LE CAMEROUN DANS LES RELATIONS INTERNATIONALES
LE CAMEROUN PRECOLONIAL
Par SANGO MATHIAS
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CHAPITRE 1 :
LE CAMEROUN PRECOLONIAL (1472-1884)
- Définir : peuple, troc, échanges transfrontaliers, commerce transsaharien, période
précoloniale ;
- Circonscrire le « Cameroun » précolonial dans l’espace et dans le temps ;
- Montrer que le Cameroun entretenait déjà des relations avec l’extérieur
INTRODUCTION
Quand on parle de "Cameroun précolonial", il s’agit de l’histoire de l’espace qui deviendra
Cameroun bien avant la colonisation européenne (allemande) qui date du 19e siècle (1884).
Or, si l’on fait débuter les relations internationales aux traités de Westphalie (1648), au
moment le système d'États au sens moderne du terme s'est affirmé
1
, il serait insensé de
parler du « Cameroun » puisqu’il n’existe en tant qu’Etat qu’à partir de 1960. Cependant,
l’espace qui portera plus tard le nom « Cameroun » existait bel et bien et accueillait
2
ici et
des peuplades
3
qui nouèrent des contacts avec d’autres populations. En effet, la zone couvrant
le sud-ouest de l'actuel Cameroun et le sud-est du Nigeria ont été le berceau des peuples
bantous
4
au Ier millénaire avant notre ère. Difficiles donc de parler de peuples
5
à cette
époque. Cela dit, depuis l’Antiquité
6
, le Cameroun est en contact avec le monde
méditerranéen grâce aux pistes du Sahara : c’est le commerce transsaharien. A partir du Xe
siècle, il connait un peuplement de la part des Sao, des Soudanais et Bantous (XVe siècle),
Peul (XVIIIe siècle) et des attaques des KANEMBOA du Bornou voisin (XIVe, XVe siècles)
et des Peuls (XIXe siècle). Ses relations avec l’Europe se nouèrent à partir du XVe siècle.
1
Les traités de Westphalie ont poussé à la constitution d'États-Nations indépendants ou souverains.
Les traités de Westphalie établirent les bases des relations internationales modernes, à savoir :
- La souveraineté des Etats sur leur territoire et le principe de l’intégrité territoriale
- Le principe de l’égalité légale entre Etats
- Le principe de la non-intervention d’un Etat dans les affaires d’un autre
2
Depuis les temps immémoriaux, depuis la préhistoire (terme désignant une période de l’histoire de l’humanité
qui va de l’apparition de l’homme jusqu’à l’avènement de l’écriture (v. 3300 av. J.-C. en Mésopotamie. En effet,
la plus ancienne écriture connue date d'un peu avant 3000 av. J.-C. et elle est attribuée aux Sumériens de
Mésopotamie. Cette très ancienne écriture est logographique, c'est pourquoi elle ne peut qu'être lue en termes
vagues.), le Cameroun était habité, comme en attestent de nombreux objets en pierre taillée et polie retrouvés
dans presque tout le territoire. En effet, sur le Mont Makabai, petit village situé près de Maroua, se trouve l’un
des sites préhistoriques les plus importants du monde ; on y rencontre des objets en pierre, mélangés à d’énormes
grottes qui forment une couche d’environ un mètre d’épaisseur.
3
Groupe humain, généralement composé d'un petit nombre d'individus au mode de vie traditionnel
4
Les premiers habitants du Cameroun furent probablement les Baka , également appelés pygmées.
