http://bioinfo.unice.fr/enseignements/EPU_2005/EPU_12/rapports_2nd_semestre/La_lymphangiogen%E8se-1.pdf 3.2. Les animaux transgéniques Les animaux transgéniques, exprimant des gènes étrangers (knock-in) ou ne pouvant pas exprimer l’un de leur propre gène (knock-out), sont étudiés en recherche fondamentale, comme animaux modèles pour les maladies humaines, la sélection animale et la production de protéines pharmaceutiques. Le modèle animal le plus important en recherche médicale est la souris (Mus musculus), pour sa simplicité d’élevage et une physiologie proche de l’homme. Afin de minimiser les effets secondaires liés aux caractères héréditaires hétérozygotes, la production d’animaux transgéniques s’effectue sur des lignées « inbreds ». Ces lignées de souris par exemple sont quasiment homozygotes après 7 à 10 croisements entre frères et soeurs. La production d'un animal transgénique doté dans chaque cellule d'un nouveau morceau identique d'ADN semble à première vue un processus fort laborieux. Les scientifiques peuvent utiliser une caractéristique fondamentale du développement animal : il est possible de déterminer de quelle cellule proviennent toutes les cellules d'un animal donné. En d'autres termes, chaque animal est né d'une seule cellule, qui s'est divisée et redivisée pour finalement produire les milliards de cellules qui le constituent (86). En conséquence, pour s'assurer que chaque cellule de l'animal contient le même morceau d'ADN, il est possible d’ajouter de l'ADN à une entité cellulée avant qu'elle ne commence à se diviser. Le nouvel ADN s'intègre au génome de la cellule et, en théorie, sera présent dans toutes les cellules qui constituent l'animal. Pour créer des animaux transgéniques, il faut modifier les cellules germinales (comme l'ovule et le spermatozoïde) qui sont les seules cellules animales capables de donner naissance à une nouvelle progéniture (87,88). 3.2.1. La micro-injection Pour produire un animal transgénique, on peut entre autre avoir recours à la microinjection. Le nouvel ADN est injecté directement dans un ovule fécondé (zygote) avant qu'il ne commence à se diviser. Le nouvel ADN s'intègre dans un chromosome dans le noyau et sera dès lors présent dans chaque cellule de l'animal qui en résultera dont les cellules germinales. Cela signifie que le nouvel ADN sera transmis aux descendants de cette lignée (86). (figure 15) 27 http://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/bv.fcgi?rid=hmg.figgrp.2709 Figure 15 : Construction de souris transgénique par micro-injection nucléaire Des pipettes en verres très fines sont utilisées spécialement pour ces manipulations ce qui permet de percer l’oocyte et percer le pronucléus male qui est plus gros que la femelle. Une solution aqueuse contenant des inserts est ensuite directement injectée dans le pronucléus. L’ADN des clones introduit peut intégrer l’ADN endogène au sein des chromosomes, formant ainsi le transgène. Suite à cela, les oocytes qui survivent sont réimplantés dans l’oviducte de femelle pseudo enceinte. Les souriceaux naissants résultent du développement des embryons implantées et sont alors étudiés par PCR pour observer la présence ou non de l’ADN d’intérêt. En résumé, l’introduction stable de gènes étrangers au niveau embryonnaire consiste en : - l’injection l'ADN contenant le gène d'intérêt dans le noyau d'un oeuf récemment fécondé. - l’intégration du gène dans l'ADN génomique. - l’implantation de l'embryon dans une mère porteuse. - l’obtention d'un animal transgénique. La micro-injection est un processus aléatoire. Il se peut que l'ADN injecté ne s'intègre pas au chromosome du zygote. Aucune des cellules de l'organisme résultant ne possédera alors le nouvel ADN. Dans certains cas, le nouvel ADN ne s'intègre pas au chromosome avant la division de la cellule. Il en résulte un animal mosaïque, qui contient le nouveau gène dans certaines de ses cellules, mais pas dans l'ensemble (87). 28 En général, l'ADN injecté contient un gène qui code pour une protéine particulière destinée à s'exprimer dans l'animal. De nombreuses régions d'un chromosome donné sont inaccessibles aux enzymes responsables de l’initiation de l'expression génique. L'emplacement de ces régions varie en fonction du type de cellule et permet de s'assurer que seuls les gènes appropriés sont « actifs » dans toute cellule donnée. Si le transgène s'intègre dans l'une de ces régions inaccessibles, la protéine associée ne sera pas produite ou sera peut-être produite uniquement dans certains types de cellules (87). En conséquence, les animaux produits à l'aide de cette méthode doivent faire l'objet de tests approfondis visant à déterminer si : - toutes les cellules de l'animal contiennent le transgène - tous les types de cellules voulus produisent le produit protéique du gène 3.2.2. Les rétrovirus A partir d’un stade embryonnaire précoce, les cellules peuvent être totipotentes ou au moins pluripotentes et peuvent permettre l’entrée d’ADN