la FEUILLE VERTE JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – VILLE DE GENÈVE DÉPARTEMENT DE LA CULTURE – N° 38 – DÉCEMBRE 2007 Brèves -Actuel sommaire impressum 100 000 visiteurs pour REAGIR es week-ends de la Fête du développement durable, du marché ProSpecieRara et de l’inauguration de notre nouvel espace pour la petite enfance, la Forêt enchantée, et enfin la Marche de l’espoir le 14 octobre ont largement contribué à ce succès. Plus de 55 visites guidées (hors publics scolaires) ont été conduites par les commissaires de l’exposition REAGIR, Didier Roguet et Pascal Peduzzi de mai à octobre. Plus de 200 classes ont visité l’exposition avec leurs enseignants. Plus de 120 coupures de presse et de nombreux passages sur les radios et télévisions nationales et locales ont balisé ces 6 mois de prise de conscience et de réaction aux grandes catastrophes environnementales qui déchirent notre planète. Les réactions des visiteurs ont été très positives et nous avons probablement contribué, avec nos partenaires, à un certain éveil des BRÈVES - ACTUEL 2 EDITORIAL 3-4 JARDIN 5à8 BIBLIOTHÈQUE 9 - 10 CONSERVATION 11 RECHERCHE 12 à 16 PARTENAIRES 17 RÉTROSPECTIVE 18 à 21 COOPÉRATION 22 - 23 AGENDA - PROGRAMME 24 à 27 Rédacteurs responsables D. Roguet, P. Perret Rédacteurs D. Aeschimann; A. Breda; P. Bungener; L. Burgisser; D. Fischer Huelin; D. Gautier; L. Gautier; V. Gerritsen; C. Golé; D. Jeanmonod; C. Lambelet; P.-A. Loizeau; P. Martin; P. Mugny; Y. Naciri; M. Perret; A. Pin; P. Steinmann; M. Stitelmann (traduction); A. Traoré; C. Vaz Photographies B. Baumler; R. Braito; L. Gautier; D. Girod; C. Lambelet; P.-A. Loizeau; B. Renaud; D. Roguet Photographie de couverture D. Roguet Conception graphique M. Berthod Impression Atar Roto-Press SA, Genève Le journal des Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève paraît une fois l’an. © 2007 Conservatoire et Jardin botaniques, Genève. Toute reproduction intégrale ou partielle des textes ou des illustrations de cette édition est strictement interdite sans accord préalable des CJB. Vous pouvez télécharger la feuille verte au format pdf sur notre site internet: www.ville-ge.ch/cjb consciences et surtout à une mise en pratique des gestes qui sauveront notre planète. Le mouvement est en marche et les CJB ont ajouté une petite pierre à l’édifice. L’exposition REAGIR se poursuit de manière virtuelle sur le site du GRID-PNUE: www.grid.unep.ch/activities/global_change/atlas/ex_2007.fr.php L’exposition (panneaux) dans son intégralité est téléchargeable, ainsi que les documents pédagogiques qui ont été produits par les CJB et les enseignants pour REAGIR. Nous profitons de ce message pour remercier tous les contributeurs, participants et visiteurs qui ont œuvré d’une manière ou d’une autre au succès de cette entreprise. Wollemia NOBILIS es CJB et plus particulièrement sa serre tempérée accueillent depuis le mois de novembre 2007 un nouvel hôte de marque: Wollemia nobilis, le pin wollemi. Cette Araucariacée d’Australie, véritable fossile vivant, est une curiosité botanique. Elle est originaire des Montagnes bleues au nord-ouest de Sidney, où elle a été redécouverte en 1994 sous la forme d’une population relictuelle de moins de 100 individus. Des boutures ont été prélevées et l’espèce multipliée. C’est un de ces exemplaires originaux que vous pouvez admirer dans notre serre tempérée. Venez nombreux admirer ce «dinosaure botanique» vivant! WI-FI public n réseau Wi-Fi public et gratuit a été mis en place début octobre dans le parc des Conservatoire et Jardin botaniques, autour des principaux bâtiments. Cette couverture concerne aujourd'hui la zone comprise entre le chemin de l'Impératrice et l'avenue de la Paix et la Console. Cet accès au Wi-Fi, s’il ne s'étend pas à l'intérieur des bâtiments, couvre néanmoins les sous-sols abritant la collection générale de l’herbier genevois. Musées en été Découverte, éveil culturel et scientifique n 2007 et pour la seconde fois, les musées de la Ville de Genève ont proposé, fin août, une semaine d’ateliers itinérants aux enfants de 8 à 11 ans. Fédérés autour de l’idée de permettre aux jeunes visiteurs d’apprivoiser leurs musées, ceux-ci ont trouvé des partenaires efficaces auprès du Service des Loisirs de la Jeunesse SLJ (pour la gestion administrative et la communication) et du Groupement intercommunal pour l’animation parascolaire GIAP (pour l’encadrement des enfants durant la pause de midi). Les participants, munis d’un carnet de route, sont ainsi entrés dans la peau de chercheurs et de professionnels de terrain de tous bords. Signé : Les musées CJB, MAH, MEG, MHN et MHS Convaincus que l’on pouvait faire du «pointu - sympa», nous avons cherché à stimuler chez eux la créativité, le sens de l’observation et le plaisir de la découverte, par le biais d’activités longuement mijotées et savamment minutées. Les enfants et les parents nous l’ont dit et écrit: «J’ai eu beaucoup de plaisir», «Je serai scientifique, comme Louis», «C’était génial», «Merci pour cette magnifique semaine!». La semaine d’ateliers itinérants Musées en été – ateliers aura donc certainement à nouveau lieu en août 2008. Renseignements et inscriptions sur le site du SLJ : http://www.geneve.ch/slj/. PAGE 2 – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES Editorial Réagissons ! Patrice Mugny Maire de Genève Les Conservatoire et Jardin botaniques sont une porte ouverte sur la nature. Cette porte, ils sont chaque année des centaines de milliers à en passer le seuil, pour admirer, découvrir ou se ressourcer au contact des trésors végétaux de ce véritable musée vivant endant six mois, les visiteurs des CJB ont aussi été conviés à se frotter à des espaces révélateurs des grandes catastrophes environnementales qui menacent notre planète en ce début du 21e siècle. Organisée sous le label «Tout peut arriver», thème choisi par le Département de la culture pour s’interroger sur la notion même de catastrophe, l’exposi- Ces catastrophes sont interdépendantes et nous en sommes tous peu ou prou responsables tion REAGIR a proposé des approches complémentaires des problèmes liés au changement climatique, à la déforestation et à la désertification, aux pollutions ainsi qu’à la perte de la biodiversité. Ces approches se voulaient tout à la fois interactives, jardinées et imagées, afin de bien faire comprendre un message essentiel: ces catastrophes sont interdépendantes et nous en sommes tous peu ou prou responsables. Que puis-je faire, à mon modeste niveau, pour contribuer au sauvetage de la planète? Quel est le «juste» prix à payer pour cela ? Est-il possible de vivre aussi bien, tout en respectant mieux mon environnement? Ces questions, et bien d’autres, trouvaient des réponses appropriées, c’està-dire accessibles à tous, au fil d’une ballade intelligemment ludique à travers les phénomènes catastrophiques que nous engendrons, sans toujours le savoir, mais aussi parfois sans y croire vraiment. Au final, l’exposition REAGIR aura réussi à relever le défi de parler simplement de problèmes éminemment sérieux; à faire prendre conscience de l’impérieuse nécessité d’opter pour des gestes écologiques et citoyens, si l’on veut pouvoir faire mentir les sombres perspectives que laissent entrevoir les connaissances scientifiques actuelles. Ainsi, les CJB prouvent une fois encore qu’ils sont très présents dans le débat sur nos modes de vie, sur ce que notre environnement peut supporter. Ces questionnements et ces préoccupations sont au cœur de la politique de la Ville de Genève. garde s’applique pleinement aux espaces urbains, dans lesquels se concentrent aujourd’hui les quatre cinquièmes de l’humanité et sur lesquels s’exercent les plus fortes pressions sur la qualité de vie. Défendre la nature en ville ne relève pas du simple slogan écolo Il est donc temps de «réagir» en favorisant la création d’éco-quartiers, où le contact avec la nature est aussi le lieu d’expériences d’ouverture, d’échanges, un facteur d’intégration et de cohésion sociale au service d’un développement harmonieux et durable. Car nous le savons bien, la nature ne s’arrête pas aux portes de la cité. Défendre la nature en ville ne relève pas du simple slogan écolo, pas plus d’ailleurs qu’il ne répond à de purs enjeux esthétiques. Au contraire, c’est militer pour que la sauvegarde d’un environnement sain ne se limite pas à la création de zones artificiellement protégées ; lutter pour que cette sauve- LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – PAGE 3 Une CANDIDATURE utile Pourquoi la candidature non retenue des CJB à l'organisation du Congrès des botanistes africains de 2010 est-elle profitable? Pierre-André Loizeau Directeur es CJB ont été sollicités au début de l'année par nos collègues de Zürich afin que nous déposions notre candidature pour l'organisation du Congrès des botanistes travaillant sur l'Afrique. Ceux-ci sont regroupés au sein d'une association dont l'acronyme est AETFAT, soit l'Association pour l'Etude Taxonomique de la Flore d'Afrique Tropicale. Intéressés par la tribune que représentait cette candidature, nous avons monté un projet en un mois, afin d'aller le présenter au congrès qui se tenait fin février 2007 à Yaoundé, au Caméroun. En concurrence avec Madagascar, notre candidature pour l'organisation du congrès 2010 a échoué dans une proportion de deux contre un face à une offre alléchante, en particulier sur le plan touristique. Aucune amertume du côté suisse, car ce fut pour nous l'occasion de présenter ou rappeler à une assemblée réunissant les plus grands spécialistes du domaine la richesse de l'herbier et de la bibliothèque de Genève, et de mettre en avant l'achèvement de la base de données la plus complète au plan mondial sur la nomenclature des plantes d'Afrique. Nous avons d’ailleurs observé une augmentation des demandes de prêts d'échantillons d'herbier grâce à cette présentation. Par ailleurs des contacts lors de ce congrès nous ont permis de signer en octobre une convention avec le «Missouri Botanical Garden» et La venue au congrès a permis d'aller consulter l'herbier national du Caméroun le «South African National Biodiversity Institute» sur des échanges de données sur la nomenclature des plantes de Madagascar. africaine. A noter que cette base de données peut être consultée à l'adresse ci-dessous: www.ville-ge.ch/cjb/bd/africa/ De plus, dans le cadre de cette convention, le «Missouri Botanical Garden» mandatera un scientifique suisse pour une période de trois ans, qui sera basé aux CJB et qui travaillera au bénéfice des trois partenaires sur la constitution de la base de données nomenclaturale malgache, celle-ci venant compléter de façon quasi exhaustive la base de données Il se pourrait donc qu'en 2010 les scientifiques des CJB aillent à Madagascar présenter la liste des espèces malgaches connues (rappelons qu'elles sont à près de 90% endémiques de l'Ile) qui aura été constituée à Genève. C'est une autre façon de faire de la coopération avec le Sud, et ce sera une autre manière de participer activement au prochain congrès. Ci-dessus Une vue de Yaoundé, Caméroun, prise depuis le Palais des Congrès A droite Les marches du Palais des Congrès de Yaoundé PAGE 4 – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES Jardin Un Jardin botanique de COLLECTIONS 190 ans après leur création, les Conservatoire et Jardin botaniques, forts des lignes directrices tracées par leur fondateur, l'illustre Augustin-Pyramus de Candolle, gardent pour mission la conservation d'un patrimoine, à travers notamment les collections vivantes es collections sont constituées autour de familles (ex.: Arecaceae ou famille des palmiers), de genres botaniques (ex.: Iris), de thèmes (ex.: Plantes à huile), de provenances géographiques (ex.: Plantes de l'Himalaya) ou encore d'associations végétales (ex.: Drabo-Seslerion, représentant le milieu «Dalles calcaires et lapiez de montagne»). Elles jouent un grand rôle pour la recherche, l'éducation, la conservation, la protection et requièrent également diverses explorations pour leur constitution. RÉPARTITION EN TAXONS DE LA COLLECTION DANS LES SECTEURS DU JARDIN 04 29 78 28 L'ensemble des quelques 16 000 spécimens concernés, représente plus de 10 000 taxons, dont la valeur est essentielle pour les travaux de connaissance et de classification de la flore. 