142 identification des especes de phytophthora responsables

Annales de l’INRAT, 2010, 83 A. KHLIJ et M.R. HAJLAOUI.
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IDENTIFICATION DES ESPECES DE PHYTOPHTHORA
RESPONSABLES DE LA POURRITURE RACINAIRE DANS LES
VERGERS D’AGRUMES TUNISIENS ET EVALUATION DE LEUR
DENSITE D’INOCULUM
A. KHLIJ
1
et M.R. HAJLAOUI
2
1. Institut Agronomique Méditerranéen de Bari, Italie
Auteur correspondant : anis.khlij@gmail.com
2. Institut National de la Recherche Agronomqiue de Tunisie (INRAT)
Rue Hédi Karray 2049, Ariana, Tunisie
RESUME
Des prospections effectuées dans la région du Cap Bon visant l’étude de
la pourriture racinaire des agrumes causée par des champignons pathogènes
appartenant au genre Phytophthora ont montré une incidence élevée de l’attaque
du bigaradier et la présence des propagules du pathogène dans le sol. Les
colonies de champignons obtenus sur milieu sélectif, à partir du sol et des
racines, ont permis l’identification de deux espèces de Phytophthora, en se
basant sur les caractéristiques morphologiques et l’analyse moléculaire à savoir
P. citrophthora et P. nicotianae. Les valeurs relativement élevées de l’infection
du bigaradier ont montré une sensibilité de ce porte-greffe aux espèces de
Phytophthora présentes dans la rhizosphère. Le comportement du bigaradier
vis-à-vis de la pourriture racinaire est fortement influencé par le mode
d’irrigation, la combinaison greffon/porte-greffe ainsi que la fréquence des
propagules présentes dans le sol.
Mots-clés : Agrumes, Bigaradier, Phytophthora, PCR
IDENTIFICATION OF PHYTOPHTHORA SPECIES RESPONSIBLE OF
ROOT ROT IN TUNISIAN CITRUS ORCHARDS AND EVALUATION
OF THEIR INOCULUM DENSITY
ABSTRACT
The monitoring of root citrus infections and soil distribution on citrus
orchards in the region of Cap Bon showed higher values of root infection by
phytophtora and inoculum density of the pathogen. Fungal colonies obtained on
selective media from soil and roots were identified as P. citrophthora and P.
nicotianae by morphological characteristics and PCR analysis. The relatively
high values of RI on sour orange demonstrated the susceptibility of this rootstock
to Phytophthora species found in rhizosphere. The behaviour of sour orange
rootstock towards Phytophthora root rot was influenced by many factors such as
citrus variety combination, irrigation system and the number of propagules in
the rhizosphere.
Key words: Citrus, Sour orange, Phytophthora, PCR
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Phytophthora
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(PCR)
.
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Phytophthora
INTRODUCTION
En Tunisie, le secteur agrumicole revêt une importance capitale pour
l’économie nationale. Cependant, la productivité de ce secteur reste médiocre à
cause de la sévérité des conditions climatiques, la gligence de certaines
techniques culturales (Lakhoua, 1997) et surtout la dégradation de l’état sanitaire
des vergers. Parmi les affections parasitaires redoutables sur agrumes, la
gommose du collet et la pourriture racinaire induites par Phytophthora spp.
constituent un problème récurrent en dépit de l’utilisation du porte-greffe tolérant
(bigaradier) et l’aménagement de l’irrigation (Bové, 1995).
Plusieurs espèces appartenant au genre Phytophthora sont responsables
de la pourriture racinaire des agrumes (Ippolito et al., 1991). Depuis 1913,
Fawcett (1913) a isolé P. citrophthora et P. nicotianae à partir des lésions au
niveau du collet de certaines espèces d’agrumes. L’implication de ces pseudo-
champignons dans la mort de la capillarité racinaire a été démontrée par Fraser
(1942), Klotz et Sokoloff (1943). Outre ces deux espèces, P. palmivora a été
signalé en tant que responsable de la pourriture racinaire des agrumes en
Argentine et en Floride (Frezzi et Macola, 1945; Menge et Nemec, 1997).
En Tunisie, c’est surtout la gommose à Phytophthora qui est connue et
face à laquelle les agrumiculteurs ont adopté le bigaradier en tant que porte-
greffe tolérant et conférant une bonne vigueur aux scions (Bové, 1995).
