Risques de transmission de la maladie de Newcastle par des

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Rev. sci. tech. Off. int. Epiz., 16 (1), 79-82
Risques de transmission de la maladie de
Newcastle par des produits avicoles contaminés
M. Guittet, H. Le Coq & J.-P. Picault
Centre National d'Études Vétérinaires et Alimentaires, B.P. 53, Zoopôle Beaucemaine-Les Croix, 22440
Ploufragan, France
Résumé
Les produits avicoles contaminés par un virus pathogène de la maladie de
Newcastle peuvent représenter des sources de transmission de virus à des
populations de volailles sensibles. En fonction du type de produit, les probabilités
de contamination sont différentes.
Des travaux conduits par différents laboratoires européens ont montré que des
virus pathogènes pouvaient être isolés à partir de carcasses provenant de
poulets vaccinés ou non, durant une courte période après l'épreuve virulente.
Les œufs pondus par des poules infectées avec un virus de la maladie de
Newcastle représentent un très faible risque.
Par ailleurs les plumes, les os, le sang et les abats qui peuvent entrer dans
l'aliment destiné aux volailles sont des risques potentiels.
Enfin, les fientes qui sont utilisées comme engrais peuvent, dans certains cas,
présenter un risque important de contamination.
Mots-clés
Abats - Carcasses - Fientes - Maladie de Newcastle - Œufs - Produits avicoles - Santé
animale-Transmission-Volailles.
Introduction
La maladie d e Newcastle est u n e des maladies les p l u s
meurtrières p o u r les volailles élevées industriellement, les
oiseaux d'ornement, de volière, les pigeons voyageurs, le
gibier à p l u m e ainsi q u e certains oiseaux sauvages.
Au niveau de l'Union e u r o p é e n n e , la maladie a été définie p a r
la Directive 92/66/CEE (8) c o m m e u n e infection d u e à u n
paramyxovirus aviaire de type 1 a p p a r t e n a n t à la famille des
Paramyxoviridae et au genre Rubulavirus, p r é s e n t a n t u n
indice de pathogénicité intracérébrale chez le p o u s s i n e x e m p t
de micro-organismes pathogènes spécifiés
(specific-pathogen
free : SPF), âgé d ' u n j o u r , supérieur à 0,7.
Si la maladie p a r elle-même entraîne des pertes d u e s à u n e
mortalité q u i p e u t atteindre 100 % d a n s certains cas, elle est à
l'origine de l'embargo réglementaire q u i s'applique a u x
produits avicoles des régions infectées, et présente ainsi des
répercussions é c o n o m i q u e s majeures p o u r les zones
touchées. Aussi, l'évaluation des risques d'introduction de la
maladie de Newcastle au sein d'une p o p u l a t i o n avicole
sensible a-t-elle été c o n d u i t e au niveau e u r o p é e n , et les
risques liés a u x p r o d u i t s avicoles contaminés o n t été examinés
avec circonspection. Ces p r o d u i t s s o n t représentés p a r les
carcasses, les œufs, les p l u m e s , les os, le sang, les abats et les
fientes.
Les carcasses
G o r d o n et coll. (11) d'une part, et Reid (13) d'autre part, o n t
décrit, respectivement e n 1 9 4 8 et e n 1 9 6 1 , l'introduction et la
dissémination de la maladie de N e w c a s d e e n Angleterre et au
Pays de Galles ; ils ont incriminé les déchets d e viande de
volaille c o n t a m i n é e qui auraient servi à l'alimentation des
poulets (3).
D a n s le b u t de vérifier ces observations anciennes, diverses
expérimentations o n t été entreprises e n laboratoire afin d e
m e s u r e r les risques exacts de contamination. L'une d'elles a
été conduite au Centre National d'Études Vétérinaires et
Alimentaires (CNEVA) d e Ploufragan (12) sur des poulets d e
chair présentant des anticorps maternels, d o n t certains
n'étaient pas vaccinés tandis q u e d'autres l'ont été avec u n
vaccin à viras vivant, soit à u n j o u r avec la s o u c h e H B 1 , soit à
14 j o u r s avec la s o u c h e La Sota. Les poulets o n t été éprouvés à
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l'âge d e 4 0 j o u r s avec les souches pathogènes de virus de la
maladie de Newcastle (Essex 70 ou Herts 33).