266 Serres Rocailles 4181 Des rencontres annuelles entre conservateurs et jardiniers permettent d'ajuster les attentes des scientifiques, celles du jardinier-chef et des chefs de cultures et de jauger les possibilités de réalisation pratique en matière de collections. Alexandre Breda Jardinier-chef Pascale Steinmann Adjointe au Jardinier-chef Parc et dendrologie Horticulture et animaux CRÉATION D'UNE COLLECTION En 2003, une collection sud-américaine de Gesnériacées, de grande valeur scientifique, a été présentée dans une serre d'exposition publique, mettant en valeur les travaux de certains conservateurs et fournissant ainsi plus de matériel végétal vivant pour des recherches. La collection des bégonias, qui occupait jusqu'alors cette serre, a été transférée dans l'annexe de Pregny. Près de 100 espèces rassemblées patiemment, puis cultivées, ont été mises en scène dans un compartiment de serre tempérée. Avec savoir-faire, 32 m2 de rocailles ont été agencés avec des blocs de roches poreuses (cornioles et tuf) recréant les affleurements ou parois rocheuses des montagnes de la côte atlantique brésilienne. Une grotte «suintante» a été conçue pour les espèces d'ombre qui aiment l'humidité. Constituer une collection est un travail d'équipe entre les conservateurs de l'Institut qui valorisent et déterminent botaniquement les collections vivantes, et les jardiniers qui se procurent, élèvent et plantent les multiples spécimens. L'implication de tous, pour les projets touchant à la conservation est primordiale. Les différents réseaux entre jardins botaniques permettent, par échange, d'enrichir les collections, soit en commandant des graines via les Index Seminum (catalogues des graines proposées par chaque institution), soit quelquefois en se procurant directement des spécimens, multipliés ou divisés dans d’autres jardins botaniques. Certaines plantes proviennent également de milieux naturels, et dans ce cas il est indispensable d'obtenir les autorisations officielles préalables de collecte et d’exportation. Chacun de ces échanges est soumis aux règles du réseau IPEN (International Plant Exchange Network) auquel les CJB ont adhéré en 2006. L'IPEN permet la libre circulation, entre les jardins botaniques, du matériel végétal vivant utilisé à but non commercial. Tout matériel échangé (graines, plantes, etc.) est muni d'un numéro qui permet sa traçabilité. Pour mener à bien ses missions au travers de ses collections, le Jardin botanique de Genève entretient également des liens avec des acteurs de la conservation de la flore au niveau national, la Commission suisse pour la conservation des plantes sauvages (CPS), la Commission suisse pour la conservation des plantes cultivées (CPC), le Centre du Réseau Suisse de Floristique (CRSF), ProSpecieRara (PSR, Fondation suisse pour la diversité patrimoniale et génétique liée aux végétaux et aux animaux). ENTRETIEN SPÉCIALISÉ DES COLLECTIONS BOTANIQUES Les objectifs fixés requièrent une organisation complexe et la formation continue des personnes travaillant sur le terrain. Les jardiniers des CJB possèdent, outre une formation professionnelle classique, des compétences de spécialistes de collections qui s'acquièrent au long des années de pratique au côté des plus expérimentés. En effet, les plantes proviennent de milieux naturels très différents, et il n'existe pas, pour chaque taxon, de mode de culture référencé. LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – PAGE 5 Ambiance tropicale de la serre d'exposition avec palmiers et épiphytes Une formation continue spécialisée se révèle nécessaire. Ainsi, pour améliorer la qualité de la collection des Gesnériacées, deux horticultrices ont suivi un stage d'approfondissement auprès de leurs collègues du Jardin botanique royal d'Edinburgh. A L'EXTÉRIEUR DES CJB AUSSI... Propriété de la Société Académique de Genève, le Jardin alpin de La Linnaea est géré par les CJB. Plusieurs fois par an, des jardiniers partent quelques jours à Bourg-Saint-Pierre (Valais) pour entretenir ou rénover les biotopes alpins. Le Jardin est également appelé pour des missions ponctuelles d'expertise ou de remise en état de collections étrangères: En 2001, Raymond Tripod, ancien jardinier-chef, a été sollicité pour l’expertise d’un arboretum à Bamako. A Dakar, il a dirigé le travail de réhabilitation du jardin botanique de l’université et, avec Gilles Nussbaum, chef de culture, il s’est également investi pour des aménagements zoologiques au parc de Hann. Maurice Thomet et Pierre Mattille, chefs de culture, ont travaillé en 2002, en Amérique du Sud, à la création d’une collection de référence de plantes médicinales pour l’université d’Asuncion (Paraguay) et à un projet de serre ethnobotanique pour le Centre d’éducation environnementale Kusillo de La Paz en Bolivie. Cette année, Alexandre Breda, jardinier-chef, a participé à une expertise botanique et horticole dans le cadre d'un projet d'aide au développement dans le nord de l'Inde. voises. Les professeurs, ainsi formés par une médiatrice, sont à même de proposer des visites autonomes et des activités à leur classe. TRANSMISSION DU SAVOIR, ÉDUCATION AUTOUR DES COLLECTIONS Par le biais de visites guidées, il est également possible à chacun d'approcher nos collections et de s'informer directement auprès des horticulteurs ou des botanistes. Des ateliers sont également mis sur pied pour les enfants. Pour les amateurs comme pour les botanistes qui visitent en nombre le jardin, interprétation et signalétique sont organisées pour permettre d'enrichir leurs connaissances au contact des collections: Chaque plante est munie d'une étiquette gravée qui indique, de manière très précise, le genre et l'espèce (binôme latin), le nom d'auteur (de la première description de l'espèce), la famille botanique et, s'il existe, le nom vernaculaire (français). Des panneaux de vulgarisation, des portfolios, voire des vitrines didactiques mettent en valeur certaines collections comme les terrasses des officinales, les plantes utiles du jardin d'hiver ou les animaux du programme PSR. Ils permettent la diffusion des connaissances. Une autre signalétique, ponctuelle et provisoire (entretien différencié, lutte biologique), sensibilise nos publics au respect de la biodiversité au travers de notre pratique de gestion des collections. Une des fonctions du secteur Education environnementale consiste à transmettre des connaissances relatives aux collections aux enseignants des écoles gene- Enfin, de nombreux élèves viennent suivre des stages de formation professionnelle dans notre institution et acquérir des connaissances en travaillant avec nos jardiniers-botanistes à la gestion des collections. RECHERCHE Un article scientifique sur les Gesneriacées, co-signé par 5 auteurs dont trois conservateurs des CJB, Mathieu Perret, Alain Chautems et Rodolphe Spichiger, vient de paraître dans la revue Evolution, couronnant ainsi des années de travaux en lien avec la collection récemment exposée. Avec 123 exemplaires répartis en 29 genres et 56 espèces, les CJB possèdent la collection de palmiers la plus riche de toute la Suisse. Dans le but de promouvoir la recherche sur les palmiers aux CJB, le 6e congrès du «Réseau européen des spécialistes scientifiques des palmiers» s'est tenu dans notre institution en mai 2006. Enfin, des botanistes étrangers visitent et améliorent régulièrement nos collections dans le cadre de leurs travaux. PAGE 6 – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES Photo: Robert Braito Photo: Delphine Girod Campanula fragilis subsp. cavolinii (Ten.) Dambolt ramenée lors d'une expédition botanique dans les Abruzzes (Italie) en juillet 2007 pour nos collections (nouveau groupe Apennins) Honoré du Prix Schulthess 2007 de Patrimoine Suisse, le Jardin alpin Flore-Alpe de Champex est à l’aube d’une nouvelle ère Jardin Le JARDIN ALPIN de Champex passe en mains valaisannes Pierre-André Loizeau Directeur 'est le 13 juillet 2007 que Patrimoine Suisse (Heimatschutz) a attribué au Jardin alpin FloreAlpe à Champex son Prix Schulthess des Jardins 2007, d'une valeur de CHF 30 000.–. Ce prix a pour but de faire connaître la culture des jardins en Suisse et de susciter l'intérêt pour ces trésors de notre patrimoine. Cette récompense rejaillit sur les Conservatoire et Jardin botaniques (CJB), car nous participons à la gestion de ce jardin depuis 40 ans. En effet, fondé en 1927 par Jean-Marcel Aubert, il fût, dès 1967, dirigé et développé par une fondation dont l'un des partenaires était la Ville de Genève, à travers les CJB. C'est l'histoire de ce jardin que nous souhaitons vous conter. LA PASSION D'UN INDUSTRIEL POUR LA MONTAGNE Jean-Marcel Aubert (1875-1968), industriel vaudois qui fit fortune avec les Câbleries et Tréfileries de Cossonay, passionné de montagne, achète en 1924 une parcelle de 600 m2 à Champex. Un jardin est aménagé autour d'un petit chalet dissimulé dans les arbres. En 1927, il demande à Henri Correvon, le célèbre horticulteur né en 1854 à Yverdon et qui fit une grande partie de sa carrière à Genève (il est le créateur du premier jardin alpin La Linnaea en 1889 à Bourg-St-Pierre et du Floraire de Chêne-Bourg en 1902), de l'aménager. Agé de 73 ans, Henri Correvon ne Jean-Paul Theurillat, directeur de la Fondation Aubert, à gauche, fait visiter Flore-Alpe aux membres de Patrimoine suisse peut que déléguer ces travaux qu'il supervise à différentes entreprises. Les travaux d'entretien annuel sont ensuite confiés à un soustraitant de Correvon, Théodor Katz, horticulteur à Chêne-Bougeries. Dès 1931, Aubert ouvre son jardin au public. On imagine que les acquisitions sont importantes, car il doit Remise du Prix Schulthess des Jardins 2007 de Patrimoine Suisse (Heimatschutz) le 13 juillet 2007 A droite Monsieur Philippe Biéler, président de Patrimoine suisse, à gauche Monsieur Pierre-André Loizeau, président de la Fondation Aubert assez rapidement faire appel à un jardinier engagé à demeure pour en assurer l'entretien. Le premier est Paul Kleiner. Le Jardin s'agrandit au fil des années et des opportunités, pour atteindre aujourd'hui une surface d'un peu plus d'un hectare. C'est en 1953 que JeanMarcel Aubert engage Egidio Anchisi, qui consacrera sa vie entière au jardin. rain et des bâtiments, ainsi que d'un capital dont les intérêts sont utilisés pour poursuivre des activités scientifiques. C'est ainsi que depuis le 22 mai 1967, ces deux partenaires assurent le budget de fonctionnement de Flore-Alpe à parts égales. Sa très grande puissance de travail, son intérêt pour la botanique, sa passion pour les voyages le conduisent à parcourir le monde pour en ramener des plantes destinées à augmenter la collection de Champex. Egidio Anchisi prend sa retraite en 1997, après 44 ans de bons et loyaux services dédiés à Flore-Alpe. En 1991, le canton hôte, soit l'Etat du Valais et la commune d'Orsières, rejoint le comité et apporte une contribution financière équivalente à chacun des autres partenaires. Cet apport permet d'engager un directeur, le Dr Jean-Paul Theurillat, dont les missions sont de développer l'activité scientifique de la fondation, d'orienter l'évolution de la collection et de la présenter au public. LA FONDATION JEAN-MARCEL AUBERT L'INFLUENCE DES JARDINIERS Jean-Marcel Aubert veut que son Jardin lui survive. Proche du terme de sa vie (1968), il obtient, probablement grâce à ses bons contacts avec les Professeurs de botanique Jacques Miège et Claude Favarger, que la Ville de Genève et l'Etat de Neuchâtel endossent la responsabilité de constituer une fondation destinée à diriger et assurer le financement du fonctionnement du Jardin de Champex. Aubert dote par ailleurs la fondation du ter- On a planté pendant les 25 premières années de la vie du jardin des plantes spectaculaires et multicolores, dont l'unique raison d'être est la délectation des yeux et certainement le plaisir des sens des visiteurs. Egidio Anchisi est lui plus attiré par les espèces sauvages. Il élève Flore-Alpe au rang de jardin botanique. Il n'achète pas de plantes, mais se rend dans la nature pour y collecter des graines ou les reçoit au travers des échanges LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – PAGE 7 reprise intégrale de la Fondation Aubert par l'Etat du Valais et la commune d'Orsières, élevant Flore-Alpe au rang de premier jardin botanique valaisan à part entière. Les rocailles du Jardin alpin Flore-Alpe avec d'autres jardins botaniques. Son jardin ressemble à un jardin de curiosités où sont amassées les plantes qu'il trouve lors de ses pérégrinations ou qui font l'objet de ses coups de coeur. Le jardin Flore-Alpe compte aujourd'hui plus de 3000 espèces de plantes venant des massifs montagneux du monde entier, avec une spécialisation sur les joubarbes, les primevères européennes, les saxifrages de haute montagne, les gentianes et les roses. On y trouve aussi des conifères du monde entier rapportés par Egidio Anchisi. L'actuel jardinier, Jean-Luc Poligné, en collaboration avec le directeur Jean-Paul Theurillat, imprime une vision un peu différente, plus thématique, en resserrant la collection sur les espèces alpines suisses, en regroupant les espèces dans leur communauté végétale (on notera ici le très bel arrangement présentant la pelouse steppique valaisanne) et en présentant des espèces médicinales. UN TRANSFERT EN DOUCEUR A l'heure où nous écrivons ses lignes (octobre 2007), les tractations vont bon train pour une En effet, l'Etat de Neuchâtel et la Ville de Genève, confrontés à des problèmes financiers, mais aussi face à l'état de maturité atteint par le Jardin alpin de Champex, ont décidé que le temps était venu de se retirer de la Fondation Aubert. Cependant les deux partenaires ne voulaient en aucun cas se retirer sans pérenniser la fondation. Suite à un travail important des membres du conseil de fondation, ceci fut rendu possible par une décision du Conseil d'Etat valaisan en septembre 