au
marché pour s’approvisionner en aliment complémentaire, associations temporaires...
6.3.6. Modalités actuelles d’exploitation et de gestion des parcours
Si le mode de gestion des parcours privés est caractérisé par un système de pâturage
libre et continu pouvant engendrer la dégradation du couvert végétal et la disparition des
espèces de bonne valeur pastorale. Ce mode revient aux propriétaires eux même, qui
mènent généralement un élevage sédentaire de subsistance et de taille réduite pouvant être
élevé sur la base d’autres ressources alimentaires comme les sous produits de l’arboriculture
(principalement l’olivier) et de la céréaliculture (paille, chaume, …). Le problème de gestion
se pose au niveau des parcours collectifs où plusieurs acteurs (utilisateurs eux-mêmes,
organisations représentatives, administration, … etc.) sont impliqués et concernés.
Vue la dominance du statut collectif des parcours, les modes d’utilisation des ressources
sont restés traditionnels et obéissant aux seules directives des usagers. Les pacages sont à
rythme saisonnier ou à rythme continu sans respect de charge, de durée et de saison de
pacage et de l’état des parcours. Les règles de pacage sont dictées essentiellement par la
tombée des pluies, la disponibilité des points d’eau équipés et des pistes, et l’intérêt
individuel des usagers à tirer le maximum du profit de l’espace pastoral.
Au niveau des parcours collectifs d’El Ouara à titre d’exemple, la répartition des troupeaux
dans l’espace est régie, au cours de la période sèche (au moment où les potentialités
productives des parcours sont à leurs niveaux les plus faibles), par les principaux facteurs
suivants (PDIP ElOuara, 2004):
• la proximité des points d’eau et des pistes praticables permettant le transport
de l’orge et des autres aliments de bétail au moindre coût ;
• l’accoutumance de certains bergers à certains milieux bien déterminés
auxquels ils s’attachent par peur de ne plus pouvoir y revenir. S’agissant d’un
parcours collectif, le vide laissé par le départ d’un berger d’un endroit
déterminé peut théoriquement être comblé par n’importe quel autre berger ;
• les potentialités pastorales des parcours, qui n’interviennent qu’en deuxième
ou troisième position.
Au niveau des parcours de Dhahar de Béni Khédache, quoique les terres collectives
soient soumises au régime forestier (Ce statut foncier est de nature à préserver la vocation
pastorale et à impliquer l’administration forestière pour aménager, organiser et assurer la
police des parcours), l’accès à ces parcours n’est pas soumis à une autorisation préalable ni
de la part de l’autorité administrative ni de la part des institutions communautaires (conseils
de gestion CG et groupement de développement agricole GDA). L’exploitation des parcours
de la zone ne se fait pas dans le cadre d’une organisation collective des pâturages
impliquant un partage réglementé des parcours entre les usagers donnant lieu à une
répartition spatiale des troupeaux en fonction des disponibilités fourragères de la zone. Elle
obéit plus à la présence de l’herbe et de l’eau qu’aux structures foncières des terres. Quand
l’année est sèche, l’exploitation des parcours est limitée dans l’espace et dans le temps
(recours intense aux achats des aliments de bétail, certains petits éleveurs vendent leurs
cheptels), alors qu’en année pluvieuse, toute une dynamique pastorale est engagée.
36
6.4. Analyse de la capacité institutionnelle de l’administration face au changement
climatique
6.4.1. Cas de l’Office de l’Elevage et des Pâturages (OEP)
Les interventions de l'OEP dans le domaine des parcours s'intègrent dans le cadre de la
Stratégie Nationale de reboisement, de conservation des eaux et des sols et de lutte contre
l’ensablement. Parmi les différents intervenants (OEP, DG Forêts, CES, ODESYPANO),
l'OEP a été chargé d'intervenir sur les terres privées. L’approche est participative
(participation de l'adhérent estimée à 25 %). L'adhésion de la population à ce programme est
volontaire moyennant une demande adressée à la Direction régionale concernée. Toute
demande techniquement retenue, fera l'objet d'un engagement entre les deux parties (OEP –
Bénéficiaire). Les aménagements des parcours sont suivis et gérés par OEP. Ces
aménagements consistent à mettre en défens ou à planter des arbustes fourragers tout en
accordant aux propriétaires des subventions pendant une période de trois ans selon le
respect et la réussite de l’opération. Cette politique de l’Etat a connu un essor considérable,
suite aux moyens financiers importants en matière d’investissement et de compensation
dispensés par l’Etat à travers l’OEP pour exciter la résilience des écosystèmes devenus très
vulnérables et mettre à la disposition des éleveurs des réserves fourragères pour faire face
aux périodes de disettes devenues de plus en plus fréquentes.
Le principal problème posé face à cette politique, dans les parcours privés du gouvernorat
de Médenine, est que le respect de l’intervention et du modèle de gestion proposé par l’OEP
est limité à un lapse de temps (3 ans) correspondant à la période où cette intervention est
soumise aux contrôles des techniciens et aux subventions accordées. La réussite est dans
tous les cas tributaire de la participation des agro-pasteurs qui sont plus suscités par la
rentabilité financière et économique que par les aspects écologiques et de conservation.
D’ailleurs, l’expérience a montré que ce sont surtout les non éleveurs qui acceptent de
protéger leurs parcelles pour bénéficier des subventions accordées par l’OEP (Ouled
Belgacem et Genin, 2003). La durabilité du modèle de gestion pratiqué est également mise
en question. En absence des subventions et d’une autorité morale soit elle de l’OEP après la
fin du contrat, le système d’exploitation antérieur basé sur le pâturage libre et continue
reprend sa place.
6.2.2. Cas de l’Arrondissement des Forêts (AF)
Pour renforcer la résilience des écosystèmes et assurer une meilleure gestion des
parcours collectifs particulièrement lors des années de crise (sécheresse prolongée),
l’arrondissement des forets a intervenu par les activités suivantes :
• Au niveau du Dhahar de Béni khedache
Vue les difficultés rencontrées avec les usagers et leurs représentants (conseils de
gestion) aucune activité d’aménagement n’a été réalisée par l’arrondissement forestier
depuis 1988 (année de soumission des parcours de Dhahar sous régime forestier) jusqu'à
l’année 1991. Ce n’est qu’à partir de cette date, après une phase de vulgarisation et de
sensibilisation que l’AF a pu intervenir dans le cadre du projet de développement rural
intégré (PDRI) par la création de 5 forages, la mise en défens de 1000 ha de parcours et
l’installation de 5 aires d’ombrage biologique a raison de 5 ha autour de chaque point d’eau.
Vu l’échec de la plantation de 200 ha d’arbustes fourragers par l’OEP (conditions edaphoclimatique non encourageante), l’AF s’est limite a l’utilisation de la technique la plus facile et
la plus bénéfique (mise en repos) avec un amendement d’une fertilisation sur une superficie
de 16000 ha. En 1999, l’AF a impliqué les usagers et a développé le plan d’aménagement de
ces espaces.