Des prélèvements d'organes (muscles : cuisse et bréchet,
reins, c œ u r , trachée, fèces) ont été réalisés à partir d e quatre
sujets p a r g r o u p e et o n t été inoculés individuellement à u n e
série de c i n q œufs e m b r y o n n é s p o u r le réisolement d u virus
d'épreuve d u 4 1 au 4 6 j o u r d'âge.
e
e
Cette étude a m o n t r é q u e le virus pouvait être isolé à partir de
tous les organes testés. Le virus a p u être isolé dès le premier
j o u r suivant l'épreuve quels que soient les virus pathogènes
chez les a n i m a u x n o n vaccinés et n e présentant pas encore de
s y m p t ô m e s ; ces derniers sont apparus le troisième j o u r après
l'épreuve.
Chez les a n i m a u x vaccinés qui n ' o n t pas présenté de
s y m p t ô m e s d u r a n t les six j o u r s d'observation après l'épreuve,
le virus a été isolé dès le deuxième j o u r p o u r le g r o u p e vacciné
avec la s o u c h e La Sota et éprouvé avec la s o u c h e Essex 7 0 ,
ainsi q u e p o u r le g r o u p e vacciné avec la s o u c h e HB1 et
éprouvé avec la souche Herts 3 3 ; p a r ailleurs, le virus a été
isolé le troisième j o u r p o u r le g r o u p e vacciné avec la s o u c h e
HB1 et éprouvé avec la s o u c h e Essex 7 0 . Chez les a n i m a u x
vaccinés avec la s o u c h e La Sota et éprouvés avec la souche
Herts 3 3 , le virus n'a pas été isolé au cours des six j o u r s de
l'expérimentation.
Ces résultats p r o u v e n t q u e le risque d e transmission d e la
maladie de Newcastle est évident et qu'il est p l u s i m p o r t a n t à
partir d'animaux vaccinés qu'à partir d'animaux n o n vaccinés.
E n effet, le délai d'apparition des s y m p t ô m e s chez ces derniers
est très court et ainsi d i m i n u e les chances d'abattre des
volailles infectées.
Toutefois, le risque doit être relativisé voire minimisé p a r le
seul fait d e l'application des directives c o m m u n a u t a i r e s au
regard d e la maladie de Newcasde (8) et d u c o m m e r c e (7, 9,
10).
Enfin, l'éventualité selon laquelle des volailles seraient
abattues d u r a n t la période d'incubation de la maladie, q u e
cette dernière n e serait pas déclarée, et q u e les carcasses
contaminées correspondantes pourraient être achetées p a r u n
c o n s o m m a t e u r , représente u n risque m i n e u r . D e p l u s , la
probabilité selon laquelle ce c o n s o m m a t e u r donnerait des
m o r c e a u x de carcasse contaminée et n o n cuite à des volailles
vivantes est extrêmement faible, surtout d a n s u n des pays de
l'Union européenne où la majorité de la p o p u l a t i o n vit en
milieu urbain.
Les œufs
Les œufs à couver des espèces poule, p i n t a d e , canard, oie,
caille, pigeon, faisan, perdrix et ratite p o u r r a i e n t représenter
u n risque p l u s important. Toutefois, il n'a pas été d é m o n t r é de
transmission verticale vraie, car les e m b r y o n s m e u r e n t avant
éclosión ( 1 , 2) et la désinfection pratiquée principalement au
formol après le ramassage des œufs, ainsi q u e l'application d e
la réglementation e u r o p é e n n e (6), annihilent le risque d e
contamination p a r l'intermédiaire de la coquille.
Les autres produits
Les p l u m e s , les os, le sang et les abats sont des p r o d u i t s q u i
p e u v e n t entrer d a n s la composition des aliments destinés a u x
volailles. Le p r o c é d é de transformation de ces c o m p o s a n t s
c o m p r e n d u n traitement p a r la chaleur q u i écarte tout danger
de contamination p a r ces produits, dans la m e s u r e où il est
correctement effectué.
Les fientes
Les fientes de volailles p e u v e n t être utilisées c o m m e engrais
organiques. Il est évident q u e celles q u i p r o v i e n n e n t
d'animaux infectés contiennent d u virus, généralement à u n
titre élevé, q u i p e u t persister l o n g t e m p s d a n s ce milieu. Le
transport de fientes d e volailles n'est p a s réglementé
spécifiquement et p e u t d o n c représenter u n risque i m p o r t a n t
d'introduction d u virus dans u n e zone i n d e m n e , d'autant p l u s
qu'au niveau e u r o p é e n de tels transports sont courants et
concernent différents pays. Toutefois, en cas de foyer déclaré
de maladie de Newcastle, la réglementation c o n c e r n a n t cette
maladie (8) s'applique et minimise ainsi le risque de
transmission d u virus.