2007, portée par la voix du Conseiller d'Etat Claude Roch lors d'une entrevue informelle à Champex, qui réunissait en outre Mme la Conseillère d'Etat neuchâteloise Sylvie Perrinjaquet et les membres du comité. Le Valais, dans le cadre d'un nouveau partenariat impliquant l'Etat du Valais et la commune d'Orsières, a décidé de reprendre les buts de la fondation à son compte, et de subvenir par des fonds adéquats au maintien du jardin alpin et de ses activités scientifiques. Les partenaires anciens et nouveaux ont toutefois négocié une année de transition, Neuchâtel et Genève participant encore à 20% du budget de fonctionnement en 2008. Les problèmes juridiques doivent encore être réglés dans les détails, mais l'essentiel est clairement affirmé, à savoir la volonté des partenaires de maintenir vivant ce bijou alpin, dans les meilleures conditions possibles. FLORE-ALPE, PREMIER JARDIN BOTANIQUE VALAISAN En tant que président de la Fondation Aubert, je suis très fier d'avoir été le successeur de nombre de personnalités du monde scientifique romand qui ont présidé aux destinées de Flore-Alpe, et de partager avec les membres du conseil de fondation le succès de ce tournant important de son existence. L'attribution du Prix Schulthess 2007 des jardins botaniques de Patrimoine suisse (Heimatschutz) est le signe que le jardin botanique de Champex a atteint un niveau de maturité remarquable grâce au travail des jardiniers et des scientifiques qui y ont œuvré. L'Etat de Neuchâtel et la Ville de Genève peuvent dès lors avec fierté transmettre un instrument touristique, scientifique et didactique de grande qualité aux habitants du canton du Valais. Le Jardin alpin Flore-Alpe domine le lac de Champex A droite Jean-Luc Poligné, jardinier responsable de Flore-Alpe, et à gauche PierreAndré Loizeau, président de la Fondation Aubert PAGE 8 – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES L’inventaire informatisé et la numérisation de la correspondance du botaniste Augustin-Pyramus de Candolle ont débuté en collaboration avec la famille de Candolle ien n'est plus propre à nourrir, si l'on peut parler ainsi, la réputation d'un homme de lettres et quelquefois même à la fonder, au moins pour un temps, qu'un grand commerce épistolaire». Cette citation de l'encyclopédiste d'Alembert illustre à merveille ce que fut la correspondance du botaniste genevois Augustin-Pyramus de Candolle (1778-1841), fondateur des CJB. Un exceptionnel corpus épistolaire imposant par sa taille, fascinant par les patronymes de bon nombre de ses épistoliers et resté préservé jusqu'à aujourd'hui. Il présente ainsi quelques 5546 lettres dites passives (parce qu'envoyées à Candolle) écrites par un total de 1229 correspondants issus de 24 nationalités différentes. Les noms des expéditeurs ne peuvent que laisser songeur notre lecteur: de célèbres hommes de lettres comme Honoré de Balzac ou François-René de Chateaubriand y cotoient des ministres de Bonaparte comme le duc de Bassano, des notables philantropes tels que le genevois Jean-Gabriel Eynard ou l'industriel Benjamin Delessert et des savants comme André-Marie Ampère ou Georges Cuvier. Patrick Bungener Collaborateur scientifique Bibliothèque Projet de digitalisation de la CORRESPONDANCE d'Augustin-Pyramus de Candolle UN CORPUS EXCEPTIONNEL RESTÉ INÉDIT Retracer l'histoire de cette collection d'autographes permet de mieux comprendre comment cette collection a pu arriver jusqu'à nous. A la mort de son père, Alphonse de Candolle (1806-1893) va soigneusement conserver et classer cette correspondance en vue de son édition qu'il ne réalisera que très partiellement. Par la suite, son fils Casimir (1836-1918) et son petit fils Augustin (18681920) prendront le relais. A la mort de ce dernier, sa veuve décide de céder en 1924 une partie de la collection aux CJB, comprenant aussi les lettres reçues par Alphonse et Casimir, en sus de l'herbier et la bibliothèque personnelle légués en 1921. «Le désir de la famille a été de fournir, par le don de ces archives, un complément utile à l'Herbier de Candolle», relate ainsi le rapport annuel des CJB de 1924-1925. L'inventaire de la collection réalisé à l'époque atteste que les lettres données ont été sélectionnées sur la base de leur contenu. Seules les lettres traitant de botanique On totalise quelques 11 000 lettres échangées, sur une période de 43 ans ont ainsi été léguées, les autres, considérées comme des missives personnelles, restant en main de la famille. Au total, ce ne sont donc pas moins de 2891 lettres (52% du total de la correspondance reçue d'Augustin-Pyramus) qui entrent dans les archives des CJB. Une centaine de lettres écrites de sa main, représentant 8% du total de sa correspondance active (ou envoyée) restée présente sur Genève, est encore léguée aux CJB. Les autres lettres envoyées par Candolle étant dispersées aux quatre coins de l'Europe (quand elles n'ont pas été Exemple de lettre envoyée par Augustin-Pyramus de Candolle, adressée au naturaliste Sabin Berthelot (1794-1880) détruites par leur destinataire) et Candolle n'ayant pas tenu un registre de copie de ses lettres, il est très difficile de déterminer le total de sa correspondance active. Néanmoins, si on compte une lettre envoyée pour une reçue, on totalise quelques 11 000 lettres échangées, soit 5 lettres envoyées ou reçues en moyenne chaque semaine sur une période de 43 ans (de l'âge de 20 ans à sa mort)! En comparaison européenne, ce corpus est important. Certes, son nombre total de lettres est inférieur à celui du médecin-naturaliste Albrecht von Haller (1708-1777) (17 000 lettres) ou du botaniste Joseph Banks (1743-1820) (20 000 lettres), mais est nettement supérieur à celui de Linné (1707-1778) (5500 lettres) ou du naturaliste genevois Charles Bonnet (1720-1793) (6000 lettres). En terme du nombre total de correspondants (1247, si on tient compte des lettres actives), cette correspondance rejoint celle de Haller (avec 1200 correspondants), légèrement derrière celle estimée du botaniste André Thouin (17471824) (avec 1900 correspondants), jardinier en chef du Jardin des Plantes de Paris dès la fin du 18e siècle. UN OUTIL DE PREMIÈRE UTILITÉ POUR L'HISTORIEN DES SCIENCES L'historien confronté à l'étude et l'édition du corpus épistolaire de Candolle se heurte à un problème majeur. La scission de la correspondance de 1924 (une partie étant déposée chez la famille et l'autre aux CJB) a entraîné bien souvent la coupure de grande série de lettres d'un même expéditeur, rendant leur consultation par conséquent difficile. De plus, bon nombre de lettres en main familial traitent, même brièvement, de botanique! La lettre au 18e siècle évoquant une multitude de sujets, il est bien difficile de faire la part de ce qui concerne strictement la botanique et LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – PAGE 9 de ce qui ne la concerne pas et la coupure de 1924 apparaît, à ce titre, bien arbitraire. Plusieurs lettres, enfin, sont issues de botanistes amateurs. Parce que ces derniers n'étaient pas des grands botanistes, leurs lettres ont été considérées par la famille lors du legs comme des lettres personnelles d'Augustin-Pyramus et conservées par elle. Il est important de relever que la correspondance d'un savant, qu'elle soit privée ou liée à son activité, fournit des détails permettant de mieux appréhender le contexte social et intellectuel du moment. Elle offre bien souvent un extraordinaire témoignage sur la diffusion des idées de l'homme de science et ses pratiques de sociabilité au sein de la communauté savante. (en particulier sur la création des CJB en 1817) et la genèse des écrits d'Augustin-Pyramus de Candolle. En bref, elle permet de restituer les étapes de la construction de son savoir, la genèse de son œuvre et des institutions qu'il peut amener à fonder. L'historien ne peut donc se passer de la correspondance privée et publique pour retracer la vie, les rôles institutionnels En sus de cet intérêt historique, la bibliothèque des CJB est de plus en plus sollicitée par le public ou des institutions extérieures pour consulter telle ou telle lettre envoyée à Candolle que, bien souvent, notre institution ne possède pas. PROJET DE NUMÉRISATION C'est pourquoi, au vu de l'importance de ces documents manuscrits, une collaboration avec la famille de Candolle a conduit les CJB à mettre en place un projet de numérisation de l'ensemble des lettres encore en leur main (quelques 3700 lettres). Dès l'automne 2007, des images scanographiques des lettres seront peu à peu réalisées par un membre de la famille et stockées sur un serveur informatique des CJB. Elles seront progressivement transférées dans une base de données qui comprendra aussi des informations attenantes aux lettres (date de la lettre, lieu d'envoi, etc.) et à leurs auteurs (nom de l'expéditeur, date de naissance et de mort, etc). A long terme, cette base de données intégrera encore les scanographies des lettres appartenant aux CJB, voire celles envoyées par Candolle et déposées dans des institutions et musées en Europe. Elle permettra la publication de l'inventaire de la correspondance d'Augustin-Pyramus en sus d'une probable mise en ligne sur le site internet des CJB, pour le plaisir des chercheurs comme celui de tous les curieux avides de documents d'histoire... Exemple de masque de saisie de la base de données des CJB intégrant les données de la correspondance d'Augustin-Pyramus de Candolle Exemple de lettre adressée à Augustin-Pyramus de Candolle, envoyée par le naturaliste et préfet du Puy-de-Dôme Louis Ramond de Carbonnières (1755-1827) PAGE 10 – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES la LISTE ROUGE cantonale des plantes vasculaires Fin 2006, les CJB ont publié une Liste Rouge cantonale concernant les plantes à fleurs et les fougères, avec le soutien actif du Domaine Nature et Paysage Catherine Lambelet-Haueter David Aeschimann Conservateurs e Domaine Nature et Paysage du canton de Genève désire disposer d’outils pour mieux préciser les besoins de sa politique de protection de l’environnement, ceci afin de pouvoir engager les ressources disponibles à bon escient. La Liste Rouge est l’un des premiers instruments d’une telle politique. On y trouve une liste des espèces historiquement présentes dans le canton et une évaluation de leur risque d’extinction. Un exemple est constitué par la gratiole (Gratiola officinalis) redécouverte après 40 ans aux Marais de Sionnet suite à des mesures de renaturation. Menacée, en très faible effectif, elle a été l’objet de différentes mesures: prise en compte dans les plans de gestion des marais, étude écologique, culture ex situ au jardin botanique, réintroduction. La sauvegarde de cette espèce a été entreprise en collaboration avec des partenaires français dans le cadre d’un projet Interreg. La dernière sta- servi de base à l’élaboration de notre Liste, indique que la flore indigène subit des pertes régulières depuis la deuxième moitié du 19e siècle (la proportion d’espèce indigènes dans la flore a passé de 69% à 53% de 1870 à nos jours). Cette évolution de la diversité floristique s’accompagne de l’apparition dans la deuxième moitié du 20e siècle d’espèces exotiques envahissantes, comme la renouée du Japon, la berce du Caucase ou les solidages. Conservation Un outil au service des plantes menacées à Genève Parmi les 236 espèces en danger d’extinction, beaucoup sont liées à des milieux en forte régression à Genève. Il s’agit des milieux humides (forêts, marais, bords des étangs, rives des cours d’eau, prairies humides), des milieux aquatiques, des champs cultivés (céréales), des prairies très sèches et des lisières thermophiles. Une Liste Rouge constitue un bilan et permet de faire le point sur les pertes et sur les menaces existantes. De nombreuses espèces de la faune sont liées – parfois spécifiquement – à la flore, aussi la disparition d’espèces végétales est un indicateur d’une perte globale de la biodiversité sur un ter- La flore indigène subit des pertes régulières depuis la deuxième moitié du 19e siècle ritoire donné. La disparition totale des espèces menacées serait le signe d’une banalisation quasi complète de ces milieux et représenterait donc une très grosse perte pour l’environnement dans notre canton. L’étude historique de la végétation, qui a Photos: Catherine Lambelet Globalement, 38% des espèces dont on a évalué le danger d’extinction à Genève sont menacées. 