Spéciation

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ECOLOGIE EVOLUTION ADAPTATION
SPECIATION
DEFINITIONS
DEFINITION BIOLOGIQUE DE L’ESPECE
Une espèce est un groupe d’individus potentiellement interféconds. Ils sont capables de se croiser entre eux et
de donner des descendants fertiles, eux-mêmes capables de se croiser entre eux. Cette définition provient
d’Ernst Mayr. Le problème vient ici du terme « potentiellement », Mayr s’étant basé sur des exemples
d’espèces réparties sur des zones géographiques larges, qui, dans leur milieu et entre groupes de répartition,
ne pourront pas se croiser entre eux, alors qu’en laboratoire, oui.
Cette définition semble très pratique, mais elle a des limites :
une limite descriptive (les pins du Japon et de Norvège peuvent
très bien se regrouper selon leur ressemblances propres), on va
donc avoir recours à l’utilisation de sous-espèces, relatives à des
répartitions géographiques. Exemple de la betterave : Bêta
vulgaris altissima sert à faire du sucre, Bêta vulgaris crassa est
celle consommée, Bêta vulgaris maritima pousse en bord de
mer. L’espèce est la même, on peut ainsi les croiser très bien,
mais on reconnaît à l’œil les différentes sous-espèces. Il se
trouve que ces betteraves sont issues de sélection artificielle.
Cette définition est très imparfaite, il existe des cas où l’on ne
peut pas l’appliquer. Par exemple, pour les semi-espèces. Ce
sont des sous-espèces qui auraient l’occasion de se croiser mais
qui ne le font pas. Exemple des corneilles en Europe. Corvus
corone corone est l’espèce de l’Est, elle est entièrement noire.
Corvus corone cornix possède un plastron grisâtre. En
laboratoire, on peut les croiser. Sur le terrain, on n’observera
jamais de croisements entre les deux espèces. Quand elles sont
le choix, les corneilles ne se reproduisent qu’avec leur semiespèce.
Il y a d’autres limites à cette définition biologique. Il existe également des espèces qui peuvent se croiser entre
elles mais qui laissent des descendants partiellement stériles. Certains hybrides sont stériles selon leurs genres,
d’autres le sont complètement. On considère l’espèce du moment où l’hybride est partiellement stérile,
définition « tout ou rien ». Cette définition est conservée car fonctionnant dans la majorité des cas. On note
une plus grande possibilité d’hybridation chez les plantes que chez les animaux. Les situations du vivant sont
continues, expliquant les difficultés de séparation claire.
Cette définition n’est également valable que chez les organismes ayant des reproductions sexuées. Les
bactéries ont globalement une reproduction asexuée. Les espèces fossiles posent également un gros problème.
Evidemment ils ne peuvent pas se reproduire. Huh. Se pose également un problème avec des organismes dont
les dimorphismes sexuels sont très marqués. On est donc contraints d’utiliser la notion d’espèce.
DEFINITION TYPOLOGIQUE
Elle est basée uniquement sur le problème de ressemblance, aussi bien morphologique que génétique. On
utilise pour les bactéries l’ARN 16S, codant pour une partie de la petite sous-unité ribosomale. La définition est
limitée car n’ayant pas de limite biologique. Les erreurs que l’on peut faire serait de regrouper des individus se
ressemblant mais n’étant pas apparentés, mais également de séparer les individus étant apparentés mais ne se
ressemblant pas. On utilise toujours ces définitions pour des espèces asexuées, fossiles, et certaines espèces
vivantes pour lesquelles on aura du mal à tester la définition biologique. Il existe des grands domaines du
vivant où la définition est restée typologique, historique. On note qu’il existe de nos jours un grand
remaniement de la systématique selon des méthodes modernes.
MAINTIEN DE LA SEPARATION
Qu’est ce qui fait que biologiquement, des organismes appartenant à des espèces différentes restent séparés ?
