L'OISEAU FAIT SON NID F ORMIDABLES ARCHITECTES, LES OISEAUX COUSENT, TISSENT, COLLENT, EMPILENT OU CIMENTENT DIVERS MATERIAUX JUSQU' A ELABORER PARFOIS DE VERITABLES CHEFS- D UVRE Si les oiseaux n'ont gardé de leurs ancêtres à sang froid, les reptiles, que peu de particularités anatomiques, ils ont en revanche conservé leur mode de reproduction: l'oviparité. Mais leurs ufs, au lieu d'être enfouis dans le sol, sont maintenus à l'air libre et menés à éclosion grâce à leur chaleur corporelle. Ce qui a conduit la gent ailée à réaliser des nids, tous plus étonnants les uns que les autres. AU CREUX DE MON ARBRE CAVITE DE PIC Les troncs d arbres servent d abri à beaucoup d espèces. Les premiers à s y installer sont les pics. Ils creusent les arbres pour y abriter leur nid et trouver les insectes xylophages dont ils se nourrissent. La loge du pic vert et du pic épeiche est fréquemment creusée à l intérieur des pommiers âgés. Puis elle est récupérée par les étourneaux. Le pic noir préfère les arbres malades ou endommagés. Les deux partenaires creusent ensemble plusieurs cavités mais n en choisissent qu une pour nicher. L année suivante la sitelle y installe son nid. Mais la différence de taille entre elle et ses prédécesseurs l oblige à en rétrécir l entrée avec une maçonnerie d argile et d écorce, pour protéger sa nichée contre les intrus. DANS LA HAIE Le paysage bocager, avec ses haies et ses vergers, est idéal pour les espèces nichant dans les arbres et les buissons. Le pinson des arbres tisse son nid avec du crin et du lichen et l installe à la fourche des arbres fruitiers. La mésange à longue queue construit dès mars dans les arbustes un nid en forme de bourse. Il est tissé de mousses et de lichens, garni à l intérieur de plumes fines. D autres espèces utilisent les cavités naturelles des arbres âgés. Les mésanges notamment recherchent le creux des arbres dans lesquels elles fabriquent un nid en mousse garni de poil et de duvet. La tourterelle des bois se contente d un bosquet pour construire un nid peu fourni avec de petites branches espacées. PINSON MESANGE A LONGUE QUEUE T OURTERELLE DES BOIS AU SOL Pour certains oiseaux, rien de tel que le sol pour passer inaperçus ! Le rouge-gorge, familier des jardins, abrite son nid dans une cavité du sol, dans les talus ou dans l herbe. Le pipit des arbres niche parmi les touffes d herbe, souvent dans les prairies à faucher. Le flamboyant martin-pêcheur creuse son nid dans les berges sablonneuses, sous forme d un tunnel long d un mètre aboutissant au nid proprement dit. Chez l alouette des champs, la femelle construit seule le nid. Elle le cache dans une touffe d herbe, parfois dans l empreinte d un sabot de bovin. Le nid est une coupe constituée de brins d herbe sèche. PIPIT ROUGE- GORGE N ID D' ALOUETTE PRES DE L'HOMME La construction de bâtiments, au lieu de faire fuir les oiseaux, en a attiré beaucoup. Le faucon crécerelle niche dans les vieux bâtiments et les clochers d église. La chouette effraie ou effraie des clochers tire son nom de son goût pour les églises. Les moineaux domestiques occupent les cavités des murs ou le dessous des toits. Où les hirondelles de cheminée et les hirondelles de fenêtre accrocheraient-elles leur nid soigneusement maçonné s il n y avait les solives ou encadrements de fenêtre des constructions humaines ? Le rouge-queue noir poursuit en bocage une expansion commencée en Normandie dans les villes. Il recherche les cavités dans les bâtiments. Le troglodyte mignon n hésite pas à installer au plafond, un nid en forme de boule de mousse verte. Le mâle en réalise une dizaine sur son territoire, au final c est madame qui choisit le bon et qui achève la décoration intérieure. FAUCON CRECERELLE ROUGE- QUEUE NOIR T ROGLODYTE COUVEUSES NATURELLES Comment ont-ils appris à le faire? Il est probable que les premiers représentants de cette classe de vertébrés, apparue sur terre il y a environ cent cinquante millions d'années, déposaient leur ponte sur des tas de débris végétaux ou à même le sol, comme le font encore de nos jours de nombreuses espèces. Il n'est pas invraisemblable non plus que certains ne couvaient leurs ufs qu'au moment où la chaleur ambiante ou celle dégagée par des matériaux en fermentation n'était plus suffisante. En Australie, les mégapodes, sortes de gallinacés très primitifs, empilent encore sur leurs ufs de gros tas d'herbe et de feuillage dont la lente fermentation, sans autres soins des parents, fait office de couveuse. MEGAPODES Mais, très vite - à l'échelle des temps géologiques - les oiseaux entreprirent la conquête de la Terre, colonisant aussi bien des contrées arides que des régions froides. Aussi durent-ils protéger plus efficacement leur couvée par des nids de plus en plus