158 d’entre elles sont même considérées comme éteintes régionalement. Pratiquement tout le cortège floristique des rives lacustres et des champs sablonneux a disparu. De plus, la proportion d’espèces proches de l’extinction est particulièrement forte. Culture et réintroduction de la gratiole des marais aux Marais de Sionnet (avril 2007) Néanmoins, grâce aux résultats publiés, il devient possible d’agir pour la protection des espèces et de leurs milieux en mettant en œuvre, par exemple, des actions de sauvegarde. Certaines espèces font déjà l’objet de suivis ou de plans d’action grâce à une collaboration entre le DNP, les CJB et différents autres partenaires comme les mandataires de projets, Pro Natura ou la CPS (Commission suisse pour la conservation des plantes sauvages). La base de données réalisée suite à cette étude permet aussi de tenir compte de la présence d’espèces menacées lorsque l’on établit des plans de gestion et que l’on effectue des études d’impact. tion connue en France voisine se situe en effet à quelques kilomètres de la frontière. De tels projets, menés dans le cadre de la collaboration transfrontalière franco-genevoise, visent à inscrire la protection des espèces et des milieux dans l’espace plus large du bassin genevois, une entité biogéographique plus rationnelle que celle tracée par les frontières politiques. LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – PAGE 11 Recherche et musée sont-ils ANTINOMIQUES ? Certaines questions surgissent souvent à propos de nos activités, notamment deux qui, loin d'être anodines, sont au cœur même de nos activités. Elles méritent quelques réponses POURQUOI UN MUSÉE TEL QUE LES CJB FAIT-IL DE LA RECHERCHE? appelons que les CJB sont un musée avec essentiellement 3 collections: celle des plantes vivantes dans le jardin, généralement bien connue du public genevois, celle des herbiers (6 millions d'échantillons) et celle de la bibliothèque. Ce sont surtout ces deux dernières qui sont connues internationalement pour leur très grande valeur. Mais si un musée est avant tout une collection d'objets, celle-ci n'a de valeur que si elle est constamment mise à jour et modernisée, en d'autres termes, si elle est étudiée... Cela est d'autant plus vrai dans une collection touchant aux organismes sur lesquels beaucoup reste à découvrir, des organismes dont l'ap- proche conceptuelle (espèces, familles) évolue depuis quelques années. Nos herbiers ne sont donc pas une simple accumulation de plantes pressées et séchées: ils sont surtout une collection gigantesque de données grâce aux indications qui accompagnent chacune des Si un musée est avant tout une collection d'objets, celle-ci n'a de valeur que si elle est mise à jour et modernisée étiquettes que porte l'échantillon, mais aussi par les échantillons eux-mêmes qui ont une morphologie (forme des feuilles, pilosité, structure de la fleur, etc.) qui est elle-même une source informative permanente. De plus, ces plantes qui se rencontrent dans la nature à des milliers de kilomètres, sont rassemblées Daniel Jeanmonod Conservateur à quelques mètres l'une de l'autre et peuvent être comparées: c'est une chance inouïe pour le chercheur qui étudie ce matériel sans avoir à se rendre d'un bout de la planète à l'autre. Il profite ainsi d'années d'efforts de ses prédécesseurs pour répondre à des questions telles que: quelles espèces poussent en Suisse? Y a-t-il disparition d'espèces? Lesquelles? Pourquoi? Comment reconnaît-on telle espèce par rapport à telle autre? Lesquelles disparaîtront si le climat change? etc. Dès lors n'est-il pas naturel que les conservateurs de ce musée tentent de répondre à quelques-unes de ces questions quand ils travaillent au sein même des réponses présentes, en grande partie, dans leurs herbiers. Ils seraient bien bêtes de ne pas participer à cette démarche à portée de main, sans bourse délier, alors qu'ils constatent chaque semaine que des chercheurs se déplacent du monde entier, à grand frais, pour venir travailler à Genève dans leurs collections. De plus, nos conservateurs connaissent leurs collections mieux que quiconque et savent trouver les spécimens qui portent une histoire, en attestant par exemple de la présence de l'espèce à Genève en 1900, alors qu'elle a disparu aujourd'hui. Enfin, avec la technologie moderne, nos collections ont pris une nouvelle valeur inestimable: ces plantes séchées sont de l'ADN conservé et, au travers de l'analyse de celui-ci, on obtient une foule d'informations dont on ne soupçonnait pas l'existence 30 ans plus tôt. Nos herbiers «poussiéreux» sont redevenus un instrument à la pointe de la recherche moderne. LA RECHERCHE EST-ELLE L'APANAGE EXCLUSIF DES UNIVERSITÉS? La récolte sur le terrain: une face méconnue du musée Penser qu'il n'existe qu'une «Recherche» universitaire est très loin de la réalité. Si les universités restent le symbole même de la Recherche, elles sont de plus en plus contraintes à choisir les domaines les plus pointus, les plus innovateurs (souvent aussi les plus chers), dans une compétition certes stimulatrice mais qui les obligent à faire des choix et à laisser de côté des pans entiers de connaissances et de recherches considérées comme trop «classiques» et surtout trop chronophages. Parmi ceux-ci la taxonomie, c'est-à-dire la connaissance des organismes dans leur globalité, et la floristique, c'est-à-dire la connaissance de la flore (ensemble des plantes) d'une région. Ces domaines demandent notamment du temps, comme toute recherche de terrain, et font nécessairement appel à un vaste matériel se trouvant... dans les musées! Face au travail expérimental de laboratoire, cher mais aux résultats plus rapides (car indépendant des saisons du terrain), ce type de recherches est totalement délaissé par les universités. Il y a aussi une incontestable affaire de mode et celle-ci, en Europe, est à l'étude des mécanismes, de la génétique, de la molécule et non plus à l'organisme dans son entier, à la biodiversité dans sa globalité. Si d'autres institutions que les universités et les écoles polytechniques ne maintiennent pas des recherches dans ce sens, nos connaissances sur la biodiversité s'arrêtent là, devant un océan de méconnaissance (entre 300 000 et 500 000 espèces végétales restent à décrire selon les estimations du World Conservation Monitoring Center). Les herbiers, devenus inutiles, ne seraient plus que des témoins discrets d'un monde végétal qui disparaît avant même qu'on en connaisse toute la richesse, alors que celle-ci est plus que jamais nécessaire pour nous nourrir, soigner, habiller, abriter, chauffer et même véhiculer. Il est donc devenu un devoir et une nécessité que les musées de «sciences naturelles» participent au maintien de ces recherches, d'autant plus que, comme nous l'avons vu plus haut, ils sont au cœur même de cette connaissance. Fort heureusement, la réalité de la «Recherche» en biologie n'est pas si dichotomique et de nombreuses passerelles existent entre la recherche universitaire et la nôtre. Elles permettent de mettre en synergie les compétences complémentaires de chacun et elles obligent les musées à se remettre sans cesse en question. De fait, c'est en elles que résident l'enrichissement et la force actuelle des musées modernes: les herbiers qui s'en sont coupés finissent bien souvent pas moisir au fond d'une cave en perdant ainsi valeur et savoir accumulés parfois pendant plusieurs siècles. UNE ÉTROITE INTÉGRATION DES TÂCHES Un herbier qui, comme le nôtre, débute au 18e siècle, est également un témoin historique de l'évolution de notre biodiversité, et il est donc de notre devoir de poursuivre ce témoignage en enrichissant nos collections de données actuelles. C'est le volet exploratoire qui conduit certains d'entre nous au Paraguay, à PAGE 12 – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES Recherche La recherche dans nos collections: la face évidente du musée Madagascar, en Corse ou... dans le canton de Genève. Des échantillons sont alors récoltés et séchés, des observations faites, des données recueillies et stockées, des questions et des recherches surgissent, de nouvelles espèces sont découvertes qu'il s'agit alors de décrire. Le conservateur va donc nécessairement naviguer entre herbier, terrain, laboratoire, bibliothèque et bases de données, en augmentant ainsi la connaissance de la biodiversité dans laquelle nous vivons tous. Pour ce faire, les CJB se sont donc dotés depuis de nombreuses années de structures facilitant cette démarche groupes de plantes sont plus particulièrement étudiés comme les usnées (lichens), les Gesneriacées (Saintpaulia), les Aquifoliacées (Houx), les palmiers, etc. Par ailleurs des collaborations étroites existent avec la gestion environnementale locale au travers du Système d'information territorial genevois, de la Liste Rouge, de programmes de sauvegarde de certaines espèces (Glaïeul des marais, Aster amelle, orchis à odeur de bouc, etc.) qui induisent des projets de recherches ponctuels afin de mieux comprendre leur biologie. Les directions que prennent ces recherches sont actuellement définies par une structure de «Conseil scientifique» créée récemment pour intégrer au mieux ces recherches avec les autres activités scientifiques et avec la gestion des collections de notre institut. L'effet synergique de l'intégration de nos 5 missions (Explorer, Conserver, Rechercher, Protéger et Transmettre) est pour nous le garant d'une collection vivante et utile à tous. Un herbier qui, comme le nôtre débute au 18e siècle, est un témoin historique de l'évolution de notre biodiversité (laboratoires, système d'informations géoréférés, base de données, etc.) et mettent ensuite à disposition les résultats de leurs recherches au travers de publications scientifiques mais aussi de base de données accessibles sur la Toile (voir notre site www.ville-ge.ch/cjb/ rubrique base de données). Il s'agit réellement d'une intégration d'activités qui part des collections en induisant une activité scientifique qui fait nécessairement appel à la Recherche, laquelle retourne à la collection en l'enrichissant et lui donnant davantage de valeur. Les résultats de cette activité scientifique apparaissent souvent dans la Feuille Verte: Flore des Alpes, Liste Rouge genevoise, Flora Corsica, Cryptogamie, etc. Ces recherches ne sont pas menées au gré des vents mais dans des directions définies par une tradition, par la richesse de nos herbiers sur certaines régions, par des compétences particulières, etc. Ainsi les zones géographiques privilégiées sont la Suisse et les Alpes, la Corse et la Région méditerranéenne, Madagascar et l'Afrique, le Paraguay et l'Amérique du Sud. De même, certains Le travail en laboratoire: la troisième face qui complète les deux autres LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – PAGE 13 Flora CORSICA. Enfin ! On en parlait depuis 22 ans, on l'attendait depuis un siècle: Flora Corsica est enfin sortie de presse Daniel Jeanmonod Conservateur UNE LONGUE GESTATION n 1901, John Briquet, alors directeur des CJB lançait un audacieux projet: «dresser un inventaire précis et critique des plantes présentes en Corse en indiquant leur distribution tant verticale qu'horizontale». Le projet reste néanmoins inachevé après l'édition du volume 3/2 en 1957. En 1985, le Prof. Gilbert Bocquet, alors directeur des CJB, décide de le relancer. Mais les temps ont changé et les pratiques aussi. On décide donc de finir l'édition des familles du «Prodrome» mais aussi de faire une synthèse en créant l'OUTIL indispensable à tout botaniste de terrain: UNE FLORE COMPACTE DE POCHE. Vingt-deux ans plus tard, elle est là: petite (11 x 18 cm), pratique (fourre plastifiée et marquepages), compacte (3,2 cm grâce au papier bible), mais très complète puisqu'elle fait 1055 pages avec plus de 1000 dessins! Si la gestation a été si longue, c'est que le projet était peut-être trop ambitieux: explorer l'île, finir le Prodrome ET faire une flore de poche. Bien des collaborateurs ont abandonné la partie qui a dû être reprise par les 2 auteurs. Mais surtout les explorations ont révélé tant de découvertes qu'il a fallu les publier et sans cesse remettre l'ouvrage sur le métier en les ajoutant. Pendant ce temps, la biologie moléculaire est arrivée assurant son lot de bouleversements comme toute nouvelle science. Les concepts ont changé. Il a fallu faire des choix et remettre encore, et sans cesse, l'ouvrage sur le métier. L'OUVRAGE Flora Corsica est avant tout: !Un ouvrage de terrain (format poche) permettant de déterminer TOUTES les plantes vasculaires (plantes à fleurs, conifères et fougères) sauvages en Corse, soit 2858 taxons, grâce au système classique des «clés dichotomiques de détermination» permettant d'arriver à chacune des 156 familles présentes, 870 genres, 2468 espèces, etc. !Une synthèse des connaissances sur ces plantes en donnant pour chacune d'elles: – ses noms latins, français et corses ainsi que les synonymes – sa biologie (annuelle, pérenne, etc.), sa taille et une brève description de la plante – la date de floraison – son écologie par sa place dans les étages de végétation, ses habitats préférentiels, parfois la nature de la roche (calcaire, schistes, etc.) si l'information s'avère importante – la région où elle pousse ainsi que son degré de rareté dans l'île – sa répartition mondiale (type biogéographique). !Un ouvrage résolument moderne tenant compte des dernières recherches en biologie moléculaire comme en floristique. ! Une collaboration avec les meilleurs spécialistes de la région, dont 15 ont participé à l'élaboration d'une ou de plusieurs familles en complétant ainsi le travail des 2 auteurs principaux: Daniel Jeanmonod et Jacques Gamisans. L'ouvrage s'adresse à tous les amateurs de plantes et de Corse, qu'ils soient professionnels (forestiers, agronomes, gestionnaires de la nature, universitaires, étudiants, etc.) ou simplement intéressés ou passionnés par le riche patrimoine de l'île. Il est accompagné de textes généraux introductifs, traitant de la géographie, la végétation, les menaces et la protection de la flore et la végétation de l'île. Il comporte aussi un glossaire des termes botaniques ainsi que de nombreux dessins de détail qui vont aider la détermination, de même que des dessins généraux pour illustrer certaines espèces parmi les plus communes ou les plus intéressantes (endémiques par exemple). Ces dessins sont, pour le tiers d'entre eux, originaux (fait par André Schlüssel, adjoint scientifique aux CJB) et pour le reste proviennent d'autres ouvrages. un enseignement à retenir lorsqu'on introduit à tout va n'importe quelle belle espèce exotique comme les «griffes de sorcières». Par ailleurs, une analyse fine de l'origine des espèces indigènes permet de retracer l'histoire ancienne de l'île, puisque certaines espèces sont communes avec la Sardaigne, mais aussi les Baléares et la Sierra Nevada, du temps (10-20 millions d'années) où ces îles formaient un ensemble proche du sud de l'Espagne d'où elles ont progressivement dérivé avant de se disloquer. Enfin la rareté actuelle de certaines espèces (cf. tableau ci-joint) nous oblige à réfléchir sur leur devenir et sur les raisons de leur rareté. Est-ce dû à l'action de l'homme et à la raréfaction d'un milieu particulier ? Flora Corsica est donc aussi un outil pour la gestion de l'environnement et des espèces protégées (indiquées dans l'ouvrage par un P !), ainsi que des milieux. DES DONNÉES QUI RACONTENT UNE HISTOIRE LA FACE CACHÉE Outre l'outil de terrain, cette flore permet une synthèse des connaissances et représente de ce fait un formidable outil pour mesurer la biodiversité corse et son état actuel. On peut ainsi constater que la flore corse comporte quelques 404 taxons introduits dont 153 se sont naturalisés (ils se reproduisent spontanément dans la nature). A partir de leur date d'introduction, on peut suivre leur histoire et leur cheminement jusqu'à aujourd'hui où elles font dorénavant partie du paysage. Certaines deviennent toutefois envahissantes en détruisant la végétation actuelle: Flora Corsica n'est pas que le fruit d'une synthèse. C'est aussi, et surtout, le résultat d'un programme de recherche mené par les CJB depuis 25 ans qui a impliqué de nombreuses expéditions sur le terrain, induisant la découverte de 250 espèces nouvelles pour l'île et de 5 taxons nouveaux pour la science. Il a impliqué thèses et diplômes universitaires dirigés par notre institut et par d'autres, ainsi que des recherches effectuées par plusieurs d'entre nous. Ces recherches sont menées dans un cadre taxonomique traditionnel mais parfois aussi moléculaire lorsque ces techniques s'avéraient nécessaires (cas des Orobanchacées). Cette activité scientifique a conduit à la publication de nombreux articles ou ouvrages scientifiques (env. 60), mais aussi à l'enrichissement de notre herbier (environ 6200 échantillons) et de notre iconothèque. Ces données ont été envoyées aux divers organismes de gestion de l'environnement en Corse (Conservatoire du littoral, Office de l'Environnement de la Corse, Conservatoire botanique de Corse) et servent à définir les zones à protéger comme à établir les Listes Rouges (espèces soumises à une protection légale) et les listes noires (espèces envahissantes à éradiquer, indiquées comme telles dans l'ouvrage). Au-delà de l'ouvrage lui-même, Flora Corsica est donc le reflet et le produit direct des 5 missions de notre institut: Explorer, Conserver (herbiers), Rechercher, Protéger et Transmettre. LA CORSE, LA SUISSE ET LEURS FLORES EN QUELQUES CHIFFRES Corse Corse Suisse Territoire 8748 km2 41284 km2 Altitudes 0-2710 m 193-4634 m Taxons traités 2858 3144 Taxons indigènes 2325 2593 Taxons endémiques 316 1 Taxons rares 789 180 (Romandie: 8718 km2) PAGE 14 – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES le suivi d’espèces en danger : l’exemple du PANICAUT DES ALPES Divers facteurs détruisent ou menacent la biodiversité, que les causes soient locales (destruction de milieux) ou globales (réchauffement climatique). Certains travaux de recherche permettent toutefois de mettre en oeuvre des actions concrètes Yamama Naciri Chargée de recherche Catherine Lambelet Conservatrice Recherche Des MARQUEURS génétiques pour ans ce contexte, une bonne connaissance de la diversité génétique des populations est un outil important pour contribuer à la protection des espèces en danger. L’évaluation de la biodiversité et de son évolution récente a donné lieu, ces dernières années, à de nombreuses publications et listes d’espèces en régression ou en danger d’extinction (Listes Rouges), telles que celles parues récemment pour le canton de Genève (Vust & von Arx, 2005; Lambelet-Haueter & al., 2006) ou celles concernant le territoire helvétique (Moser & al., 2002; Scheidegger & Clerc, 2002). Sur la base des données fournies par ces publications, des programmes de sauvegarde sont parfois mis en place pour freiner l’érosion constatée. Ils visent, en premier lieu, à conserver les milieux dans lesquels ces espèces se développent préférentiellement (conservation in situ). Dans les cas les plus graves, l’espèce doit être conservée et multipliée hors de son milieu (conservation ex situ, banque de Des programmes de sauvegarde sont mis en place pour freiner l’érosion constatée Le chardon bleu (Eryngium alpinum L.) Photos: Beat Baumler, CRSF graines). Il arrive également que les deux approches soient combinées. Pour pouvoir optimiser les stratégies mises en place dans les deux cas de figure, il est souvent utile de pouvoir répondre à des questions telles que: Dans quelle population faut-il ramasser préférentiellement des graines pour une banque de semences ? Quelles sont les populations les plus menacées de consanguinité et qu’il faudrait prioritairement renforcer par un apport de «sang neuf»? Quelles sont celles qui sont les plus variables génétiquement? C’est là que les marqueurs génétiques* (voir glossaire) peuvent être d’une grande utilité. Une telle approche a été appliquée à la conservation du chardon bleu (Eryngium alpinum L.), une ombellifère emblématique de l’arc alpin et des massifs avoisinants. Aussi connue sous le nom de panicaut des Alpes, cette plante aux belles inflorescences bleues est en forte régression en Suisse et en Europe où elle est partout protégée (Wyse Jackson & Ackeroyd, LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – PAGE 15 Fig. 1 Diversité génétique dans les populations, selon deux indices différents: la diversité génique (variant entre 0 et 1), qui, quand elle est proche de zéro indique que la variabilité est réduite, et la richesse allélique qui permet de comparer le niveau moyen de diversité entre populations. Chaque paire de barres verticales caractérise une population dont le code est donné en bas du graphique: MO: Moléson; U: Urqui; JA1 et JA2: Jaman 1 et 2; S: Sautodo; TA: Tanay; TSE: Teysachaux; TE2: Tanay 2; TD: Tour du Don; VV: Vallée de la Vare; SUS: Susanfe; SUR: Surenen; K: Klosters; NUF: Nufenen *GLOSSAIRE ADN L’Acide Désoxyribo-Nucléique est la molécule support de l’hérédité Marqueurs génétiques Portion d’ADN servant de «code barre». La comparaison d’un même fragment d’ADN entre différents individus permet de les comparer entre eux et de calculer leur distance génétique. De tels marqueurs sont aussi utilisés dans d’autres domaines, comme les tests de paternité par exemple Noyau Le noyau est le centre de commande de la cellule. C’est lui qui renferme l’information génétique (chromosomes constitués d’ADN et de protéines). Il transmet les instructions nécessaires aux autres parties de la cellule. C’est comme cela que le fonctionnement de la cellule est assuré Chloroplaste Les chloroplastes sont des structures situées à intérieur de la cellule et qui contiennent de la chlorophylle. C’est la présence de la chlorophylle qui donne la couleur verte aux végétaux. Le chloroplaste assure plusieurs fonctions, dont la principale est la photosynthèse (transformation du carbone de l’air en carbone des tissus végétaux sous l’effet de la lumière) 1994). La Commission pour la conservation des plantes sauvages de Suisse a d’ailleurs établi un plan d’action pour la conservation de cette espèce attractive dans les cantons des Grisons, d’Uri, du Valais et d’Obwald (Käsermann, 2000). Nous avons utilisé cinq marqueurs du noyau* des cellules et deux marqueurs des chloroplastes* de façon à identifier, parmi les populations étudiées en Suisse, celles qui méritent une attention toute particulière, du fait de leur composition ou de leur spécificité génétique. Les résultats tirés de l’analyse de l’ensemble de ces marqueurs montrent que: 1. Des populations proches géographiquement peuvent être très différentes génétiquement, de sorte que le critère de proximité géographique ne dit rien de la proximité génétique. 2. Les populations suisses sont en moyenne plus semblables entre elles que les populations françaises, et moins diversifiées (Gaudeul & al., 2004; Naciri & Gaudeul, 2007). Elles sont aussi plus menacées, du fait de leur taille en général faible. 3. La décroissance de l’espèce serait essentiellement due à l’influence humaine (cueillette) ou au changement de type d’exploitation de la montagne plutôt qu’à des raisons biologiques propres à l’espèce (telles que l’accumulation de mutations défavorables dues à la consanguinité). En effet, toutes les populations sont génétiquement variables (fig. 1), bien que certaines d’entre elles le soient plus que d’autres. Vu la forte menace pesant sur les populations suisses, il faut rapidement mettre en place une gestion plus favorable des sites menacés et renforcer les mesures de conservation ex Des renforcements des populations les plus précaires doivent également être envisagés situ de l’espèce. Les analyses génétiques ont ainsi permis d’identifier quelles populations doivent être impérativement surveillées et protégées du fait de leur diversité ou de leur particularités génétiques (pour récolter des graines dans l’optique d’une banque de semence par exemple), ou du fait de leur vulnérabilité (faible diversité, taille peu importante): il s’agit des populations de Tanay (Valais), de Jaman et du Sautodo (Vaud), du Moléson (Fribourg), de Surenen (UriObwald) et de Klosters (Grisons). Des renforcements des populations les plus précieuses et les plus précaires doivent également être envisagés, particulièrement pour la population de Klosters. Ces conclusions vont être communiquées aux cantons concernés, seuls habilités à prendre les mesures adéquates. BIBLIOGRAPHIE Gaudeul, M., I. Till-Battraud, F. Barjon & S. Manel (2004). Genetic diversity and differentiation in Eryngium alpinum L. (Apiaceae) : comparison of AFLP and microsatellite markers. Heredity, 92:508-518. Käsermann, C. (2000). Alpen-Mannstreu, Eryngium alpinum L. Aktionsplan für die Erhaltung und Förderung dieser gefährdeten Art (ausserhalb des Hauptverbreitungsgebiets in den westlichen Voralpen). FloraConsult, Bern. Lambelet-Haueter, C., C. Schneider & R. Mayor (2006). Inventaire des plantes vasculaires du canton de Genève avec Liste Rouge. Hors Série N° 10. Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève, Genève. Moser, D., A. Gygax, B. Bäumler & al. (2002). Liste Rouge des Espèces Menacées de Suisse: Fougère et Plantes à Fleurs. OFEFP, Bern, Switzerland. Naciri, Y. & M. Gaudeul (2007). Phylogeography of the endangered Eryngium alpinum L. (Apiaceae), in the European Alps. Molecular Ecology, 16: 2721-2733. Scheidegger, C. & P. Clerc (2002). Liste rouge des espèces menacées en Suisse: Lichens épiphytes et terricoles. Ed. Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage OFEFP, Berne, Institut fédéral de recherches WSL, Birmensdorf, et Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève. OFEFP-Série: L'environnement pratique. Vust, M. & B. von Arx (2005). Les lichens terricoles du canton de Genève. Inventaire, Liste Rouge et mesures de conservation. DT, DNP, Genève. Wyse Jackson, P. S. & J. R. Ackeroyd (1994). Guidelines to be followed in the design of plant conservation or recovery plans. Conseil de l' Europe, Strasbourg, France. Données sur Eryngium alpinum et sa conservation sous http://www.crsf.ch http://www.cps-skew.ch/francais/actions_en_cours.htm PAGE 16 – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES Les 25 ans de l’AAJB Christine Vaz Coordinatrice Laurent Burgisser Membre du comité L’anthèse de la fleur de l’âge doit se situer aux alentours du quart de siècle. Cette année, la fringante Association des Amis du Jardin Botanique a fêté ses 25 ans our célébrer cet anniversaire, nous avons invité Pierre Lieutaghi, ethnobotaniste spécialiste du domaine européen, pour une conférence exceptionnelle le 13 septembre 2007 au Jardin botanique. Un apéritif avec vue (sur le Mont Blanc) ne pouvait que présager du bonheur botanique quant à la suite: ainsi, devant 80 auditeurs ravis, M. Lieutaghi a très joliment conté l’Histoire des plantes fondatrices du jardin européen. Partenaires L’ANTHÈSE de la fleur de l’âge, Rien de tel pour continuer à la Maison des Jardiniers où nous avons sacrifié, sur l’autel du phanérogame consentant, quelques succulents végétaux, en tranches, en rondelles, en petits cubes, voire en charpie; bref, un fort sympathique repas campagnard. Nous avons ensuite terminé la soirée, digestifs et rêveurs, la tête dans le pistil (ou l’anthère) jusqu’à très tard dans la nuit (rappelons que nous avons 25 ans... et à 25 ans...). L’AAJB a été fondée en 1982 par le Prof. Gilbert Bocquet. Il souhaitait offrir au Jardin botanique un appui moral au travers de cette association. Il avait également la volonté de mieux faire connaître le Jardin et la nature en général et ainsi de sensibiliser le public aux problématiques de l’environnement. Aujourd’hui, l’AAJB propose des cours, des sorties et autres activités botaniques pour le grand public, ainsi que des visites guidées du Jardin botanique pour des groupes. En terme de soutien au Jardin botanique, l’AAJB finance l’achat de 2 périodiques de la bibliothèque pour un montant avoisinant les 1000.