Ce sont les barrières à la reproduction qui vont empêcher l’interfécondité. Elles peuvent intervenir de manière
géographique, comportementale, morphologique, biologique. Il existe toute une gamme de mécanismes
différents.
BARRIERE PRE-COPULATOIRE
ISOLEMENT GEOGRAPHIQUE
Le premier moyen d’empêcher la reproduction est déjà d’empêcher que le couple se forme, on parle de
barrière pré-copulatoire. S’y trouve l’isolement géographique.
• Si les espèces A et B sont isolées, on les dit
allopatriques (éléphants d’inde/éléphants d’Afrique –
écureuils à allopatrie dynamique par comportement
territorial).
• Si les espèces A et B sont en contact mais ne
se mélangent pas, la zone de mélange est très étroite
(zone hybride), on les dit parapatriques.
• Si les espèces A et B sont mélangées, jusqu’à
confondre les deux zones de répartition, on les dit
sympatriques.
Les distributions allopatriques et parapatriques sont
des barrières pré-copulatoires évidentes.
Représentation de la parapatrie
BARRIERE COMPORTEMENTALE
Les phénomènes de parades sexuelles, induisant des chants, danses, comportements de séduction, et ainsi
qu’une foultitude d’indices, est une barrière importante. Chez les oiseaux, c’est le chant qui permet d’attirer le
partenaire. Ainsi, des chants différents vont défavoriser une rencontre. Les phéromones également.
BARRIERE HETEROCHRONIQUE - ISOLEMENT TEMPOREL
C’est le fait que les partenaires ne puissent pas se reproduire car ayant des cycles sexuels asynchrones. Ils ne
sont pas féconds au même moment. Ainsi, chez les insectes, la forme Imago mature sexuellement a une durée
de vie très limitée. Au contraire, la vie larvaire dure très longtemps. L’ensemble de ces isolements sont appelés
isolements écologiques.
BARRIERE POST-COPULATOIRE PREZYGOTIQUE
Les isolements post-copulatoires empêchent la formation de descendants. Ils peuvent être de plusieurs types .
Elle n’empêche pas la formation du couple, mais celle de l’œuf. Ainsi, la fécondation n’a pas lieu.
ISOLEMENT MECANIQUE
Il y a impossibilité mécanique de pratiquer la fécondation. On observe cela chez les insectes. Les mâles insectes
produisent des spermatophores, système venant s’imbriquer dans le système reproducteur femelle, tel un
système clef-serrure. Chez les drosophiles, les génitalia seront très complexes. Il existe des espèces qui ne
diffèrent que par la forme de ces génitalia.
ISOLEMENT GAMETIQUE
Les spermatozoïdes et ovules peuvent se rencontrer mais ne peuvent fusionner. Il y a absence de
reconnaissance entre les gamètes.
BARRIERE POST-COPULATOIRE POST-ZYGOTIQUE
Le développement de l’hybride est corrompu : soit il ne nait pas, soit il nait avec l’imperfection de la stérilité,
voire de la mort. On peut ainsi rencontrer :
•
•
•
•
de la mortalité hybride,
de l’inviabilité,
de la faiblesse hybride
de la stérilité hybride
La règle de Haldane veut que si un des deux sexes hybrides doit être stérile, c’est le sexe hétérogamétique qui
le sera.
LA SPECIATION
Ce sont les mécanismes de mise en place de ces espèces.
MODELES DE SPECIATION
Ces modèles sont à priori théoriques. Deux mécanismes sont des mécanismes classiques d’apparition des
espèces lors de la synthèse néo-darwinienne. Le mécanisme d’apparition à partir de groupes isolés est un
mécanisme classique.
SPECIATION VICARIANTE
Elle est liée au fait que l’on puisse avoir des populations isolées, considérant que les populations ne sont pas un
tapis continu d’individus. Les densités d’individus ne sont pas constantes : on forme ainsi des populations
relativement séparées. Ainsi, on y trouve différentes populations, relativement isolées les unes des autres.