La durée de la mise en repos varie de 2 à 3 ans avec l’ouverture des parcelles au pacage
pendant le printemps et surtout durant les années pluvieuses. En matière de gestion, l’accès
37
annuel des troupeaux à ces parcelles s’étalait sur une durée moyenne allant de 1 à 1,5 mois
et n’exigeait le paiement d’aucune redevance. Malheureusement, cet accès gratuit du
troupeau n’a pas permis de contrôler la pression animale et son impact sur l’accentuation du
surpâturage. Les résultats de ce programme de mise en défens de n’ont pas permis de
reconstituer durablement le potentiel pastoral dans les parcelles concernées avec la
coïncidence de la succession des années de sécheresse. Par ailleurs, l’exclusion des
éleveurs du parcours de la mise au point du programme de mise en défens, réalisé par
l’arrondissement forêt, constituait une contrainte majeure à l’appropriation des modes de
gestion requis par les usagers. Dans ce contexte, le refus catégorique, de la part des
éleveurs, de la notion de mise en défens a été constaté du fait que cette action est limitative
au mouvement du cheptel et aux espaces de pacage. Il en découle, une nécessité absolue
lors de la mise au point du parcellaire relatif à cette étude, de prendre en considération les
déterminants qui sont de nature à faciliter la gestion et la rotation des espaces à mettre en
défens.
• Au niveau des parcours d’El Ouara
L’arrondissement des forêts avoue que ses interventions dans la restauration et la gestions
de parcours collectifs d’El Ouara pour faire face aux différents types de perturbation et
renforcer la résilience des écosystèmes face au changement climatique représenté par des
sécheresses de plus en plus fréquentes, restent très limitées.
A l’exception de la création du parc national de Sidi Toui en 1991, Ces interventions n’ont
été suivis que d’effets modestes sinon décevants au regard des efforts investis. Les
problèmes posés ne cessent en effet de s’aggraver et les ressources pastorales de subir une
régression inexorable. Les difficultés rencontrées sont multiples :
Ø milieu physique marginal dont les conditions édaphiques des sites aménagés sont
extrêmement sévères. Les interventions ont coïncidé avec une sécheresse très prolongée ;
Ø
les traditions sociales des usagers sont solidement ancrées. D’ailleurs l’échec de la
plupart des interventions techniques (mises en défens, plantations) à cause de la
sécheresse, a engendré une réticence des usagers voire même des conseils de gestion sur
l’utilité de ces interventions. En admettant même le succès de la faisabilité technique de tels
aménagements, leur chance d’acceptabilité par la population dont le comportement est régie
par des modes de raisonnement, par des affinités ethniques et par des stratégies d’alliance
et d’organisation pluriséculaires, est relativement faible ;
Ø échec de l’administration dans la sensibilisation des usagers et des conseils de
gestion de l’importance des mises en défens et de la rotation des pâturages pour garantir la
présence de la végétation en attendant sa régénération à la suite de l’occurrence d’une
année pluvieuse.
D’autres contraintes d’ordre foncière, législative sociale et institutionnelle peuvent être
également à l’origine des échecs de l’administration forestière dans l’aménagement et la
gestion des parcours collectifs aussi bien d’El Ouara que du Dhahar :
Les parcours collectifs ou communautaires non soumis ne sont pas sous l’autorité de l’AF
et ne bénéficient par conséquent d’un aucun effort de la part de l’Etat pour l’amélioration et le
contrôle de leur gestion. Ces parcours qui représentent environ le tiers de la superficie totale
des terres à pâturages du gouvernorat de Médenine, sont les plus exploités et les plus
dégradés.
Une seconde hypothèse relative à la législation appliquée par le service forestier pour
la gestion des parcours soumis au régime forestier. Cette législation ressort des textes et des
décrets du code forestier. La Tunisie dont le quart de sa superficie totale est occupée par les
parcours naturels (la majorité se trouve dans le Centre et le Sud), n’a, jusqu’à présent, pas
38
élaboré un code pastoral qui pourra faciliter la tache du service concerné du CRDA (il devra
à ce moment être nommé par exemple « Arrondissement des Parcours ») pour bien gérer
ces parcours collectifs. Les spécificités écologique, sociale et historique de la gestion des
parcours collectifs par les populations pastorales diffèrent énormément avec celles en
relation avec le domaine forestier et les sociétés forestières.
Le code forestier actuel charge l’administration forestière de gérer et de développer les
parcours collectifs soumis au régime forestier à travers l’élaboration des plans
d’aménagement qui comprennent les règlements d’exploitation et les plans de mise en
défens. Des études ont montré que ni les usagers ni leurs représentants n’ont été impliqués
dans le choix des sites à aménager ou des techniques de développement des parcours. Ce
fait se justifie par l’absence des conventions et des contrats établis entre l’Etat et les
organismes de base (conseils de gestion, groupement de développement agricole)
représentant les agro-pasteurs. D’ailleurs, les quelques plans d’aménagement réalisés, dans
les parcours collectifs du Dhahar de Béni Khédache, qui se sont limités le plus souvent à des
mises en défens ont été suivis par la population concernée avec une certaine réticence.
L’administration forestière avec les moyens humains et financiers disponibles
actuellement, n’est pas capable de gérer des grands espaces si-lointains comme Dhahar et
El-Ouara. Ceci exige son renforcement par des cadres qualifiés et des moyens financiers et
une implication plus active des usagers et de leurs représentants pour faire face aux défis de
l’aménagement et de la gestion des parcours déjà amplifiés par le changement climatique.
7. Orientations stratégiques et mesures d’adaptation pour augmenter la résilience de
l’écosystème face au changement climatique
7.2. Proposition d’orientations stratégiques en vue d’améliorer l’élaboration des
stratégies, des programmes et projets d’aménagement et de gestion des écosystèmes
L’analyse de différentes stratégies et projets en relation avec l’amélioration et la gestion
des parcours a montré l’absence d’une stratégie nationale claire d’adaptation des parcours et
du secteur de l’élevage spécifique au changement climatique. Dans ce qui suit nous
développons un certain nombre d’orientations pouvant aider à préserver les écosystèmes
pastoraux du gouvernorat de Médenine et leurs biens et services face au changement
climatique à travers l’augmentation de leur résilience.
7.1.1. Sur le plan politique : Création d’une unité spécifique à la stratégie d’adaptation
L’augmentation de la résilience des écosystèmes pastoraux si vulnérables exigent de
dépasser la gestion de crise à court terme au moyen d’une stratégie d’adaptation aux risques
liés au CC et d’intégrer l’adaptation au changement climatique dans toutes les politiques et
les programmes relatifs à leur gestion, existants ou à réaliser. Les plans d’action doivent être
suffisamment souples pour pouvoir y intégrer l’amélioration des connaissances sur les
conséquences et les risques potentiels du CC. Ils doivent également accorder la priorité aux
actions qui privilégient à la fois l’atténuation et l’adaptation. L’intégration générale de
l’adaptation signifie probablement que les lois, les politiques et les programmes doivent tous
être révisés voire modifiés pour tenir compte de l’adaptation au changement climatique, au
besoin. A titre d’exemple les textes et les décrets du code forestier ne semblent pas dans
plusieurs cas répondre aux particularités de la gestion des parcours collectifs dans le sud
tunisien. La création d’un code pastoral intégrant l’adaptation des écosystèmes pastoraux au
changement climatique et organisant les modalités de leur gestion s’avère fondamentale.