Cependant, des symptômes de dépérissement des arbres greffés sur bigaradier
ont éobservés au cours des dernières années et commencent à inquiéter les
agrumiculteurs. L’arbre affecté montre un dépérissement progressif qui se
manifeste par une chlorose diffuse du feuillage, suivie de la chute des feuilles à
partir des plus vieilles et du dessèchement des rameaux à partir de la partie
apicale. Le mauvais fonctionnement du système racinaire détermine, en outre, un
état de stress hydrique même si l’eau du sol est suffisante (Lutz et Menge, 1986).
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Au cours de ce travail, nous nous proposons d’identifier les espèces de
Phytophthora responsables de la pourriture des racines du bigaradier en utilisant
des critères morphologiques et la technique PCR et d’évaluer la densité des
propagules dans le sol et le taux d’infection racinaire des arbres montrant des
symptômes de dépérissement et des arbres asymptomatiques.
1. MATERIEL ET METHODES
1.1. Echantillonnage
L’échantillonnage réalisé au printemps 2003, a été effectué en prenant
en considération les aspects suivants: l’homogénéité du verger, les variétés
d’agrumes, le mode d’irrigation pratiqué (par submersion ou localisé). Un total
de 50 vergers de la région du Cap Bon ont été visités, le nombre d’échantillons le
plus élevé a été prélevé dans les localités de Beni Khalled et Menzel Bouzelfa vu
l’effectif important des pieds d’agrumes dans cette zone (Tableau 1).
Afin de déterminer quantitativement la présence des propagules de
Phytophthora spp., la densité d’inoculum (DI) dans le sol et le taux d’infection
racinaire (IR) ont été évalués pour chaque verger d’agrumes prospecté. Deux
arbres apparemment sains et deux arbres montrant des signes de dépérissement
ont été choisis pour chaque verger. L’échantillon est composé de racines et de
sol, prélevés à une profondeur de 5-20 cm, avec un poids d’environ 1 kg obtenu
par regroupement des quatre prélèvements de différents points sous la frondaison
de l’arbre.
Tableau 1. Répartition par localité des vergers visités pour
le monitorage de Phytophthora spp.
Localité Nombre de vergers visités
Beni Khalled 16
Menzel Bouzelfa 17
Soliman 6
Bou Argoub 4
Hammamet 4
Nabeul 3
Total 50
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1.2. Isolement de Phytophthora spp. sur milieu sélectif
Afin de confirmer la présence du pathogène dans un échantillon de sol
ou de racines, on a utilisé un milieu de culture sélectif gélosé à base de farine de
maïs (CMA) addition de Benomyl, Nystatine, PCNB, Rifampicine,
Ampicilline et Hymexazol (BNPRAH) (Masago et al., 1977; Ippolito et al.,
1991). Le comptage des colonies de Phytophthora spp. est réalisé après 4 à 8
jours d’incubation à l’obscurité et à une température de 19°C.
1.2.1. Isolement à partir du sol
Les échantillons du sol prélevés sont séchés, émiettés puis tamisés à
travers une maille de 2 mm; pour chaque échantillon, 10 g du sol tamisé est -
suspendu dans 100 ml d’eau distillée stérile dans un Erlenmeyer de 250 ml, le
mélange est bien agité, puis à l’aide d’une pipette, 1 ml de la solution est posé
et étalé sur la surface du milieu de culture sélectif de Phytophthora. Par la suite,
les boîtes sont incubées à 19 °C pendant 24 h. Après incubation, les boîtes sont
lavées à l’eau stérile, puis incubées de nouveau à 19 °C pendant 4 à 8 jours
supplémentaires. Le nombre moyen de colonies par boîte, divisé par le poids sec
obtenu, représente la densité de l'inoculum dans le sol (DI), exprimée sous forme
de nombre de propagules par g de sol. Les colonies montrant une morphologie
caractéristique de P. nicotianae et P. citrophthora sont transférées sur substrat
sélectif, puis sur PDA.