Celles-ci peuvent apparaître par allopatrie d’une espèce ancestrale, c’est ce qui est arrivé notamment à
certaines populations de part et d’autre de l’isthme de Panama. Par sélection naturelle, les mutations
favorisant l’adaptation auront lieu chez les deux populations. Plus le temps va passer, plus celles-ci deviendront
différentes, d’autant plus que les conditions seront différentes.
Si plus tard, éventuellement les deux populations se retrouvent en contact, si la barrière les séparant disparait,
où si les deux populations s’adaptent bien, grandissent et reviennent de nouveau en contact, on retrouve une
situation de parapatrie, situation de contact secondaire. Si la sélection a joué son jeu pendant longtemps, il se
peut qu’on ait tellement de différences accumulées que les populations n’arrivent plus à former des couples et
se croiser entre eux pour permettre la naissance d’hybrides.
En favorisant l’adaptation locale, la sélection naturelle mène à la formation de barrières locales.
Cette sélection vicariante fonctionne également lorsqu’en cas de contact secondaire, on peut avoir des
hybrides. Malgré tout, on pourrait ici avoir spéciation, à l’unique condition que les hybrides fassent en
moyenne moins de descendants que les autres populations, et soient ainsi désavantagés par la sélection
naturelle. Ainsi, la sélection naturelle favorisera tout caractère de différentiation entre populations. Ce sont des
mécanismes de renforcement. Notamment, il y aura spéciation lorsque les hybrides présenteront des
désavantages sélectifs.
Ce modèle de spéciation est donc du à une allopatrie et une adaptation aux conditions différentes, rendue
possible par une faiblesse hybride. Cette spéciation est sélective.
LA SPECIATION PAR EFFET FONDATEUR
Elle démarre de la même façon que la vicariante. Une petite population va « bourgeonner » hors de son aire de
répartition, et être isolée. Comme la population est de petite taille, et par le simple effet de la dérive et du
hasard, on va pouvoir accumuler et faire se répandre des mutations dans toute la population, et ce de façon
plus rapide. Ainsi, si on a un contact secondaire, et si la dérive à eu lieu suffisamment longtemps,
mécaniquement, les différences peuvent être suffisantes pour qu’on ait une faiblesse hybride, menant à une
spéciation. Ainsi, les variations du chant des oiseaux, par exemple, n’a aucun rôle à jouer dans la sélection
naturelle.
Jusque dans les années 80, dans la vision classique, on pensait que la seule spéciation possible passait
seulement par allopatrie. Certains auteurs pensent, via des observations, qu’il existe un troisième modèle de
spéciation, en sympatrie.
SPECIATION PAR SYMPATRIE
Ses mécanismes sont à peu près connus : dès que deux groupes font des hybrides faibles, la sélection naturelle
amènera à la formation de deux espèces.
EXEMPLES BIOLOGIQUES
On connait beaucoup de spéciations, cela dit, le règne humain n’a jamais vu d’espèces apparaître, malgré les
modèles théoriques proposés. Tout cela est relatif à un problème temporel : la spéciation prend du temps.
Cette diversité de spéciation fait qu’au final le temps de spéciation est non seulement long, mais aussi très
variable. Dans certains lacs africains, vieux de quelques milliers d’années, on sait qu’y sont apparues des
espèces de poissons propres à chacun d’entre eux. De même, certaines spéciations ont duré des millions
d’années.
La spéciation est doc un phénomène complexe, et chacune d’entre elles est un cas particulier, malgré qu’elle
adhère à un modèle théorique.