Le renforcement des aspects politiques et législatifs dépasse même le cas particulier des
écosystèmes pastoraux dans la mesure où l’intégration doit toucher toute la politique agricole
et économique du pays. Un comité national ou une direction générale pourrait être créée au
niveau du Ministère de l’Agriculture et de l’Environnement avec des antennes régionales
39
pour pouvoir coordonner cette intégration. Quoique l’adaptation au changement climatique
dépasse largement le mandat d’un ministère en particulier. Il faut une stratégie d’adaptation
et un plan d’action national et l’appliquer à tous les paliers et dans toutes les instances du
gouvernement.
7.2.3. Sur le plan social et institutionnel
• Il serait fondamental de souligner que toute politique d’aménagement à appliquer aux
écosystèmes dégradés, doit prendre comme base de réflexion que la population jugée
dégradante, continuera d’y demeurer la force dominante autant dans les écosystèmes
naturels que dans les agro-écosystèmes. Les voies de restauration doivent être choisies en
concertation avec les usagers et les ayant droits et leurs représentants.
• L’implication des usagers des parcours depuis la planification jusqu’à la mise en œuvre
et la gestion des espaces objet d’une amélioration (appropriation et prise en charge des
acquis) : la stratégie de mise en œuvre repose sur l’utilisation de l’approche participative et
intégrée permettant de durabiliser les acquis. L’expérience du PRODESUD (projet de
développement Agro-pastoral et de promotion des initiatives locales pour le Sud-Est :
Tataouine et la délégation de Douz/Kébili) est un modèle à suivre dans ce contexte. En effet
ce projet repose sur la participation de la communauté pastorale, l’implication des
partenaires sociaux (conseils de gestion (CG) et GDA) et l’intégration des activités (élevage
et autres activités pastorales).
• Renforcer les capacités des institutions publiques et de développement (CRDA, OEP,
…) et des organisations de base (Conseils de gestion, Groupements de Développement
Agricole) pour améliorer la gestion des parcours naturels et augmenter leur résilience face
au changement climatique ;
• Développer et promouvoir des techniques et technologies adéquates en matière
d’aménagement et de gestion des parcours par l’installation des aménagements CES et la
collecte des eaux de ruissellement pour préserver la végétation naturelle et par conséquent
accroître la résilience des sols et des ressources en eau contre les effets des changements
climatiques ;
• Développer les capacités en vu d’intégrer les préoccupations des changements
climatiques à long-terme dans les pratiques durables de gestion de pâturages ;
• Le développement des capacités des populations dépendantes des ressources locales
à valoriser les connaissances et le savoir faire locaux pour développer des agro
écosystèmes plus durables et résistants aux impacts du changement climatique.
7.2.4. Sur le plan recherche scientifique
Promouvoir la recherche scientifique, gage de tout développement : Encourager les
institutions de recherche et d’enseignement supérieur à appuyer les organismes de
développement à travers la réalisation des analyses, études et le développement de
méthodes et d'instruments d’adaptation des écosystèmes au changement climatique. Il s’agit
d’entreprendre des travaux et des études ciblés pour répondre à certaines questions
perturbant l’utilisation des ressources et influençant négativement la productivité des
parcours et de chercher soit des nouvelles techniques (relatives à l’augmentation de la
résilience des écosystèmes, sélection des espèces pastorales plus adaptées au changement
climatique) soit des techniques déjà existantes mais qui nécessitent d’être valorisées et
adaptées au contexte (techniques appropriées de conservation des eaux et des sols, de
collecte des eaux de ruissellement « water harvesting » en milieu pastoral, …).
7.2.5. Sur le plan technique
• La mise en repos
Le concept de la mise en repos, proposé ici, est différent de ceux de la mise en défens et
de la réserve fourragère sur pieds, car il consiste en un mode de gestion basé sur une
40
utilisation régulière des sites retenus (abstraction faite de la nature de l’année), celle-ci
alternant avec des périodes de récupération du couvert végétal de façon à aider à une
remontée biologique de l’écosystème, tout en participant au soulagement d’autres sites
soumis à une forte pression d’utilisation. Cette technique permet d’assurer l’initiation d’une
dynamique ascendante des principaux types de parcours s’apprêtant à pratique et d’asseoir
une discipline de gestion basée sur le principe de la rotation ou du pâturage différé.
La réussite de cette pratique est fortement tributaire du choix du site à mettre en repos. Il
faut que l’état de dégradation n’ait pas atteint le seuil d’irréversibilité. La présence de
l’espèce clé de voûte et certaines espèces très appétées même à un niveau rare à très rare
constitue un indicateur de la dynamique de l’écosystème et des potentialités de régénération.
• Plantations d’arbustes fourragers L’échec de cette technique observé dans les parcours améliorés revient soit au mauvais
chois du site de plantation (sol très pauvre, milieu très sec) soit au choix des espèces
arbustives dont les éxigences écologiques ne sont pas satisfaites par les conditions locales
du site de leur plantation. La plantation d’arbustes fourragers plus adaptés aux conditions de
la région comme Periploca angustifolia, Rhus tripartita, Stipagrostis pungens et Retama
raetam même si elles permettent une production nettement inférieure par rapport aux
espèces exotiques (Acacia sp., Cactus, Atriplex sp.) est un garant de la réussite de
l’opération. Ces plantations doivent être établies dans les sites recevant un supplément
d’eau par ruissellement avec des systèmes appropriés de collecte d’eau pluviale.
• Resemis par réintroduction des espèces pastorales disparues Le resemis est une technique relativement complexe qui demande un itinéraire
technique fin partant de la collecte des semences et arrivant aux façons culturales
spécifiques à chaque espèce. De plus le resemis a d’autres objectifs de restauration de
l’écosystème et de relance de la dynamique biologique qui peuvent ne pas concerner
l’usager actuel de l’espace. Cependant le grand succès qu’a connu cette technique dans le
site d’El Mahmouda, Dhahar de Douz dans le cadre du projet PRODESUD constitue un
appui pour l’appliquer dans les parcours de Médenine où les conditions écologiques sont
meilleures. Les conditions d’utilisation de cette technique se réunissent lorsque les parcours
ont atteint un état de dégradation irréversible où les semenciers font défaut et lorsque la
restauration par une simple mise en repos n’est plus possible.