– par année. Un soutien est également offert à un projet par année (cette année la fête des 10 ans des Ateliers Verts, l’année dernière la tenue d’un Workshop sur les palmiers (EUNOPS) au sein des CJB). Pierre Lieutaghi Alors, c’est avec vous que nous avons voulu faire la fête, et elle fut belle tout au long du mois de septembre. Elle a débuté le week-end des 1 et 2 septembre, sur la place du marché de la ville historique de Berne. Vous êtes 12 000 à être venus goûter à de rares délices ou caresser des animaux un temps presque disparus. En Suisse romande, les festivités ont coïncidé avec le vernissage de l’exposition «C’est pour ma pomme» – la présentation de 365 modèles de pommes naturelles de la Fondation ProSpecieRara – un grand marché de produits issus de nos races et variétés menacées et l’ouverture de notre nouvel espace permanant aux CJB. Ce massif, où nos légumes sont présentés de manière ornementale, a été intégré à la grandiose manifestation des CJB présentée cette année sur la pelouse de la villa «Le Chêne». ProSpecieRara Denise Gautier Coordinatrice romande n quart de siècle d’activités nous a permis de nous positionner comme les champions de la conservation de la diversité des races et variétés agricoles. Notre Fondation compte maintenant 4500 membres, s’occupe de la conservation de 1800 variétés de fruits, 900 variétés de plantes de jardin et de plein champ et de 27 races d’animaux de rente. Si nous sommes arrivés à ce fantastique résultat, c’est grâce à vous, fidèles défenseurs de la diversité. Augmenter et favoriser la diversité perdue au fil des décennies par une agriculture de plus en plus intensive, c’est la manière de «Réagir» que ProSpecieRara propose pour préserver nos ressources génétiques et garder la possibilité d’adapter la production agricole future aux changements qui pourraient intervenir, dans les conditions du marché, de production et d’environnement, y compris les changements climatiques et pour garantir notre souveraineté alimentaire. En 25 ans, de beaux résultats ont été obtenus. Cependant, beaucoup reste à faire et nous nous réjouissons de pouvoir compter sur votre soutien dans les années à venir et de poursuivre notre fructueuse collaboration avec les CJB. LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – PAGE 17 1 3 3 4 REAGIR 1 Epicéas coupés pour la Cité des métiers, récupérés et décorés par les collaborateurs des CJB fin 2006. Ils formeront la future forêt calcinée de REAGIR 2 On brûle des arbres déjà morts (samedi 17 mars, 8h00) 3 Une des Rencontres apéritives organisée dans le cadre de REAGIR, le 29 mai avec Jacques Grinevald 4 Exposition évolutive, citoyenne et interactive de REAGIR sous tente. Elle abritait entre autres le Salon de lecture nomade dédié à l’environnement 5/6 Plus de 100 000 visiteurs pour REAGIR, de mai à octobre Fidèle à sa tradition, la Feuille Verte vous présente une rétrospective photographique des événements marquants de l’année écoulée Rétrospective 5 6 PAGE 18 – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES 2 REAGIR 1 Les commissaires de l’exposition, Pascal Peduzzi du PNUE (casquette) et Didier Roguet (baguette de sourcier), lors d’une des nombreuses visites guidées de l’exposition-jardin 2 Une des lectures automnales du programme de REAGIR, goûter littéraire en musique organisé par les éditions Encre fraîche 3 Inauguration de l’exposition-jardin REAGIR, le jeudi 10 mai 4 Pierre-André Loizeau, directeur des CJB, en conversation lors de l’inauguration avec Frits Schlingemann, directeur et représentant pour l’Europe du PNUE 1 3 4 ANNUELLE REAGIR 1 Une des vitrines consacrée à la 6e extinction et à la commémoration du tricentenaire de Carl von Linné 2 Contes autour de la Forêt Enchantée par Madame Lise Berthoud 3 Une des rondelles de bois de l’Arbre à palabres 4 Atelier musical de la Bulle d’Air 2 3 1 4 LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – PAGE 19 1 2 1 Les Ateliers d’été organisés par les musées de la Ville de Genève ont fait le plein. Les participants ont appris aux CJB, entre autres, à se servir d’un binoculaire pour déterminer une plante 2 Formation in situ sur la forêt genevoise (végétation et ethnobotanique) pour les enseignants, dans le cadre du projet Climatic, organisée par la Passerelle Sciences et Cité de l’Université de Genève et dispensée par les CJB (L. Nusbaumer & D. Roguet, 10 octobre) 3 Présentation de la nouvelle Flore de Corse de Daniel Jeanmonod et Jacques Gamisans (mai) 4 Café scientifique organisé aux CJB par le Forum des sciences sur le thème de la nouvelle gestion des espaces verts (30 mai) 5 10 ans des Ateliers verts (13 juin) La découverte du tronc et de ses hôtes 6 10 ans des Ateliers verts La partie officielle et le goûter offert par la Ville de Genève, en présence des enfants, de leurs parents et des directions respectives (CJB et UNI3) 7 Nombreux participants de la Marche de l’Espoir 2007 traversant le Jardin botanique (13 octobre) 8 Nicolas Wyler, Raoul Palese et Pascal Martin représentaient les CJB aux journées SITG - Système d'Information du Territoire Genevois (18 au 22 avril) 3 4 Rétrospective 6 5 7 8 PAGE 20 – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES ANNUELLE 1 2 3 4 C’est notre manière de relater la multiplicité des rapports que nous entretenons avec nos différents publics. Qu’ils en soient ici remerciés! 5 1 Passage du traditionnel Marathon de Genève à la Console (6 mai) 2 Inauguration d’un nouvel espace de jeux pour nos plus jeunes visiteurs, la Forêt enchantée 3 Goûter inaugural pour plus de 500 personnes! (9 septembre) 4 Première Fête du développement durable aux CJB: présence du chef du peuple Surui (Amazonie), ici en compagnie d’Agnès Soral, marraine d’Aquaverde, des autorités consulaires brésiliennes, des représentants des autorités genevoises et de la direction des CJB 5 Une des œuvres éphémères installée pour la Fête du développement durable «ARACHNE», par Muriel Décaillet LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – PAGE 21 EXPOSITION «Nuestras plantas, nuestra gente»: 3e édition en la ville d’Aregua Ana Pin Responsable du projet Etnobotánica Paraguaya & Magali Stitelmann Traduction Cette fois-ci, l’exposition itinérante «Nuestras plantas, nuestra gente» a été présentée en dehors d’Asunción. La ville d’Aregua a accueilli la troisième édition de cet évènement éducatif: du 7 juin au 6 juillet 2007, l’exposition a été ouverte au public et, de façon privilégiée, au secteur scolaire local es activités liées à cette exposition se réalisent dans le cadre du projet Etnobotánica Paraguaya (EPY), fruit de la coopération entre les municipalités d’Asunción et de Genève. L’exposition d’Aregua a été organisée par le projet EPY en collaboration avec la Municipalité d’Aregua, la Préfecture centrale du Département et l’organisation PRONATURA. Elle a été présentée dans l’un des bâtiments de la Préfecture, situé à quelques mètres du lac Ypacarai, au centre de la ville d’Aregua. Les acquis de notre première exposition, présentée en 2006 dans le Jardin botanique d’Asunción, ont permis de l’enrichir. Cette troisième édition a été enrichie d’éléments sur le thème des usages du «piri» (Schoenoplectus californicus et Cyperus giganteus) et de la «totora» (Typha sp.) pour lequel nous avons élaboré un poster complétant l’ensemble déjà existant. Nous avons ouvert les jeudi, vendredi et samedi, ainsi que quelques dimanche, au total 17 jours, et reçu quelques 1015 visiteurs dont 830 étudiants (provenant de 14 établissements éducatifs d’Aregua et des villes voisines), 80 enseignants et une centaine de visiteurs tout public. Les groupes d’étudiants qui ont visité l’exposition étaient reçus par deux guides, ainsi que deux bénévoles, étudiants de biologie. En parallèle, 13 séminaires étaient proposés au grand public par des professionnels paraguayens. De plus, d’autres séminaires à l’attention des étudiants et enseignants étaient offerts afin d’approfondir leurs connaissances en sciences naturelles qui font partie intégrante de leur plan d’étude. La participation des «piriceros» (les artisans qui travaillent le Piri) a été très appréciée. Ils ont parlé de leur expérience professionnelle et ont fait une démonstration de fabrication d’objets d’artisanat. Alma, une petite fille artisane, nous a enseigné comment fabriquer un pose-plat pour la table. Le piri se récolte dans le lac Ypacarai, puis après séchage, divers objets sont élaborés et commercialisés sur le marché local à très bas prix. Par le biais de ces expositions itinérantes, le projet EPY peut se rapprocher des gens qui utilisent les ressources naturelles et lancer avec eux un travail de sensibilisation et de partage des connaissances en matière de conservation et gestion durable des espèces végétales indigènes. C’est un défi passionnant! Le PROJET «fragmentation forestière dans le Sud-Ouest de la Côte d’Ivoire» RÉCOMPENSÉ Pascal Martin Doctorant & Laurent Gautier Conservateur Depuis plusieurs années, les Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève sont engagés en partenariat avec la Côte d’Ivoire sur des projets de botanique, de floristique, d’écologie végétale et d’éducation environnementale n 1999, un projet sur l’influence de la fragmentation forestière a vu le jour avec l’Université de Cocody-Abidjan et le Centre Suisse de Recherches Scientifiques en Côte d’Ivoire (CSRS). Ce projet est né du constat suivant: dans les régions tropicales, la déforestation a entraîné un morcellement important des grands blocs forestiers. En Côte d’Ivoire, le paysage est maintenant composé de cultures, de jachères et de fragments forestiers. Ces îlots de forêts constituent désormais des refuges importants pour la faune et la flore tropicale. La conservation de ces fragments de forêts est donc d’une importance capitale pour la biodiversité et pour le maintien des conditions climatiques. Fort de ce constat, les CJB ont initié sous l’impulsion de Laurent Gautier et de Rodolphe Spichiger un projet financé par le Fond National Suisse pour la Recherche Scientifique visant à mieux comprendre l’influence de la fragmentation sur la composition floristique, la structure végétale et la régénération des fragments forestiers du Sud-Ouest de la Côte d’Ivoire. La région d’étude est adjacente au Parc National de Taï (www.parc-nationalde-tai.org) qui constitue la plus grande forêt humide protégée en Afrique de l’Ouest, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco. Un travail préparatoire mené par Cyrille Chatelain sur la base d’images satellites a permis de reconstituer l’historique de la fragmentation dans la région. Durant plus de deux années, des inventaires botaniques ont été menés par deux étudiants: Adama Bakayoko de l’Université de Côte d’Ivoire et Pascal Martin de l’Université de Genève. Leurs travaux montrent que les fragments Adama Bakayoko et Pascal Martin reçoivent le prix WWF-CSRS pour la conservation du Parc National de Taï forestiers sont encore très riches floristiquement et qu’ils sont d’une importance socioéconomique très élevée pour les populations rurales (plus de 50 % des espèces sont utilisées par les populations en phytothérapie, en matériel de construction ou pour l’artisanat). Dans les fragments étudiés, la régénération des espèces forestières est viable ce qui permet d’affirmer que leur conservation dans les régions tropicales est une garantie pour l’avenir des écosystèmes forestiers. L’engagement et les résultats des deux étudiants ont été récompensés en septembre 2007 par le Prix WWF-CSRS pour la conservation du Parc National de Taï (PNT). Ce prix, attribué tous les deux ans, récompense les travaux qui aident à mettre en place une politique de conservation et d’aménagement durable du PNT et des zones riveraines. Ces travaux menés par les CJB en partenariat avec les universitaires ivoiriens s’intègrent dans une politique à long terme d’acquisition et de partage des connaissances visant à protéger les milieux naturels. PAGE 22 – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES au Centre d’Education Environnementale du Parc de Hann (CEEH) Altiné Traoré Responsable du projet CEEH Coopération CENTRE AÉRÉ « spécial environnement » De jolis dessins ont été produits. Pour ce qui est du théâtre, le conte de l’écrivain sénégalais Cheikh Alioune Ndao, «Le Rat des Villes et le Rat des Champs», a été mise en scène et joué par les enfants. Le rat des villes invite son ami le rat des champs à venir passer quelques jours en ville avec lui. Ce dernier refuse car en ville, il y a la pollution et les gens jettent les ordures dans les rues. Cette pollution et ces saletés peuvent entraîner des maladies graves. Le rat des villes n’est pas d’accord mais n’arrive pas à convaincre son ami qui préfère rester en campagne et respirer de l’air pur. !Atelier photographie Les enfants ont appris à prendre des photos avec des appareils photos simples ou numériques. La photo illustrant cet article a été prise par les enfants. e Centre d’Education Environnementale du Parc de Hann a apporté quelques innovations durant les vacances en organisant conjointement avec une école maternelle (3 POM) et une association de la Commune d’Arrondissement de Hann dénommée ADES (Action pour le Développement, l’Entraide et la Solidarité), un centre aéré, du 23 juillet au 11 août 2007. Trente-sept enfants, âgés de 3 à 13 ans, ont prit part à ce centre aéré, 17 de l’Ecole 3 POM et 20 de l’Association ADES. Ces enfants étaient encadrés par douze moniteurs. Le CEEH a donné une partie des ressources humaines, les supports techniques et le local pour abriter les activités. 