élaborés. Des simples dépressions dans le sol aux constructions les plus sophistiquées de certains passereaux en passant par les cavités de tous ordres, les habitations communautaires, les berceaux suspendus, les coupes maçonnées des hirondelles et les aires de rapaces, il existe aujourd'hui une très grande variété de nids. Et il n'y a pas que ceux des espèces exotiques à même de nous étonner par leurs conceptions architecturales, souvent ingénieuses, parfois dignes d'être comparées à de véritables réalisations artistiques. Voici donc quelques exemples... LES RUDIMENTAIRES... Certains de nos oiseaux se contentent de pondre leurs ufs dans une simple dépression du sol produite par quelques rotations du corps. Ainsi, chez plusieurs limicoles comme les gravelots, la ponte est déposée dans une petite cuvette, au milieu des cailloux. G RAVELOTS Parmi les oiseaux ne construisant pas de nid, il y a bien sûr les adeptes du squat, comme le hibou moyen duc, qui, à quelques exceptions près, ne niche que dans des nids de corvidés. Et puis, il y en a un qui non seulement ne bâtit pas, mais abandonne ses ufs dans le ou les nids d'une autre espèce, laissant à celle-ci le soin d'élever ses rejetons. On aura reconnu le coucou, célèbre pour son comportement de pique-assiette. ... OU LES MAÇONNES Ceux de l'hirondelle de fenêtre et de l'hirondelle de rochers, faits de boulettes de mortier mélangées avec de la salive et un peu de paille, sont de véritables bunkers presque indestructibles. Ils ont l'avantage de pouvoir contenir deux nichées successives par an et d'être réoccupés plusieurs années de suite. Mais ils ont aussi l'inconvénient de faciliter la propagation de nombreuses tiques et autres bestioles indésirables, même après un sérieux nettoyage de printemps. H IRONDELLE RUSTIQUE OU DE FENETRE SUSPENDUS ... Plus courant en Afrique chez les tisserins, ce type de nid est celui de la bien nommée rémiz penduline. Ce petit passereau, nichant occasionnellement en Suisse, confectionne un nid raffiné en forme de chausson qu'il suspend à l'extrémité flexible d'une branche de saule. Ses parois sont si solides et son intérieur si douillet qu'il se voit souvent utilisé dans certains pays d'Europe de l'Est comme chausson pour les enfants. R EMIZ PENDULINE ... OU EN TUNNEL Dans nos contrées, ce sont ceux de l'hirondelle de rivage, du guêpier et du martin-pêcheur. Tous se livrent à de pénibles travaux d'excavation pour construire leurs nids dans les berges d'argile ou de sable compact. Il s'agit en fait de galeries horizontales, d'un diamètre à peine plus grand que celui du corps de l'oiseau, débouchant dans une chambre d'incubation et d'élevage. Le tunnel du martin-pêcheur peut atteindre une longueur de plus d'un mètre vingt, tandis que celui du guêpier mesure parfois trois mètres de long. Compte tenu de leur taille, et sachant qu'ils mettent au plus une semaine pour achever leur forage, le labeur de ces petits mineurs ne s'apparente pas à une sinécure. H IRONDELLE DE RIVAGE M ARTIN- PECHEUR G UEPIER TISSES ET SUR PILOTIS... Nombre de petits passereaux construisent des nids en coupe faits de brindilles de toutes sortes habilement tissées. Les plus grands spécialistes en la matière sont les différentes espèces de fauvettes et les fringillidés, notamment le pinson des arbres. Les petits chefs-d uvre de ces adroits tisserands sont, suivant les espèces, tantôt arrimés sur des branches, tantôt déposés près du sol. La femelle du loriot, quant à elle, tisse avec astuce une sorte de panier qu'elle arrime à une fourche. Mais les nids les plus étonnants sont ceux des rousserolles construits sur pilotis - en fait des roseaux - un à deux mètres au-dessus de l'eau. M ERLES, GRIVES, F AUVETTE LORIOT P INSON DES ARBRES R OUSSEROLLE ... OU ENCORE FLOTTANTS Plusieurs oiseaux de nos contrées ont réussi de manière ingénieuse à tirer parti de la protection que peuvent leur offrir les milieux aquatiques en construisant des nids flottants. Sous nos latitudes, des modèles nous sont fournis, entre autres, par la foulque, la mouette rieuse et la guifette moustac. Mais le meilleur exemple est celui des grèbes qui amoncellent sur l'eau différentes plantes aquatiques jusqu'à former une sorte de tumulus végétal qui, bien qu'amarré à quelques végétaux, flotte comme un radeau. Pour ces palmipèdes, incapables de se mouvoir au sol avec aisance, il est incontestable que ce type de nid leur offre une certaine commodité pour accéder à leurs ufs. En outre, il présente l'avantage de maintenir la température de la ponte lors des absences prolongées de l'oiseau grâce à la fermentation des matériaux en décomposition. C'est le principe du compost: il s'agissait simplement d'y penser! F OULQUE M OUETTE RIEUSE G UIFETTE MOUSTAC G REBE