• Renforcement de l’infrastructure
Pour éviter la dégradation des parcours en raison du pâturage libre et continue avec
une charge animale excessive, il est fondamental de créer et de prendre des mesures
accompagnatrices à l’instar de la création et l’entretien des infrastructures à l’instar des
points d’eau, des aires d’ombrages, des voies d’accès, des centres de services et de la
couverture sanitaire. Seules ces mesures qui peuvent permettre la mobilité des troupeaux et
de pratiquer un modèle de gestion basé sur la rotation des pâturages.
• Valorisation des eaux de ruissellement
Parmi les mesures conseillées par les instances scientifiques et techniques pour
l’augmentation de la résilience des écosystèmes vulnérables (à l’instar de ceux de l’alfa, du
romarin et de l’armoise blanche dans les monts de Béni Khédache) c’est la collecte des eaux
de ruissellement qui peuvent alimenter la nappe et conduire à la remontée biologique des
espèces végétales lors des saisons exceptionnellement pluvieuses. La maîtrise et la
valorisation, dans les parcours, d’une partie de ces eaux, en tant qu’action d’amélioration
pastorale, pourraient constituer une orientation pertinente du fait de sa contribution non
négligeable à l’amélioration de l’offre fourragère.
41
7.3. Proposition de mesures d’adaptation concrètes pour augmenter la résilience de
l’écosystème face au changement climatique
Comme il été signalé auparavant, au niveau des parcours privés gérés par l’OEP,
l’amélioration pastorale a donné des résultats plus ou moins encourageants. En absence de
problèmes institutionnels et fonciers, seules mesures d’adaptation comportant les actions de
développement qui restent valables pour ces types de parcours. Les mesures d’adaptation
concrètes relatives aux aspects institutionnels, fonciers et gestion sont orientées vers les
parcours collectifs qui sont les plus importants aussi bien au niveau superficies qu’au niveau
gestion et importance socioéconomique.
Les mesures d’adaptions d’adaptation concrètes pour augmenter la résilience de
l’écosystème face au changement climatique proposées sont ci-dessous présentées.
7.2.1. Actions de développement
Ces actions concernent diverses interventions, inégalement réparties selon le territoire en
fonction de la nature des parcours et de leurs potentialités et de leur vulnérabilité face au
changement climatique. Elles sont conçues pour faire la part des occurrences de
sécheresse en modulant en conséquence les priorités d’actions et les aides de sauvegarde
du cheptel. Elles comprennent des actions de mises en repos, de resemis des parcours, de
plantations d’arbustes fourragers autochtones qui peuvent être appliquées soit d’une façon
unique soit intégrée selon la vulnérabilité des formations végétales du gouvernorat de
Médenine (tableau 5). Ces actions comprennent également le renforcement des
infrastructures pastorales existantes et les propositions relatives à l’utilisation des parcours.
Ces interventions doivent constituer un seul paquet de façon à ce que ces techniques soient
complémentaires ou substituables en fonction des conditions du milieu et des paramètres
de gestion.
7.2.1.1. Mise en repos
Elle doit en priorité être conduite dans les milieux présentant une certaine résilience afin
d’obtenir des résultats rapides et concluants servant à améliorer l’offre fourragère. Dans la
région d’étude, cette technique s’apprête à être pratiquée dans toutes les formations
végétales en particulier celles évaluées dans la première phase de la présente étude
comme étant les plus vulnérables à l’instar celles a base de Stipa tenacissima, Rosmarinus
officinalis et Artemisia herba alba.
L’efficacité de cette technique pourrait être largement améliorée lorsqu’elle est couplée,
selon le cas avec l’une ou l’autre des opérations suivantes :
- le scarifiage qui engendre en effet l'amélioration du bilan hydrique du sol suite à la
destruction de la pellicule de battance ce qui favoriserait l'infiltration de l’eau et provoque par
voie de conséquence la remontée biologique en aidant à l'enfouissement des graines et en
facilitant la germination. à savoir.;
- les travaux de CES: le rôle des ouvrages anti-erosifs consiste, entre autre, à protéger les
pâturages contre l’érosion hydrique (ruissellement) grâce à la construction de petits
ouvrages pour arrêter les ravinements tels que les banquettes, les cordons en pierres
sèches et la consolidation des ravins par des seuils en pierres sèches et en gabions.
A la troisième année, la parcelle mise en repos sera ouverte au pâturage une seule fois
durant la saison de dormance végétative pour valoriser les UF cumulées et profiter de
l’impact animal (enfouissement des semences, amélioration de l’infiltration des eaux de
pluies, etc.). Ensuite, et à partir de l’année 4, la parcelle sera ouverte deux fois par an : la
première, de courte durée mais à forte charge animale, aura lieu durant la saison de
croissance végétative (de préférence au début); et la seconde de durée plus longue (jusqu’à
utilisation quasi totale du tapis herbacé annuel) aura lieu pendant la période de dormance
des principales espèces pastorales. La durée de cette deuxième pâture et la charge
animale dépendront de l’offre fourragère.
42
Tableau 5. Techniques de restauration et réhabilitation des écosystèmes pastoraux pour l’augmentation de leur résilience face au changement
climatique.
Parcour à
base de
Rosmarinus
officinalis
Stipa
tenacissima
Mise en repos
Resemis
Eviter la perturbation de ce type de parcours. Ne
Le resemis est techniquement
mettre en repos que les faciès très dégradés par
déconseillé
surexploitation et mettre ceux peu utilisés au pâturage
contrôlé.
Plantation
Les plantations sont à déconseiller, sauf
dans le cas où des pieds mères de
Periploca leavigata et de Rhus tripartitus
pourraient être plantés et bien conduits
dans les talwegs avec la mise en place des
petits ouvrages anti-érosifs.
Eviter la perturbation de ce type de parcours. Ne
Le resemis est techniquement
mettre en repos que les faciès très dégradés par
déconseillé
surexploitation et mettre ceux peu utilisés au pâturage
contrôlé.
Les plantations sont à déconseiller, sauf
dans le cas où des pieds mères de
Periploca leavigata et de Rhus tripartitus
pourraient être plantés et bien conduits
dans les talwegs avec la mise en place des
petits ouvrages anti-érosifs.
Artemisia herba instaurer la mise en repos de deux ans qui est l’une
Le resemis doit d’abord commencer par Atriplex nummularia convient bien aux sites
alba
des meilleures techniques pour développer et
les faciès les plus dégradés de
dégradés se développant sur des sols
restaurer les différents faciès de dégradation de
l’armoise en utilisant la même espèce.
encroûtés et pouvant recevoir un surplus
l’armoise blanche
Il serait préférable de rajouter Salaola
d’eau de ruissellement. Il faudra pour ce
vermiculata, et Stipa parviflora. Les
faire démanteler la croûte avant de planter.
sites à ressemer doivent favoriser les
D’autres espèces comme Periploca
glacis plats et les dépressions où le
leavigata et des Acacia épineux peuvent
bilan d’eau est rendu favorable par les
convenir.
apports de ruissellement.
Anthyllis
La mise en repos doit concerner uniquement les sites Le ressemis direct doit être envisagé
Les plantations sont à déconseiller dans ce
henoniana
où il y a un voile éolien et là où Stipa parviflora,
uniquement dans les sites les plus
type de milieu.