3 POM a assuré la prise en charge des moniteurs, du transport et de la restauration des élèves et l’association ADES a pris en charge l’éducation sportive. Les objectifs de ce centre aéré sont: !Contribuer à l’éveil écologique des enfants par le biais d’ateliers scientifiques, artistiques et ludiques en rapport avec l’environnement. !Inculquer aux enfants les bons réflexes et comportements environnementaux. !Et faire des enfants des messagers auprès des familles et dans les quartiers. Durant ces trois semaines, plusieurs activités ont été menées: – Recyclage du plastique: après ramassage de sachets en plastique, les enfants ont appris à confectionner des dessous de verre, des chapeaux, etc. Avant de travailler sur le plastique, les monitrices ont appris aux enfants comment tricoter (faire des brides, des mailles simples et doubles avec du fil pendant une semaine). – Sensibilisation sur les déchets: des posters, ! Activités d’éducation environnementale – Identification des espèces végétales dans le jardin ethnobotanique et des espèces animales du parc zoologique. – Semis de gombo: les enfants ont appris qu’il faut d’abord nettoyer, labourer et niveler la terre, puis tracer les lignes de semis, faire des trous de semis, mettre les graines dans les trous et refermer les trous ensuite et enfin arroser la parcelle semée. – Reboisement: les enfants sont intervenus dans le jardin en renforçant les haies de filaos. Deux-cent pieds de filaos ont été plantés. «La Terre n’est pas une Poubelle», nous ont été offerts par Océanium, une ONG intervenant dans le domaine de l’environnement. Ces posters expliquent la durée de vie des déchets. Ils ont permis aux enfants de mieux comprendre l’impact des déchets sur notre environnement. !Activités artistiques (danse, dessin et théâtre) Le matin et après la pause déjeuner, les enfants chantent pour «se réveiller». Avec l’aide d’un professeur d’art plastique, les enfants ont appris comment dessiner. Ces cours ont été bénéfiques non seulement pour les enfants mais aussi pour les monitrices. !Activités sportives (arts martiaux) Après une journée bien remplie, les enfants font du sport. Un maître en Tækwondo a travaillé avec les enfants durant tout le centre aéré. Ce premier centre aéré organisé par le CEEH et ses partenaires a été une réussite. Une des radios de la place a été invitée pour enregistrer quelques ateliers du centre aéré (jardinage, recyclage plastique et dessin) le jeudi 9 Août pour la diffuser le mercredi 15 Août de 14H à 17H dans l’émission destinée aux enfants «Droit de Savoir». Cette innovation apportée aux activités du CEEH est le fruit d’une collaboration franche avec des acteurs de l’éducation et de la protection de l’environnement, et avec le soutien de la Direction de l’Environnement, des ONG Syto et Océanium. Le CEEH compte élargir cette collaboration et organiser, les années à venir, d’autres centres aérés avec un effectif plus important d’enfants sur une durée plus longue. LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – PAGE 23 Une NOUVELLE VITRINE pour présenter au public les activités des CJB Au printemps 2008, la salle d’exposition temporaire des CJB changera d’affectation et explorera de nouveaux horizons; guidés par un objectif institutionnel, nous présenterons dans cet espace des réalisations artistiques illustrant des problématiques scientifiques rattachées aux domaines de compétences de l’institut et s’articulant autour du thème Art et Environnement usqu’ici ouvert au public de mars à octobre, et mis à disposition de créateurs extérieurs pour présentation de leurs travaux personnels durant des périodes de trois semaines, cet endroit idéalement situé sera désormais consacré à des projets en liaison avec les missions de l’institution. La pratique en vigueur jusqu’alors, instaurée il y a plus de vingt ans, a permis d’offrir une tribune, voire un tremplin, à de nombreux artistes que nous saluons ici et qui ont saisi l’opportunité de faire connaître leurs œuvres à un auditoire amateur de botanique. Ce cycle s’est achevé sur un bilan positif et nous remercions toutes les personnes qui, de près ou de loin, se sont associées à cette aventure. pour valoriser d’avantage auprès de la population genevoise et des touristes suisses et étrangers la diversité des travaux menés dans notre institut; nous sommes particulièrement attentifs à la mise en lumière de notre Conservatoire qui en constitue la face cachée. Celui-ci est actif dans des domaines aussi multiples que l’exploration, la recher- La salle d’exposition de la Villa le Chêne constitue la seule vitrine des CJB qui ne disposent pas en leurs murs d’autre emplacement pour promouvoir leurs activités. En investissant ce lieu de diffusion par la présentation d’événements en lien avec leurs propres actions, les CJB affirment leur volonté d’intensifier la communication en direction de leurs visiteurs, autour de thèmes en prise directe avec leurs missions fondamentales. che, l’enseignement, la conservation ainsi que la protection de la nature, et il compte notamment un herbier et une bibliothèque qui le hissent au rang d’institution patrimoniale d’importance majeure. Les Conservatoire et Jardin botaniques sont reconnus sur le plan local, national et international et sont actifs dans de nombreux programmes de recherche. Il nous apparaît cependant essentiel de tout mettre en œuvre La concrétisation de ce dessein passe par la mise en œuvre de projets touchant ces spécialités et mêlant des approches qui empruntent aux sphères de l’art et de la science, incluant une ouverture sur l’écriture, la pédagogie et la communication. Nouveaux PANNEAUX décoratifs du tunnel piétonnier es panneaux peints par des élèves agrémentant le tunnel piétonnier sous la Route suisse seront renouvelés en mai 2008. La réalisation dépendra de l’inspiration du maître d’arts visuels, bien que le sujet choisi sera en rapport direct avec le monde végétal. Elle suivra aussi l’actualité 2008 des CJBG qui se concentrera sur le lien entre les plantes, les jardins et les mathématiques. Plusieurs enseignantes ont répondu à notre appel, et nous nous réjouissons d’avance de pouvoir bientôt présenter le travail créatif de leurs élèves aux visiteurs du Jardin botanique, d’autant que l’éclairage du tunnel a été rénové et amélioré. ANNÉE de la pomme de terre 2008 es CJB fêteront la pomme de terre en accueillant une exposition automnale de ProSpecie Rara consacrée à ce tubercule magique et incontournable. Vous saurez tout ou presque sur notre vénérable patate et ses nombreuses variétés régionales. Expositions, ateliers-récoltes et petit marché seront au rendez-vous. Notre propos va s’articuler plus particulièrement autour de la thématique de l’art et l’environnement Danièle Fischer Huelin Administratrice Notre propos va s’articuler plus particulièrement autour de la thématique de l’art et l’environnement, l’art opérant ici un rôle important de vecteur entre l’institut et le grand public, qui aura l’occasion d’admirer à la Villa le Chêne des travaux artistiques portant sur nos champs d’investigation scientifique. Des artistes seront sollicités dans ce sens. Le concept développé pour ce lieu a été pensé en concertation avec les différents protagonistes des CJB, dans l’optique notamment de nouer un lien solide entre le programme de cet espace et les projets présentés dans le Jardin. Aussi notre exposition inaugurale s’inscrit-elle en liaison étroite avec la manifestation Jardin de Maths, qui s’étendra dans le parc de fin mai à octobre 2008, et vous êtes d’ores et déjà tous invités à venir découvrir ce printemps une intervention artistique fondée sur la thématique des maths dans la nature. Les horaires d’ouverture de cet espace seront communiqués par les voies habituelles. MIROIR du ciel ous la direction et à l’initiative du sculpteur Jo Fontaine «Miroir du ciel» est un projet de création interactive d’une sculpture monumentale en pierre. Des enfants des classes primaires et des Centres de jour participent à tour de rôle à cette création dans le cadre de L’Art et les enfants (DIP). Le projet, échelonné sur trois ans et abrité dans une «tente-bulle», mise à disposition par les CJB, consiste à tailler dans un bloc de granit de trente tonnes un cercle de 3,60 de diamètre, légèrement incliné, symbolisant un réceptacle. La partie supérieure qui est polie représente le «Ciel» et la partie inférieure striée et brute la «Terre». Le chantier est ouvert en permanence au(x )public(s). PAGE 24 – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES Christophe Golé Professeur au Smith College, Boston Qu’est-ce qu’ont en commun les arrangements de feuilles le long de la tige d’une plante, des écailles d’un ananas, ou de celles d’une pomme de pin, ou bien encore la disposition des graines sur la fleur d’un tournesol? l se trouve que ces structures à première vue disparates sont très souvent arrangées en un réseau formé par deux familles de spirales (ou hélices), s'enroulant en sens opposés. Lorsque l'on compte le nombre de spirales dans chaque famille, on obtient le plus souvent deux nombres qui sont consécutifs dans la célèbre suite de Fibonacci: 1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 34, 55, 89, 144, etc. De plus, l'angle entre les paires de feuilles successives le long des tiges se rapproche très souvent de «l'angle d'or», à peu près 137.51º, relié à une autre célébrité, le nombre d'or (lui même apparenté aux nombres de Fibonacci). On pourrait penser que Fibonacci a basé sa théorie sur l’observation du monde. Il n’en est rien, puisque cette corrélation a été établie plus de 400 ans après sa mort. Coïncidences? Les plantes contiennent-elles Fibonacci dans leurs gènes? Est-ce une intervention divine? Les plantes savent-elles compter? L'exposition «Fibonacci et ses plantes», qui s'ouvrira en mai 2008 aux CJB tentera de vous convaincre qu'il n'est pas nécessaire d'invoquer de telles hypothèses pour expli- avec des membres du Smith College au Massachusetts quer ce phénomène. Depuis le milieu du 19e siècle, les (USA), s’adressera à tous, en proposant de nombreux botanistes ont observé la création de ces structures à l'apex exemples et activités jardinées. (point de croissance) de la plante. Les différents organes apparaissent successivement comme des protubérances microscopiques de cellules qui s'organisent en réseaux dès leur apparition. De simples modèles géométriques et LÉONARD DE PISE, DIT FIBONACCI dynamiques, basés sur des hypothèses découlant d'observations de l'apex, Léonard de Pise (12e-13e siècle) créa une série de peuvent reproduire ces structures avec nombres aux propriétés remarquables: une fiabilité remarquable, et offrir une 1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 34, 55, ... 