fp
M
f9
)
q
j ç
Souderabdruck au8
Archiv fur Religionswisseuschaft
Baud IX
Jupiter
SilifiulilS
exsuperaiitissirnus
Par
Pranz
Cumont Bruxelles
Le musée de Berlin a acquis, il
y
a peu d'années, un bas
relief provenant de Rome et portant une figure de Jupiter
avec la dédicace
I(bvi) optinw) m(axim) Summo exsupe-
rantissimo. Cette plaque sculptée a fait aussitôt l'objet d'une
étude sagace de M. Kekule von Stradonitz, qui a reconstitué
le
monument auquel elle appartenait, retrouvé son histoire,
apprécié ses caractères archéologiques et déterminé sa date.'
II a montré que ce bas-relief avait fait partie d'une base tra-
vaillée au moins sur trois faces et que sur les deux côtés
étaient placés les Dioscures. Le Jupiter qui occupait la par-
tie antérieure, était représenté tenant de la main droite une
patère et portant de l'autre une corne d'abondance.
2
C'est une
image d'un style archaïsant mais d'une époque tardive; elle ne
remonte pas plus haut que la fin du IV
,
siècle de notre ère
et doit être attribuée sans doute au règne de Commode, qui
Et frapper des monnaies au type (le Jupiter avec la légende
lové exsup(eranlissimo)',
et qui, dans le calendrier introduit
1
R Kekule von Stradonitz
Ûber dus Relief mit der Jnschrift C. I. L.
VI. 426 )Sitzungsber. Akad. Berlin XVI!,
p.
387), 1901.
Un type analogue et reproduit sur une gemme de St. Péters-
bourg dont l'authenticiué est certaine, quelque bizarre qu'elle paraisse
(Reinach
Pierres grurée., pi.
123 N". 3 et p 134; cf. pi. 120 No. 3 et
p. 124. On y voit un Jupiter archaïsant, debout, coiffé du modins de
Sérapis, tenant d'une main une patère sur laquelle se pose une abeille
ou nu papillon selon Winckelmann) et de l'autre une corne d'abon-
dance.
Cohen
Mann. esnp. ro
i
n.
III
p.
261 Nol. 241, 242. Jupiter y est
représenté autrement que sur le lias-relief de Berlin: il est assis sur
un trône et porte le sceptre - Années 186-187.
Document
il I Il
l 111111 lil I II I
il
0000005409198
'1
324
1'ran7 Cumont
par lui à Rome, donna même au mois de Novembre le nom
d'Exsuperatorius
(en grec
'ratv).'
Si je reprends ici la parole a propos du monument de
Berlin, ce n'est pas pour combattre les conclusions de mon
éminent devancier - elles paraissent inattaquables --, mais je
voudrais étudier au point de vue religieux ce Jupiter étrange,
dont la véritable nature n'a pas, semble-t-il, été expliquée
jusqu'ici. On verra que la composition archéologique de la
base romaine eu sera elle même éclaircie.
*
*
Je réunirai d'abord la série des inscriptions où apparait
le
Jupiter exsuperaniissinus.
On peut déjà en les interprétant
en tirer des indications précieuses sur le caractère de ce dieu:
1.
Rome.
O. I. L. VI. 416:
I(ovi) opiimo) n(aximo) summo
exsiq)er fan]
j
tis.sirn[o] . - Bas
-
relief de Berlin. [)'après
la fonne des caractères, il date environ de l'an
200
apr. J. C.
2.
Italie.
Luceria
C. I. L. IX. 784:
flovi oplinwJ
I
maXnw
som me
eXsupc'ran li5si»u
X. Aur(èlius) Augendus
j
pro-
c(urator) s(a!tuum?) A(pulorum?) pro sa lute sua et iii.
Aur(eli)
]iiontani eq(uitis)
1?(omani) fihi 1 sui v(otun
i(ibens) ;n(erito) soivil.
1
I)(e)d(icata
,
) VI [Njofnasj Ma-
[i<'w)j.
La ligne 1 est restituée d'après le numéro précédent
(cf. N
o
.
4). La date de l'inscription est suivant Flirsch-
'
Lampride
Comnod.
e.