Gymnocarpos decander et Helianthemum ssp sont
dégradés et là où le sol et les
rencontrées.
conditions hydriques sont favorables.
Gypsophytes
La mise en repos ne devra concerner que les endroits Il est inutile de semer
Les plantations sont à déconseiller
peuplés par Helianthemum kahiricum et Lygeum
spartum.
Rhantherium
Les faciès incluant Stipa parviflora, Stipa lagascaea,
Les faciès ensablés conviennent au
C’est inutile comparée à l’efficacité surtout
suaveolens
Plantago albicans, Echiochilon fruticosum,
semis direct de plusieurs espèces de
de la mise en repos.
Helianthemum lippii sessiliflorum, répondent très
Rhanterium suaveolens, Stipa
rapidement et substantiellement aux mises en repos
lagascae, Stipagrostis pungens. Les
de deux années successives au maximum
faciès dégradés sur sol sablo-limoneux
43
peuvent être semés par Salsola
vermiculata, Echiochilon fruticosum,
Argyrolobium uniflorum, etc.
Psammophytes Les mises en repos donnent des résultats substantiels Le resemis n’est pas indispensable car
dès la première saison, mais le rétablissement des
il y a un bon stock de graines dans le
milieux très détériorés nécessiterait des mises en
sol. Le semis de différentes espèces
repos plus prolongées ou du moins une utilisation très pérennes est possible à condition de
limitée dans le temps chaque année.
profiter des années pluvieuses pour
installer des foyers de semenciers.
Les faciès se développant sur des sols plus ou moins Eviter le resmis
Haloxylon
fixes et où Helianthemum lippii, Helianthemum
schmittianum
kahiricum, Stipa parviflora, Aristida plumosa, etc. sont
rencontrées même à faible densité conviennent aux
mises en repos.
Halophytes
La mise en repos n’est pas conseillée.
Les espèces existantes sont bien
acclimatées et il n’y a pas besoin de
resemer
Eviter les plantations
Eviter les plantations
Eviter les plantations
44
7.2.1.2. Plantations d’arbustes fourragers autochtones
Les plantations d’arbustes fourragers permettront écourter la période de soudure
chronique, augmenter rapidement le disponible fourrager, stabiliser les fluctuations interannuelles et stimuler la dynamique de régénération naturelle. Ces plantations participeront à
une atténuation de l’impact des années plutôt sèches et des mises en repos, à la remontée
biologique et à la réhabilitation des espèces pastorales herbacées.
Les techniques de plantations sont connues des techniciens, mais l’on veillera à choisir
les sites les plus favorables. Pour le choix des espèces à planter, la priorité sera donnée
aux espèces autochtones comme Periploca laevigata (Halleb) et Rhus tripartita (Jderi) dans
les fonds d’oueds, les dépressions et là où un appoint d’eau de ruissellement peut être
obtenu ; et Laegos raetam, Stipagrostis pungens, Calligonum sp.,Genista saharaea, etc.
dans les zones ensablées.
7.2.1.3. Resemis
A l’instar du site El Mahmouda (Dhahar de Douz), le resemis sera établi sous forme
d’îlots à l’intérieur de zones favorables à la dissémination naturelle. Les sites resemés
correspondront ainsi à des foyers de contamination à partir desquels les semences
gagneront progressivement d’autres espaces. Pour ce faire, les sites à considérer sont ceux
où le sol est meuble et où existe un voile éolien plus ou moins mobile. Cette opération doit
être effectuée dans les sites mis en repos.
Les techniques de semis varient selon les espèces considérées. Ainsi les plantes
autochtones colonisant les milieux sableux, comme Retama raetam, Stipagrostis pungens,
Calligonum comosum, Calligonum sp, doivent être semées directement en favorisant les
endroits où des reliques de ces espèces existent encore. Concernant les ligneux bas
comme Rhanterium suaveolens et Salsola vermiculata, la technique consiste à scarifier le
sol d’abord puis à épandre les semences sur la surface travaillée; alors que l’on doit semer
d’abord puis scarifier le sol pour des espèces comme Argyrolobium uniflorum, Stipa
lagascae, Plantago albicans, etc.
L’époque de semis se situe entre début septembre et fin novembre, c’est à dire durant
les pluies automnales et lorsque la température du sol est encore suffisamment élevée pour
favoriser la germination. Les quantités de semences à l’ha varient avec l’espèce (environ 5
à 7 kg/ha de semences pures pour Argyrolobium uniflorum et Plantago albicans).
7.2.1.4. Mesures d’accompagnement
Un grand effort a été déployé par le CRDA de Médenine dans mise en place de
l’infrastructure dans les grands espaces pastoraux du gouvernorat. Il est nécessaire
d’entretenir périodiquement les voies d’accès, les aires d’ombrages et surtout les points
d’eau. Des centres de services sont à créer. Le renforcement de l’infrastructure est en effet
en étroite relation avec une meilleure mobilité des troupeaux. Il faut que les actions de
développement ci-dessus indiquées (mise en repos, resemis, plantations) ne soient pas une
contrainte pour l’accès à cette infrastructure.
7.2.1.5. Mobilité des troupeaux et pâturage différé
Une meilleure gestion des parcours implique la prise en compte des conditions
climatiques dont en particulier les fluctuations pluviométriques et leur inégale répartition
dans l’espace pastoral et dans le temps. La variation intra annuelle peut être considérable.
Les précipitations ont lieu normalement en automne et au printemps; toutefois ces saisons
peuvent être complètement sèches ou humides. Ces fluctuations sont imprédictibles, ce qui
constitue un facteur d’insécurité permanente et de perturbation constante des systèmes de
production. Les points d’eau conditionnent toute la stratégie de gestion des parcours. De
plus les techniques de restaurations et de réhabilitation proposées ((mise en repos,
resemis, plantations) visent principalement à côté de l’amélioration de l’état du couvert
végétal et sa résilience, l’introduction d’un mode de gestion fondé sur la rotation des
45
parcours et sur le pâturage différé. Cette technique repose sur le principe de faire admettre
aux usagers de retarder le pâturage des parcours de quelques semaines à la suite des
premières pluies automnales pour garantir l’installation des jeunes plantules et des
nouvelles émergences..
Ce domaine est, par excellence, celui où les GDA peuvent tester et roder leurs
mécanismes de fonctionnement et exercer leur autorité morale sur leurs adhérents. Par
conséquent, une longue concertation, à ce sujet, est indispensable. Elle doit en outre, être
continue afin d’apporter les ajustements imposés en particulier par la répartition spatiotemporelle de la pluviométrie et du calendrier d'exploitation des parcours aménagés.