5
1. ensemble de personnes constituant une nation Exemple : le peuple français
2. politique ensemble de personnes soumises au même système politique et au même gouvernement
[Remarque d'usage: souvent au singulier] Exemple : les élus du peuple
6
Période de l'histoire occidentale qui commence avec la naissance du monde grec vers 2000 avant Jésus-Christ,
pendant l'âge du bronze, et s'achève à la fin de l'Empire romain d'Occident en 476 après Jésus-Christ
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I- UNE probable
7
PARTICIPATION AU COMMERCE TRANSSAHARIEN
On nomme commerce transsaharien le transport des marchandises par voie désertique et les
relations et pratiques commerciales entre les territoires africains séparés par le Sahara
8
. Ce
commerce s’est étalé du Néolithique jusqu’au XVIe siècle
9
. Or, Depuis les temps
immémoriaux, depuis la préhistoire, le Cameroun était habité, comme en attestent de
nombreux objets en pierre taillée et polie retrouvés dans presque tout le territoire. Grâce aux
vestiges, des chercheurs ont précisé la période de peuplement ancien camerounais, remontant
à 30 000 ans avant notre ère. Ils ont identifié plusieurs phases d’occupation, rattachées à l’âge
de la Pierre récent, au stade néolithique, à l’âge du Fer et à la période précoloniale. Ainsi, de
1000 avant J.-C. à 1400 après J.-C. s'épanouit, dans la région périphérique du Lac Tchad, la
civilisation des Sao. D'après une théorie récente mieux fondée les Sao étaient des immigrants
partis du Proche-Orient lors de l'effondrement de l'Empire assyrien à la fin du VIIe siècle av.
J.-C.2.
Carte du commerce transsaharien du VIIIe au XVIe siècle
Le IXe siècle av. J.-C. voit l'émergence d'un premier commerce transsaharien, activés par les
comptoirs phéniciens sur la rive sud de la Méditerranée
10
. Cet établissement suscite une
demande nouvelle en produits africains tels que peaux d’animaux, parfums (ambre marin),
ivoire et œufs d’autruche : ces derniers sont utilisés par les Phéniciens et les Carthaginois pour
7
Susceptible de se confirmer avec des chances sérieuses Synonyme: vraisemblable Exemple : il est probable
qu'il vienne
8
Le commerce transsaharien désigne le commerce à travers le Sahara entre les pays méditerranéens et l'Afrique
subsaharienne.
9
Fasciné par les récits des anciens chroniqueurs sur la richesse du Soudan, le sultan du Maroc el-Mansour lance
une expédition à travers le Sahara en 1591. Mais les envahisseurs se désolent de ne pas trouver les merveilles
escomptées lorsqu’ils s’emparent du palais du sultan de Tombouctou. L’installation de comptoirs commerciaux
par les Européens depuis la fin du XVe siècle a effectivement porté ombrage au commerce transsaharien, lequel
subsiste néanmoins jusqu’au XIXe siècle.
10
Océan Atlantique jusqu’au sud du Maroc, mer Rouge et océan Indien
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les rituels funéraires car l’œuf, une fois décoré à l’ocre, est considéré comme un symbole de
vie. Grecs, Phéniciens puis Carthaginois avec l'Afrique centrale pour les obtenir.
Puis, lorsque les Romains s’établissent en Afrique du Nord à la toute fin du Ier siècle av. J.-C.,
ils construisent de grands ports dont certains, comme Leptis Magna (Libye), reçoivent de la
part des populations du désert des produits du Sud : peaux d’animaux, plumes et œufs
d’autruches, esclaves. Après avoir soumis le Fezzan (19 av. J.-C.), les Romains lancent
quelques expéditions commerciales vers le sud, comme celles de Suellius Flacus et de Julius
Maternus. Même s’ils préfèrent s’en remettre à leurs nouveaux alliés pour se procurer les
marchandises désirées, les Romains apportent un élément essentiel au commerce
transsaharien, à savoir l’introduction du chameau qui remplace désormais la caravane de
bovins.
Il faut attendre la constitution d’une vaste zone de commerce musulman, à partir du VIIIe
siècle, pour qu’un commerce régulier se mette en place. Une première route est aménagée à
l’ouest du Sahara par la construction de puits et de palmeraies, destinés à accueillir les
caravanes ; elle relie la cité de Sidjilmassa, au sud du Maroc, à Aoudaghost, au sud de la
Mauritanie. La ville mauritanienne est, en fait, un comptoir aménagé par les commerçants
musulmans pour faire du troc avec la capitale de l’empire du Ghana dont la richesse repose
sur les riches gisements d’or des sources du Sénégal et du Niger. Ainsi, au VIIIe siècle, les
Arabes échangent l'or du Ghana contre du sel produit dans le Sahara central.