étranger dans la lignée germinale. Une des méthodes qui permet à l'ADN étranger d'intégrer les chromosomes des cellules hôte emploie des rétrovirus. Ces virus à ARN ont la capacité de passer de la forme ARN à ADN grâce à la transcriptase inverse avant d'intégrer des génomes cellulaires (89). Les rétrovirus s’incorporent aléatoirement dans l'ADN de l’hôte. Cet ADN, appelé l'ADN proviral, peut être efficacement exprimée par la cellule hôte et répliqué avec l’ADN de l’hôte. Les rétrovirus intègrent rarement et au hasard l’ADN les cellules accessibles et ne tuent normalement pas leur hôte (90). (figure 16) http://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/bv.fcgi?rid=hmg.figgrp.2357 Figure 16 : Le cycle de vie du rétrovirus Les particules virales contiennent le génome sous forme d’ARN et une transcriptase inverse qui sont entourés d’une enveloppe lipoprotéique puis d’une capside protéique. Une copie d’ADN double brin du génome viral peut s’intégrer dans l’ADN de l’hôte. Ce dernier synthétise l’ARN et les protéines virales, qui s’auto assemblent et bourgeonne à partir de la cellule même. L’hôte n’est pas tué. 29 Les vecteurs rétroviraux présentent de nombreux avantages par rapport à d'autres systèmes de transfert de gène. En effet, ils ont la capacité d’infecter un large éventail de cellules animales, ils expriment les gènes d’intérêt de manière élevée, et permettent également l’absence de synthèse des protéines virales après infection de l’hôte (91). Des gènes étrangers ont été efficacement insérés dans les cellules de mammifères en les infectant avec des vecteurs dérivés du virus murin de leucémie de Moloney, qui peut accepter des insertions jusqu’à 6 Kb. Deux autres vecteurs viraux sont fréquemment employés : - Virus de Vaccinia : il contient un ADN de grande taille, se réplique dans le cytoplasme des cellules de mammifères, et arrête la synthèse des protéines de la cellule hôte. - Baculovirus : il infecte les cellules d'insecte, qui peuvent être facilement cultivées. Les larves d'insecte atteintes de ce virus permettrent la production massive de protéine. Des vecteurs basés sur ces virus ont été utilisés pour exprimer des inserts d'ADN de manière efficace (90) 30 3.3. Le Knock Out Le Knock Out (KO) est une technique permettant d’inactiver sélectivement un gène en remplaçant celui-ci par un allèle mutant provenant d’un autre organisme. Cette technique qui détruit la fonction du gène est un outil puissant qui permet d’observer les processus cellulaires et les mécanismes dans lesquels le gène est initialement impliqué. Les souris Knock Out, permettent l’étude du développement, du comportement et de l’activité physiologique d’un gène. Ils peuvent également servir de systèmes modèles utiles afin d’étudier certaines maladies génétiques humaines et son implication dans le cancer (92).La méthode de production des souris Knock Out implique les étapes suivantes : (figure 17) http://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/bv.fcgi?rid=mcb.figgrp.1981 Figure 17 : Processus général de la formation de souris Knock Out : Les cellules souches embryonnaires hétérozygotes exprimant une mutation pour un gène d’intérêt (X) et les cellules homozygotes pour le marqueur d’un gène ( ici peau noire) sont injectées dans le blastocyte embryonnaire de 4,5 jours qui est homozygote pour un autre marqueur ( peau blanche). L’embryon obtenu est alors implanté chez une souris femelle enceinte. Les souriceaux obtenus sont des chimères, ce qui est révélé par leur pelage noir et blanc. Les souris chimériques sont croisées avec des souris blanches. Les souriceaux issus de ce croisement ont des cellules ES dérivées dans leur lignées germinales. Par isolement de l’ADN de ces souris il est possible d’identifier l’allèle muté. Un croisement entre ces souris noires produit des individus homozygotes pour l’allèle muté. Des souris Ko sont alors obtenues. 31 1. L’allèle mutant est introduit par recombinaison homologue dans les cellules souches embryonnaires (cellules ES). La recombinaison homologue est un échange de fragments d’ADN entre deux molécules au niveau de séquences nucléotidiques homologues. (figure 18) Le KO est basé sur la recombinaison homologue entre un ADN exogène et un ADN génomique. Ce mécanisme a été mis en évidence en 1980 par injection directe d’ADN dans des cellules de mammifères (92). Les facteurs qui favorisent la recombinaison homologue sont: - La taille de la région homologue - Le fort pourcentage d’homologie - L’ADN sous forme linéaire (par rapport à forme circulaire) - Le mode de transfection http://www.genoway.com/commun/img/homologous2.jpg Figure 18 : Insertion d’un gène par recombinaison homologue Un transgène est inséré par recombinaison homologue au niveau d’un locus d’intérêt. Une fois réarrangé, le transgène peut alors être exprimé. 2. Une fois que les clones positifs de cellules ES sont obtenus, ils sont micro injectés dans les blastocytes de souris receveuses. 