7.3.2. Appui institutionnel et modalités de gestion 7.3.2.1. Le renforcement des capacités du CRDA de Médenine et la création d’une
Unité spécifique d’adaptation au changement climatique
La principale institution opérant dans la zone du projet est le Commissariat Régional au
Développement Agricole (CRDA). C’est l’institution en charge du développement agricole
dans le gouvernorat de Médenine, et intervient à travers le programme national et le
programme régional de développement. Ses objectifs se focalisent autour de l’amélioration
des conditions de vie et de revenu de la population agricole, et de la mobilisation et la
sauvegarde des ressources naturelles.
Le renforcement des capacités du CRDA de Médenine exige l’appui de son adaptation
et de ses méthodes de travail aux exigences de l’approche participative et intégrée et de le
renforcer par des moyens de travail additionnels pour qu’il s’acquitte convenablement de
ses nouvelles tâches et missions qui lui seront dévolues dans le cadre de cette stratégie
d’adaptation au changement climatique des parcours naturels. Les types d’appuis
concerneront particulièrement les domaines de : (i) l’ajustement organisationnel du CRDA
de Médenine à travers la mise en place d’une unité pluridisciplinaire de gestion des
ressources naturelles entre des parcours bien formée en matière de gestion des risques et
l’adaptation au changement climatique. Cette unité pourrait être présider par le chef
d’Arrondissement des Forets et travaille en étroite collaboration avec les autres
arrondissements y compris ceux de CES, de statistique et des affaires socioéconomiques,
…, (ii) l’adaptation du système d’information du CRDA au besoin de la stratégie (fluidité de
l’information entre l’unité et ses partenaires techniques), (iii) renforcement du CRDA en
matériel de travail et moyens humains, et (iv) formation du personnel technique y compris y
compris les membres de l’unité a créer et les partenaires qui ne relèvent pas du CRDA de
Médenine (autorités, services techniques et membres des organisations de base (GDA,
CG…) dans divers domaines en liaison avec les exigences de la stratégie (adaptation au
changement climatique, approche participative, gestion des ressources collectives, …).
La nouvelle unité qui intervient au titre de représentant du CRDA à l’échelle régionale
mais également de la Direction Générale d’adaptation au changement climatique à l’échelle
nationale, est appelée à jouer pleinement la carte du partenariat et de la participation en
particulier avec ses principaux partenaires, les GDA et les CG. Ceci est d’autant plus
nécessaire que l’unité devrait céder la place au GDA à moyen et long terme et ce afin de
garantir la durabilité des interventions réalisées dans le cadre de la stratégie d’augmentation
de la résilience des écosystèmes face au changement climatique. Ceci exige le soutien par
l’unité de l’action du GDA et le considérer comme un véritable partenaire et une structure
porteuse de la stratégie.
7.3.2.2. Groupements de Développement Agricole (GDA)
Les compétences des GDA selon la loi sont très larges:
• la protection des ressources naturelles du périmètre de son intervention et la
rationalisation de leur utilisation;
• la sauvegarde, le traitement et la garde des plantations et des cultures;
46
• contribuer à l'apurement des situations agraires;
• l'augmentation de la productivité des exploitations agricoles;
• le développement des systèmes de parcours et des techniques d'élevage;
• l'accomplissement de toute mission visant le renforcement de l'intérêt collectif et ses
adhérents”.
L'adhésion au GDA se fait d’une façon volontaire et individuelle. Les GDA ne sont
donc pas sensé représenter une collectivité comme les conseils de gestion. Ils disposent
cependant d'un territoire qui doit être connu mais dont la délimitation n'est pas explicitement
exigée. Le décret sur les statuts-type précise que : “peuvent adhérer au groupement tous
les propriétaires, exploitants agricoles et pêcheurs de son périmètre d'intervention”. Il n'est
donc pas nécessaire que ceux-ci soient présents. Les GDA sont dirigés par des conseils de
gestion composés de 3 à 6 membres. Les pouvoirs du conseil d'administration sont assez
étendus pour permettre une gestion souple des GDA avec un recours limité aux
assemblées générales. Le conseil d'administration est renouvelé par tiers tous les ans.
7.2.2.3. Les conseils de gestion
Les conseils de gestion des terres collectives les plus impliques dans l’exécution d’une
stratégie d’adaptation des écosystèmes pastoraux du gouvernorat de Médenine face au
changement climatique sont en nombre de 27. Douze (12) appartiennent à la délégation de
Benguerdane et 16 à la délégation de Béni Khedache).
Les activités des conseils de gestion se limitent à l'attribution, à titre privé, des terres
collectives et à la défense des parcours collectifs contre les empiètements extérieurs. Leurs
structures et leur organisation et aussi leurs traditions ne les habilitent pas à jouer un rôle
dynamique dans le développement. Par ailleurs, la législation les concernant ne leur donne
pas une grande latitude en matière d'activités de développement agricole et rural,
notamment pour ce qui est de la gestion financière. Ces conseils sont soumis à une forte
tutelle qui n’encourage pas la responsabilité et l'initiative collectives. Nonobstant ces
limitations, on ne peut pas envisager l'aménagement et la gestion des parcours collectifs
dans le cadre des GDA sans recevoir l'aval des conseils de gestion. La solution la plus
adéquate consiste à inclure un représentant de chaque conseil dans le Bureau du GDA ou
assurer le concours de tous les conseils de gestion au conseil d’administration du
groupement de développement pour garantir l’adhésion de tous les usagers du parcours.
Cette représentativité est souhaitable car le GDA sera nécessairement le représentant de la
population usagère des parcours et assurera les négociations et tout le travail participatif
avec l’unité de gestion de la stratégie d’adaptation. D’ailleurs, ceci permettra de créer une
synergie entre les GDAs et les conseils de gestion qui est de nature à résorber les conflits,
faciliter la mise en œuvre du plan d’aménagement et permettre la mise en place d’un
schéma d’autogestion des parcours.