Il convient de rappeler ici l'épisode de maladie de N e w c a s d e
survenu en G r a n d e Bretagne en 1 9 8 4 / 1 9 8 5 , d o n t l'origine a
été i m p u t é e à la contamination de l'aliment p a r des fèces d e
pigeons sauvages infectés p a r le virus de la maladie de
Newcastle (4, 5).
Conclusion
T o u s les produits avicoles (carcasses, œufs, p l u m e s , abats,
fientes, etc.), s'ils sont contaminés p a r le virus d e la maladie d e
Newcastle, représentent u n facteur d e risque de transmission
d u virus d e la maladie à des volailles sensibles.
U n e gestion correcte des élevages, des couvoirs, des abattoirs
et des ateliers de transformation p e r m e t de réagir r a p i d e m e n t
e n cas de suspicion de maladie de Newcastle, e n appliquant
les mesures décrites dans la Directive c o m m u n a u t a i r e relative
à cette maladie ; ainsi le risque de transmission d u virus est-il
considérablement réduit.
Les œufs p o n d u s p a r des poules infectées p e u v e n t contenir d u
virus, mais c'est principalement la surface d e l'œuf qui est
contaminée p a r l'intermédiaire des poussières et des fèces,
elles-mêmes contaminées p a r le virus.
E n ce qui concerne la fabrication d'aliments destinés a u x
volailles dans lesquels sont incorporés des p l u m e s et d'autres
produits d'origine avicole, le risque de transmission est
négligeable, grâce a u x traitements t h e r m i q u e s q u e ces
produits subissent.
Les œufs de c o n s o m m a t i o n , ou les p r o d u i t s dérivés des œufs,
représentent u n risque à p e u près n u l d e transmission de la
maladie à des volailles sensibles, e n raison m ê m e de leur
destination.
Enfin, le c o m m e r c e des p r o d u i t s avicoles au sein de l'Union
e u r o p é e n n e et avec les pays tiers est s o u m i s à des
réglementations q u i minimisent les risques de transmission de
la maladie de Newcastle.
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Risks of transmitting Newcastle disease by infected poultry
products
M. Guittet, H. Le Coq & J.-P. Picault
Summary
Poultry products contaminated with pathogenic strains of Newcastle disease
virus are a source of virus transmission to susceptible poultry flocks. The
probability of contamination varies according to the type of product.
Research conducted by various laboratories in Europe has shown that
pathogenic virus can be isolated from the carcasses of chickens, whether
vaccinated or not, during a brief period after experimental infection.
Eggs laid by hens infected with Newcastle disease virus present a very low risk.
Furthermore, feathers, bones, blood and offal present potential risks if they are
incorporated in poultry feed.
Finally, poultry droppings used as a fertiliser can present a major risk of infection
in certain circumstances.
Keywords
Animal health - Carcasses - Eggs - Faeces - Newcastle disease - Offal - Poultry Poultry products - Transmission.
•
Riesgos de transmisión de la enfermedad de Newcastle a través de
productos avícolas contaminados
M. Guittet, H. Le Coq & J.-P. Picault
Resumen
Los productos avícolas contaminados por un virus patógeno de la enfermedad de
Newcastle pueden constituir fuentes de transmisión del virus a poblaciones
sensibles de aves de corral. Las probabilidades de contaminación difieren según
el tipo de producto.
Las investigaciones de diversos laboratorios europeos han demostrado la
posibilidad de aislar virus patógenos en caparazones de pollos vacunados o no,
durante un breve periodo después de la prueba de confrontación.
Los huevos de gallinas infectadas por un virus de la enfermedad de Newcastle
entrañan un nivel muy bajo de riesgo.
Por otra parte, las plumas, los huesos, la sangre y los menudillos, posibles
ingredientes de los alimentos destinados a las aves de corral, constituyen fuentes
potenciales de riesgo.
Los excrementos usados como fertilizante, por último, pueden en ciertos casos
presentar un elevado riesgo de contaminación.
Palabras clave
Aves de corral - Caparazón - Enfermedad de Newcastle - Excrementos - Huevos Menudillos - Productos aviares - Sanidad animal - Transmisión.
•
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qualification des pays tiers ou des parties de pays au regard de
l'influenza aviaire et de la maladie de Newcasde en ce qui
concerne les importations de viandes fraîches de volaille et
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