11:
Menses quoque in 1onorevz eius pro
Âugusto Conznzodum, pro &ptemhri J-Je rcn.lem, pro (ictobri lavictum, pro
?
r
ovembri Exsuperatorim, pro J)ece?nbri Amaijni-um ex signo ipiu.'
adulatres vocabant;
cf. e. 12:
Cum patre appellatu5-i-ènperator I' Kal.
Es-
superatcrias. Pion Case. LXII, 15 (p. 297,
2
Tloissevain): xai, oi
rijv
àz
,
a&rOC
7tàvrEg
,
Ior xar
t&eEî&ca
udro
oIrou
4vto, 'Ajix,o, E&rvj,
AoJxLo, Aio.
Kde-
Aiyovro, 'HcixÂw, 'Pcoeafo, 'Trr
(
JaiJwv.
airàg }'&9
&Uorr dUct
EELas'E
tdv
6VOUVWV, 1V '
i uid1'OV Xd
TiV
7ruyLwg
Vt(Û lEro J,
XUl
V
TLOtV
di7rLùe
7ciV
xat'
rjIuliv
vacav.
Jupiter summus exsuperantissimus
325
feld
(Die Kaiseri. Ver aliunqsbearnten p. 127) le com-
mencement du 111° siècle.
3.
Aeca. C. 1.
L. IX. 948 = Kan
De love Dolicheno
No.
96:
lovi fDJo/i/ic[heno] e.ruperantiss[irnoJ L. Jluntntius
Nig[er] Quintus Valeriu[s] J7cJy/'Jtus Sererin[usJ
Gaucivijus Ttulflu.sj co(n»
(t
1) r.
S.
La date du consulat est inconnue mais parait devoir
être placée dans la seconde moitié tin Il
e
siècle (Dessau
Prosop.
II p. 387
Ne
.
515).
4.
Près de Clusium. C. I. L. XI. 2600 = Dessau
inser. sel.
3003:
lori o(pii?uo)m(a.xinw) rumm(o)
1
exsuperantis[sij-
mo T. Sextius Verian us pro salute Gor ,wiiani f(ilii)
clarissimi vin, consulis
Consulat de date inconnue.
5.
Gaule. Ager Vocuntiorum. O. I. L. XII. 1533:
/I('ovi)
o(pimo) m(axinw)?J
1
sJumnzo 1 JUIn.. li. S. fexj voto.
Restitution très douteuse.
6.
Dacie. Carlshourg. C. I. L. III. 1090 = Dessau
lnscr. sel.
2998:
lori summo ex superanlissimo
divinarum, inc J -
manaru.mqu.e rerum rectoni fatorumqw ar bitro
a
......et pro I ........lq
7.
Gormanie. Utrecht. C. I. Rh. 55 = Dessau
Inser. sel.
3094;
lori optimo) nc('aximo) sumrno exsuperantissimo,
Soli invicto, Apoilini, Lunae, Dianac, Fortuna, Marti,
Vietoricu,, Paci
/Q
.
7
Antisi. jus Adrentus
Aug(usii) pr(o) pr(actore) dut.
Q. Antistius Adventus fut légat de Germanie sous
Marc Aurèle ou Commode:
cf. Prosopoqr. I P.
85 N°. 589.
8.
Il faut rapporter sans cloute
it
la même divinité l'inscrip-
tion suivante trouvée près de Capoue. C. I. L. X. 3305
= Dessau
In,scr. sel.
2997:
J('ori) o(ptimo
,
) rn('axinzo,)
sum mo excellen tissiino .Iaecius Probus v(ïr) c(lanissimus),
prae
K
ectus
)
aiimeni(orum), juod hoc in loco
an ceps
Archiv f. Bc1igionswisenchnft XX
326
Franz Cumont
pericul'um
1
sustinuerit
et bonam rulrtw/i nem recipera-
vent v(otum) s(oivit).
Maccius Probus fut légat de Tarraconaise
SOUS
Sep-
time Sévère et Caracalla (198-211 ap. J. C.); cf.
Prosop.
Il
p. 320 N°. 47.
Ainsi ces inscriptions, pour autant que leur date puisse
être déterminée, ne sont pas antérieures à lu seconde moitié
du
lIe
siècle. Cette constatation confirme ce qui avait déjà
remarqué M. Kekule (p. 39): ,,Si l'usage de l'épithète
Exsupe-
rantissin1ns
ne s'est pas introduite sous le règne de Commode,
il s'est certainement alors généralisé." Or, nous savons que
Commode témoigna une dévotion particuliire aux cultes orien-
taux - comme tous les despotes sur le trône des Césars. Il
fut le premier empereur qui se fit initier aux mystères de
Mithra et (lui figura en personne dans les processions isiaques.'