7.2.2.4. Modalités pratiques pour l’exécution des différentes composantes de la
stratégie
Les GDAs et l’unité spécialisée de la stratégie d’adaptation au changement climatique définissent conjointement les solutions techniques et les modalités pratiques pour la mise en œuvre des différentes composantes de la stratégie. Ce partenariat est basé sur les principes suivants : - le diagnostic participatif des besoins exprimés; - la négociation et le choix des solutions, des lieux et des actions à entreprendre; - la définition conjointe des responsabilités spécifiques de chacun des deux partenaires; - la cogestion et le suivi de la mise en œuvre. • Rôle des GDAs Le rôle des GDAs consiste à : 1) contribuer à la définition des priorités et du programme d’action pluriannuel et annuel de la stratégie, 2) valider la hiérarchisation des priorités, 3) 47
définir les groupes et les zones cibles, 4) contribuer à la définition des modalités pratiques pour la mise en œuvre des actions, 5) garantir la mobilisation des agriculteurs et des éleveurs concernés, 6) assurer l’encadrement des agriculteurs et éleveurs engagés dans une opération liée à cette stratégie, 7) prendre en charge la réalisation de certaines opérations de développement dans le cadre de conventions établies avec l’administration conformément à la réglementation en vigueur (marché de gré à gré), 8) garantir à terme la pérennisation des actions entreprises dans le cadre de la stratégie. Pour la réalisation de toutes ces taches, les GDA du Dhahar et d’El Ouara seront amenés: - à solliciter de la part des Conseils de gestion respectifs, qui ont juridiquement la responsabilité d’exploitation des parcours de leurs zones, une sorte de délégation de pouvoir pour représenter les intérêts des ayants droit pour la mise en œuvre de cette opération de développement. - à trouver les modalités pratiques pour assurer une adhésion et une mobilisation des éleveurs pour la réalisation des objectifs de la strategie. • Rôle de l’unité chargée de la mise en œuvre de la stratégie Son rôle consiste à: 1) contribuer à la définition des priorités et du programme d’action annuel de la strategie, 2) identifier des solutions techniques appropriées, 3) contribuer à la définition des modalités pratiques pour leur mise en œuvre, 4) garantir et suivre la réalisation matérielle sur terrain (en régie ou à l’entreprise), 5) assurer l’appui et l’encadrement technique et institutionnel aux GDAs, 6) faciliter à terme l’affirmation de la responsabilité des GDAs dans la conduite des actions et l’organisation des éleveurs concernés. Le système de partenariat qui sera mis en place entre les GDAs et l’Unite bénéficiera d’une action de facilitation, de modération et d’appui méthodologique qui sera confiée à une équipe de spécialistes dans le cadre du programme d’accompagnement de recherche-­‐développement. Sur le plan pratique, un programme d’action pluriannuel et un plan d’opération annuel de
la stratégie définissant à la fois les activités à entreprendre, les moyens à mettre en œuvre
et la contribution des différents partenaires, seront élaborés conjointement par les deux
partenaires.
7.2.3. Développement des compétences et formation
7.2.4.1. Formation du personnel technique du CRDA (Unité chargée de la mise en œuvre de la stratégie) Dans le but de renforcer les capacités des différents services techniques du CRDA, aussi
bien au niveau régional que local, qui sont appelés à assurer l’encadrement nécessaire à la
mise en œuvre et le suivi de la stratégie relative a l’adaptation des parcours au changement
climatique, deux types de formation sont envisagés pour le personnel de ces services :
• Une formation complémentaire : Ce type de formation est dispensé sous forme de
sessions de recyclage qui sont limitées dans le temps (une semaine) et qui s’adressent à
des techniciens de base (techniciens supérieurs) notamment les membres de l’unité. Ces
sessions portent sur des thématiques ponctuelles qui sont en rapport direct à la fois avec
les objectifs de la stratégie (mesures d’adaptation concrètes pour augmenter la résilience
de l’écosystème face au changement climatique) et ses modalités de mise en œuvre.
• Une formation de mise à niveau : Il s’agit d’une formation de mise à niveau et de
perfectionnement qui vise à doter le CRDA d’un personnel compétent ayant les
qualifications nécessaires pour concevoir, mettre en œuvre et suivre des opérations de
développement participatif a la lumière du changement climatique.
7.2.4.2. Formation des membres et du personnel des GDAs
48
Il est fondamental d’assurer une formation spécifique visant le développement des
capacités des responsables et des employés du GDA en matière de gestion et de conduite
des actions de développement tout intégrant les nouveaux défis impliqués par le changement
climatique. Ce programme prévoit aussi des visites à des structures similaires dans certains
Gouvernorats du Sud et du Centre du pays ayant acquis une certaine expérience en matière
de gestion participative du développement local. Cette formation portera sur les cinq
principaux axes suivants : 1) le fonctionnement du GDA et les relations avec les adhérents; 2)
la gestion des ressources naturelles en milieu pastoral à la lumière du changement
climatique; 3) la conduite des opérations techniques prévues par le projet; 4) les relations
avec l’environnement administratif et institutionnel; 5) les relations avec l’environnement
économique.
7.2.5. Recherche scientifique
Comme il a été signalé auparavant la recherche scientifique est la gage de tout
développement. Le rôle de la recherche devient primordial pour appuyer les services
techniques et les aider à trouver les meilleures solutions aux problèmes quotidiens qu’ils
rencontrent dans la gestion des parcours surtout avec les risques alarmants induits par le
changement climatique sur la vulnérabilité des écosystèmes pastoraux. Il est fondamental
pour l’établissement de la stratégie d’adaptation au changement climatique, d’associer les
institutions de recherche a l’instar de l’IRA de Médenine et les considérer comme partenaires
en raison de la nouveauté de la thématique et prévoir un financement sur le budget de la
stratégie pour financer les activités de recherche demandées. Les thèmes prioritaires avec
lesquels la recherche doit commencer à aborder sont les suivants :
• thème 1 : Identification des modes de pâturage permettant l’augmentation la résilience
des écosystèmes pastoraux face au changement climatique ;
• thème 2 : Identification et sélection des espèces pastorales autochtones plus adaptées
au changement climatique ;
• thème 3 : Amélioration pastorale par le développement des ouvrages anti-érosifs et
des systèmes appropriés de collecte des eaux pluviales.
8. Conclusion
Les principales conclusions qui peuvent être dégagées de cette étude montrent que les
écosystèmes pastoraux du gouvernorat de Médenine sont très fragilisés par la pression
humaine et sont par conséquent en danger face aux changements climatiques. Actuellement
surexploités, ils seraient plus dégradés sous la même pression pastorale et sous des
conditions d’aridité plus forte. Les conséquences directes iront de la chute de la production
pastorale, l’accentuation du déficit du bilan fourrager et de l’appauvrissement en espèces de
haute valeur pastorale qui s’avèrent les plus vulnérables aux effets combinés du changement
climatique et du surpâturage. L’étude a permis de mettre en évidence la présence de trois
différentes classes d’écosystèmes pastoraux quant à leur vulnérabilité au changement
climatique :
- les écosystèmes des monts des Matmatas de la délégation de Béni Khédache (Stipa
tenacissima, Rosmarinus officinalis et Artemisia herba alba) sont les fragiles et les plus
vulnérables au changement climatique. Les formations à base d’Anthyllis henoniana et de
gypsophytes, caractéristiques des sols caillouteux et gypseux ont également présenté une
grande vulnérabilité ;
- les écosystèmes pastoraux à base de Rhanterium suaveolens et de psammophytes
(Stipagrostis pungens et Retama raetam), caractérisant les sols sablonneux fixes et
mobiles respectivement, se sont avérés moyennement vulnérables ;
49
-
étant relativement les moins perturbés et les plus adaptées aux conditions climatiques
précaires, les parcours à beguel (Haloxylon schmittianum) et ceux salés (à base
d’halophytes) semblent être les plus moins vulnérables au changement climatique en
présentant une très faible vulnérabilité.