Le commerce entraîne la prospérité des transporteurs nomades mais aussi des États du Sud du
Sahara : ce que l'historien Bernard Lugan appelle « l'âge d'or du Sahel ». Le premier à
émerger est le Ghana à l'issue de la route transsaharienne la plus à l'Ouest. Le commerce
transsaharien le pousse à la conquête d'Aoudaghost en 990. Le Mali au XIIIe siècle et l'empire
de Gao au XVe siècle lui succèdent. La priorité de ces États est la « défense des carrefours
sahariens et le maintien du monopole des transactions entre l'Afrique du Nord et le Sahel ».
En effet, après les prises d’Aoudaghost (1054) et de Ghana (1076) par les Almoravides
musulmans, Tombouctou devient une métropole commerciale et religieuse musulmane
réputée. Car le commerce transsaharien est dorénavant interdépendant de la foi islamique. La
traite transsaharienne a commencé dès l'antiquité. L'Islam la développe car la religion interdit
de réduire les musulmans en esclaves, contrairement aux Africains « infidèles » qui vivent au
sud du Sahara.
Les marchandises du Nord (poteries vernissées, vêtements de laine, verrerie, objets en métal,
blé et orge) sont troquées contre de l’ivoire, des plumes d’autruches, de l’ambre gris pour
faire des colliers, de l’or et des esclaves
11
. Parallèlement se développe un commerce plus
important entre le sel des dépressions du centre du désert, destiné aux populations du Sahel, et
le mil constituant la nourriture des habitants des oasis et des nomades.
Au XVIe siècle, face à la concurrence des navigateurs européens sur la côte atlantique puis à
l'abolition de l'esclavage et de la traite, l'activité décline à l'Ouest entraînant un
appauvrissement des caravansérails, oasis et cités caravanières auparavant « brillantes et
11
Du VIIe siècle au XIXe siècle av. J.-C., entre 7 et 8 millions d'esclaves auraient ainsi été vendus
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prospères ». Le trafic caravanier s'oriente alors vers l'Est de la Méditerranée, la mer Rouge et
l'océan Indien par Zanzibar, le commerce est encore actif au XIXe siècle et particulièrement
florissant dans les années 1860 et 1870
Au demeurant
12
, cette traite suit un axe sud-nord mais aussi ouest-est, depuis la région des
Grands Lacs, du bassin du Congo et de la vallée du Zambèze jusqu'au Caire et à Bagdad, plus
tard vers Zanzibar. Le royaume du Kanem-Bornou prospère grâce à ce trafic jusqu'au XVIIIe
siècle. Il est donc fort probable que le Cameroun ait pris part à cette activité. Le Cameroun
exportait de l’ivoire, des peaux de panthère, des plumes d’autruche, du natron, et importait
des perles, des objets en bronze, du sel et des tissus. Les bœufs, les chevaux et les ânes
aidaient à traverser le Sahara, alors humide et verdoyant.
A ces relations commerciales vont succéder dès le XIVe siècle des agressions extérieures.
II- LES Agressions Étrangères CONTRE LE CAMEROUN
Il faut distinguer d’une part les agressions contre les Sao et d’autre part les agressions peules.
A- LES AGRESSIONS CONTRE LES SAO
Entre les VIIe et VIIIe siècles, des nomades blancs, les Toubou, un peuple berbère, s’établirent
à l'est du lac Tchad
13
et formèrent un état doté d'une structure assez lâche. Ce nouveau peuple
de nomades fut gouverné par les mais ou rois de la dynastie des Sefawas (ou Sefuwa) qui
supplantèrent la dynastie des Zaghaouas. Ils installèrent leur capitale à N’Jimi (Ndjimi). La
prospérité de ce royaume était fondée sur le commerce transsaharien ; très tôt, il fut marqué
par l'influence de l'islam qui devint la principale religion. En effet, les nouveaux dirigeants se
convertirent à l'islam vers le XIe siècle.