1.2.2. Isolement à partir des racines
Les racines ont élavées avec de l’eau de robinet, découpées en petits
morceaux de 1 cm de longueur, et déposées à la surface du milieu sélectif à
raison de 20 morceaux par boîte de Petri. Pour chaque échantillon, cinq boîtes
ont été inoculées. Après 4 à 8 jours, le nombre total de colonies obtenues sur les
cinq boîtes est considéré comme représentant du pourcentage d’infection des
racines (IR) (Ippolito et al. 1991). Les données obtenues ont été analysées
statistiquement par l’analyse de la variance et les moyennes séparées par le test
de Duncan (Duncan’s Multiple Range Test). Le pourcentage est converti en
valeur angulaire (Bliss angular value) avant l’analyse.
1.3. Identification des espèces de Phytophthora
1.3.1. Identification morphologique
Pour la détermination de l’espèce fongique, on se base sur des critères
taxonomiques déterminants selon la description de Stamps et al. (1990). Pour
l’étude de la morphologie, les isolats sont transférés sur milieu CMA, et sont
observés après incubation à l’obscurité pendant 5-6 jours à une température de
24±1 °C (Feichtenberger et al., 1984).
1.3.2. Identification par PCR
Les isolats ont été cultivés sur milieu extrait de malt gélosé (Malt
Extract Agar) couvert d’une membrane stérile de cellophane qui facilite la
collecte du mycélium. Par la suite, l’extraction de l’ADN a été effectuée selon le
protocole de Möِller et al. (1992).
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Les extraits d’ADN ont été amplifiés par PCR avec une amorce Ph2 (5’-
ATACTGTGGGGACGAAAGTC-3’) ayant une séquence nucléotide commune
avec les espèces de Phytophthora, cette dernière est conçue pour la région ITS1
et combinée avec l’amorce universelle ITS4 (5’-
TCCTCCGCTTATTGATATGC-3’) (Cooke et Duncan, 1997) pour amplifier
l’ADN des espèces de Phytophthora. Deux autres paires d’amorces spécifiques
Pc2B-Pc7 (respectivement 5’-GTTTGTGCTTCGGGCCGAGG-3 et 5’-
GCAGAAAAGCATACAATAAGCGCCTGT-3’) pour P. citrophthora et Pn5B-
Pn6 (respectivement 5’-GAACAATGCAACTTATTGGACGTTT-3’ et 5’-
AACCGAAGCTGCCACCCTAC-3’) pour P. nicotianae ont été utilisées
(Ippolito et al., 2002).
Les réactions de PCR ont été réalisées dans un volume total de 25 µl
contenant 100 ng d’ADN du génome, 10 mM de Tris-HCl (pH 9), 50 mM KCl,
0.1% Triton X-100, 100 µM de dNTPs, 1 mM MgCl
2
, 1 unité de la Taq
polymérase (Taq DNA polymérase, Promega Corporation, WI, USA) et 2 µM
des amorces spécifiques. La réaction de PCR a été alors incubée dans un
thermocycle programmable (PCR express, Hybaid, UK) commençant par 5 min
pour la dénaturation à 95°C, ensuite 35 cycles à 95°C pour 30 s, regroupement à
50 °C pour 30 s, et extension à 72°C pour 1 min. Les fragments amplifiés ont é
analysés par électrophorèse dans un gel d’agarose à 2% dans le tampon TAE
(Tris, Acétate, EDTA) (Sambrook et al., 1989) et visualisés par coloration au
bromure d’éthidium (2 µg ml
-1
).
2. RESULTATS ET DISCUSSION
2.1. Evaluation de la densité d’inoculum et de l’infection racinaire dans les
vergers
Lors de l’échantillonnage, plusieurs symptômes ont été observés comme
signe d’attaque par Phytophthora. Les arbres dépéris ont montré des racines avec
des chevelus peu nombreux courts et noueux et le tissu cortical se fendant
facilement sous une pression légère des doigts (Figure 1). Dans certains cas, une
présence des flux de gomme dans la zone du collet a été observée.
La densité d’inoculum (DI) de Phytophthora spp. dans le sol, prélevé sous la
frondaison des plantes montrant des attaques racinaires, a varié entre 0 et 28
propagules par gramme de sol sec (Tableau 2). La valeur la plus élevée (28) a été
rapportée dans un verger d’oranger âde 40 ans à Beni Khalled. Par contre,
deux autres vergers ont montré une DI inférieure à une propagule par gramme de
sol. La DI du sol prélevée sous la frondaison des arbres apparemment sains, est
toujours plus faible que la DI des sols des arbres montrant des signes de
dépérissement (Tableau 2).
1 / 12 100%

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