Malgré cette situation alarmante, tous les indicateurs montrent que les écosystèmes
pastoraux du gouvernorat de Médenine n’ont pas encore atteint le seuil d’irréversibilité et du
non retour. Les changements quantitatifs (superficies des classes de vulnérabilité, les taux
de recouvrements, la densité des espèces indicatrices, …) et qualitatifs (physionomie,
structure, présence des espèces clefs de voute et palatables, …) ayant eu lieu sous l’effet
combiné du climat et de la mauvaise gestion, ne semblent pas profondément toucher la
capacité de résilience de la plupart de ces écosystèmes ce qui pourra leur permettre à
revenir à un état antérieur proche à celui initialement existant en cas où une gestion plus
rationnelle des ressources pastorales sera pratiquée.
Ces parcours, surtout les plus vulnérables et gardant encore une certaine capacité de
résilience nécessitent par conséquent des aménagements et une régénération naturelle,
mais également une gestion réglementée et contrôlée permettant l’adéquation entre les
besoins du cheptel et les disponibilités fourragères. Le succès de ces interventions exige
forcément l’implication des acteurs locaux (usagers, GDAs, administration, …).
L’évaluation économique effectuée a été basée sur l’application de l’approche
TEEB et les données et les informations disponibles auprès des institutions de
recherche notamment l’Institut des Régions Arides et les services techniques
compétents en particulier le CRDA de Médenine et l’ODS. Evidemment le présent
travail n’a pas la prétention d’être complet, bien au contraire, c’est un travail pionnier
certes mais qui est sensiblement perfectible. Plusieurs biens et services très
intéressants n’ont pas pu être pris en compte, en particulier la chasse, la valorisation
du paysage, les activités de recréation traditionnelle comme les activités de tente et
de randonnées désertiques effectuées par des centaines de familles pendant les
saisons clés surtout le printemps. Les prélèvements de bois de chauffe, le
charbonnage n’ont pas été évalués également. D’autres biens n’ont été évalués que
partiellement comme les PAM, les dépenses de protection, les services culturelles
(beaucoup de festivals n’ont pas pu être pris en compte). Certaines évaluations
monétaires nécessitent des investigations spécifiques et l’application de méthodes
appropriées qui demandent des moyens importants en termes de temps et d’efforts,
lesquels ne sont pas disponibles dans le cadre de ce travail. Les laboratoires de l’IRA
pourront dans ce sens proposer et mettre en œuvre des programmes de
recherche/développement en partenariat avec les services et acteurs de
développement notamment le CRDA, l’ODS, l’environnement, les ONGs et les
institutions locales.
Quant à la tentative d’évaluation de la valeur économique perdue des différents biens
et services de l’écosystème pastoral sous l’effet du CC, les résultats ont confirmé
l’hypothèse que le CC aura un effet négatif sur la VET de l’écosystème, pastoral
dans le gouvernorat de Médenine. Cet impact négatif se traduira par des pertes
économiques d’autant plus importantes à l’horizon 2050. Les services
d’approvisionnement et de régulation subiront une dégradation continue de leur
potentiel notamment pour les principales plantes aromatiques et médicinales.
Ces impacts auront sans doute des conséquences sensibles sur les revenus de la
population et son bien être social, qui aura des effets négatifs sur les niveaux de
pauvreté, l’emploi et la création des richesses pouvant affecter le potentiel de
développement économique et social aussi bien au niveau local que régional.
50
Les résultats ont révélés également l’intérêt et la pertinence de l’action face à
l’inaction dont les impacts pourraient être lourdement facturés à la société actuelle
mais surtout aux générations futures. Par conséquent, la mise en œuvre des
stratégies appropriées d’adaptation à court, moyen et long termes se justifient
amplement. Des efforts d’affinement de ce type de travaux et leur couplage à des
actions de planification et de mise en œuvre de stratégies d’adaptation et
d’atténuation au CC s’imposent et deviennent plus qu’une nécessité. Laquelle
nécessité impose à la communauté nationale et internationale d’agir et de mobiliser
les fonds suffisants pour plaider en faveur de l’action.
L’analyse de différentes stratégies et projets en relation avec l’amélioration et la gestion
des parcours a montré l’absence d’une stratégie nationale claire d’adaptation des parcours et
du secteur de l’élevage spécifique au changement climatique et ce malgré les grands efforts
déployés par le CRDA et l’OEP en matière de restauration et réhabilitation des parcours et la
mise en place une infrastructure pastorale (points d’eau, aires d’ombrage, voies d’accès, …).
Les résultats de ces interventions n’ont pas été au niveau des attentes ni au niveau des
moyens financiers dépensés. Ceci en étroite relation avec les contraintes environnementales
(conditions édaphiques et climatiques très difficiles) mais surtout aux modes de gestion
adoptés et aux problèmes fonciers et institutionnels rencontrés particulièrement dans les
parcours collectifs.
Les orientations et la mise en place d’une stratégie d’augmentation de la résilience face
au changement climatique des écosystèmes pastoraux qualifiés vulnérables à très
vulnérables nécessitent d’entreprendre les mesures suivantes :
Le renforcement des aspects politiques et législatifs dépasse même le cas particulier des
écosystèmes pastoraux dans la mesure où l’intégration doit toucher toute la politique agricole
et économique du pays. Un comité national ou une direction générale pourrait être créée au
niveau du Ministère de l’Agriculture et de l’Environnement avec des antennes régionales
pour pouvoir coordonner une intégration de l’adaptation au changement climatique dans
toutes les politiques et les programmes de gestion des ressources naturelles. Les plans
d’action doivent être suffisamment souples pour pouvoir y intégrer l’amélioration des
connaissances sur les conséquences et les risques potentiels du CC. Par ailleurs les cadres
relevant des services de développement y compris ceux des unités chargées de la mise en
œuvre cette activité et intégration nécessitent une mise à niveau de leurs connaissances à
travers des sessions de formation régulière.
L’application de toute politique d’aménagement à appliquer aux écosystèmes dégradés, doit
prendre comme base de réflexion que la population jugée dégradante, continuera d’y
demeurer la force dominante et amplifie par conséquent la vulnérabilité des écosystèmes au
changement climatique. Les voies de restauration doivent être choisies en concertation avec
les usagers et les ayant droits à travers les organisations de base qu’ils les représentent.
Ces organisations (GDAs et Conseils de gestion) nécessitent une habilitation par selon un
programme de formation touchant tous les aspects de fonctionnement et de gestion des
ressources naturelles à la lumière du changement climatique. Ces organisations doivent être
impliqués dans les différentes phases de la stratégie dès la conception jusqu’à l’exécution.
Les actions de développement sont celles utilisées par les organismes de développement
mais qui exigent la réunion des conditions de leur réussite aussi bien sur le plan technique
que social. Les formations végétales les plus vulnérables devront avoir la priorité quant aux
interventions.
La recherche scientifique est le gage de tout développement. La nouvelle stratégie exige de
promouvoir la recherche scientifique et encourager les institutions de recherche à s’investir
dans la recherche des techniques permettant d’augmenter la résilience des écosystèmes
51
face au changement climatique (sélection des taxons plus adaptés, modèles des pâturage,
systèmes appropriés de collecte des eaux pluviales dans les parcours, …).
52
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Internationale Zusammenarbeit (GIZ) GmbH
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