233, 377, 610... explication mathématique à celles-ci. où chaque nombre (sauf les deux premiers) est la Fibonacci et l’angle d’or seraient des somme des deux nombres qui précèdent. conséquences de règles du jeu éle1+1=2; 1+2=3; 2+3=5; 3+5=8; 5+8=13; 8+13=21; mentaire et de la structure initiale de 13+21=34; 21+34=55 etc. la graine d’une plante, et non la règle Bien plus tard, on découvrit que, sauf pour le début de même. la série, chaque nombre divisé par son précédent donne le résultat constant Venez découvrir ce dialogue poétique entre la botanique et les mathématiques. L'exposition, bilingue (français-anglais) créée en collaboration 1,618 (soit 34 : 21 = 1,618; 610 : 377 = 1,618...). Ce ratio est le nombre d’or, la divine proportion des grecs anciens, qui est la seule à avoir la propriété de lier deux segments entre eux dans la même proportion que le plus grand et le segment total. Au fil du GÉNOME humain LA BIOINFORMATIQUE ET GENÈVE: UN ANNIVERSAIRE l’occasion de ses 10 ans, l’Institut suisse de bioinformatique propose une balade le long du génome humain. Du 1er au 30 septembre 2008, 24 chromosomes semés dans un champ vous raconteront le monde minuscule des gènes et protéines ainsi que celui toujours grandissant de la bioinformatique. Et pour attiser la curiosité des petits, un jeu de piste les fera courir d’un chromosome à l’autre en leur faisant palper ainsi du bout de leurs pieds, la complexité d’un univers invisible à nos yeux. DEUX MÈTRES… C’est la distance qu’il faudrait parcourir si nous déroulions l’ADN qui constitue notre génome. Ce génome se répète dans la grande majorité de nos cellules qui se chiffrent à des milliards... Comment la Nature fait-elle pour emballer deux mètres d’ADN Evènement Fibonacci et ses PLANTES dans une seule cellule qui, de surcroît, ne peut se voir qu’au microscope optique? Sa trouvaille: les chromosomes. Une bien jolie ruse pour compacter l’ADN. Et à chaque chromosome, sa taille. Aussi le parcours Au fil du génome humain «déroulera» chacun d’entre eux sous vos pas et sera rythmé par leurs différentes longueurs. LES CHROMOSOMES: X POUR MADAME, Y POUR MONSIEUR La balade commence ainsi par la visite d’un premier chromosome qui vous conduira à la découverte du suivant. Et de chromosome en chromosome, vous ferez le tour complet de notre génome. En tout, vous parcourrez 22 chromosomes, que nous possédons en double, l’un venant de notre mère et l’autre de notre père. Et pour finir, vos pas vous mèneront à une paire toute particulière: celle des chromosomes sexuels. Les célèbres X et Y qui nous font, respectivement, femme ou homme. L’ADN: NOTRE LIVRE DE CUISINE A quoi sert notre ADN? On peut se le représenter comme un livre de cuisine... de 24 tomes... soit un tome pour chaque chromosome. Et dans chaque tome se trouve un certain nombre de recettes : les gènes. En vous promenant, vous ferez connaissance avec quelques-uns d’entre eux – les gènes susceptibles de provoquer des maladies comme la mucoviscidose, certains cancers ou l’anémie par exemple, ou encore ceux qui nous octroient certaines caractéristiques comme la couleur de nos yeux. LES PROTÉINES: NOS OUVRIÈRES Bien que les gènes soient à l’origine de tout ce que nous sommes, ce ne sont pas eux qui font le boulot. Non. Les ouvrières sont les protéines qui, elles, sont le produit des recettes. Sans protéines, nous ne pourrions ni marcher, ni réfléchir, ni dormir. Et, comme pour les gènes, vous vous Vivienne Gerritsen Institut suisse de bioinformatique introduirez dans leur univers et découvrirez leur étonnante nature biologique comme leurs fascinantes structures tridimensionnelles ainsi que le rôle primordial qu’elles ont à entretenir la vie, comme le battement de notre cœur mais parfois aussi, la maladie. L’AUTRE DIMENSION La bioinformatique. Sans elle, notre connaissance du monde des gènes et celui des protéines serait beaucoup moins riche. L’informatique appliquée à la biologie est un des instruments – encore florissant – qui participe à la compréhension de ce qui nous fait... et de ce qui nous défait. Elle est, en effet, un précieux outil dans la recherche et le design de thérapies pour toutes sortes de maladies – le SIDA, les cancers et le diabète par exemple – que le parcours Au fil du génome humain vous propose aussi de découvrir, chromosome après chromosome. LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – PAGE 25 JARDIN de MATHS DU I AU 27 MA OBRE 12 OCT08 20 EXPOSITION – JARDIN aux Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève. Musée vivant de la Cité / en plein air / entrée libre Didier Roguet Conservateur JARDIN DE MATHS, QUEZACO ? UNE INVITATION? • Un parcours-découverte, une exposition-jardin • Une invitation à jouer aux mathématiques avec les plantes dans un espace naturel, une proposition pour dédramatiser les mathématiques en les emballant de nature et de biodiversité • Un point de vue aussi sur le rôle primordial que jouent les théories mathématiques dans la construction végétale Une invitation à faire des mathématiques différentes dans la nature, parmi les végétaux et avec eux. Une expositionjardin, un parcours initiatique à travers des mathématiques appliquées, et naturelles, expliquant la nature et la nature des choses, des mathématiques parlantes et utiles, révélatrices de formes et de savoirs. Des mathématiques démythifiées et dédramatisées, favorisant une adhésion facilitée des élèves et de leurs parents à des clés nouvelles de compréhension du monde végétal. POUR QUI ? végétaux. Les fougères en sont un exemple connu et frappant. Des modèles informatiques venant de l’astrophysique permettront de visualiser la construction quasimathématique des arbres. Expérience et observation stupéfiante de voir se construire l’arborescence d’une essence grâce à une formule mathématique. Ceci dans la Villa le Chêne et en collaboration avec l’Observatoire de Genève et la Société de Physique et d’Histoire Naturelle. ECLAIRAGES CROISÉS Des éclairages croisés, comme nous aimons à les pratiquer, permettront à nos publics de lire notre thématique sous de multiples angles. Des visions tour à tour scientifiques, artistiques et musicales, poétiques et botaniques, physiques, ludiques et festives seront proposées de fin mai à octobre 2008. Une attention particulière aux enseignants et à leurs desiderata sera proposée. Conférences, visites guidées thématiques, intra et extramuros, fêtes et jeux seront déclinés pendant les 6 mois d’exposition-.jardin. A vos programmes dès le mois d’avril pour les temps forts de notre saison «Jardin de maths». tél.: 022 418 51 00 ou sur notre site: www.ville-ge.ch/cjb C’est une proposition aux publics, à nos publics. C’est notre projet pour l’année 2008. Un projet pour toute la famille, grands et petits, matheux ou moins matheux, aficionados des mathématiques, ou jouisseurs de calculette certes, mais aussi et surtout désespérés de la fraction, malaimants du boulier, réfractaires géométriques et autres rebelles de la règle de trois... QUI SONT CES DÉÇUS DES MATHS? Une majorité d’enfants disent des statistiques, une majorité d’adultes probablement aussi: «On ne m’a jamais montré à quoi cela pouvait servir (Lili, 40 ans)»; «on apprenait des théorèmes sans méthode ni applicatif, pour les ressortir tels des perroquets (Max, 36 ans)». Il y a sûrement un Max ou une Lili qui se cache en chacun d’entre nous. NOS OBJECTIFS? On aimerait voir sortir les professeurs de mathématiques de leurs collèges et s’amuser avec leurs élèves de la pratique des maths dans la nature. Le jardin, l’espace vert et la forêt deviendraient des espaces de découvertes et d’applications mathématiques, des invitations à observer et comprendre la fascinante construction du monde végétal, cartésienne et rigoureuse. L‘invitation est aussi lancée aux enseignants de physique, de sciences naturelles, d’activités créatrices et de dessins. Une partie de l’exposition étant bilingue, les enseignants d’anglais, de français et de... latin sont évidemment les bienvenus. Vive la transdisciplinarité! COMMENT CELA SE PRÉSENTERA ? «Jardin de maths» se présentera comme un parcours initiatique avec des pôles d’interactions dans nos collections botaniques. Interactivité de la découverte pratiquée le long du parcours et expositions «phares» seront au rendez-vous lors de cette balade dans les collections du Jardin botanique, au départ de la Villa le Chêne. Les publics pourront expérimenter, toucher et même observer la «chose» mathématique en action dans le grand dessein de la Nature. Une exposition du Prof. Christophe Golé et de son équipe du Smith College aux USA («Fibonacci et ses plantes») sera présentée et illustrée dans et autour de notre serre tempérée. Elle met en évidence le rôle des spirales dans la formation des végétaux et leur morphologie. Fascinantes séries de Fibonacci et nombre d’or sous-tendent l’architecture de multiples végétaux et en expliquent la formation et la croissance. Les fractales, répétitions organisées et extraordinaires, fournissent leur modèle constructiviste à de nombreux PAGE 26 – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES Evènement VOUS AVEZ DIT «JARDIN» ? Le Jardin en effet ne sera pas en reste. Outre les ressources qu’il offrira, intégré à l’exposition à travers ses collections permanentes, de multiples interventions jardinées seront proposées en appui ou en décor au parcours didactique. Elles appuieront et baliseront tel ou tel propos. Démonstrations ou interactions par le fait floral et naturel, elles imageront la découverte mathématique et naturaliste. QUE POURRA-T-ON FAIRE ? tion de cette essence dans une forêt, dans une strate de cette forêt, construire un xylophone avec le bois de l’arbre et en comprendre la signification mathématique et physique, calculer la surface biogéographique potentielle de répartition de cette plante, montrer l’incidence des changements climatiques sur cette espèce et sa répartition par modélisation, calculer son âge grâce à la dendrochronologie, etc. Peut-être pas tout cela, mais l’expérience et l’expérimentation pratiques seront au rendez-vous le long du parcours à travers une dizaine de stations et de propositions mathématiques interactives. • Surveillez le programme de «Jardin de maths» qui sera à disposition sur le site des CJB dès le mois d’avril 2008, pour tous les détails sur les événements qui jalonneront cette manifestation: www.ville-ge.ch/cjb/ • Retenez d’ores et déjà le week-end des 6 et 7 septembre 2008 pour une grande fête familiale autour de mathématiques naturalistes, musicales et ludiques dans le Jardin botanique QUAND ET OÙ ? Mesurer un arbre, calculer son volume de bois, comprendre sa phyllotaxie (c’est-à-dire l’arrangement de ses ramifications sur son tronc), lire son cône et en extraire des structures spiralées à travers les séries de Fibonacci, mesurer le potentiel germinatoire de cet arbre à travers un comptage des graines, calculer le poids spécifique du bois de cette essence, construire un labyrinthe avec son bois et en comprendre le fonctionnement mathématique, s’intéresser à la construction morphologique de cette espèce avec les fractales, faire une analyse statistique de réparti- L’exposition-jardin («Jardin de maths») se déroulera du 27 mai au 12 octobre 2008, une médiation sera proposée pendant les mois d’été. L’exposition «Fibonacci et ses plantes» (spirales végétales) prendra place dans et autour de la Serre tempérée (médiation estivale). L’exposition art et science «Fractales végétales» se déroulera dans la Salle du Chêne aux mêmes dates (horaires à définir). Un parcoursdécouverte, «Maths de jardin» se déroulera dans le Jardin, en boucle, au départ de cette dernière et aux mêmes dates. Il englobera 10 stations expérimentales et interactives, montées en collaboration avec des enseignants de l’instruction publique (DIP) et du domaine privé, ainsi que l’exposition «Fibonacci et ses plantes», l’Atelier de sculpture de Jo Fontaine et le Botanic Shop (jeux). Variations botaniques / VISITES GUIDÉES vous intéresse ? Les CJB vous convie à participer à des visites guidées thématiques les mardis durant la pause de midi. De mars à décembre, quelques 25 visites, abordant autant de thèmes, sont organisées par des spécialistes, jardiniers et scientifiques, qui vous feront part de leur passion et vous guideront à travers les différentes collections et trésors que renferme notre institution. nvie de mieux connaître le monde végétal ? Le travail des botanistes et des horticulteurs Au fil des saisons, ces «variations botaniques» vous permettront de vous immerger dans la luxuriance tropicale de nos serres, d’en savoir plus sur la flore locale et les mesures entreprises pour sa protection, d’obtenir des conseils sur la culture des plantes horticoles, d’admirer les trésors de la bibliothèque, de comprendre l’utilité d’un herbier, de s’initier au décryptage de l’ADN..., et de découvrir bien d’autres thèmes encore. C’est donc avec plaisir que nous vous invitons à prendre connaissance du nouveau programme pour l’année 2008 et à participer à ces rendez-vous botaniques. Ces visites vous sont offertes gratuitement, mais nous demandons une inscription préalable par téléphone: 022 418 51 00 ou par e-mail: [email protected] Le programme des «Variations botaniques» est disponible sur notre site internet: www.ville-ge.ch/cjb/ et figure dans un dépliant disponible à la réception du Jardin botanique. Les visites ont lieu le mardi de 12h30 à 13h30. Mathieu Perret Conservateur Rendez-vous devant la Villa du Chêne, ch. de l’Impératrice 1, proche du parc aux animaux, entrée nord-est du Jardin botanique LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 38 – DÉCEMBRE 07 – PAGE 27 Imprimé sur papier écologique Cyclus print ® recyclé, sans chlore Conservatoire & Jardin botaniques – Case postale 60 – Chemin de l’Impératrice 1 – CH-1292 Chambésy/Genève – tél. 022/418 51 00 – Fax 022/418 51 01 – www.ville-ge.ch/cjb/