3. Les blastocytes sont alors réimplantés dans l’utérus de souris. 4. Les cellules ES injectées chez la souris femelle colonisent le blastocyte et après un croisement avec des souris mâles, des souris chimères sont obtenues dans lesquelles le transgène est exprimé en fonction des tissus. Ces cellules peuvent être exprimées dans les lignées somatiques ou germinales, ces dernières étant très importantes afin d’obtenir des gamètes transgéniques. 5. Des souris chimériques sont croisées avec des souris normales afin d’obtenir des cellules germinales avec le matériel transgénique. 6. Seules les souris hétérozygotes sont croisées entre elles ce qui permet d’obtenir environ 25% de souris homozygotes pour l’allèle mutant. Il est important de savoir que les souris homozygotes sont parfois non viables et meurent au stade embryonnaire. Afin de vérifier ce point, il est nécessaire de sacrifier des souris hétérozygotes fécondées par les mâles hétérozygotes et de génotyper les embryons à différents temps embryonnaires. Ceci permettra de montrer l’importance de ce gène dans le développement embryonnaire. 32 La létalité embryonnaire due à l’invalidation d’un seul allèle du gène est observée dans le cas du VEGF. Il est néanmoins possible d’observer l’effet de l’invalidation du gène à l’état adulte en passant par des mutations silencieuses provisoires (système CRE/Lox P) (92). Le système Cre/loxP a donc été utilisé pour générer des souris Knock Out pour le gène du VEGF-C permettant ainsi d’observer les conséquences de son absence dans certains tissus spécifiques chez la souris adulte (86). La Cre est une recombinase (de la famille des intégrases) du bactériophage P1. Cre est une protéine de 38 kDa qui catalyse la recombinaison entre deux sites de reconnaissance, les sites LoxP. LoxP est une séquence d’ADN de 34 pb avec à ses extrémités des palindromes de 13 nucléotides (il est donc impossible de trouver cette séquence dans un génome eucaryote). Les deux sites peuvent être très éloignés l’un de l’autre et être tout de même recombinés par la Cre. Cette recombinase fonctionne dans les cellules eucaryotes génétiquement modifiées comportant deux sites loxP. En fonction de leur orientation, il peut se produire une délétion ou une inversion (93). (figure 19) http://www.adbt.com/DESS_EGPR/index.php Figure 19 : La délétion d’exon Deux sites loxP sont insérés de part et d’autre d’un exon du gène à invalider (triangle vert). L’exon est dit « floxé ». Cette construction peut être utilisée pour remplacer le gène sauvage par recombinaison homologue dans des cellules ES. On vérifie que des souris transgéniques homozygotes (pour l’exon floxé) sont parfaitement saines. Ces souris peuvent alors être croisées avec des souris transgéniques exprimant la Cre recombinase dans un tissu particulier (le génome de ces souris contient le gène Cre sous la dépendance d’un promoteur tissu spécifique). La première étape est de générer des souris exprimant LoxP. Elles sont crées par recombinaison homologue formant ainsi des mutations silencieuses. Dans un deuxième temps, des souris exprimant Cre sont synthétisées. Pour ce faire, un vecteur d’expression codant pour cette recombinase est injecté dans des embryons. Ces derniers lorsqu’ils sont positifs au vecteur sont réimplantés dans la souris et sont à l’origine des souris Cre +/+ (86). 33 Enfin dans un troisième temps, les souris Cre +/+ et LoxP +/+ sont croisées. Seules les souriceaux exprimant Cre +/+ et LoxP +/- sont viables. Ces souris expriment Cre dans un tissu spécifique (un promoteur tissu spécifique a été cloné en amont du gène codant pour Cre) ce qui va entraîner l’élimination du gène d’intérêt inséré entre les deux sites LoxP. L’induction de la Cre entraîne donc une délétion (93) (figure 20). http://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/bv.fcgi?rid=hmg.figgrp.2741 Figure 20 : Le système de recombinaison Cre-loxP. Le système de recombinaison Cre-loxP peut être utilisé pour inactiver un gène désiré. (A) La recombinaison homologue standard utilise des cellules ES, dans lesquelles trois sites LoxP sont introduits avec un marqueur M sur le locus cible A. Après la transfection, on génère des souris LoxP. Le gène codant pour la recombinase Cre est ajouté (enzyme qui induit des recombinaisons entre deux sites LoxP) ce qui permet de donner plusieurs produits qui sont ensuite sélectionnés. Des recombinants de type 1 sont utilisés pour générer des souris dans lesquelles le locus cible est situé entre deux sites LoxP. (B) Un croisements entre une souris dont le gène d’intérêt A est situé entre deux régions LoxP et une souris transgénique comportant un gène codant pour la recombinase Cre lié a un promoteur tissu spécifique est réalisé. Les souris issues de ces croisements, qui comportent les deux constructions, expriment la recombinase Cre dans le tissu désiré, et la résultante de la recombinaison contenue entre les deux site LoxP dans ces cellules spécifiques inactive ainsi le locus cible A. 34