Les cités-états Sao sont envahies par le Kanem au XIe siècle. La population est métissée entre
les nomades blancs et les populations noires. Puis, afin de former ce qui sera le Grand Kanem,
les Kanembu décident de coloniser l’ouest du lac et de maîtriser les Sao de cette région. Mais
les Sefuwa exercent toujours une répression féroce sur les Sao qui se fugient à l’intérieur du
lac. .
Les conquêtes entreprises au cours des deux siècles suivants permirent d'étendre l'empire, à
l'ouest jusqu'au fleuve Niger et à l'est jusqu'au royaume Ouaddaï ; au nord, l'empire étendit sa
puissance jusqu'au Fezzan.
12
Pour le reste ou d'un autre point de vue Synonyme: par ailleurs Synonyme: au reste Exemple : il est très
discret; au demeurant il est charmant
13
Fondé vers 820, par Maï de Tibesti (petit frère de Derdo Molitafor)
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Au XIVe siècle, des guerres contre le peuple boulala au sud forcèrent le mai à se diriger vers
l'ouest, jusqu'à Bornou, les mais suivants restaurèrent l'empire, et sous Ali Ghaji,
Ngazargamu fut choisie comme nouvelle capitale. Les attaques et exterminations connaissent
leur apogée au XIVe siècle (sous le règne du Kanem Idrīs Alaoma) : destruction des camps
fortifiés et des habitations Sao, destruction des champs et des récoltes, abattage des arbres,
interdictions de sortir des camps et villes fortifiées. Les Sao furent vaincus par la famine.
Les Sao qui ne périrent pas dans ces guerres trouvèrent probablement refuge dans les massifs
montagneux du Nord Cameroun on retrouve progressivement leurs traces vers Maroua,
Mora, Bibemi, et Pitoa.
Au XVe siècle, il y eut la migration des Soudanais. De l’Abyssinie et de l’Est du Soudan, ils
partirent de l’Est à l’Ouest en traversant le Nord Cameroun. Si la plupart des Soudanais
continuèrent au Nigeria et en Afrique de l’Ouest, certains d’entre eux (les Massa, les
Moundang, et les Toupouri) s’arrêtèrent au Cameroun et se mélangèrent aux populations
locales.
Au XVIe siècle, l'empire s'étendit et vit sa puissance s'accroître, en particulier sous le règne
d'Idris III Alaoma (v. 1571-1603), qui fit l'acquisition d'armes à feu fournies par les Turcs
ottomans d'Afrique du Nord.
À son apogée, le Kanem-Bornou contrôlait les routes du Sahara oriental, mettant l'Afrique
centrale en liaison avec l'Égypte et la Libye; il amorça un long déclin à partir du XVIIe siècle.
L'empire déclina une fois de plus au XVIIIe siècle, en raison, notamment, d'une infiltration
des Peul par l'ouest. Il résista péniblement à un assaut d'Osman Dan Fodio entre 1808 et 1809.
L'empire fut finalement absorbé par les Ouaddaï en 1846.
B- Le Djihad des Peuls
A la fin du XVIIe siècle, les Peuls ou Foulbés arrivèrent au Nord Cameroun, dont ils
constituent environ le tiers de la population et ils pratiquent essentiellement l’élevage,
après une longue migration qui les conduisit de l’Egypte (ou Abyssinie) au Mali, au Sénégal,
au Nigéria et au Nord Cameroun. Acceptés par les populations des territoires qu’ils ont
traversés, subdivisés en clans, troquant avec les populations locales les produits de leurs
troupeaux, les Peuls menèrent une vie paisible.
Fils d'un chef religieux musulman peul, Ousman dan Fodio, dont le nom signifie « le fils du
lettré », naquit dans le royaume haoussa de Gobir, dans le nord-ouest de l'actuel Nigeria. Il
commença vers l'âge de 20 ans à voyager, enseignant et prêchant l'islam. Ousman dan Fodio
se révolta contre les pratiques religieuses du sultan, qui, bien que musulman, mêlait la
tradition animiste à l'islam. Exilé, il regroupa des disciples parmi les nomades peuls et les
agriculteurs haoussa, qui le nommèrent, en 1804, commandeur des croyants. Il fonda alors la
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