COMPLEXE D’ESPECE MUS (SOURIS)
Mus Musculus
En France, on a deux espèces de souris, une presque
inféodée à l’homme, Mus domesticus, et une autre
sauvage, Mus musculus. Elles ont les mêmes répartitions
géographiques et vivent donc en sympatrie, à une certaine
échelle. En regardant de plus près, on a une répartition
mosaïque : domesticus en zones humides, musculus en
zones sèches. Dans la nature, il n’y a jamais de croisements
entre eux, et si elles se rencontrent, il y a combat, avec
généralement victoire de domesticus. Il y a des différences
morphologiques entre les deux espèces. Pourtant, en les
regroupant en laboratoire, si elles survivent à leur combat,
elles finiront par se croiser, elles sont donc
potentiellement interfécondes.
Mus Domesticus
On se rend compte que musculus est fréquent dans le midi,
en Espagne, et encore plus au Maroc. Domesticus est
présente partout où est l’homme. Pour essayer de comprendre l’origine de ces espèces, les chercheurs ont
effectué des recherches sur les fossiles, et la génétique. On sait que les souris sont apparues relativement
récemment en Europe. On en retrouve en Afrique du Nord, en Grèce, en Asie, au Sud de l’Asie mineure. Si on
remonte plus loin dans le temps, on retrouve simplement des ancêtres rongeurs.
On peut donc reconstruire le scénario suivant : avant la glaciation, les souris sous forme du rongeur ancestral
étaient omniprésentes, ainsi, lors de la glaciation, plus les glaciers descendaient, plus les souris reculaient vers
le Sud, les repoussant vers des zones isolées les unes des autres, notamment au Maroc, en Grèce, ainsi qu’en
Asie. Les souris étaient isolées dans des zones refuge, à l’abri des glaces. Par spéciation vicariante, chacun des
groupes a évolué dans son sens, et a du finir par donner naissance au Maroc musculus, et en Asie, domesticus.
A la fin des glaciations, les souris sont remontées en Europe. Musculus est remonté en Espagne et a traversé
les Pyrénées, domesticus a fait le tour des Carpates, certainement avec les hommes, jusque dans le midi. Ainsi,
on sait que ces espèces sont apparues dans des situations allopatriques.
Des études de diversité génétique dans ces espèces ont également permis de retracer des migrations. Mus
spetrus est apparue quant à elle en Grèce. Mus spicilegus provient de l’Oural. Finalement, ces espèces sont
toutes interfécondes, mais dans la nature, les croisements n’ont jamais lieu. Toutes les espèces européennes
actuelles sont apparues par des phénomènes de spéciation vicariante dans des zones refuge.
LE CAS DE RHAGOLETIS POMONELLA
Les colons ont introduit le pommier en
Amérique du nord au XVII. N’ayant apporté
que les graines, sans apporter ses parasites
(des insectes y pondant ses œufs), les
pommiers ont eu des taux de production
très importants. Pendant 200 ans, les
pommes étaient sans ver. Cela dit, du côté
de Boston, au début du XIX, a été reportée
la première attaque d’une pomme par des
mouches. Aujourd’hui, tous les pommiers
d’Amériques sot attaqués par le même
insecte
qu’en
Europe,
Rhagoletis
pomonella.
Auparavant,
rhagoletis
parasitait l’aubépine, en Amérique du nord.
Au bout de 200 ans de culture de
pommiers, elle s’y est attaqué, les aubépines étant aux pied des pommiers. L’ovipositeur, l’organe servant à
pondre l’œuf dans le fruit, est plus long pour l’aubépine que pour les pommes. Ainsi, des différences
morphologiques se sont mises en place. Et même des différences génétiques. Cela signifie qu’il y a très peu de
croisements. Les mâles rhagoletis de pommes rencontrent leurs femelles sur une pomme, et uniquement sur
une pomme. Les mouches de pomme sont très strictes, les mouches d’aubépine le sont moins, et retournent
quelquefois sur la pomme, c’est pourquoi il n’y a pas encore spéciation. Il y a également hétérochronie entre
les deux groupes, il se trouve que pommiers et aubépine ne produisent pas les fruits au même moment dans
l’année. Les hybrides sont fortement défavorisés, naissant dans le mauvais fruit à un mauvais rythme.
Rhagoletis pomonella
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