On pouvait donc s'attendre à ce que le dieu qu'il honorait
d'une prédilection spéciale, au point de le faire figurer sur ses
monnaies et de le prendre en quelque sorte pour patron, ap-
partînt, lui aussi, au panthéon asiatique et, de fait, c'est ce
qu' attestent les inscriptions: nous trouvons d'abord (No
.
7) le
Jupitcr sammus exuperantissinws
uni au
Sol inriubrs
qui est le
nom caractéristique des dieux solaires de l'Orient. Dans le
calendrier de Commode le mois
Incietus
était pareillement rap-
proché
d'Exsuperalorius
5
,
et, de même que la première épithète
appliquée au prince indique qu'il se considère comme le représen-
tant de Soleil sur la terre, la seconde l'assimile au maître des
dieux, à Jupiter ou pour mieux dire à Baal. Le
No.
3 nous
montre en effet le qualificatif
d'exsupc'rant.issimus
porté
par
le
Jupiter Dolichénus, le Baal de Dolichè en Commagène. Une autre
Lampride
Commod. e.
i; cf.
Mon. mysi. Mithra 1 p. 231
et C. I L.
VI.
420
= Dessau
Inscr. sel. 398.
ilion. mys(. ihilhra I p. 48 ss.. cf.
ibid. II p
173
la dddicice
lot
,
i
(C. I. L. VI,
377) par un
prêtre
nommé
Exuperantius.
cf
. supra p. 324 n.
1.
Mon. ieiyst..illitlira I
p.
288.
Cf. L'sener
.Rlcin. Mus. LX, 1905,
p.
466 $s.
Jupiter summus exeuperantissimus
397
dédicace d'un serviteur de ce Jupiter sémitique (C. I. L. VI.
406 30758)
est consacrée
Ex praccepto I'ovis) o(ptimi)
m(aximi) D(oiie/.esi) conservatori toius poli et nunsini praestan-
tissimo . .
Ce dernier superlatif est un équivalent
d'exsu-
perantissimus.
Mais le plus explicite de nos textes est celui
(N°. 6) qui donne au nouveau Jupiter les titres de
,,divinarum
humanarum que rerum rector, fa.torurn que arbitcr".
On eu
rapprochera iinmédiatenieiit la célèbre dédicace bilingue à Bêl
découverte à Vaison
1
:
Belus Eortunae rector nu'ntisque ma-
gister ...
Etvvr
'g . . . L'une et l'autre
sont inspirées par les croyances astrologiques qui à l'épo-
que impériale dominaient toute la religion de la Syrie.
Le dieu suprême est le ,,Seigneur du ciel"
(Ba.al
g
amin)
dont
les révolutions déterminent tous les événements
de
ce monde
et les pensées même des hommes. Il peut donc être appelé
à juste titre ,,l'arbitre de la Fortune, le guide des choses
divines et humaines et le maître de la pensée".
Le caractère du Jupiter
Exsuperantissimus,
tel que nous
venons de le définir, permet de comprendre certaines particula-
rités du bas relief - et de l'intaille - qui le représentent.
,,C'est le seul Jupiter qu'on voie avec une corne d'abon-
dance" observait déjà Winckelmann.
5
Mais cet attribut insolite
est celui de la Fortune, à laquelle préside ce Baal orienta!,
comme nous venons de le dire, et dans la dédicace que nous
citions tantôt, l'épithète
praestantissimo
est suivie de celle
d'exhibif cri,
eest à dire ,,uourricier". En second lieu,
l'artiste a prêté à son Jupiter une apparence archaïque, comme
le remarque encore Winckelmann, ,uni eine entlegenere
Ursprilnglichkeit zu geben".
3
Les cultes orientaux sont
en effet entourés du prestige d'une antiquité presque infinie.
Enfin ainsi s'explique qu'on ait placé ce Jupiter entre les
C. I. L. XII. 1927 =
Dessau
huer. sel, 2997.
Description des pierres
du
cabinet Stosch, citée par Kekule
t. e. p. 389.
Kekule
ibid.
p.
388.
22'
1 / 14 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !